Visé par une pétition, Vital Kamerhe, président de l'Assemblée nationale de la République Démocratique du Congo, un allié du président Félix Tshisekedi, a démissionné de son poste ce lundi.
Dans son discours de démission devant les députés, le désormais ancien président de l'Assemblée nationale a déploré que le débat autour de sa possible destitution et de certains membres du bureau de l'Assemblée nationale ait occulté les véritables défis prioritaires auxquels la RDC est confrontés.
Il a justifié ensuite sa démission par un souci de ne pas bloquer l'institution qu'il dirige depuis mai 2024.
''J'ai décidé devant 110 millions de Congolais que ma petite personne ne doit pas bloquer une grande institution comme l'Assemblée nationale'' a-t-il déclaré.
Vital Kamarhe a aussi rappelé que par ''conviction et par amour pour la patrie'', il a ''œuvré activement pour l'avènement d'une alternance pacifique dans le pays, en soutien à Félix Tshisekedi'' et il a indiqué avoir ''consacré sa vie à la recherche et à la consolidation de la paix, ainsi qu'à l'amélioration des conditions de vie de la population congolaise''.
Il a affirmé néanmoins ne ''nourrir ni colère, ni ressentiment envers qui que ce soit'' car son ''cœur est trop étroit pour s'encombrer de tels fardeaux'' et ''s'efforce d'entretenir l'amour fraternel et de cultiver les vertus du pardon''.
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Comment en est-on arrivé à la démission de Vital Kamerhe?
Le mercredi 17 septembre 2025, la chambre basse du Parlement congolais a mis en place une commission spéciale temporaire chargée d'examiner les pétitions signées par plusieurs dizaines de députés et de déposer son rapport sous 72 heures.
Depuis plusieurs semaines en effet, des députés ont fait circuler des pétitions pour obtenir la destitution de Vital Kamerhe et quatre autres membres du bureau de l'Assemblée nationale.
Les documents qui ont recueilli 262 signataires sur les 500 que compte l'Assemblée nationale ont été déposés afin d'être examinés puis soumis au vote.
Les signataires des pétitions réclamaient le départ de cinq membres du bureau de l'Assemblée nationale dont son président accusés d'entraver le contrôle parlementaire.
Leur réclamation devait être mise au vote, lors d'une plénière au Palais du peuple, à Kinshasa après les conclusions de la commission parlementaire spéciale ayant examiné les documents des pétitionnaires.
Alors que les députés étaient convoqués en plénière pour voter ce texte, Vital Kamerhe a pris les devants et a annoncé sa démission.
Pourquoi des députés en veulent à Vital Kamerhe ?
Les signataires de la pétition accusent Vital Kamerhe de ''malversations financières, blocage du contrôle parlementaire, manque de transparence, dix mois d'arriérés de frais de fonctionnement et couverture médicale insuffisante pour les élus'', entre autres.
Selon Crispin Mbindule, un des initiateurs de cette pétition, interrogé par Radio Okapi, en déposant sa démission, Vital Kamerhe a échappé au débat et au vote, car il reconnait les griefs formulés contre lui.
''La démission est un aveu'' estime-t-il. ''Je peux dire qu'il a fui le combat, car il maintenait que tous les griefs que nous avions soulevés dans notre pétition étaient infondés. Nous aurions préféré l'affronter en plénière et soumettre la pétition au vote'' dit-il, avant d'inviter ses collègues à ''poursuivre la lutte car ce n'est pas encore fini, parce que le contrôle parlementaire doit être instauré. Kamerhe était celui qui bloquait ce contrôle, or il n'y a pas de démocratie sans contrôle parlementaire de l'exécutif''.
La réaction du président Félix Tshisekedi
Le président Félix Tshisekedi en voyage à New York où il participe aux Assemblées annuelles de l'ONU a rejeté au cours d'un déjeuner de presse son implication dans la pétition qui a entrainé la démission de son allié Vital Kamerhe.
''Je ne suis pas à l'origine de la démission de Vital Kamerhe ni de ses problèmes. Je ne vois pas pourquoi il voudrait me tourner le dos. Je n'y suis pour rien. Je continue à le considérer comme un allié, comme un frère'', a déclaré Félix Tshisekedi.
Se disant garant de la stabilité des institutions, ''cela ne m'autorise pas à m'immiscer dans leur fonctionnement. S'ils ( les députés) ont décidé de défier leur président, cela relève de leur gestion interne. Mon rôle est de veiller au respect des droits de chacun et à la stabilité de l'institution'' a-t-il précisé.
Vital Kamerhe : un homme politique influent
Après 16 mois à la tête de la chambre basse du Parlement congolais, Vital Kamerhe quitte son poste avant la fin de la législature comme en 2009, lorsqu'il a été poussé à la démission également.
Président également de l'Assemblée nationale entre 2006-2009, il avait été forcé à la démission après avoir dénoncé ''la présence des troupes rwandaises sur le territoire congolais''. Le pays était dirigé à l'époque par Joseph Kabila.
Allié de l'actuel président Félix Antoine Tshisekedi, Vital Kamerhe est considéré comme l'un des stratèges politiques les plus influents de la RDC.
Cependant malgré cette influence, il avait été condamné en 2020 à vingt ans de prison pour détournement de deniers publics estimés à 50 millions de dollars, avant d'être acquitté deux ans plus tard.
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