x Télécharger l'application mobile Abidjan.net Abidjan.net partout avec vous
Télécharger l'application
INSTALLER
PUBLICITÉ

Art et Culture Publié le samedi 5 septembre 2009 | Notre Voie

Dire bien - “Dis-moi qui est ton parrain, je te dirai qui tu es ”

Dans le vaste et riche pré des mots de l’actualité, où les fleurs ne se cueillent pas mais se décrivent, j’ai contemplé pour nous, lecteurs miens, le mot «parrain». Deux inédits et historiques évènements m’ont permis coup sur coup cette linguistique extase (visuelle). Tous les deux évènements remontant au mois d’août 2009 ; le mot «août» (qui peut s’écrire «oût») signifiant aussi la «moisson» (cf. l’expression «faire l’août») … sont indiscutablement une bonne moisson pour le processus de sortie de crise en cours en Côte d’Ivoire et même pour l’image du pays. 1/- Deux heureux rendez-vous qui inaugurent une nouvelle ère … Le premier évènement concerne la rencontre inédite et historique entre les jeunes du COJEP (Congrès panafricain des jeunes et des patriotes) avec à leur tête leur président, Charles Blé Goudé, et le monumental révérend Jesse Jackson, venu des USA. Rappelons que Jesse Jackson a séjourné en Côte d’Ivoire du 10 au 14 août 2009 comme invité spécial du 4ème Sommet des leaders de la jeunesse panafricaine organisé (bien entendu) par le COJEP. A Charles Blé Goudé, l’hôte mais aussi le jeune leader courageux et brave (de l’italien «bravo» qui signifie aussi «excellent, habile, talentueux, qui brille ou fait belle figure dans son genre»), le grand combattant de la liberté, Jesse Jackson, dira avec force et conviction doublée d’admiration ceci : «Je suis désormais ton parrain» (cf. Notre Voie n°3357 du 17/08/09 et le Temps n°1891 du 17/08/09, tous les deux organes de presse parlant de «confidences» de Jesse Jackson, un homme à l’esprit vaste.). Le second évènement remonte à la mémorable visite de travail du président de la République, Laurent Gbagbo, lui aussi infatigable combattant de la liberté et sous nos cieux rare acteur politique à l’esprit vaste (qui est capable de grandes entreprises), dans le Département d’Issia les 27 et 28/08/09. Aux nouveaux membres du bureau investi de l’UFAO (Union Fraternelle des Akan de l’Ouest), structure que le chef de l’Etat a qualifiée «d’instrument essentiel pour la cohésion sociale», il dira aussi ceci avec force et conviction doublée d’admiration et de soulagement : «l’initiative que vous avez prise réjouit mon cœur, parce que dans ce pays il y a trop de menteurs…». Après ce constat, le chef de l’Etat ajouta ceci pour marquer son soutien sans réserve à cette nouvelle structure, véritable rempart contre les campagnes d’intoxication menées par ses adversaires politiques dans les campements baoulé de l’Ouest : «Je soutiens votre association et j’accepte d’en être le parrain. Parce que c’est une association de prise de conscience (cf. le Temps n°1902 des 29-30/08/2009). Voilà, lecteurs miens, les deux heureux rendez-vous qui non seulement me firent revoir la beauté morale du mot «parrain», mais aussi ils inaugurent une ère nouvelle où les mots «réconciliation, entente» (des jeunes, des groupes ethniques) requinqués et redorés restent nécessaires au processus de sortie de crise. Sans ces deux mots, notre pays s’affalerait. Avec donc le mot «parrain», nous avons de quoi espérer (rien qu’en multipliant par exemple ce type d’initiatives). 2/- Quand la pression humaine pèse sur le sens du mot… Du point de vue définitoire, le mot «parrain» est un mot emprunté à l’Eglise où il désigne toute personne de sexe masculin qui joue le rôle de responsable spirituel d’une personne nouvellement baptisée. Du mot sont issus le dérivé verbal (parrainer) et le dérivé nominal (parrainage), aujourd’hui mis par abus (ou soit de gain) à toutes les sauces jouissives. J’y reviendrai. Le contraire exact du mot, avec le même sens favorable, est «marraine». Mais les choses ne s’arrêtent pas là car ces deux mots ont leurs ancêtres. Il faut remonter loin dans le temps et mieux consulter le «Dictionnaire du français classique (la langue du 17ème siècle) de Gaston Cayrou (Edition Klincksieck) pour comprendre que historiquement, que dis-je, diachroniquement (de «dia» qui signifie «à travers» et de «chronos», temps), le parrain (qui comme on le voit, appartient au langage des cultes) est à la marraine, ce que le mot «compère» est au mot «commère» qui est fort loin du sens défavorable que nous lui connaissons. (cf. «commérage»). A ce titre, lecteurs miens, le mot «commère» qui souffre d’une conspiration sociologique (cf. les clichés du genre «toute femme bavarde) mérite d’être considéré par nous, car digne de respect et de considération. Selon donc le lexicographe Gaston Cayrou, le compère est le parrain par rapport à la marraine et aux parents de l’enfant tenu par lui sur les fonts de baptême. Ainsi contracte-t-il une alliance spirituelle avec eux. A ce titre il agit comme le second père. En témoigne la présence du préfixe «com» du latin «cum» qui signifie «avec», pater «père», c’est-à-dire «père» spirituel de l’enfant, chargé éventuellement de le diriger et de le secourir en cas de mort du père naturel. C’est un choix qui lie et engage pour toute la vie. Et c’est ce sens propre ou primitif que l’on retrouve dans le mot «parrain» utilisé par Jesse Jackson et par Laurent Gbagbo. Ce choix qui rassure les parties dénote aussi disponibilité, constance dans la présence, responsabilité partagée… Entre le compère et son filleul ( ou baptisé). Ce terme, transféré dans le langage ordinaire ne tarde pas à signifier «camarade, ami voire complice et larrons en foire par déviation péjorative. Tout ce qui se dit ici pour «compère» vaut pour «commère». Ces deux termes en gagnant en polysémie, ne fonctionnent plus de nos jours comme «doublets» (ou synonymes exacts) de parrain et de marraine. Mais cela ne met pas nos deux mots, principalement le mot «parrain» à l’abri de la pression humaine. Conséquence ? Dans le pré des mots de l’actualité, le mot «parrain» serait comparable à une rose. Et comme on le sait, il n’y a pas de rose sans épines. Quelle histoire ! Dans l’une de ses épines il vient à signifier dans le milieu de la mafia, le chef de famille au sens large du terme. Le film du réalisateur français Ford Coppela intitulé «Le Parrain», sorti en 1972 et mettant en scène deux géants du cinéma américain (Marlon Brando, le père et Al Pacino le fils héritier) en fit la triste promotion. Rappelons que ce film (en 3 parties) est une excellente adaptation à l’écran du livre («Le parrain», paru en 1969) de Mario Puzo qui y raconte l’histoire d’une famille de mafiosi (pluriel de «mafieux») dirigée par le pater, le capo (chef) Don Vito Corleone, symbole du chef d’un important groupe illégal ou aux activités illicites. Que Dieu nous en garde. Mais le détournement sémantique ne s’arrête pas là. A côté du sens précis à lui donné par les mafiosi où le parrain est aussi celui qui présente quelqu’un dans un club ou cercle pour l’y faire entrer ou admettre, il y a enfin le sens de «mécène» qui apporte un soutien financier à l’organisation d’une manifestation ou cérémonie (cf. le mot «parrainage»). Qui suit les annonces à la télé et à la radio, se rend vite compte de la fréquence étourdissante du mot «parrainage». Presque pas de cérémonie ou manifestation sans ce mot qui perd son sens moral au bénéfice d’un sens bassement matérialiste. Les organisateurs qui ne manquent pas d’imaginations attendent non pas des mots du parrain mais des espèces sonnantes et trébuchantes. Ainsi le choix du parrain ne se fait presque plus en fonction de sa moralité mais en fonction de sa poche ou sa surface financière. Ah, l’argent ! Voilà, lecteurs miens, la fin de ma linguistique extase visuelle qui nous a permis de décrire et de saisir les mensurations du mot «parrain» qui, rappelons-le, ne va pas sans les mots «témoin, témoignage» (du latin «testimonium» qui signifie «attestation juridique, preuve»). Quel que soit donc le sens à lui donné, le choix d’un parrain ne peut être ni hasardeux ni neutre… Car on peut y lire vos intentions, votre conscience… Enfin, et je m’arrêterai là, je voudrais me souvenir avec émotion et fierté, de l’artiste chanteur de reggae, Serges Kassy (Sergent) qui avait pris sur lui le courage militant de crier haut et fort et d’assumer ceci : «Je suis le parrain de la FESCI» au moment où la répression barbare du pouvoir PDCI s’abattait dans les années 90 sur les élèves et étudiants. Bravo, l’artiste ! Preuve que le parrainage est aussi cette valeur qui n’attend point le nombre des années…
Koné Dramane direbien@live.fr
PUBLICITÉ
PUBLICITÉ

Playlist Art et Culture

Toutes les vidéos Art et Culture à ne pas rater, spécialement sélectionnées pour vous

PUBLICITÉ