"Depuis 2002, ici, plus rien ne fonctionne", lance, visiblement amer, Amadou Fofana derrière sa machine à coudre. Comme les plus de mille artisans regroupés au sein de l’Union des groupements des artisans du Nord ivoirien (UGAN) depuis 1986, ce jeune tisserand-couturier regarde avec nostalgie les années 1990, où le tourisme battait son plein dans la région de Korhogo (Nord ivoirien) dans laquelle il habite.
Frappée de plein fouet par la partition du pays en 2002 et la prise du contrôle de la partie septentrionale du pays par les rebelles des Forces Nouvelles (FN), la région des Savanes a vu son économie artisanale décroître brutalement. "Notre attractivité touristique était centrée sur l’artisanat, contrairement à d’autres régions", analyse Soualiho Fofana, secrétaire général de l’UGAN depuis 1992.
"Grâce à la solidarité entre nous, nous avons tenu et nous sommes restés unis", poursuit M. Fofana, lissant soigneusement une barbiche poivre-et-sel. Coupés de leurs sources de revenus locaux, les artisans ont densifié leur unique débouché, à l’international, avec l’exportation de produits dans la filière du commerce équitable, en France.
Visant à assurer une rémunération plus juste aux petits producteurs et artisans, le commerce équitable s’impose depuis la crise, entre 2002 et 2011, comme le principal moyen de survie et de développement du secteur.
Tout commence en 1987, lorsque Philippe Bertrand, un Français anciennement volontaire à Korhogo, transmet le contact de l’UGAN à Solidar’Monde, une centrale d’achats basée à Paris spécialisée dans le commerce équitable. Un partenariat se met en place, et les tissus, vêtements et objets d’art trouvent de nouveaux acquéreurs dans les boutiques dites "équitables" de France.
"Nous n’avions pas de mot pour le définir, mais sans le savoir, nous voulions nous tourner vers le commerce équitable, pour que les artisans puissent vivre de leur travail", reprend le secrétaire général. A cet effet, une association de soutien, Les amis d’UGAN, s’est mis en place en France en 2014, notamment pour renforcer les capacités des travailleurs et les aider à trouver des débouchés.
Pour la deuxième année consécutive, une couturière professionnelle française, Noëlle Delabbé, intervient de leur part, fin 2015, formant en plus de deux mois, une douzaine de couturiers et tisserands volontaires, pour améliorer leurs techniques et faire correspondre leurs produits aux standards européens.
"Grâce à cette formation, je m’adapte, et cela a bouleversé ce que je pensais savoir de la couture", explique Amadou Fofana, sous le large Apatam où se font les formations et se créent les produits. "Noëlle m’a appris à capter le monde", témoigne celui qui dit avoir "appris à marcher sur les pédales" des machines à coudre.
Son campus ravagé par un incendie en 2004, l’UGAN peine encore à se reconstruire et se remettre des années de crise, et l’exportation, qui représente l’essentiel de leur activité, peine à suffire. "De plus en plus, les autorités locales s’intéressent à l’Ugan. La mairie loge certains collaborateurs et le Conseil général commence à s’impliquer dans les discours, mais on attend encore d’autres actes", assène Lanciné Koné, directeur général de la structure.
A bientôt trente ans, le groupement d’artisans s’estime heureux d’avoir pu "survivre à la ruine" grâce au commerce équitable, selon les termes de cet informaticien de formation. Mais elle reste "malade, à cause de maladies de tous les genres", déplore Soualiho Fofana, qui ambitionne désormais de recruter un commercial basé à Abidjan, "pour trouver des débouchés dans tout le pays".
Abondamment affirmé par les pouvoirs publics et repris dans la presse, l’objectif de l’émergence économique à atteindre en 2020 par la Côte d’Ivoire est un motif d’espoir pour les artisans, soucieux d’éviter une trop grande dépendance à l’international. A l’instar de M. Koné, qui conclut que "Nous voulons prendre part à ce mouvement, et affirmer que l’émergence passe aussi par le développement de l’artisanat équitable".
NMI
Frappée de plein fouet par la partition du pays en 2002 et la prise du contrôle de la partie septentrionale du pays par les rebelles des Forces Nouvelles (FN), la région des Savanes a vu son économie artisanale décroître brutalement. "Notre attractivité touristique était centrée sur l’artisanat, contrairement à d’autres régions", analyse Soualiho Fofana, secrétaire général de l’UGAN depuis 1992.
"Grâce à la solidarité entre nous, nous avons tenu et nous sommes restés unis", poursuit M. Fofana, lissant soigneusement une barbiche poivre-et-sel. Coupés de leurs sources de revenus locaux, les artisans ont densifié leur unique débouché, à l’international, avec l’exportation de produits dans la filière du commerce équitable, en France.
Visant à assurer une rémunération plus juste aux petits producteurs et artisans, le commerce équitable s’impose depuis la crise, entre 2002 et 2011, comme le principal moyen de survie et de développement du secteur.
Tout commence en 1987, lorsque Philippe Bertrand, un Français anciennement volontaire à Korhogo, transmet le contact de l’UGAN à Solidar’Monde, une centrale d’achats basée à Paris spécialisée dans le commerce équitable. Un partenariat se met en place, et les tissus, vêtements et objets d’art trouvent de nouveaux acquéreurs dans les boutiques dites "équitables" de France.
"Nous n’avions pas de mot pour le définir, mais sans le savoir, nous voulions nous tourner vers le commerce équitable, pour que les artisans puissent vivre de leur travail", reprend le secrétaire général. A cet effet, une association de soutien, Les amis d’UGAN, s’est mis en place en France en 2014, notamment pour renforcer les capacités des travailleurs et les aider à trouver des débouchés.
Pour la deuxième année consécutive, une couturière professionnelle française, Noëlle Delabbé, intervient de leur part, fin 2015, formant en plus de deux mois, une douzaine de couturiers et tisserands volontaires, pour améliorer leurs techniques et faire correspondre leurs produits aux standards européens.
"Grâce à cette formation, je m’adapte, et cela a bouleversé ce que je pensais savoir de la couture", explique Amadou Fofana, sous le large Apatam où se font les formations et se créent les produits. "Noëlle m’a appris à capter le monde", témoigne celui qui dit avoir "appris à marcher sur les pédales" des machines à coudre.
Son campus ravagé par un incendie en 2004, l’UGAN peine encore à se reconstruire et se remettre des années de crise, et l’exportation, qui représente l’essentiel de leur activité, peine à suffire. "De plus en plus, les autorités locales s’intéressent à l’Ugan. La mairie loge certains collaborateurs et le Conseil général commence à s’impliquer dans les discours, mais on attend encore d’autres actes", assène Lanciné Koné, directeur général de la structure.
A bientôt trente ans, le groupement d’artisans s’estime heureux d’avoir pu "survivre à la ruine" grâce au commerce équitable, selon les termes de cet informaticien de formation. Mais elle reste "malade, à cause de maladies de tous les genres", déplore Soualiho Fofana, qui ambitionne désormais de recruter un commercial basé à Abidjan, "pour trouver des débouchés dans tout le pays".
Abondamment affirmé par les pouvoirs publics et repris dans la presse, l’objectif de l’émergence économique à atteindre en 2020 par la Côte d’Ivoire est un motif d’espoir pour les artisans, soucieux d’éviter une trop grande dépendance à l’international. A l’instar de M. Koné, qui conclut que "Nous voulons prendre part à ce mouvement, et affirmer que l’émergence passe aussi par le développement de l’artisanat équitable".
NMI