L’accès aux services financiers dans le monde progresse chez les adultes, mais à un rythme très inégal. Selon le dernier rapport Global Findex (a), la proportion d’adultes disposant d’un compte d’argent mobile en Afrique subsaharienne est très faible dans des pays comme le Nigéria (moins de 10 %), mais peut dépasser les 70 % au Kenya.
Les disparités en matière d’inclusion financière ne correspondent pas nécessairement aux variations de revenus. Dans les pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure, la proportion d’adultes titulaires d’un compte bancaire va d’environ 20 % au Pakistan et au Cambodge à près de 93 % en Mongolie.
Si le revenu n’explique pas tout, ne faudrait-il pas regarder du côté de la réglementation ? Nous venons de publier deux notes de politique générale (a) qui traitent de cette question et qui concluent qu’un cadre réglementaire adapté est généralement synonyme d’une plus grande inclusion financière.
La protection des consommateurs : un aspect crucial
La première note (a), de portée mondiale, actualise les recherches initialement entreprises par Franklin Allen et d’autres contributeurs (a). Elle se penche sur les raisons pour lesquelles les taux de possession d’un compte courant varient autant au sein d’économies à niveaux de revenu approchants. Nous avions l’intuition que la protection du consommateur constituait un facteur important. C'est pourquoi nous avons repris les données de l’enquête 2017 de la Banque mondiale sur l’inclusion financière et la protection des consommateurs (FICP) (a) pour créer un indice mesurant le suivi et le respect de ces règles. Cet indice varie entre 0,06 et 1 : plus il est élevé, plus l'encadrement est robuste.
Les résultats de notre travail confirment notre hypothèse de départ. Nous constatons que la détention d’un compte courant et le recours à l’épargne formelle sont plus élevés dans les pays où la protection du consommateur est plus encadrée. L’épargne formelle est également corrélée aux politiques visant à limiter les frais ainsi qu’aux incitations fiscales favorisant l’inclusion financière. On peut en déduire que l'effet des réglementations relatives à la protection des consommateurs n'est pas tant de favoriser l’adoption des services financiers que d’encourager leur utilisation. Ces dispositifs sont, pour les consommateurs, un gage de confiance dans la sécurité de leurs transactions et de protection contre les risques de fraude.
Une réglementation adaptée favorise l’adoption de l’argent mobile
Nous nous sommes ensuite penchés sur l’adoption de l’argent mobile (a) en Afrique subsaharienne, en combinant les données de la base Global Findex à celles de l’association d’opérateurs mobiles GSMA.
Les données Global Findex nous indiquent la proportion d’adultes disposant d’un compte d’argent mobile. L’indice mis au point par la GSMA analyse six dimensions afin d’évaluer dans quelle mesure le cadre réglementaire d’un pays favorise l’utilisation de services d’argent mobile. Chaque pays est classé sur une échelle de 0 à 100.
Nous observons (a) que les pays d’Afrique subsaharienne qui obtiennent un bon score affichent un taux d’adoption de l’argent mobile plus élevé (et cette corrélation est statistiquement significative après prise en compte des différents niveaux de développement économique dans la région). Nos données montrent en particulier qu’une augmentation de 10 points de l’indice de la GSMA est corrélée à une hausse de 7 points de pourcentage des taux de possession d’un compte de paiement mobile. Ce constat vient conforter l'hypothèse selon laquelle de bonnes pratiques réglementaires sont synonymes d’un recours accru aux services d'argent mobile. Par ailleurs, la GSMA a récemment mis en évidence (a) que la présence d’un cadre réglementaire favorise l’utilisation des services de paiement par mobile, notamment chez les femmes et les adultes pauvres.
Quelles réglementations sont déterminantes ?
Nous avons voulu prolonger notre travail en identifiant les dispositions réglementaires qui contribuent plus particulièrement à ces résultats. L’indice de la GSMA (a) comporte six dimensions, et certaines d’entre elles pourraient peser plus que d’autres. Les données montrent des corrélations positives significatives entre l’indice et les taux de possession d’argent mobile pour trois dimensions : la vigilance à l’égard de la clientèle, l’agrément et la protection des consommateurs.
Il semble logique que ces variables soient liées à un taux d’adoption de l’argent mobile plus élevé. Des règles de vérification moins strictes à l’égard des particuliers titulaires de comptes à faible risque peuvent en effet favoriser l’inclusion financière des populations pauvres (qui souvent ne disposent pas des documents nécessaires à l’ouverture d’un compte). La dimension « agrément » porte sur l’existence d’un cadre législatif pour les transactions mobiles, les exigences en matière de fonds propres et la capacité des établissements non bancaires à offrir des services d’argent mobile. Enfin, une bonne politique de protection du consommateur veille à ce que les clients aient connaissance de tous les frais qui s'appliquent et qu’ils aient accès à des voies de recours efficaces, le tout concourant à une plus grande confiance dans le système financier.
Il n’existe pas de solution toute faite pour bien réglementer
Il nous faut cependant tempérer notre analyse. Il n’existe pas de panacée pour élaborer un cadre réglementaire favorisant l’inclusion financière. Par ailleurs, notre étude comporte des limites. Comme les données de l’indice de la GSMA n’existent que pour 2018, nous ne sommes pas en mesure d’examiner l’évolution de l’impact des réglementations au fil du temps. Il en va de même pour les données de l’enquête FICP, qui n’existent que pour 2017.
Si l’application des mesures réglementaires est fondamentale, la finance numérique évolue rapidement et les États doivent faire preuve d’une certaine souplesse, voire parfois expérimenter et improviser. Selon la GSMA, les pays qui amendent régulièrement leurs dispositions réglementaires affichent des valeurs d’indice plus élevées que ceux qui s’appuient sur leur cadre réglementaire d’origine. Une chose est certaine : il faut des principes stricts de protection des consommateurs pour inciter le plus grand nombre à se tourner vers le système financier formel.
Les disparités en matière d’inclusion financière ne correspondent pas nécessairement aux variations de revenus. Dans les pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure, la proportion d’adultes titulaires d’un compte bancaire va d’environ 20 % au Pakistan et au Cambodge à près de 93 % en Mongolie.
Si le revenu n’explique pas tout, ne faudrait-il pas regarder du côté de la réglementation ? Nous venons de publier deux notes de politique générale (a) qui traitent de cette question et qui concluent qu’un cadre réglementaire adapté est généralement synonyme d’une plus grande inclusion financière.
La protection des consommateurs : un aspect crucial
La première note (a), de portée mondiale, actualise les recherches initialement entreprises par Franklin Allen et d’autres contributeurs (a). Elle se penche sur les raisons pour lesquelles les taux de possession d’un compte courant varient autant au sein d’économies à niveaux de revenu approchants. Nous avions l’intuition que la protection du consommateur constituait un facteur important. C'est pourquoi nous avons repris les données de l’enquête 2017 de la Banque mondiale sur l’inclusion financière et la protection des consommateurs (FICP) (a) pour créer un indice mesurant le suivi et le respect de ces règles. Cet indice varie entre 0,06 et 1 : plus il est élevé, plus l'encadrement est robuste.
Les résultats de notre travail confirment notre hypothèse de départ. Nous constatons que la détention d’un compte courant et le recours à l’épargne formelle sont plus élevés dans les pays où la protection du consommateur est plus encadrée. L’épargne formelle est également corrélée aux politiques visant à limiter les frais ainsi qu’aux incitations fiscales favorisant l’inclusion financière. On peut en déduire que l'effet des réglementations relatives à la protection des consommateurs n'est pas tant de favoriser l’adoption des services financiers que d’encourager leur utilisation. Ces dispositifs sont, pour les consommateurs, un gage de confiance dans la sécurité de leurs transactions et de protection contre les risques de fraude.
Une réglementation adaptée favorise l’adoption de l’argent mobile
Nous nous sommes ensuite penchés sur l’adoption de l’argent mobile (a) en Afrique subsaharienne, en combinant les données de la base Global Findex à celles de l’association d’opérateurs mobiles GSMA.
Les données Global Findex nous indiquent la proportion d’adultes disposant d’un compte d’argent mobile. L’indice mis au point par la GSMA analyse six dimensions afin d’évaluer dans quelle mesure le cadre réglementaire d’un pays favorise l’utilisation de services d’argent mobile. Chaque pays est classé sur une échelle de 0 à 100.
Nous observons (a) que les pays d’Afrique subsaharienne qui obtiennent un bon score affichent un taux d’adoption de l’argent mobile plus élevé (et cette corrélation est statistiquement significative après prise en compte des différents niveaux de développement économique dans la région). Nos données montrent en particulier qu’une augmentation de 10 points de l’indice de la GSMA est corrélée à une hausse de 7 points de pourcentage des taux de possession d’un compte de paiement mobile. Ce constat vient conforter l'hypothèse selon laquelle de bonnes pratiques réglementaires sont synonymes d’un recours accru aux services d'argent mobile. Par ailleurs, la GSMA a récemment mis en évidence (a) que la présence d’un cadre réglementaire favorise l’utilisation des services de paiement par mobile, notamment chez les femmes et les adultes pauvres.
Quelles réglementations sont déterminantes ?
Nous avons voulu prolonger notre travail en identifiant les dispositions réglementaires qui contribuent plus particulièrement à ces résultats. L’indice de la GSMA (a) comporte six dimensions, et certaines d’entre elles pourraient peser plus que d’autres. Les données montrent des corrélations positives significatives entre l’indice et les taux de possession d’argent mobile pour trois dimensions : la vigilance à l’égard de la clientèle, l’agrément et la protection des consommateurs.
Il semble logique que ces variables soient liées à un taux d’adoption de l’argent mobile plus élevé. Des règles de vérification moins strictes à l’égard des particuliers titulaires de comptes à faible risque peuvent en effet favoriser l’inclusion financière des populations pauvres (qui souvent ne disposent pas des documents nécessaires à l’ouverture d’un compte). La dimension « agrément » porte sur l’existence d’un cadre législatif pour les transactions mobiles, les exigences en matière de fonds propres et la capacité des établissements non bancaires à offrir des services d’argent mobile. Enfin, une bonne politique de protection du consommateur veille à ce que les clients aient connaissance de tous les frais qui s'appliquent et qu’ils aient accès à des voies de recours efficaces, le tout concourant à une plus grande confiance dans le système financier.
Il n’existe pas de solution toute faite pour bien réglementer
Il nous faut cependant tempérer notre analyse. Il n’existe pas de panacée pour élaborer un cadre réglementaire favorisant l’inclusion financière. Par ailleurs, notre étude comporte des limites. Comme les données de l’indice de la GSMA n’existent que pour 2018, nous ne sommes pas en mesure d’examiner l’évolution de l’impact des réglementations au fil du temps. Il en va de même pour les données de l’enquête FICP, qui n’existent que pour 2017.
Si l’application des mesures réglementaires est fondamentale, la finance numérique évolue rapidement et les États doivent faire preuve d’une certaine souplesse, voire parfois expérimenter et improviser. Selon la GSMA, les pays qui amendent régulièrement leurs dispositions réglementaires affichent des valeurs d’indice plus élevées que ceux qui s’appuient sur leur cadre réglementaire d’origine. Une chose est certaine : il faut des principes stricts de protection des consommateurs pour inciter le plus grand nombre à se tourner vers le système financier formel.