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Art et Culture Publié le dimanche 19 août 2018 | AIP

La région du Sud-Comoé, un réceptacle de rois

© AIP Par Serge T.
Cérémonie de clôture la fête de réjouissance l`Abissa de Grand-Bassam
Dimanche 20 Novembre 2016. Grand-Bassam. Le roi du peuple N`Zima Kotoko, Nanan Awoula Tanoé Désiré a présidé la cérémonie de clôture de la fête de réjouissance dénommé Abissa
Aboisso -La région du Sud-Comoé est, de loin, l’une des régions de la Côte d’Ivoire regorgeant le plus de rois. Au total, huit rois dont quatre dans le département de Grand-Bassam, deux dans celui d’Adiaké, un dans le département de Tiapoum et un dans celui d’Aboisso régentent la vie traditionnelle dans cette région. Qui sont-ils, comment arrivent-ils au pouvoir, quel rôle jouent-ils dans la société ?

Les huit rois de la région du Sud-Comoé

Le département de Grand-Bassam présente plus de rois que tous les autres de la région.

Awoulahin (Roi, dans la plupart des langues de la région) Tanoé Désiré rois des N’zima Kotoko de Côte d’Ivoire est le rois de ceux que les colonisateurs ont appelés "apolloniens" allusion faite à leur beauté comparée à Apollon, la divinité grecque de la beauté masculine. Ils vivent à Grand-Bassam. Leur roi est l’actuel président de la Chambre nationale des rois et chefs Traditionnels (CNRCT).

Son voisin immédiat est Awoulahin Kanga Asoumou, roi des Abouré Êhè de Moossou près de Grand-Bassam. Juste à quelques kilomètres de Moossou se trouve Sa majesté Assemien Nogbou roi des Abouré Ossohoun d’Ebra. Awoulai Akoï Felix règne quant à lui sur le royaume Ehivet de Bonoua.

Les éhotilé ou les bétibé d’Adiaké ont aussi leur roi en la personne de Sa Majesté Abakuaba N’gbandji Agnu avec pour siège Etuéboué. Les Esssouma d’Assinie Mafia Obéissent eux à Awoula Fian Mossou. Quant au Adouvlè sohié de Tiapoum ils sont régentés par Awoulahin Kroutchi IV. Amon N’douffou V règne, quant à lui, sur le Sanwi dans le département d’Aboisso avec pour siège Krindjabo.

Chaque département du Sud Comoé à au moins un roi. Comment arrivent-ils au pouvoir ?



Les critères de choix du Roi

"La légende raconte qu'à une certaine époque bien avant Jésus-Christ, les femmes, ne trouvant pas normal que l'homme, le père de l’enfant, se balade aisément au moment où elles se tordent de douleur lors de l’accouchement, ont demandé une faveur à Dieu. Elles ont souhaité que le père se torde de douleur en même temps que la femme au moment du travail.

Ce que Dieu leur accorda, après un entretien avec leur porte-parole. Et un jour, dans une cour, un homme, assis, déchiffrait son parchemin pendant que sa femme, en travail, se tordait de douleur. Cependant, en lieu et place du mari, comme l'avaient voulu les femmes, c'était le voisin qui se morfondait en même temps que la femme, en travail.

Après cette scène, qui venait de démasquer une femme adultère, les femmes ont demandé à Dieu de rétablir l'ordre ancien des choses, pour éviter de tels incidents. C'est-à-dire de laisser la femme seule souffrir au moment de l'accouchement. Il en ressort la moralité selon laquelle "seule la mère connaît le père de son enfant".

C'est à partir de cette histoire que les Agni, et la plupart des Akan ont, à l'instar des Juifs (Egyptiens) opté pour le système matrilinéaire. Parce que, disent-ils, "on ne se trompe pas de la maternité d'un enfant". Ainsi, le roi en pays Agni ressort d'une famille précise.

La constitution du royaume stipule que le Roi provienne d'une seule famille.

Il y a d'abord la situation généalogique sur laquelle les vielles femmes et plus particulièrement la mère sont consultées, le deuxième critère qui concerne la capacité à exercer le pouvoir, relève de l'appréciation des parents masculins.



L’intronisation
L'intronisation proprement dite se fait le vendredi de la semaine faste et comporte deux phases. La première consiste à designer officiellement le roi. c'est l'aspect politique. La seconde est l'aspect religieux. Elle consiste à mettre le nouveau roi en rapport avec ses propres ancêtres par l'intermédiaire de l'adjabia ou le siège.
Cette cérémonie donne lieu à de grandes manifestations de réjouissance.

Tout comme à l'enterrement d'un Roi. l'intronisation du Roi se fait dans le secret, dans le cas du sanwi, par le chef du village d'Ehia, qui est le village des intronisateurs en pays Agni d'Aboisso. Elle commence dans la nuit du 4ème jour de la semaine (jeudi) et prend fin le 7ème jour (dimanche).

Dans la nuit du jeudi au vendredi, on présente le roi à un petit groupe de personnes, constitué pour la plupart de personnes venues des villages du royaume.

Après cette première étape, les "Adoumouffouê" ou guerriers du royaume, habillés dans des tenues faites avec des sacs de riz, le visage peint d'une poudre noire, et avec une couronne tissée avec des feuilles de bananiers sur la tête s’apprêtent pour la sécurité du roi.

Durant tous ces trois jours, les Adoumouffouê, originaires des villages Adaou et Osseybo de la région d'Aboisso, veillent au grain sur le nouveau Roi.

La deuxième étape est celle des épreuves. Elle se fait dans le grand secret. On introduit le roi dans "l'adjabia soua" ou maison du trône sacré, où seuls les initiés ont accès. Une fois dans la pièce, le roi est soumis au traditionnel rite d'intronisation. On feint de faire asseoir le roi trois fois sur le trône dont il est l'élu avec des paroles bien précises.

La première fois, les anciens disent ces paroles, "A partir d'aujourd'hui, tu es l'élu de ce trône". La seconde fois, ils déclarent, "Nul n'a le droit de te détrôner tant que tu ne donneras pas dos au trône". La troisième fois, les anciens disent, "Nous resterons tous soumis à tes ordres".

Le roi reste dans cette chambre en compagnie des initiés et des "Adoumouffouê", pour se recueillir avec les esprits.
Après cette épreuve, le roi devra subir une autre, qui semble de loin la plus difficile. Il ne dort pas pendant tous ces jours. Il ne mange pas et ne boit pas.

La suite des rites se fait dans le secret de la tradition.

Le dimanche, il est présenté officiellement au peuple, avec les traditionnels "Ossé yeh" et est soumis à l'appréciation de l'Attougblan, tam-tam parleur. La tradition exige que le roi soit porté au moment de cette dernière étape par des personnes bien précises, dans son hamac de roi. Mais, avant de commencer la procession, le roi va se purifier avec le sang d'un mouton.

Il va poser son premier pas de roi dans ce sang, pour être purifié, et avec lui, tous les autres rois présents à la cérémonie. Après quoi, il devancé par les "Komians" (féticheuses) qui procèdent à la purification de l'itinéraire du nouveau roi, le roi part à la conquête de son royaume.

Les Adoumouffouê arpentent les rues du village, machettes à la main, pour sécuriser le périmètre de la procession. Le roi visite son royaume, perché sur les épaules des "porteurs" (on porte le roi une seule fois l'an). Il faut retenir que cette cérémonie de haute portée culturelle, est rentrée dans les mœurs de toute la cité d'Aboisso mais aussi de l'élite ivoirienne.



Le rôle du roi

Le roi est l'incarnation vivante du peuple. Il est intermédiaire entre les vivants et les puissantes surnaturelles. Le roi est habité d'une force que les Agni appellent « Tumi» qui lui confère des pouvoirs à la fois bénéfiques et dangereux.

Le roi est le garant de la prospérité générale du royaume. L'accident ou le malheur qui lui arrive rejaillit sur toute la population qui est affectée au même degré. Le roi doit être physiquement intègre.

La vie dans le Sud-Comoé, constate-t-on, ne se fait pas sans les rois qui jouissent d'une grande notoriété dans leurs différents royaumes de cette région du Sud-Est de la Côte d'Ivoire.

akn/fmo

Par Ahoulou Konan Noël

Chef du bureau régional d'Aboisso
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