ABIDJAN - Nelson Mandela a "osé", sans "honte", porter des chemises bariolées car il "vivait comme il voulait", raconte son tailleur Pathé Ouédraogo, dit Pathé’O, Burkinabè d’origine et Ivoirien d’adoption, depuis son atelier d’Abidjan.
Moins d’une semaine après la mort du héros de la lutte anti-apartheid, la trentaine de petites mains du tailleur s’affaire, dans un ronronnement de machines à coudre mâtiné de musique africaine, pour répondre à la demande de chemises "Mandela".
"Toutes les boutiques appellent depuis dimanche. Pourtant, il y avait un stock spécial pour cela. Mais il n’existe plus. On est en train d’en fabriquer", explique Pathé’O, le mètre à ruban enroulé autour du cou, depuis le quartier populaire et commerçant de Treichville, où il est basé.
Dans sa jolie boutique colorée, en face de l’atelier, des photos montrent le couturier aux côtés de Koffi Annan, Naomi Campbell, Desmond Tutu, qu’il a habillés ou habille encore... et Nelson Mandela.
L’homme qui portait ses chemises colorées à motifs si peu protocolaires. Celui qui a fait sa fierté. Et peut-être un peu sa fortune. Les produits Pathé’O, désormais, s’acquièrent dans une dizaine de capitales africaines. La chemise coûte 15 à 120.000 francs CFA (env 23 à 183 euros).
"Mandela, comme il est très médiatique... tout le monde a bénéficié de son nom, y compris nous", reconnaît le longiligne tailleur, qui indique être né en 1950 ou 1954, "selon l’âge du village" burkinabè où il est né. Il aurait donc 59 ou 63 ans.
Sa relation avec Madiba, dit-il, débute "en 1994 ou 1995", quand il offre deux chemises à Madiba, en plus des cinq que la chanteuse Miriam Makeba était venue acheter pour le président sud-africain.
"Quelques temps après j’ai reçu une lettre écrite de sa main dans laquelle il me disait: +l’Afrique de demain appartient aux créateurs de richesse+".
En 1998, Nelson Mandela lui consacre une demi-heure à Ouagadougou, lors d’un sommet de l’Union africaine. Le conturier ne parle pas anglais. Un traducteur facilite l’échange.
"Très souvent, quand vous êtes reçu par les chefs de l’Etat, il y a une espèce de barrière entre vous. Mais lui non, quand il est arrivé, il m’a pris comme ça (par le bras), puis il a tâté ma tête, et il m’a dit: +cette tête-là, il y a beaucoup de choses dedans+", mime-t-il avec emphase.
"Il aurait pu dire: +c’est qui ça, un couturier, un tailleur ? Quel chef d’Etat va oser toucher un tailleur ? (...) Mais il m’a écouté. Il m’a pris par la main alors qu’il ne m’avait jamais vu. On a marché dans le jardin".
Adoubé, Pathé’O deviendra ensuite pour beaucoup "le couturier de Mandela".
"La différence avec les autres, c’est qu’en portant mes chemises, il ne s’est jamais dit: +Est-ce que ça ma va ?+ Est-ce que je ne suis pas ridicule ? Est-ce que je ne dois pas ressembler à tel ou tel chef d’Etat ?", souligne-t-il.
"C’était quelqu’un qui savait, qui croyait et qui vivait ce qu’il voulait. Il fallait oser. Il n’a pas eu peur de mettre ça. Il n’a pas eu honte. (...) Il n’était pas comme les autres", poursuit Pathé’O.
Jeudi, le tailleur, en deuil, s’envolera pour Johannesburg afin de rendre un dernier hommage à son plus fameux modèle "pour dire (à sa famille) que je compatis". Et d’ajouter: "Il était comme un père pour moi".
jf/mf
Moins d’une semaine après la mort du héros de la lutte anti-apartheid, la trentaine de petites mains du tailleur s’affaire, dans un ronronnement de machines à coudre mâtiné de musique africaine, pour répondre à la demande de chemises "Mandela".
"Toutes les boutiques appellent depuis dimanche. Pourtant, il y avait un stock spécial pour cela. Mais il n’existe plus. On est en train d’en fabriquer", explique Pathé’O, le mètre à ruban enroulé autour du cou, depuis le quartier populaire et commerçant de Treichville, où il est basé.
Dans sa jolie boutique colorée, en face de l’atelier, des photos montrent le couturier aux côtés de Koffi Annan, Naomi Campbell, Desmond Tutu, qu’il a habillés ou habille encore... et Nelson Mandela.
L’homme qui portait ses chemises colorées à motifs si peu protocolaires. Celui qui a fait sa fierté. Et peut-être un peu sa fortune. Les produits Pathé’O, désormais, s’acquièrent dans une dizaine de capitales africaines. La chemise coûte 15 à 120.000 francs CFA (env 23 à 183 euros).
"Mandela, comme il est très médiatique... tout le monde a bénéficié de son nom, y compris nous", reconnaît le longiligne tailleur, qui indique être né en 1950 ou 1954, "selon l’âge du village" burkinabè où il est né. Il aurait donc 59 ou 63 ans.
Sa relation avec Madiba, dit-il, débute "en 1994 ou 1995", quand il offre deux chemises à Madiba, en plus des cinq que la chanteuse Miriam Makeba était venue acheter pour le président sud-africain.
"Quelques temps après j’ai reçu une lettre écrite de sa main dans laquelle il me disait: +l’Afrique de demain appartient aux créateurs de richesse+".
En 1998, Nelson Mandela lui consacre une demi-heure à Ouagadougou, lors d’un sommet de l’Union africaine. Le conturier ne parle pas anglais. Un traducteur facilite l’échange.
"Très souvent, quand vous êtes reçu par les chefs de l’Etat, il y a une espèce de barrière entre vous. Mais lui non, quand il est arrivé, il m’a pris comme ça (par le bras), puis il a tâté ma tête, et il m’a dit: +cette tête-là, il y a beaucoup de choses dedans+", mime-t-il avec emphase.
"Il aurait pu dire: +c’est qui ça, un couturier, un tailleur ? Quel chef d’Etat va oser toucher un tailleur ? (...) Mais il m’a écouté. Il m’a pris par la main alors qu’il ne m’avait jamais vu. On a marché dans le jardin".
Adoubé, Pathé’O deviendra ensuite pour beaucoup "le couturier de Mandela".
"La différence avec les autres, c’est qu’en portant mes chemises, il ne s’est jamais dit: +Est-ce que ça ma va ?+ Est-ce que je ne suis pas ridicule ? Est-ce que je ne dois pas ressembler à tel ou tel chef d’Etat ?", souligne-t-il.
"C’était quelqu’un qui savait, qui croyait et qui vivait ce qu’il voulait. Il fallait oser. Il n’a pas eu peur de mettre ça. Il n’a pas eu honte. (...) Il n’était pas comme les autres", poursuit Pathé’O.
Jeudi, le tailleur, en deuil, s’envolera pour Johannesburg afin de rendre un dernier hommage à son plus fameux modèle "pour dire (à sa famille) que je compatis". Et d’ajouter: "Il était comme un père pour moi".
jf/mf