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Art et Culture Publié le mardi 2 juin 2009 | Fraternité Matin

Cinéma : Un hymne aux “guerriers”

Bronx Barbès, c’était hier, en 2000. Un film plein et plaisant sur le monde du ghetto, des gens du Bronx d’ici, «ségrégés dans les kraals de la misère», qui, chaque jour, se battent, au propre comme au figuré, pour sortir de l’enfer dans lequel on les a plongés.

Neuf ans après le succès de ce premier film, la réalisatrice de ce regard si touchant sur ce monde des marginaux, victimes de leur marginalité, (Bronx Barbès), signe une deuxième œuvre cinématographique, Après l’océan. Le discours est émouvant: la lutte au quotidien de ceux qui n’ont plus rien à perdre pour leur survie; l’atmosphère de même, presque, avec l’œil d’une caméra qui sait restituer l’univers de ce monde traversé par la violence, l’humour, mais aussi par l’amour, la solidarité, la générosité, etc.

L’histoire de ce film est simple et profonde. Un film sur l’exil qui est «impie»; sur le dur désir de vivre, et non d’exister de «guerriers»; ceux qui vont chercher toujours leur destin plus loin, les immigrants: Ils ont pour nom : Otho, Shad… Deux jeunes «guerriers» dont le rêve est d’aller de « se chercher» en Europe. Le premier sera rapatrié – la honte du quartier et surtout de ses parents- et le second, Shad, revient au pays en héros, pour épouser sa belle et bonne Pélagie… «Chacun a un petit miracle dans son aventure guerrière». Une aventure où la lutte pour la survie est toujours présente. On s’en sort( ?), comme Shad et tant d’autres, grâce à de petits métiers, de petites escroqueries. C’est le monde de la débrouillardise, avec tous ses risques.

Après l’océan dépasse le cadre spécial de Bronx Barbès (l’esprit de combat au quotidien mené par des enfants du ghetto), pour embrasser les questions de survie auxquelles se heurtent les exilés… clandestins. Et nous entraîner, à travers des regards parallèles, Nord/ Sud, sur les contrastes entre le monde de là-bas et celui d’ici.

Le Nord ? Le rêve. L’ici ? La misère, où tout est sombre, mais la vie est là. Grouillante. Irrésistible. Avec ses décors; son parler coloré de la rue-pègre.

Tour à tour, des acteurs déjà sortis de l’anonymat, à la différence de Bronx Barbès, nous offrent de petits instants de bonheur cinématographique: 1h45, avec un son dolby Srd qui ne nous font pas oublier … Bronx Barbès. La musique du film, tiré du répertoire ivoirien, laïc et religieux est l’œuvre d’un duo : un rappeur (Kajeem) et un griot tradi-moderne, Karim ; et de la troupe de Tro Guédé. Des «scènes… osées » peuvent heurter la prétendue pudicité et l’esprit faussement moralisateur de quelques maîtres censeurs. Comme si le cinéma devait être hors du monde et en dehors de lui.

Ce film est dédié à la Côte d’Ivoire où réside la réalisatrice depuis dix ans. Aussi lui a-t-elle réservé la primeur de la projection. Renversant ainsi l’ordre habituel de la distribution des films internationaux qui souvent sortent en exclusivité en Europe, avant de venir en Afrique. Comme une dette envers ce pays, elle dira, «extrêmement heureuse »: «Je veux rendre à ce pays ce qu’il m’a donné».

Après l’océan n’aurait sans aucun doute pas eu le destin qui est le sien aujourd’hui, n’eût été l’implication personnelle du Président de la République, Laurent Gbagbo. Elle précisera d’ailleurs que la Côte d’Ivoire est entrée, dans le financement, à part égale, avec les autres producteurs du film. C’était la volonté du Président de la République, une manière concrète de rompre avec l’assistanat dans ce domaine.

SEM. Gbagbo, à la fin du film, a salué, entre autres, le mérite de cette réalisatrice qui a une manière spéciale de restituer la réalité de la vie des cours communes, de l’univers des ghettos, et d’exprimer avec une irrésistible ferveur, ce monde de la survie.

Sa présence, à cette cérémonie, dans le théâtre ouvert plein de monde du Palais de la culture, en présence du représentant du Premier ministre, de la ministre, Mme Adjobi Christine… était plus un symbole : un engagement en faveur du cinéma.




Michel Koffi
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