Motus : Héritage

Demain, on sera le 9 juin. Une date marquée dans le marbre de l’histoire musicale ivoirienne. En effet, c’est le 9 juin 1983 à Yamoussoukro, la capitale politique de notre pays, que disparaissait le maitre incontesté et incontestable du Ziglibity, Loué Ernest Djédjé, plus connu sous le nom d’Ernesto Djédjé. Cela fait donc trente ans que l’enfant de Tahiraguhé a déposé brutalement le micro, arraché à l’affection des siens et des mélomanes ivoiriens et africains. A 35 ans, le chanteur et danseur émérite a été fauché par la traitresse mort, qui n’oublie pas et qui ne pardonne pas. Pourquoi les grands hommes doivent-ils partir dans la fleur de l’âge ? Y a-t-il une damnation qui les frappe à ce point ? Ernesto Djédjé, Fulgence Kassy, Gnaoré Djimi « Doble Bagnon », Jimmy Hendrix, Elvis Presley, Bruce Lee, Bob Marley et James Dean, pour ne citer que ceux-là, sont morts en pleine jeunesse et pendant qu’ils étaient au sommet de leur art. Trente ans donc que le « Gnoantré national » a quitté le monde des survivants, laissant le Ziglibity dans la totale désolation. Ce n’est un secret pour personne que ce rythme qui a tant fait danser la Côte d’Ivoire et l’Afrique, ne vit que par le souvenir de son principal promoteur. Ses disciples et présumés héritiers n’ont pas été à la hauteur de la tâche. Englués dans les querelles intestines de porte-étendard du Ziglibity, Luckson Padaud, Blissi Tébil et Johnny Dédi « la Fleur » ne sont pas parvenus à perpétuer l’?uvre du maitre. Le premier s’est perdu dans le « Ziglibity makossa ». le second ne s’est pas remis de sa fameuse grève de la faim à la cité Mermoz de Cocody. Quant au troisième, la fleur qu’il porte avec fière allure n’a pas germé, pour entretenir l’espoir. Depuis 30 ans, le Ziglibity n’est plus que l’ombre de lui-même, s’il n’a pas été carrément enterré à Tahiraguhé avec son chef. Demain donc ouvrira le temps du souvenir, du devoir de mémoire à l’endroit de cet artiste hors pair et d’un génie sans commune mesure. Il est à espérer que les tenants de la culture nationale se donnent les moyens de préserver ce qui reste de l’héritage Djédjé et de tous ces valeureux artistes qui ont tiré leur révérence.