«M. le président de la République, demain le village de N’guessanblékro, dans la commune de Port-Bouët, n’existera plus, les cocotiers et les fermes feront place aux belles maisons, aux grandes rues et aux infrastructures socio-économiques.
Nul ne s’oppose au développement, mais à quel prix ? Monsieur le président, la construction des logements économiques comme faisant partie intégrante de votre programme de gouvernement est un projet révolutionnaire. Mais il est urgent d’interpeller les autorités sur les abus et les trafics d’influence dont pourraient être victimes les pauvres paysans. Le village de N’guessanblékro depuis 1973 est toujours sous la menace d’un probable déguerpissement. Déjà en 1996, n’eût été la promptitude de la mairie de Port-Bouët et l’ingéniosité de Kouadio N’guessan, fondateur dudit village appuyé par le président défunt Félix Houphouet-Boigny, N’guessanblékro aurait disparu depuis belle lurette. Qui est N’guessan Kouadio ? Originaire du village de Takrakokodjan, dans la sous-préfecture de Botro (Bouaké), N’guessan kouadio est né en 1895 et décède en 1995, puis il a été enterré selon la tradition, dans son campement devenu N’guessanblekro. Ceci est la preuve manifeste de la reconnaissance officielle de son autorité en tant qu’ex-chef de village. Sa tombe entourée de celles de ses deux fils et de sa belle fille sont situées à l’entrée du village. Quant à son épouse, Agni originaire d’Aboisso, elle repose à Assouba son village natal. Kouadio N’guessan est arrivé en 1920 à Abidjan, travailleur infatigable, il s’installe dans la commune de Port-Bouët dans un campement en bordure de lagune. Plus tard, feu Mpiké Aka propriétaire terrien originaire du village d’Anna S/P de Bingerville en 1925 lui cède ladite parcelle de près de quatre-vingt hectares et conformément à la tradition une cérémonie coutumière fut organisée pour marquer l’événement. Malheureusement, avec l’arrivée de l’ex-Président Gbagbo, la situation de N’guessanblékro s’est considérablement dégradée. Il convient d’ajouter à cela les actions destructrices des hommes de main de madame Simone Gbagbo. La vie de N’guessan Kouadio aurait été une belle histoire s’il n’y avait pas eu cette envie permanente d’expropriation marquée par le bruit des machines. La venue très récente (octobre 2011) de l’huissier de justice, maître Ngbesso Adépo Victor à N’guessanblékro, est le signe annonciateur d’une probable expulsion d’où la distribution prochaine des convocations, selon l’huissier.
Aujourd’hui, l’histoire de déguerpissement entamée en 1973 se répète encore sous nos yeux, dans l’indifférence totale. Mais pourquoi s’acharne-t-on tant sur N’guessanblékro qui, loin s’en faut, n’est pas le seul village lagunaire ?
Qui a vendu N’guessanblékro ? La question au regard des destructions massives des champs et des plantations sans dédommagement mérite d’être élucidée.
Au nom des droits humains, peut-on sacrifier impunément des innocents sur l’autel des intérêts égoïstes, mercantiles et politiques ?
Devant le drame que vivent aujourd’hui les habitants de N’guessanblekro nul n’a le droit de se taire, enseignants, simples citoyens, avocats touristes, journalistes, défenseurs des droits de l’Homme, associations féminines, chefs religieux… etc. Nous sommes tous interpellés. Ceux ou celles qui ont connu ou approché N’guessan Kouadio à l’instar de Mme Aka Angui Hortense maire de Port-Bouët, ont aujourd’hui un devoir de mémoire. Ils ont l’ultime responsabilité d’éclairer l’opinion nationale et internationale ; en vue de l’éclatement de la vérité. Monsieur le Président pour ces hommes, ces femmes et ces enfants qui ne demandent qu’à vivre paisiblement sur la terre de leurs parents, notre mutisme serait un silence à la fois coupable et suicidaire voire lâche»
A NAKAHA
