Abidjan- La visite jeudi en Côte d’Ivoire du président français François Hollande vient consacrer la réussite économique d’un pays sorti d’une décennie de violences, mais dont le bilan en terme de droits de l’Homme peut largement s’améliorer.
Ancienne puissance coloniale, actrice centrale de la crise ivoirienne
(2002-2011), la France, qui maintient 450 soldats en Côte d’Ivoire, a
contribué à installer le président Alassane Ouattara au pouvoir en aidant à renverser son prédécesseur Laurent Gbagbo.
Paris ne semble pas chercher à peser dans le débat des droits de l’Homme, regrettent militants et analystes, pour qui les critiques de la France, premier partenaire commercial de la Côte d’Ivoire, restent trop timorées envers Abidjan.
Si M. Hollande devrait rencontrer Affi N’Guessan, le président du Front
populaire ivoirien (FPI, pro-Gbagbo) et quelques ONG, le business restera au coeur de son bref séjour.
Les travers dénoncés par la société civile ivoirienne sont pourtant importants, à commencer par l’état de la justice, sur laquelle repose la
réconciliation nationale mais qui peine à convaincre de sa neutralité.
Pour l’instant, les poursuites judiciaires touchent presque exclusivement des partisans de l’ex-président Gbagbo, dont le refus de reconnaître la victoire d’Alassane Ouattara à l’élection de 2010 provoqua cinq mois de violences. Il est accusé de crimes contre l’humanité par la Cour pénale internationale (CPI).
D’après une commission d’enquête ivoirienne, plus de 700 morts sur les 3.248 ayant péri durant la crise postélectorale sont pourtant le fait de forces pro-Ouattara, dont les ex-chefs de guerre occupent désormais de hautes charges sécuritaires.
Abidjan réfute toute accusation d’impunité.
"Il y a encore beaucoup à faire pour qu’on puisse réellement parler d’une justice équitable en Côte d’Ivoire", observait fin mai Eugène Nindorera, le chef de la division droits de l’Homme de l’Onuci, la mission locale de l’ONU, sur Radio France internationale.
- Accusations de torture -
Fin juin, des photos de corps suppliciés ont fait la une de journaux
ivoiriens. D’après eux, les victimes étaient des détenus ayant subi des actes de torture (dont des brûlures à l’acide) entre août 2013 et mai 2014.
Leur publication "a un lien évident avec la visite de Hollande", déclare
Paul Angaman, le président de ACAT-Côte d’Ivoire, une ONG luttant contre la torture. "Le FPI (pro-Gbagbo) veut faire passer ce message car il a beaucoup de militants en prison."
Pascal Affi N’Guessan, le président du FPI, dénonce ainsi "un millier" de "camarades" incarcérés vivant "l’enfer", "dont certains sont torturés", et les "arrestations pour des raisons politiques" de partisans, parfois "détenus dans des lieux tenus secrets".
Le ministre ivoirien de la Justice Gnénéma Coulibaly nie. "Il n’y a pas de torture dans les maisons d’arrêt" et les photos étaient fausses, affirmait-il début juillet.
"Dans les prisons officielles, ils ne pratiquent plus la torture",
acquiesce Paul Angaman. "Mais dans les commissariats, à la DST (Direction de la surveillance du territoire, services de renseignement) ou dans les lieux de détention secrets, elle est utilisée", remarque-t-il.
Michel Gbagbo, fils de Laurent, passa quelques jours à la DST en février, après avoir été arrêté à l’aéroport d’Abidjan.
Accusé notamment d’"attentat ou complot contre l’autorité de l’Etat", le
fils Gbagbo, capturé avec son père le 11 avril 2011, avait été remis en liberté provisoire en juillet 2013 au nom de l’"apaisement".
Entretemps, ce citoyen franco-ivoirien avait porté plainte en France, via son avocat, contre l’actuel président de l’Assemblée nationale Guillaume Soro et les "ComZon" (ex-chefs rebelles) pour "traitement dégradant et inhumain".
Les affaires Guy-André Kieffer, un journaliste franco-canadien disparu il y a 10 ans en Côte d’Ivoire, et Yves Lambelin, un cadre français enlevé le 4 avril 2011 et dont le cadavre avait ensuite été retrouvé à Abidjan, devraient également être abordées lors de la visite de M. Hollande.
Dans ces trois cas, "il faut que la justice ivoirienne soit en mesure de
collaborer avec la justice française", observe une source proche de l’Elysée.
"Il n’y a pas de mauvaise volonté de la part des Ivoiriens mais il y a cette espèce de lenteur qui fait que ces affaires traînent un peu en
longueur", poursuit-on. "Evidemment, le message sera passé. Il faut collaborer, et vite."
jf/ck-eak/jlb/sba/mba
Ancienne puissance coloniale, actrice centrale de la crise ivoirienne
(2002-2011), la France, qui maintient 450 soldats en Côte d’Ivoire, a
contribué à installer le président Alassane Ouattara au pouvoir en aidant à renverser son prédécesseur Laurent Gbagbo.
Paris ne semble pas chercher à peser dans le débat des droits de l’Homme, regrettent militants et analystes, pour qui les critiques de la France, premier partenaire commercial de la Côte d’Ivoire, restent trop timorées envers Abidjan.
Si M. Hollande devrait rencontrer Affi N’Guessan, le président du Front
populaire ivoirien (FPI, pro-Gbagbo) et quelques ONG, le business restera au coeur de son bref séjour.
Les travers dénoncés par la société civile ivoirienne sont pourtant importants, à commencer par l’état de la justice, sur laquelle repose la
réconciliation nationale mais qui peine à convaincre de sa neutralité.
Pour l’instant, les poursuites judiciaires touchent presque exclusivement des partisans de l’ex-président Gbagbo, dont le refus de reconnaître la victoire d’Alassane Ouattara à l’élection de 2010 provoqua cinq mois de violences. Il est accusé de crimes contre l’humanité par la Cour pénale internationale (CPI).
D’après une commission d’enquête ivoirienne, plus de 700 morts sur les 3.248 ayant péri durant la crise postélectorale sont pourtant le fait de forces pro-Ouattara, dont les ex-chefs de guerre occupent désormais de hautes charges sécuritaires.
Abidjan réfute toute accusation d’impunité.
"Il y a encore beaucoup à faire pour qu’on puisse réellement parler d’une justice équitable en Côte d’Ivoire", observait fin mai Eugène Nindorera, le chef de la division droits de l’Homme de l’Onuci, la mission locale de l’ONU, sur Radio France internationale.
- Accusations de torture -
Fin juin, des photos de corps suppliciés ont fait la une de journaux
ivoiriens. D’après eux, les victimes étaient des détenus ayant subi des actes de torture (dont des brûlures à l’acide) entre août 2013 et mai 2014.
Leur publication "a un lien évident avec la visite de Hollande", déclare
Paul Angaman, le président de ACAT-Côte d’Ivoire, une ONG luttant contre la torture. "Le FPI (pro-Gbagbo) veut faire passer ce message car il a beaucoup de militants en prison."
Pascal Affi N’Guessan, le président du FPI, dénonce ainsi "un millier" de "camarades" incarcérés vivant "l’enfer", "dont certains sont torturés", et les "arrestations pour des raisons politiques" de partisans, parfois "détenus dans des lieux tenus secrets".
Le ministre ivoirien de la Justice Gnénéma Coulibaly nie. "Il n’y a pas de torture dans les maisons d’arrêt" et les photos étaient fausses, affirmait-il début juillet.
"Dans les prisons officielles, ils ne pratiquent plus la torture",
acquiesce Paul Angaman. "Mais dans les commissariats, à la DST (Direction de la surveillance du territoire, services de renseignement) ou dans les lieux de détention secrets, elle est utilisée", remarque-t-il.
Michel Gbagbo, fils de Laurent, passa quelques jours à la DST en février, après avoir été arrêté à l’aéroport d’Abidjan.
Accusé notamment d’"attentat ou complot contre l’autorité de l’Etat", le
fils Gbagbo, capturé avec son père le 11 avril 2011, avait été remis en liberté provisoire en juillet 2013 au nom de l’"apaisement".
Entretemps, ce citoyen franco-ivoirien avait porté plainte en France, via son avocat, contre l’actuel président de l’Assemblée nationale Guillaume Soro et les "ComZon" (ex-chefs rebelles) pour "traitement dégradant et inhumain".
Les affaires Guy-André Kieffer, un journaliste franco-canadien disparu il y a 10 ans en Côte d’Ivoire, et Yves Lambelin, un cadre français enlevé le 4 avril 2011 et dont le cadavre avait ensuite été retrouvé à Abidjan, devraient également être abordées lors de la visite de M. Hollande.
Dans ces trois cas, "il faut que la justice ivoirienne soit en mesure de
collaborer avec la justice française", observe une source proche de l’Elysée.
"Il n’y a pas de mauvaise volonté de la part des Ivoiriens mais il y a cette espèce de lenteur qui fait que ces affaires traînent un peu en
longueur", poursuit-on. "Evidemment, le message sera passé. Il faut collaborer, et vite."
jf/ck-eak/jlb/sba/mba