Le chef de l’Etat, au deuxième jour de son séjour au Sénégal, a animé avec le président Abdoulaye Wade une conférence à l’hôtel Méridien. Nous vous proposons ici la deuxième partie cette conférence.
(…) Quel est le sort des Sénégalais vivant en Côte d’Ivoire après la chute de Gbagbo ?
Alassane Ouattara : Le sort réservé aux ressortissants ouest-africain et aux Sénégalais résidents en Côte d’Ivoire nous préoccupe. Le président Wade et moi-même en avons parlé très souvent. J’ai été choqué de voire que de nombreux ouest-africains et notamment des Sénégalais étaient réfugiés dans leur ambassade pendant de nombreux jours sans nourriture, sans eau. Ces moments ont été terribles pour tout le monde pas seulement pour les Ivoiriens. Nous avons fait ce que nous avons pu. Il faut faire en sorte que tous ceux qui sont partis précipitamment soient les bienvenus. Je souhaite que certaines familles telles sénégalaises, mauritaniennes, libanaises, maliennes ou burkinabé qui ne connaissent que la Côte d’Ivoire et qui sont des Ivoiriens en réalité, puissent revenir pour contribuer à la reprise économique de la Côte d’Ivoire mais également à notre volonté de réconciliation et de protection de protection de toutes les populations.
Est-ce que cette visite est une récupération ? J’ai dit que j’ai été élu pour un mandat de cinq ans. J’espère que j’aurais la vie et la santé de le faire. Je le ferai au mieux de mes capacités, en toute conscience dans l’intérêt des Ivoiriens. Donc, la récupération ne m’intéresse pas.
Ensuite, compte tenu des difficultés qui ont amené les forces républicaines à pacifier la Côte d’Ivoire, si cela aura un impact sur le résultat des enquêtes. Je dois vous dire que les Forces républicaines ont été constituées seulement le 17 mars 2011. Parce que j’ai estimé que nous étions dans une phase où les choses avaient trop trainé. Nous devrions avoir une intervention de la CEDEAO conformément aux résolutions de cette Institution. L’usage de la force légitime était envisagé. Nous avons considéré que dans cette perspective, les Forces de défense et de sécurité devraient prendre leurs responsabilités pour pacifier le pays et protéger les Ivoiriens. Cette pacification du pays a commencé à l’intérieur du pays qui a duré trois jours sur l’ensemble du pays jusqu’à ce que les Forces républicaines arrivent aux portes d’Abidjan. Là, nous avons demandé qu’elles soient cantonnées en espérant que Laurent Gbagbo aurait compris que le pays entier lui ayant échappé, il aurait accepté de partir. Mais, il a préféré engager une bataille avec des miliciens et des mercenaires. Car, l’armée républicaine, la gendarmerie, une bonne partie de la police ont refusé de participer à ce combat. Ils savaient que ce n’était pas un combat juste. Partout où on m’a signalé que les choses ont dérapé, nous avons engagé une enquête. Par exemple, à Duékoué, une semaine après, nous avons envoyé le Procureur de cette région pour enquêter sur les tueries. J’ai même demandé que la commission des droits de l’homme envoie une équipe pour enquêter également. Parce que mon souhait est de faire en sorte qu’il n’y ait pas d’impunité en Côte d’Ivoire. Nul n’est au-dessus de la loi. Donc, tous ceux qui ont commis des crimes de sang seront punis. La loi est là pour définir les sanctions. La Côte d’Ivoire veut être un Etat de droit, elle veut être exemplaire. Il n’y aura pas d’exception.
Me Abdoulaye Wade (Président du Sénégal) :
Je voudrais remercier les journalistes qui sont venus très nombreux à cette conférence de presse. Je ne suis pas sûr d’avoir tant de journalistes sénégalais, étrangers. Cela montre l’intérêt vous avez pour la visite du Président Ouattara au Sénégal. Car la bonne communication est une dimension de la démocratie et le développement. Je voudrais de nouveau exprimer la fierté de recevoir Alassane Dramane Ouattara, président de la République de Côte d’Ivoire. C’est mon petit frère. Il a décidé de faire sa première visite officielle en Côte d’Ivoire.
Vous demandez si cette visite va renforcer les relations entre la Côte d’Ivoire et le Sénégal qui ont été malmenées ces derniers temps. Je voudrais vous dire qu’il ne faut pas s’arrêter aux apparences. Notre relation avec est une relation très ancienne. Mon père, mon oncle qui ont vécu en Côte d’Ivoire, se sont mariés là ; mon oncle a des progénitures ivoiriennes.
Comme beaucoup d’autres Sénégalais. Quand Gbagbo a été arrêté au temps d’Houphouët Boigny, j’étais peiné de voir un opposant en prison. J’ai demandé à Abdou Diouf d’aller voir Houphouët. A Paris, j’ai demandé une audience à Houphouët, je lui ai demandé de libérer Gbagbo. Gbagbo, peu de temps avant d’être reçu par ses amis socialistes français, a dit : « Wade est libéral, moi je suis socialiste. Je ne vois pas comment on peut coopérer ». J’étais le seul à demander sa libération. Mieux, j’ai commis un avocat, Me Alioune Badara Cissé, un avocat sénégalais, pour aller rencontrer Gbagbo en prison. Houphouët m’a dit : « J’ai tout fait pour le libérer. Mais, ils (lui et ses camarades) ont fait appel. Je ne peux intervenir qu’après l’arrêt de l’appel ». La réponse de Gbagbo a été de dire qu’il faut que Houphouët s’engage par écrit. Quand on m’a rapporté cela, j’ai dit dommage. Ces gens-là n’ont pas de formation politique. Quelqu’un comme Houphouët donne sa parole. On ne lui demande pas de le faire par écrire. Alors, la cours d’appel a confirmé la condamnation. Deuxième élément. Quand il y a eu des problèmes le traitement de 500 000 voix, il a cherché à me voir. Quand je suis arrivé, il m’a dit : « Donne-moi des conseils ». Il m’a dit : « Parle à tous les leaders politiques y compris ceux de mon propre parti ». J’ai échangé avec tous les leaders. Sur le traitement de ces 500.000 cas, il a tenu compte un tout petit peu de ce que nous avons dit.
Mes relations avec Alassane Ouattara
D’abord je dois dire qu’Alassane Ouattara m’a toujours considéré comme son grand frère.
Deuxièmement, il est économiste et financier. Nous nous entendons. Troisièmement, il est membre de l’Internationale Libérale dont j’ai été pendant longtemps vice-président.
Aujourd’hui, je suis patron de l’Internationale Libérale. C’est moi qui a présenté la candidature de Ouattara à l’Internationale Libérale. Il est venu ici participer à plusieurs réunions de l’Internationale Libérale. Voici l’habileté qu’il a eue. Bien entendu, j’ai suivi comme tout le monde tout ce qui s’est passé en Côte d’Ivoire. Hier, au diner, un ambassadeur européen m’a dit : « Une fois de plus, vous avez eu raison sur nous ». Des ambassadeurs avaient dit que Ouattara ne pouvaient pas gagner. Je leur ai dit : « C’est Ouattara qui va gagner. Je connais la Côte d’Ivoire. En Europe, lorsqu’on me demandait : « Qu’est-ce que vous pensez de la situation de la Côte d’Ivoire ? » Je disais que le futur président de la Côte d’Ivoire, c’est Ouattara. Je n’ai jamais hésité. Compte tenu de tout ça, il a voulu réservé sa première visite de travail au Sénégal. Je ne veux pas le laisser partir. Il y aura amélioration des relations entre la Côte d’Ivoire et le Sénégal dans les domaines économique et politique. Il y aura une évolution de la CEDEAO , de l’UEMOA. A la dernière réunion de la CEDEAO à laquelle il n’a pas pu participer, nous avons lancé l’idée de la transformation de la CEDEAO en Confédération politique de l’Afrique de l’Ouest. Mes collègues m’ont demandé d’approfondir ma réflexion. Je leur ai envoyé un dossier. Je lui ai parlé de ça. Je lui ai parlé également de la transformation de l’UEMOA vers une entité politique avec une assemblée politique. Le Sénégal est un grand partenaire en Afrique de l’Ouest.
Je n’ai pas peur. Moi je dirige le Sénégal. Chacun dirige son pays selon les principes généraux. Voilà le cadre dans lequel je travaille. Si Ouattara était parti ailleurs, on demandera pourquoi il est allé là-bas. Est-ce que vous pensez qu’on peut récupérer un homme comme Alassane Ouattara ? C’est mal le connaitre. Il est le président de la Côte d’Ivoire. Il s’est battu.
Nous avons dit dans le communiqué final qu’il faut renforcer l’axe Abidjan-Dakar qui est un axe privilégié de l’intégration de l’Afrique de l’Ouest. Il y en a d’autres, le Mali etc. Cela a été traditionnellement comme ça. L’une des bases de l’Afrique de l’Ouest, c’est Senghor-Houphouët ou Houphouët-Senghor. C’est un axe historique qui est créé qu’on ne peut pas être supprimé du jour au lendemain. Nous voulons renforcer cet axe qui bénéficie de toutes les possibilités intellectuelles, culturelles qui existent, Ouattara et moi.
Vous savez que les Sénégalais n’ont pas eu de problèmes avant cette crise. Ils sont adoptés comme des Ivoiriens. Malheureusement, l’un de nos compatriotes qui a entendu le discours de Ouattara, a dit que : « C’est fini, c’est la paix ». Il n’a pas été assez prudent. Il est allé ouvrir sa boutique le lendemain. Alors des gens sont venus et l’ont tué. Je le regrette. La Côte d’Ivoire est le seul pays d’Afrique qui contient 30% d’étrangers. C’est Houphouët qui a voulu ça. C’est bien comme ça. Il ne faut pas s’enfermer. Même la France a fait une politique de population, d’immigration au lendemain de la Guerre. L’histoire montre que chaque fois qu’il y a brassage, c’est un endroit qui fait des progrès plus vite que les autres. Les Etats-Unis sont un melting-pot. C’est un Noir qui est à la tête de la plus grande puissance au monde. La Côte d’Ivoire a bénéficié de cet apport.
Ouattara est venu me demander des conseils. Je suis le doyen des chefs d’Etat. J’ai plusieurs expériences de toutes les situations qu’on ne peut imaginer. Je lui disais ce matin : « Ne fais pas les erreurs que j’ai faites ». Il m’a demandé trois conseils.
Je lui ai dit : « Il faut désarmer les gens ». On ne peut pas gouverner un pays où il y a des gens avec des pistolets, des kalachnikovs ou des canons ou même des mortiers. Il y a deux voies. La première, c’est de lancer un appel patriotique à tous les Ivoiriens pour désarmer.
Deuxième voie, c’est que vous achetiez les armes. Ça été déjà fait. Il faut fermer les frontières et faire un bon contrôle. Deuxième conseil, je lui ai dit le pardon. Sans le pardon, la loi d’amnistie n’existerait pas. Le troisième conseil, c’est la jeunesse. Il faut penser à la jeunesse. La jeunesse a tellement été impliquée. Aujourd’hui, l’Université est fermée. Ouattara est très attaché à l’Enseignement. Nous allons voir avec des amis pour financer des pavillons dans l’Enseignement supérieur pour que les étudiants viennent rattraper le retard…
Le mot de fin d’Alassane Ouattara
Je voudrais vous remercier cher ainé de l’accueil et des conseils que vous avez bien voulu nous donner. Je voudrais vous saluer pour votre vision et l’œuvre importante et immense que vous réalisez pour le Sénégal. Le Sénégal a certainement fait un bon spectaculaire ces dernières années grâce à vous. Je sais que je pourrais grâce à Dieu bénéficier de vos conseils.
Recueillis à Dakar par IBK (Envoyé spécial)
(…) Quel est le sort des Sénégalais vivant en Côte d’Ivoire après la chute de Gbagbo ?
Alassane Ouattara : Le sort réservé aux ressortissants ouest-africain et aux Sénégalais résidents en Côte d’Ivoire nous préoccupe. Le président Wade et moi-même en avons parlé très souvent. J’ai été choqué de voire que de nombreux ouest-africains et notamment des Sénégalais étaient réfugiés dans leur ambassade pendant de nombreux jours sans nourriture, sans eau. Ces moments ont été terribles pour tout le monde pas seulement pour les Ivoiriens. Nous avons fait ce que nous avons pu. Il faut faire en sorte que tous ceux qui sont partis précipitamment soient les bienvenus. Je souhaite que certaines familles telles sénégalaises, mauritaniennes, libanaises, maliennes ou burkinabé qui ne connaissent que la Côte d’Ivoire et qui sont des Ivoiriens en réalité, puissent revenir pour contribuer à la reprise économique de la Côte d’Ivoire mais également à notre volonté de réconciliation et de protection de protection de toutes les populations.
Est-ce que cette visite est une récupération ? J’ai dit que j’ai été élu pour un mandat de cinq ans. J’espère que j’aurais la vie et la santé de le faire. Je le ferai au mieux de mes capacités, en toute conscience dans l’intérêt des Ivoiriens. Donc, la récupération ne m’intéresse pas.
Ensuite, compte tenu des difficultés qui ont amené les forces républicaines à pacifier la Côte d’Ivoire, si cela aura un impact sur le résultat des enquêtes. Je dois vous dire que les Forces républicaines ont été constituées seulement le 17 mars 2011. Parce que j’ai estimé que nous étions dans une phase où les choses avaient trop trainé. Nous devrions avoir une intervention de la CEDEAO conformément aux résolutions de cette Institution. L’usage de la force légitime était envisagé. Nous avons considéré que dans cette perspective, les Forces de défense et de sécurité devraient prendre leurs responsabilités pour pacifier le pays et protéger les Ivoiriens. Cette pacification du pays a commencé à l’intérieur du pays qui a duré trois jours sur l’ensemble du pays jusqu’à ce que les Forces républicaines arrivent aux portes d’Abidjan. Là, nous avons demandé qu’elles soient cantonnées en espérant que Laurent Gbagbo aurait compris que le pays entier lui ayant échappé, il aurait accepté de partir. Mais, il a préféré engager une bataille avec des miliciens et des mercenaires. Car, l’armée républicaine, la gendarmerie, une bonne partie de la police ont refusé de participer à ce combat. Ils savaient que ce n’était pas un combat juste. Partout où on m’a signalé que les choses ont dérapé, nous avons engagé une enquête. Par exemple, à Duékoué, une semaine après, nous avons envoyé le Procureur de cette région pour enquêter sur les tueries. J’ai même demandé que la commission des droits de l’homme envoie une équipe pour enquêter également. Parce que mon souhait est de faire en sorte qu’il n’y ait pas d’impunité en Côte d’Ivoire. Nul n’est au-dessus de la loi. Donc, tous ceux qui ont commis des crimes de sang seront punis. La loi est là pour définir les sanctions. La Côte d’Ivoire veut être un Etat de droit, elle veut être exemplaire. Il n’y aura pas d’exception.
Me Abdoulaye Wade (Président du Sénégal) :
Je voudrais remercier les journalistes qui sont venus très nombreux à cette conférence de presse. Je ne suis pas sûr d’avoir tant de journalistes sénégalais, étrangers. Cela montre l’intérêt vous avez pour la visite du Président Ouattara au Sénégal. Car la bonne communication est une dimension de la démocratie et le développement. Je voudrais de nouveau exprimer la fierté de recevoir Alassane Dramane Ouattara, président de la République de Côte d’Ivoire. C’est mon petit frère. Il a décidé de faire sa première visite officielle en Côte d’Ivoire.
Vous demandez si cette visite va renforcer les relations entre la Côte d’Ivoire et le Sénégal qui ont été malmenées ces derniers temps. Je voudrais vous dire qu’il ne faut pas s’arrêter aux apparences. Notre relation avec est une relation très ancienne. Mon père, mon oncle qui ont vécu en Côte d’Ivoire, se sont mariés là ; mon oncle a des progénitures ivoiriennes.
Comme beaucoup d’autres Sénégalais. Quand Gbagbo a été arrêté au temps d’Houphouët Boigny, j’étais peiné de voir un opposant en prison. J’ai demandé à Abdou Diouf d’aller voir Houphouët. A Paris, j’ai demandé une audience à Houphouët, je lui ai demandé de libérer Gbagbo. Gbagbo, peu de temps avant d’être reçu par ses amis socialistes français, a dit : « Wade est libéral, moi je suis socialiste. Je ne vois pas comment on peut coopérer ». J’étais le seul à demander sa libération. Mieux, j’ai commis un avocat, Me Alioune Badara Cissé, un avocat sénégalais, pour aller rencontrer Gbagbo en prison. Houphouët m’a dit : « J’ai tout fait pour le libérer. Mais, ils (lui et ses camarades) ont fait appel. Je ne peux intervenir qu’après l’arrêt de l’appel ». La réponse de Gbagbo a été de dire qu’il faut que Houphouët s’engage par écrit. Quand on m’a rapporté cela, j’ai dit dommage. Ces gens-là n’ont pas de formation politique. Quelqu’un comme Houphouët donne sa parole. On ne lui demande pas de le faire par écrire. Alors, la cours d’appel a confirmé la condamnation. Deuxième élément. Quand il y a eu des problèmes le traitement de 500 000 voix, il a cherché à me voir. Quand je suis arrivé, il m’a dit : « Donne-moi des conseils ». Il m’a dit : « Parle à tous les leaders politiques y compris ceux de mon propre parti ». J’ai échangé avec tous les leaders. Sur le traitement de ces 500.000 cas, il a tenu compte un tout petit peu de ce que nous avons dit.
Mes relations avec Alassane Ouattara
D’abord je dois dire qu’Alassane Ouattara m’a toujours considéré comme son grand frère.
Deuxièmement, il est économiste et financier. Nous nous entendons. Troisièmement, il est membre de l’Internationale Libérale dont j’ai été pendant longtemps vice-président.
Aujourd’hui, je suis patron de l’Internationale Libérale. C’est moi qui a présenté la candidature de Ouattara à l’Internationale Libérale. Il est venu ici participer à plusieurs réunions de l’Internationale Libérale. Voici l’habileté qu’il a eue. Bien entendu, j’ai suivi comme tout le monde tout ce qui s’est passé en Côte d’Ivoire. Hier, au diner, un ambassadeur européen m’a dit : « Une fois de plus, vous avez eu raison sur nous ». Des ambassadeurs avaient dit que Ouattara ne pouvaient pas gagner. Je leur ai dit : « C’est Ouattara qui va gagner. Je connais la Côte d’Ivoire. En Europe, lorsqu’on me demandait : « Qu’est-ce que vous pensez de la situation de la Côte d’Ivoire ? » Je disais que le futur président de la Côte d’Ivoire, c’est Ouattara. Je n’ai jamais hésité. Compte tenu de tout ça, il a voulu réservé sa première visite de travail au Sénégal. Je ne veux pas le laisser partir. Il y aura amélioration des relations entre la Côte d’Ivoire et le Sénégal dans les domaines économique et politique. Il y aura une évolution de la CEDEAO , de l’UEMOA. A la dernière réunion de la CEDEAO à laquelle il n’a pas pu participer, nous avons lancé l’idée de la transformation de la CEDEAO en Confédération politique de l’Afrique de l’Ouest. Mes collègues m’ont demandé d’approfondir ma réflexion. Je leur ai envoyé un dossier. Je lui ai parlé de ça. Je lui ai parlé également de la transformation de l’UEMOA vers une entité politique avec une assemblée politique. Le Sénégal est un grand partenaire en Afrique de l’Ouest.
Je n’ai pas peur. Moi je dirige le Sénégal. Chacun dirige son pays selon les principes généraux. Voilà le cadre dans lequel je travaille. Si Ouattara était parti ailleurs, on demandera pourquoi il est allé là-bas. Est-ce que vous pensez qu’on peut récupérer un homme comme Alassane Ouattara ? C’est mal le connaitre. Il est le président de la Côte d’Ivoire. Il s’est battu.
Nous avons dit dans le communiqué final qu’il faut renforcer l’axe Abidjan-Dakar qui est un axe privilégié de l’intégration de l’Afrique de l’Ouest. Il y en a d’autres, le Mali etc. Cela a été traditionnellement comme ça. L’une des bases de l’Afrique de l’Ouest, c’est Senghor-Houphouët ou Houphouët-Senghor. C’est un axe historique qui est créé qu’on ne peut pas être supprimé du jour au lendemain. Nous voulons renforcer cet axe qui bénéficie de toutes les possibilités intellectuelles, culturelles qui existent, Ouattara et moi.
Vous savez que les Sénégalais n’ont pas eu de problèmes avant cette crise. Ils sont adoptés comme des Ivoiriens. Malheureusement, l’un de nos compatriotes qui a entendu le discours de Ouattara, a dit que : « C’est fini, c’est la paix ». Il n’a pas été assez prudent. Il est allé ouvrir sa boutique le lendemain. Alors des gens sont venus et l’ont tué. Je le regrette. La Côte d’Ivoire est le seul pays d’Afrique qui contient 30% d’étrangers. C’est Houphouët qui a voulu ça. C’est bien comme ça. Il ne faut pas s’enfermer. Même la France a fait une politique de population, d’immigration au lendemain de la Guerre. L’histoire montre que chaque fois qu’il y a brassage, c’est un endroit qui fait des progrès plus vite que les autres. Les Etats-Unis sont un melting-pot. C’est un Noir qui est à la tête de la plus grande puissance au monde. La Côte d’Ivoire a bénéficié de cet apport.
Ouattara est venu me demander des conseils. Je suis le doyen des chefs d’Etat. J’ai plusieurs expériences de toutes les situations qu’on ne peut imaginer. Je lui disais ce matin : « Ne fais pas les erreurs que j’ai faites ». Il m’a demandé trois conseils.
Je lui ai dit : « Il faut désarmer les gens ». On ne peut pas gouverner un pays où il y a des gens avec des pistolets, des kalachnikovs ou des canons ou même des mortiers. Il y a deux voies. La première, c’est de lancer un appel patriotique à tous les Ivoiriens pour désarmer.
Deuxième voie, c’est que vous achetiez les armes. Ça été déjà fait. Il faut fermer les frontières et faire un bon contrôle. Deuxième conseil, je lui ai dit le pardon. Sans le pardon, la loi d’amnistie n’existerait pas. Le troisième conseil, c’est la jeunesse. Il faut penser à la jeunesse. La jeunesse a tellement été impliquée. Aujourd’hui, l’Université est fermée. Ouattara est très attaché à l’Enseignement. Nous allons voir avec des amis pour financer des pavillons dans l’Enseignement supérieur pour que les étudiants viennent rattraper le retard…
Le mot de fin d’Alassane Ouattara
Je voudrais vous remercier cher ainé de l’accueil et des conseils que vous avez bien voulu nous donner. Je voudrais vous saluer pour votre vision et l’œuvre importante et immense que vous réalisez pour le Sénégal. Le Sénégal a certainement fait un bon spectaculaire ces dernières années grâce à vous. Je sais que je pourrais grâce à Dieu bénéficier de vos conseils.
Recueillis à Dakar par IBK (Envoyé spécial)