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Économie Publié le mardi 2 février 2016 | Cote d’Ivoire Economie

Entretien avec M. Edoh Kossi Amenounvé, directeur général de la BRVM : Le financement des PME-PMI par le marché est une préoccupation majeure

© Cote d’Ivoire Economie Par Marc Innocent
Budget: le ministre Abdourahmane Cissé tient une conférence sur l`optimisation des régies financières
Samedi 27 Juin 2015. Abidjan. Le Ministre auprès du premier ministre en charge du Budget a tenu une conférence sur le thème "Le défi de l`optimisation des régies financières au service  de l`économie ivoirienne" au cours du petit déjeuner débat organisé par l`amicale des diplômés de HEC Paris. Photo: Edoh Kossi Amenounvé, Directeur Général de la BRVM
Le marché financier est un puissant levier où les entreprises et autres institutions peuvent lever à moindres frais d’importants fonds pour financer leur développement. Malheureusement, au sein de la BRVM, la présence des petites et moyennes entreprises fait défaut, bien qu’elles soient pourvoyeuses d’emplois. Un état de fait que regrette Edoh Kossi Amenounvé, directeur général de la BRVM, qui dresse par ailleurs un bilan de la place boursière.


Vous avez été nommé à la tête de la BRVM il y a trois ans. Quelle a été votre stratégie pour capter, entre autres, l’épargne des ménages les plus modestes afin de redynamiser l’économie sous-régionale ?
Avant d’aborder la question, je voudrais remercier Côte d’Ivoire Economie pour l’occasion qu’elle me donne, encore une fois, de parler de la Bourse, et particulièrement de notre Bourse communautaire, la BRVM. Cela contribue à l’information des ménages sur ce véhicule de placement de leur épargne. En 2012, dès ma prise de fonction, il a fallu définir de nouvelles orientations stratégiques pour redynamiser la place boursière de l’Uemoa. L’une de ces orientations stratégiques était l’accroissement de la visibilité régionale et internationale de la BRVM à travers la multiplication des actions de promotion et de communication pour susciter l’intérêt des investisseurs, aussi bien particuliers qu’institutionnels.
Au cours de ces trois dernières années nous avons mis un accent particulier sur l’organisation de campagnes de sensibilisation dans les pays de l’Uemoa à travers les «Media Day», les «Journées BRVM», mais également sur les sessions de formation du grand public dans les Antennes nationales de Bourse (ANB). Nous avons également suscité la création de clubs d’investissement dans les différents pays, contribué à l’éducation des investisseurs via un portail dédié sur notre site Internet, et enfin développé des cadres de coopération avec les universités et écoles de commerce. Enfin, nous avons créé le service d’information boursière via le SMS, dénommé «Infos BRVM».

Pensez-vous avoir relevé en si peu de temps un tel défi, étant entendu que nos populations subsahariennes développent encore difficilement la culture boursière ?
Le développement de la culture boursière est un travail de long terme. Cependant, nous commençons à voir quelques résultats de notre stratégie. En effet, l’intérêt des particuliers pour l’investissement en valeurs mobilières ne cesse de croître, comme en témoigne leur participation aux Offres publiques initiales (IPO) qui sont largement sursouscrites (Total Sénégal, BOA Sénégal). Nos volumes de transactions sont également en forte croissance, passant de 40.914.740 titres échangés fin 2012 à 110.220.060 titres au 15 décembre 2015, avec une bonne progression de la participation des particuliers. Ces derniers, en quête d’informations, sont de plus en plus nombreux à fréquenter nos Antennes nationales sur notre site Internet et sur nos pages de réseaux sociaux.

Les sociétés émergentes s’appuient sur leur tissu de PME-PMI pour favoriser leur développement. Malheureusement, les petites et moyennes entreprises ou industries de la sous-région, pourtant vecteurs de croissance et pourvoyeuses d’emplois, n’ont pas un accès aisé au financement par le marché. Où en êtes-vous aujourd’hui avec le projet du troisième compartiment du marché dédié justement aux PME-PMI ?
Effectivement, les PME de la sous-région n’ont pas un accès aisé au financement de façon générale, et en particulier au financement par le marché. La problématique du financement des PME-PMI est une préoccupation de l’ensemble du système financier communautaire. La BRVM entend contribuer à la recherche de solutions à cette problématique en mettant en place un mécanisme qui réponde aux besoins des PME-PMI et qui permette d’attirer l’épargne locale et régionale vers cette catégorie d’entreprises. Cela prend un peu de temps car il faut trouver une solution viable qui tienne compte de l’expérience des autres Bourses à travers le monde. Par ailleurs, il faut construire tout un écosystème autour de ce mécanisme de financement pour assurer sa pérennité en impliquant les Etats, les régulateurs, le secteur privé (patronats, chambres de commerce), ainsi que les acteurs du marché (SGI, agences de notation, organismes de garantie, etc.).

Ces dernières années, vous avez sillonné les grandes places financières du Maghreb, d’Europe et des Etats-Unis, où des partenariats ont été négociés. Quelles sont aujourd’hui les retombées de ce lobbying ?
Elles sont déjà concrètes, comme en témoigne la capitalisation boursière du marché des actions de la BRVM qui a plus que doublé, passant de 3.177 milliards FCFA au 31 décembre 2011 à 7.536,81 milliards FCFA au 30 novembre 2015. Il en est de même de la valeur des transactions qui est passée de 146 milliards FCFA en 2012 à plus de 300 milliards FCFA au 30 novembre 2015. La BRVM a ainsi renforcé son positionnement dans le classement des Bourses africaines (sixième place) et a intégré le Top 5 des Bourses africaines les plus prometteuses en 2015. Nous avons mis tout en œuvre pour atteindre cet objectif, bien sûr avec la contribution de tous les acteurs du marché et l’appui des autorités de notre Union. Cette position refléterait mieux le poids et les performances économiques des huit pays de l’Uemoa sur le continent africain. Enfin, au 4 décembre 2015, la BRVM est la Bourse africaine la plus performante avec une progression de 18,8% de son indice Composite, dans un contexte difficile pour l’ensemble des marchés du continent.

Quelles sont les difficultés auxquelles vous êtes confrontés dans la réalisation de vos ambitions ?
La première, c’est le faible engouement des sociétés à se faire coter à la BRVM. Trente-neuf actuellement, c’est très peu par rapport au potentiel de notre Union. La BRVM a enregistré treize introductions en Bourse depuis sa création, dont deux entre 2014 et 2015, notamment la BOA Sénégal et Total Sénégal. Il nous faut des privatisations (comme ce fut le cas de la Sonatel, de l’Onatel, etc.), des admissions volontaires (comme pour les filiales bancaires du Groupe BOA), des sorties de Fonds de Private Equity, etc. La seconde, c’est le difficile accès aux médias publics pour la diffusion de l’information boursière. La vulgarisation rapide de la culture boursière au sein de notre Union dépendra de l’engagement des médias publics (télés, radios, presse écrite, etc.) à accompagner la BRVM dans sa mission. Enfin, c’est le développement de nouveaux produits de collecte de l’épargne. Il faut, au cours des prochaines années, la création de ces produits (Plan épargne active, fonds communs de placement, Plan épargne retraite, Plan d’épargne-vie, etc.) et inciter les populations à y investir (défiscalisation). On ne peut pas se développer sans épargne.

Dans le cadre des programmes de privatisation au sein de l’Uemoa, il est prévu que 20% des actions des entreprises à privatiser soient introduites en Bourse afin d’accroître considérablement le nombre d’entreprises cotées. Qu’est-ce qui fait obstacle à l’application de cette mesure ?
La mise en œuvre semble difficile. Nous avons rencontré depuis 2012 presque tous les comités de privatisation de l’Uemoa. Des opérations sont attendues au cours des prochaines années.

Dans quelles mesures la BRVM peut-elle constituer une niche d’opportunités pour une jeunesse en quête d’emploi ?
Les métiers de la Bourse ne sont pas très connus mais il existe de réelles opportunités d’emplois dans les différents segments du marché. Le développement de la Bourse s’accompagne de celui des nouveaux métiers : analyste financier, gestionnaire de portefeuille, conseiller en placement ou en investissement, arrangeur, etc. Nous encourageons donc les jeunes à s’intéresser davantage au marché financier régional et à ses métiers.

La BRVM, commune aux huit Etats de l’Uemoa, existe depuis dix-sept ans. Quel bilan peut-on dresser à cette occasion ?
Le bilan est positif. La BRVM constitue aujourd’hui le seul modèle au niveau mondial et reconnu par tous comme un exemple réussi de marché de capitaux parfaitement intégré, avec un régulateur unique, une Bourse unique entièrement électronique et un système de règlement/livraison central intégré avec des titres entièrement dématérialisés. D’ailleurs, le cabinet Havas Horizon, dans son dernier rapport de mars 2015, a clairement indiqué que «la BRVM, basée à Abidjan, montre un bel exemple de coopération interétatique réussie». L’évolution des indicateurs du marché depuis 1998 illustre bien la bonne progression de notre marché. Enfin, je voudrais saisir cette occasion pour saluer la vision des pères fondateurs de notre marché.

Propos recueillis par Alexis Noumé
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