La Côte d’Ivoire retrouvée
Ma lettre à tous les Ivoiriens
Mes chers compatriotes,
Peuple de Côte d’Ivoire,
Nous célébrons, ce 7 août 2015, le 55e anniversaire de notre accession à l’indépendance et à la souveraineté nationale, conquises au prix de lourds sacrifices consentis par la génération des pères fondateurs. À Bouaflé, Dimbokro, Séguéla, Abidjan et Grand-Bassam, le souvenir des brimades et des privations est encore vif. À Korhogo et Abengourou, des femmes et des hommes de condition modeste ont donné de leur nécessaire pour que vive la Côte d’Ivoire libre. Un grand patriote natif de Dayépa, dont Gagnoa est le chef-lieu, le sénateur RDA Victor Biaka Boda a payé de sa vie son engagement pour l’émancipation. Yamoussoukro, au cœur de notre pays, nous a donné Félix Houphouët-Boigny. Au Nord, au Sud, à l’Est, à l’Ouest et au Centre, nous avons su nous rassembler pour bâtir l’État de Côte d’Ivoire et mettre en acte notre rêve de former une nation fraternelle, hospitalière, égalitaire.
Peuple de Côte d’Ivoire, bâtir une nation moderne, accueillante et pacifique demande des sacrifices. Nous pouvons rendre hommage aux Atchans pour avoir payé le prix de la transformation d’Abidjan en pôle économique. On oublie parfois que l’ouverture du canal de Vridi a contraint des populations qui vivaient jusque-là, pour l’essentiel, des revenus de la pêche et de l’agriculture à se recycler, en raison de la salaison de la lagune par l’eau de mer.
Propriétaires fonciers, les Ébriés ont accepté de perdre leurs terrains, même si cela donne lieu à de nombreux contentieux, pour que la Côte d’Ivoire en gagne. Partout en Côte d’Ivoire, nous devons suivre leur exemple bien que cela ne soit pas facile.
Nous pouvons également saluer entre tous l’attitude des Baoulés qui ont pris leur part de fardeau au nom de la nation. L’édification du barrage de Kossou dans la Région des Lacs, notre poumon énergétique, a demandé là encore d’importants sacrifices quand on sait qu’il a recouvert des sépultures dans une région où honorer les ancêtres a un sens.
Mes chers compatriotes, le développement impose contraintes et sacrifices.
Peuple de Côte d’Ivoire notre terre porte, nourrit, héberge. Nous devons donc sortir d’un rapport à la terre uniquement fondé sur son occupation ou son exploitation. Candidat à la présidence de la République, je m’engage, une fois élu, à développer une politique de sensibilisation, un véritable catéchisme de l’intégration des territoires de Côte d’Ivoire en vue de la concorde et de l’unité nationale retrouvée.
La réconciliation aurait dû faire l’objet de toute l’attention du président sortant. Jusqu’à ce jour, il n’en est rien. Au contraire tous les jours et par tous ses actes et déclarations, il ajoute de la division à la division.
Peuple de Côte d’Ivoire, notre pays ne peut pas continuer à être gouverné le couteau entre les dents. Il nous faut travailler à le rendre de nouveau gouvernable en changeant radicalement de cap. L’élection présidentielle qui vient va nous fournir l’occasion de ce changement, l’occasion de tourner la page, l’occasion de refuser la violence et les menaces qui entretiennent un climat d’angoisse et de terreur, l’occasion d’une transition démocratique. Le passage d’un état à un autre s’appelle une transition. Il n’y a pas beaucoup d’autres façons de le dire sans faux tabous.
La seule voie qui s’offre à nous pour un changement démocratique véritable est la voie des urnes. L’élection ne se fera ni par acclamation ni à main levée. Nous devons nous mobiliser en faisant massivement, dans le secret de l’urne, le choix d’un changement en faveur de la culture de paix que les pères fondateurs nous ont léguée.
La condition d’un choix véritable est l’égalité entre les candidats. L’actuelle Commission électorale n’a malheureusement d’indépendance que le nom. Sa composition ne reflète pas l’importante diversité du paysage politique et n’est, dans sa forme actuelle, ni équilibrée ni équitable. Elle ne respecte pas même le principe pourtant élémentaire de la loi censée la fonder, qui dispose que le mandat de son président n’est pas reconductible. Si on ajoute à cela la participation du président de cette Commission ainsi que celle du président du Conseil constitutionnel, l’autre arbitre de la compétition électorale, à la campagne permanente du président sortant, le constat d’inégalité est indéniable. Or il faudra au prochain président de la République une légitimité populaire sans soupçon pour réformer l’État et consolider la nation sans continuer à entretenir la menace des périls de la déstabilisation et de l’ingouvernabilité de notre pays.
Peuple de Côte d’Ivoire, l’enjeu de l’élection est crucial. Il s’agit pour nous de retrouver la Côte d’Ivoire, retrouver son modèle social républicain, retrouver les fondamentaux de son économie, retrouver sa cohésion qui repose sur le respect et la protection de nos textes en tête desquels l’intégrité de notre Constitution. Élu président de la République, je m’engage à respecter et à faire respecter nos lois et règlements, ce qui ne devrait pas être une option pour qui ambitionne d’assumer cette charge. La Côte d’Ivoire doit entamer une transition vers le retour à l’État de droit, le retour à la culture du dialogue à toute épreuve et à la gouvernance de compromis si chères au président Houphouët-Boigny.
Mes chers compatriotes, les temps sont difficiles. C’est la raison qui m’a conduit à solliciter vos suffrages, par conviction et par devoir. La conviction que si rien n’est fait pour mettre un frein à l’émiettement des communautés, des organisations politiques, des familles, nous risquons de voir s’évanouir notre rêve de Côte d’Ivoire. Le devoir de redresser notre pays, de nous pencher sur le sort des plus fragiles par fidélité aux idéaux du PDCI-RDA qui fut un parti de progrès, de solidarité sociale. Le devoir encore de protéger la Côte d’Ivoire, dans un environnement international porteur de risques en conduisant une politique plus sage, plus sûre, plus modeste.
Mes chers compatriotes, je sais que l’humeur dominante est à l’inquiétude et que notre sentiment national est parfois malmené. Mal-vie, insécurité, sous-emploi, affaiblissement de notre système d’éducation et de formation, sous-équipement du secteur de santé publique, partialité de notre appareil judiciaire, corruption généralisée… L’inventaire des facteurs d’inquiétude est hélas bien long, qui pousse certains de nos concitoyens au désespoir.
Mes chers compatriotes, il n’y a pas de fatalité. Les seules batailles perdues d’avance sont celles qu’on refuse de livrer. Je suis candidat sur un projet qui vise à relever les défis économiques, sociaux et sécuritaires auxquels la Côte d’Ivoire est confrontée. Un projet de nouvelle espérance sociale et démocratique. Élu président de la République, j’emploierai ma solide expérience internationale au service de notre pays. J’ai d’ores et déjà indiqué que je mènerais une politique de rassemblement, d’union, de réconciliation pour inverser la tendance actuelle à la division.
Fier et vaillant peuple ivoirien, je veux redonner tout son sens et toutes ses couleurs à notre drapeau national. Réconcilier, dans l’union et la paix retrouvées, l’orange de notre savane avec le vert de nos forêts. J’invite donc les Ivoiriens, tout au long de cette campagne, à se réapproprier notre drapeau en signe d’espérance et de fraternité retrouvées.
Je me suis fixé, au plan économique, l’objectif réaliste de ramener la Côte d’Ivoire au niveau d’un pays à revenu intermédiaire, un pays qui compte pour sa contribution à la bonne marche des affaires du continent et du monde. Niveau qu’elle avait atteint dès les années 1980 avant d’enregistrer le catastrophique recul des quinze dernières années.
Nous ne pouvons pas plus longtemps vendre aux Ivoiriens des illusions que seuls les plus naïfs continuent à prendre au sérieux. Le président sortant dit que notre pays est désormais plus riche, en se fondant sur des chiffres qui ne résistent pas toujours à la réalité et dont la fiabilité est souvent sujette à caution. S’il est vrai que la croissance économique a connu une embellie lors des cinq dernières années, le maigre arbre de la croissance ne suffit pas à masquer l’immense forêt des contre-performances en matière de gouvernance économique. La vérité est que les indicateurs sociaux restent très faibles. Le niveau de pauvreté n’a pas évolué depuis 2010 dans le sens d’une amélioration. Il suffirait de quelques chiffres pour dissiper le doute. Si l’on se fie à la dernière publication de l’indice du développement humain du Programme des Nations Unis pour le Développement (PNUD), notre pays occupe le 171e rang sur 187. Si l’on considère l’indice de perception de la corruption, la Côte d’Ivoire se classe au 115e rang mondial et à la 22e place sur 46 pays d’Afrique subsaharienne. L’indice Mo Ibrahim sur la gouvernance en Afrique nous place en 40e position sur 52 États et en queue de peloton de la zone UEMOA dans laquelle nous récoltons le « bonnet d’âne » de 7e sur 7. Les Ivoiriens vivent la réalité de l’augmentation du coût de l’électricité, du déguerpissement sans relogement, de l’étranglement de l’économie populaire, seul moyen de subsistance pour de nombreux foyers. Ayant dans ma jeunesse aidé ma mère à vendre du pain sur les marchés et travaillé dans les plantations de café avec mes parents et grands-parents, je suis sensible à ces problèmes. Je m’engage en conséquence à travailler plus concrètement à rendre les Ivoiriens moins pauvres tout en veillant à accroître la prospérité de notre pays.
Mes chers compatriotes, la réalité, la dure réalité, impose de reconnaître que la ménagère voit son panier se vider avec le renchérissement accéléré du coût de la vie et l’augmentation régulière du prix des denrées de première nécessité. L’appauvrissement de nos concitoyens n’est pas une vue de l’esprit. L’indice de pauvreté était à 51 % à l’investiture du président sortant. Il n’a pas atteint plus de 2 % de réduction, ce qui est notoirement insignifiant. La moitié de nos compatriotes vit toujours sous le seuil de pauvreté. Le lait, le sucre, l’huile et le riz sont en constante augmentation sous cette mandature, avec des prix qui passent du simple au double. Nous comptons entre 700 000 et 1 million de déguerpis sans possibilité de relocalisation, ce qui augmente les poches de pauvreté singulièrement à Abidjan et dans ses alentours et peut créer de l’insécurité humaine. En zone rurale, les plantations de notre ancienne boucle du cacao sont remplacées par l’hévéa dont le cours avait atteint 1000 FCFA le kilo et oscille aujourd’hui entre 200 et 300 FCFA le kilo. Ces cultures de substitution, sévèrement taxées, accentuent l’appauvrissement à la base. Or nous pouvons raisonnablement travailler à une stabilisation des prix qui permette à tous les paysans de bénéficier d’une juste rétribution. Comment, dans ces conditions, construire des voies à péage en pleine agglomération sans accentuer de fait l’exclusion spatiale des plus fragiles ?
Peuple de Côte d’Ivoire, l’économie, notre économie, est une chose trop sérieuse pour être abandonnée aux théoriciens. L’économie, c’est affaire de bon sens, de bonne gestion et de choix d’opportunité. Mes préoccupations économiques sont plus proches du quotidien, ma vision plus sociale et plus solidaire. Certainement plus protectrice aussi.
Mes chers compatriotes, ma candidature est une candidature pour l’avenir. Une candidature tournée vers notre jeunesse dont la situation est préoccupante. Qui ne connaît la vitalité de notre démographie ? La jeunesse ivoirienne constitue un potentiel de richesse, à condition d’assurer sa formation et son insertion. Il nous faut transformer la société pour qu’aux périls des jeunes de Côte d’Ivoire ne succède pas un péril jeune en Côte d’Ivoire. Il ne suffit pas de démultiplier les acteurs d’une nouvelle « filière jeune » à la veille des élections pour donner l’impression que ce problème nous préoccupe. Des remèdes viables existent pour guérir en profondeur nos maux et enfin sortir de l’impasse. Il y a des raisons d’espérer et c’est bien ma première ambition que d’en convaincre les Ivoiriens. La situation de l’emploi des jeunes est certes critique. 5 millions de nos jeunes sont désœuvrés et l’arsenal administratif et juridique ne rassure pas ceux d’entre eux qui voudraient entreprendre. Il nous faudra une approche plus imaginative pour favoriser l’auto-emploi, le soutien aux micro-projets par un code de l’entreprenariat jeune plus incitatif. Mes chers compatriotes, ces mesures entrent dans le projet de simplification du rapport entre État et administrés que je préconise. Un projet qui met l’accent sur l’obligation de proximité et d’État modeste.
Il nous faudra également repenser la formation pour qu’elle soit en adéquation avec notre environnement social, notre marché de l’emploi. La formation professionnelle doit retrouver sa juste place. Il ne sert à rien de faire des promesses qu’on sait être incapable de tenir, pour répondre aux attentes des bailleurs de fonds. Le président sortant avait, dans le domaine de l’éducation, annoncé la création de quinze mille classes, pour n’en réaliser effectivement qu’entre trois et cinq mille. Il nous avait assuré pouvoir construire cinq universités en cinq ans, soit une l’an. Cette promesse comme beaucoup d’autres est restée lettre morte, à l’état de vœu pieu. Respecter ses promesses, c’est faire preuve de responsabilité. Il y va du crédit de la parole publique et de l’image de notre pays. Nos jeunes ne demandent ni à être indemnisés ni à être rétribués dans une sorte de perpétuel assistanat, mais plutôt à être valorisés par leur emploi salarié ou la rémunération du produit de leur activité. Cela s’appelle gagner sa vie. Il nous faudra de ce fait favoriser une société de l’insertion pour sortir du modèle de la société d’indemnisation qui se dessine sous nos yeux et tend à fragiliser notre économie.
Mes chers compatriotes, l’autre axe majeur de ma politique porte sur la sécurité et la protection civile. J’aurai l’occasion d’en préciser les contours au moment de la campagne. La sécurité, c’est d’abord celle de notre pays, à l’intérieur de nos frontières, pour lutter contre l’incivilité et toutes formes de criminalité organisée. La sécurité, c’est également celle du sol ivoirien et de ses abords terrestres, maritimes, aériens. A cet égard, la menace terroriste désormais plus proche de nos frontières et la nécessaire surveillance des circuits de narcotrafic qui l’alimente rappellent l’urgence à prendre des mesures, d’autant que nous sommes plus directement visés. La sécurité, c’est ensuite l’obligation de l’État d’assumer son devoir régalien de protection du territoire en ne laissant pas à des groupes de délinquants l’option de quitter volontairement, quand bon leur semble, des sites pourtant classés au titre de notre patrimoine forestier. C’est malheureusement le cas depuis plusieurs années à l’Ouest de notre pays, au Mont Péko.
La sécurité, c’est encore et peut-être surtout celle des Ivoiriens au quotidien, en commençant par le domaine de la santé. Le sous-équipement des hôpitaux et centres de santé rend vaine la politique mimétique d’assurance maladie universelle. Avec deux scanners pour 23 millions d’habitants, il est patent qu’il faut aborder la question autrement. La sécurité civile commande de faire face aux situations dramatiques dont nos populations font trop souvent les frais. Je pense notamment aux conséquences désastreuses de la saison des pluies, mais plus largement à celles des catastrophes naturelles ou accidentelles qui doivent trouver réponses.
La sécurité, c’est enfin celle du monde des affaires, du secteur privé et de sa relation au secteur public. Élu président, j’ai l’intention d’enrailler la corruption et d’endiguer la politique de « rattrapage » encouragée par le président sortant. Il nous faut favoriser un climat de sérénité et d’assainissement propice au développement de l’entreprise et à l’investissement. Corruption, arbitraire, harcèlement fiscal doivent cesser de polluer notre économie.
Mes chers compatriotes, quels que soient les efforts et les moyens déployés pour masquer la réalité, le président sortant ne pourra pas durablement cacher le soleil avec sa main. Je suis candidat pour que la Côte d’Ivoire que j’ai servie dans ses représentations diplomatiques, au gouvernement, à l’Union Africaine ou aux Nations-Unies, renoue avec sa vocation universelle, retrouve son influence et redore son prestige. Je suis candidat pour que la Côte d’Ivoire et les Ivoiriens se retrouvent.
Bonne fête de l’indépendance et que vive la Côte d’Ivoire !
Amara Essy,
Candidat à l’élection présidentielle d’octobre 2015
Ma lettre à tous les Ivoiriens
Mes chers compatriotes,
Peuple de Côte d’Ivoire,
Nous célébrons, ce 7 août 2015, le 55e anniversaire de notre accession à l’indépendance et à la souveraineté nationale, conquises au prix de lourds sacrifices consentis par la génération des pères fondateurs. À Bouaflé, Dimbokro, Séguéla, Abidjan et Grand-Bassam, le souvenir des brimades et des privations est encore vif. À Korhogo et Abengourou, des femmes et des hommes de condition modeste ont donné de leur nécessaire pour que vive la Côte d’Ivoire libre. Un grand patriote natif de Dayépa, dont Gagnoa est le chef-lieu, le sénateur RDA Victor Biaka Boda a payé de sa vie son engagement pour l’émancipation. Yamoussoukro, au cœur de notre pays, nous a donné Félix Houphouët-Boigny. Au Nord, au Sud, à l’Est, à l’Ouest et au Centre, nous avons su nous rassembler pour bâtir l’État de Côte d’Ivoire et mettre en acte notre rêve de former une nation fraternelle, hospitalière, égalitaire.
Peuple de Côte d’Ivoire, bâtir une nation moderne, accueillante et pacifique demande des sacrifices. Nous pouvons rendre hommage aux Atchans pour avoir payé le prix de la transformation d’Abidjan en pôle économique. On oublie parfois que l’ouverture du canal de Vridi a contraint des populations qui vivaient jusque-là, pour l’essentiel, des revenus de la pêche et de l’agriculture à se recycler, en raison de la salaison de la lagune par l’eau de mer.
Propriétaires fonciers, les Ébriés ont accepté de perdre leurs terrains, même si cela donne lieu à de nombreux contentieux, pour que la Côte d’Ivoire en gagne. Partout en Côte d’Ivoire, nous devons suivre leur exemple bien que cela ne soit pas facile.
Nous pouvons également saluer entre tous l’attitude des Baoulés qui ont pris leur part de fardeau au nom de la nation. L’édification du barrage de Kossou dans la Région des Lacs, notre poumon énergétique, a demandé là encore d’importants sacrifices quand on sait qu’il a recouvert des sépultures dans une région où honorer les ancêtres a un sens.
Mes chers compatriotes, le développement impose contraintes et sacrifices.
Peuple de Côte d’Ivoire notre terre porte, nourrit, héberge. Nous devons donc sortir d’un rapport à la terre uniquement fondé sur son occupation ou son exploitation. Candidat à la présidence de la République, je m’engage, une fois élu, à développer une politique de sensibilisation, un véritable catéchisme de l’intégration des territoires de Côte d’Ivoire en vue de la concorde et de l’unité nationale retrouvée.
La réconciliation aurait dû faire l’objet de toute l’attention du président sortant. Jusqu’à ce jour, il n’en est rien. Au contraire tous les jours et par tous ses actes et déclarations, il ajoute de la division à la division.
Peuple de Côte d’Ivoire, notre pays ne peut pas continuer à être gouverné le couteau entre les dents. Il nous faut travailler à le rendre de nouveau gouvernable en changeant radicalement de cap. L’élection présidentielle qui vient va nous fournir l’occasion de ce changement, l’occasion de tourner la page, l’occasion de refuser la violence et les menaces qui entretiennent un climat d’angoisse et de terreur, l’occasion d’une transition démocratique. Le passage d’un état à un autre s’appelle une transition. Il n’y a pas beaucoup d’autres façons de le dire sans faux tabous.
La seule voie qui s’offre à nous pour un changement démocratique véritable est la voie des urnes. L’élection ne se fera ni par acclamation ni à main levée. Nous devons nous mobiliser en faisant massivement, dans le secret de l’urne, le choix d’un changement en faveur de la culture de paix que les pères fondateurs nous ont léguée.
La condition d’un choix véritable est l’égalité entre les candidats. L’actuelle Commission électorale n’a malheureusement d’indépendance que le nom. Sa composition ne reflète pas l’importante diversité du paysage politique et n’est, dans sa forme actuelle, ni équilibrée ni équitable. Elle ne respecte pas même le principe pourtant élémentaire de la loi censée la fonder, qui dispose que le mandat de son président n’est pas reconductible. Si on ajoute à cela la participation du président de cette Commission ainsi que celle du président du Conseil constitutionnel, l’autre arbitre de la compétition électorale, à la campagne permanente du président sortant, le constat d’inégalité est indéniable. Or il faudra au prochain président de la République une légitimité populaire sans soupçon pour réformer l’État et consolider la nation sans continuer à entretenir la menace des périls de la déstabilisation et de l’ingouvernabilité de notre pays.
Peuple de Côte d’Ivoire, l’enjeu de l’élection est crucial. Il s’agit pour nous de retrouver la Côte d’Ivoire, retrouver son modèle social républicain, retrouver les fondamentaux de son économie, retrouver sa cohésion qui repose sur le respect et la protection de nos textes en tête desquels l’intégrité de notre Constitution. Élu président de la République, je m’engage à respecter et à faire respecter nos lois et règlements, ce qui ne devrait pas être une option pour qui ambitionne d’assumer cette charge. La Côte d’Ivoire doit entamer une transition vers le retour à l’État de droit, le retour à la culture du dialogue à toute épreuve et à la gouvernance de compromis si chères au président Houphouët-Boigny.
Mes chers compatriotes, les temps sont difficiles. C’est la raison qui m’a conduit à solliciter vos suffrages, par conviction et par devoir. La conviction que si rien n’est fait pour mettre un frein à l’émiettement des communautés, des organisations politiques, des familles, nous risquons de voir s’évanouir notre rêve de Côte d’Ivoire. Le devoir de redresser notre pays, de nous pencher sur le sort des plus fragiles par fidélité aux idéaux du PDCI-RDA qui fut un parti de progrès, de solidarité sociale. Le devoir encore de protéger la Côte d’Ivoire, dans un environnement international porteur de risques en conduisant une politique plus sage, plus sûre, plus modeste.
Mes chers compatriotes, je sais que l’humeur dominante est à l’inquiétude et que notre sentiment national est parfois malmené. Mal-vie, insécurité, sous-emploi, affaiblissement de notre système d’éducation et de formation, sous-équipement du secteur de santé publique, partialité de notre appareil judiciaire, corruption généralisée… L’inventaire des facteurs d’inquiétude est hélas bien long, qui pousse certains de nos concitoyens au désespoir.
Mes chers compatriotes, il n’y a pas de fatalité. Les seules batailles perdues d’avance sont celles qu’on refuse de livrer. Je suis candidat sur un projet qui vise à relever les défis économiques, sociaux et sécuritaires auxquels la Côte d’Ivoire est confrontée. Un projet de nouvelle espérance sociale et démocratique. Élu président de la République, j’emploierai ma solide expérience internationale au service de notre pays. J’ai d’ores et déjà indiqué que je mènerais une politique de rassemblement, d’union, de réconciliation pour inverser la tendance actuelle à la division.
Fier et vaillant peuple ivoirien, je veux redonner tout son sens et toutes ses couleurs à notre drapeau national. Réconcilier, dans l’union et la paix retrouvées, l’orange de notre savane avec le vert de nos forêts. J’invite donc les Ivoiriens, tout au long de cette campagne, à se réapproprier notre drapeau en signe d’espérance et de fraternité retrouvées.
Je me suis fixé, au plan économique, l’objectif réaliste de ramener la Côte d’Ivoire au niveau d’un pays à revenu intermédiaire, un pays qui compte pour sa contribution à la bonne marche des affaires du continent et du monde. Niveau qu’elle avait atteint dès les années 1980 avant d’enregistrer le catastrophique recul des quinze dernières années.
Nous ne pouvons pas plus longtemps vendre aux Ivoiriens des illusions que seuls les plus naïfs continuent à prendre au sérieux. Le président sortant dit que notre pays est désormais plus riche, en se fondant sur des chiffres qui ne résistent pas toujours à la réalité et dont la fiabilité est souvent sujette à caution. S’il est vrai que la croissance économique a connu une embellie lors des cinq dernières années, le maigre arbre de la croissance ne suffit pas à masquer l’immense forêt des contre-performances en matière de gouvernance économique. La vérité est que les indicateurs sociaux restent très faibles. Le niveau de pauvreté n’a pas évolué depuis 2010 dans le sens d’une amélioration. Il suffirait de quelques chiffres pour dissiper le doute. Si l’on se fie à la dernière publication de l’indice du développement humain du Programme des Nations Unis pour le Développement (PNUD), notre pays occupe le 171e rang sur 187. Si l’on considère l’indice de perception de la corruption, la Côte d’Ivoire se classe au 115e rang mondial et à la 22e place sur 46 pays d’Afrique subsaharienne. L’indice Mo Ibrahim sur la gouvernance en Afrique nous place en 40e position sur 52 États et en queue de peloton de la zone UEMOA dans laquelle nous récoltons le « bonnet d’âne » de 7e sur 7. Les Ivoiriens vivent la réalité de l’augmentation du coût de l’électricité, du déguerpissement sans relogement, de l’étranglement de l’économie populaire, seul moyen de subsistance pour de nombreux foyers. Ayant dans ma jeunesse aidé ma mère à vendre du pain sur les marchés et travaillé dans les plantations de café avec mes parents et grands-parents, je suis sensible à ces problèmes. Je m’engage en conséquence à travailler plus concrètement à rendre les Ivoiriens moins pauvres tout en veillant à accroître la prospérité de notre pays.
Mes chers compatriotes, la réalité, la dure réalité, impose de reconnaître que la ménagère voit son panier se vider avec le renchérissement accéléré du coût de la vie et l’augmentation régulière du prix des denrées de première nécessité. L’appauvrissement de nos concitoyens n’est pas une vue de l’esprit. L’indice de pauvreté était à 51 % à l’investiture du président sortant. Il n’a pas atteint plus de 2 % de réduction, ce qui est notoirement insignifiant. La moitié de nos compatriotes vit toujours sous le seuil de pauvreté. Le lait, le sucre, l’huile et le riz sont en constante augmentation sous cette mandature, avec des prix qui passent du simple au double. Nous comptons entre 700 000 et 1 million de déguerpis sans possibilité de relocalisation, ce qui augmente les poches de pauvreté singulièrement à Abidjan et dans ses alentours et peut créer de l’insécurité humaine. En zone rurale, les plantations de notre ancienne boucle du cacao sont remplacées par l’hévéa dont le cours avait atteint 1000 FCFA le kilo et oscille aujourd’hui entre 200 et 300 FCFA le kilo. Ces cultures de substitution, sévèrement taxées, accentuent l’appauvrissement à la base. Or nous pouvons raisonnablement travailler à une stabilisation des prix qui permette à tous les paysans de bénéficier d’une juste rétribution. Comment, dans ces conditions, construire des voies à péage en pleine agglomération sans accentuer de fait l’exclusion spatiale des plus fragiles ?
Peuple de Côte d’Ivoire, l’économie, notre économie, est une chose trop sérieuse pour être abandonnée aux théoriciens. L’économie, c’est affaire de bon sens, de bonne gestion et de choix d’opportunité. Mes préoccupations économiques sont plus proches du quotidien, ma vision plus sociale et plus solidaire. Certainement plus protectrice aussi.
Mes chers compatriotes, ma candidature est une candidature pour l’avenir. Une candidature tournée vers notre jeunesse dont la situation est préoccupante. Qui ne connaît la vitalité de notre démographie ? La jeunesse ivoirienne constitue un potentiel de richesse, à condition d’assurer sa formation et son insertion. Il nous faut transformer la société pour qu’aux périls des jeunes de Côte d’Ivoire ne succède pas un péril jeune en Côte d’Ivoire. Il ne suffit pas de démultiplier les acteurs d’une nouvelle « filière jeune » à la veille des élections pour donner l’impression que ce problème nous préoccupe. Des remèdes viables existent pour guérir en profondeur nos maux et enfin sortir de l’impasse. Il y a des raisons d’espérer et c’est bien ma première ambition que d’en convaincre les Ivoiriens. La situation de l’emploi des jeunes est certes critique. 5 millions de nos jeunes sont désœuvrés et l’arsenal administratif et juridique ne rassure pas ceux d’entre eux qui voudraient entreprendre. Il nous faudra une approche plus imaginative pour favoriser l’auto-emploi, le soutien aux micro-projets par un code de l’entreprenariat jeune plus incitatif. Mes chers compatriotes, ces mesures entrent dans le projet de simplification du rapport entre État et administrés que je préconise. Un projet qui met l’accent sur l’obligation de proximité et d’État modeste.
Il nous faudra également repenser la formation pour qu’elle soit en adéquation avec notre environnement social, notre marché de l’emploi. La formation professionnelle doit retrouver sa juste place. Il ne sert à rien de faire des promesses qu’on sait être incapable de tenir, pour répondre aux attentes des bailleurs de fonds. Le président sortant avait, dans le domaine de l’éducation, annoncé la création de quinze mille classes, pour n’en réaliser effectivement qu’entre trois et cinq mille. Il nous avait assuré pouvoir construire cinq universités en cinq ans, soit une l’an. Cette promesse comme beaucoup d’autres est restée lettre morte, à l’état de vœu pieu. Respecter ses promesses, c’est faire preuve de responsabilité. Il y va du crédit de la parole publique et de l’image de notre pays. Nos jeunes ne demandent ni à être indemnisés ni à être rétribués dans une sorte de perpétuel assistanat, mais plutôt à être valorisés par leur emploi salarié ou la rémunération du produit de leur activité. Cela s’appelle gagner sa vie. Il nous faudra de ce fait favoriser une société de l’insertion pour sortir du modèle de la société d’indemnisation qui se dessine sous nos yeux et tend à fragiliser notre économie.
Mes chers compatriotes, l’autre axe majeur de ma politique porte sur la sécurité et la protection civile. J’aurai l’occasion d’en préciser les contours au moment de la campagne. La sécurité, c’est d’abord celle de notre pays, à l’intérieur de nos frontières, pour lutter contre l’incivilité et toutes formes de criminalité organisée. La sécurité, c’est également celle du sol ivoirien et de ses abords terrestres, maritimes, aériens. A cet égard, la menace terroriste désormais plus proche de nos frontières et la nécessaire surveillance des circuits de narcotrafic qui l’alimente rappellent l’urgence à prendre des mesures, d’autant que nous sommes plus directement visés. La sécurité, c’est ensuite l’obligation de l’État d’assumer son devoir régalien de protection du territoire en ne laissant pas à des groupes de délinquants l’option de quitter volontairement, quand bon leur semble, des sites pourtant classés au titre de notre patrimoine forestier. C’est malheureusement le cas depuis plusieurs années à l’Ouest de notre pays, au Mont Péko.
La sécurité, c’est encore et peut-être surtout celle des Ivoiriens au quotidien, en commençant par le domaine de la santé. Le sous-équipement des hôpitaux et centres de santé rend vaine la politique mimétique d’assurance maladie universelle. Avec deux scanners pour 23 millions d’habitants, il est patent qu’il faut aborder la question autrement. La sécurité civile commande de faire face aux situations dramatiques dont nos populations font trop souvent les frais. Je pense notamment aux conséquences désastreuses de la saison des pluies, mais plus largement à celles des catastrophes naturelles ou accidentelles qui doivent trouver réponses.
La sécurité, c’est enfin celle du monde des affaires, du secteur privé et de sa relation au secteur public. Élu président, j’ai l’intention d’enrailler la corruption et d’endiguer la politique de « rattrapage » encouragée par le président sortant. Il nous faut favoriser un climat de sérénité et d’assainissement propice au développement de l’entreprise et à l’investissement. Corruption, arbitraire, harcèlement fiscal doivent cesser de polluer notre économie.
Mes chers compatriotes, quels que soient les efforts et les moyens déployés pour masquer la réalité, le président sortant ne pourra pas durablement cacher le soleil avec sa main. Je suis candidat pour que la Côte d’Ivoire que j’ai servie dans ses représentations diplomatiques, au gouvernement, à l’Union Africaine ou aux Nations-Unies, renoue avec sa vocation universelle, retrouve son influence et redore son prestige. Je suis candidat pour que la Côte d’Ivoire et les Ivoiriens se retrouvent.
Bonne fête de l’indépendance et que vive la Côte d’Ivoire !
Amara Essy,
Candidat à l’élection présidentielle d’octobre 2015