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Politique Publié le samedi 31 mars 2012 | Le Mandat

Crise malienne / La Cedeao au pied du mur : Ouattara joue sa crédibilité

© Le Mandat Par Seibou Traore
Coopération: Alassane Ouattara au 40ème sommet de la CEDEAO, à Abuja (Nigeria) sur les questions de sécurité dans la sous-région
Jeudi 16 février 2012. Abuja (Nigeria). Le chef de l`Etat ivoirien, SEM Alassane Ouattara prend part au 40ème sommet de la CEDEAO sur les questions de sécurité dans la sous-région
Alors que la situation se dégrade à Bamako et dans le nord du Mali, les chefs d’État de la Cedeao ont lancé un ultimatum de 72 heures à la junte militaire malienne. Ils ont menacé le pays d’un « embargo diplomatique et financier », si la junte ne rétablit pas l’ordre constitutionnel. La Cedeao joue sa crédibilité à 48 heures de l’expiration de cette menace.

Empêchés d`atterrir à Bamako par une manifestation de partisans de la junte malienne, les chefs d`État ouest-africains conduits par le président en exercice de la Cedeao, Alassane Ouattara, se sont réunis en urgence, à huis clos, à l`aéroport d’Abidjan. Dans la capitale économique ivoirienne, en présence notamment du médiateur dans la crise malienne, le président du Faso, Blaise Compaoré et du président de l`Union africaine, Boni Yayi du Bénin, ils ont décidé, le jeudi 29 mars, de lancer un ultimatum aux putschistes. « La junte dispose donc d’un délai maximum de 72 heures », soit jusqu’au lundi 02 avril, « au plus tard », pour rétablir l’ordre constitutionnel, au risque de voir le Mali frappé par «un embargo diplomatique et financier», a déclaré le président de la Commission de la Cedeao, Désiré Kadré Ouédraogo. Les sanctions de la Cedeao incluent une interdiction de voyager et un gel des avoirs dans la région pour les membres de la junte. Avec la fermeture des frontières, la fermeture de l`accès aux ports des pays côtiers de la zone et un gel des comptes du Mali à la Banque centrale ouest-africaine (Bceao), elles visent clairement une asphyxie du pays. Avec de lourdes conséquences pour la population. Comme dans le cas ivoirien où la communauté internationale avait décidé d’imposer ces sanctions pour isoler l’ancien président ivoirien, Laurent Gbagbo. Qui, en dépit de sa défaite dans les urnes, s’agrippait au pouvoir. De leur côté, les putschistes se sont institutionnalisés en adoptant une nouvelle Constitution. Le texte consacre la prééminence des militaires jusqu`aux élections présidentielle et législatives, qui clôtureront la transition et dont la date n`est pas déterminée. Des élections auxquelles aucun membre de la junte n`est autorisé à se présenter. Le président Amadou Toumani Touré (ATT) s’est, quant à lui, exprimé le mercredi 28 mars pour la première fois depuis le coup d’État. Mais, cette intervention médiatique n’a en aucun cas marqué son retour sur la scène politique. ATT a déclaré qu`il se trouvait « à Bamako » et qu`il n`était «pas prisonnier». Très évasif sur son lieu de résidence exact, ainsi que sur ses intentions politiques, il a ainsi montré qu’il se mettait hors jeu.

Les rebelles Touaregs gagnent du terrain, Tombouctou vacille

Dans le même temps, la situation s’est dégradée à Bamako, comme dans le nord du pays. Le jeudi 29 mars, la rébellion touarègue du MNLA, accompagnée du groupe salafiste Ansar dine de Iyad Ag Ghali, a lancé une attaque sur la ville stratégique de Kidal, dans le nord-est du Mali, laquelle est d’ailleurs tombée entre leurs mains. Le capitaine Amadou Sanogo, chef de la junte militaire qui a pris le pouvoir au Mali, a sollicité une aide étrangère, le vendredi 30 mars. Aide qui doit lui permettre de faire face à l`offensive touarègue dans le Nord, où la situation est, selon lui, "critique". Il s’est simplement excusé pour les incidents du jeudi 29 mars. Les rebelles touaregs et les groupes islamistes armés qui menaient un assaut sur Kidal, dans le nord-est du Mali, ont pris le vendredi 30 mars cette ville stratégique, a-t-on appris auprès de témoins."Les rebelles maîtrisent la situation", a affirmé un enseignant joint par l`AFP à Kidal. "Les gens d`Iyad (Ag Ghaly, chef du groupe armé islamiste Ansar Dine) sont entrés dans la ville, ils nous ont dit « circulez, n`ayez pas peur », a ajouté un autre fonctionnaire. Le MNLA menaçait également de prendre d’assaut la ville de Tombouctou. Les chefs d’Etat ouest-africains, par leur sortie, avaient-ils pris la juste mesure des choses ? Le président en exercice de la Cedeao, Alassane Ouattara, est face à une crise complexe en début de son mandat. Face au mur, le président Ouattara a-t-il les cartes en main pour dénouer cette crise ? La junte a aujourd’hui bon dos, elle qui se fait, jour après jour, un petit capital de sympathie. La part de soutien se renforcera et s’étendra ,si la Cedeao et l’UA mettent du temps à matérialiser leurs projets. Est-il à la fois possible de « chasser» la junte du pouvoir à Bamako et de bouter hors des frontières nationales des rebelles qui ont violé l’intégrité du territoire ? Les plus à plaindre aujourd’hui, ce sont bien les chefs d’Etat membres de la Cedeao et non les « nouveaux occupants illégaux » d’un Mali à la dérive.

La Cedeao est-elle allée trop vite en besogne ?

Pourquoi avoir tenu à aller à Bamako comme en territoire conquis après avoir proféré des menaces à l’endroit de la junte ? Une mission du seul médiateur Blaise Compaoré n’aurait-elle pas d’abord permis de se faire une idée de la situation avant toute autre initiative ? D’ailleurs, en cas d’intervention, qui va financer le déploiement des forces ? L’UA ? L’Occident ? Qui acceptera d’envoyer ses troupes ? A ce niveau, les Etats-Unis ont déclaré que l’initiative militaire est à proscrire pour le moment. Dans quels délais ? Contre les rebelles ou la junte ? La sous-région sort à peine des tourments de la guerre ivoiro-ivoirienne. L’on panse encore les blessures issues des autres conflits fratricides, notamment au Liberia, en Sierra Leone et, plus récemment, en Guinée Bissau. Il faut éviter, à tout prix, de retomber dans des travers économiques sans fin. Surtout que les pays sahéliens font face à un déficit céréalier par suite d’une pluviométrie capricieuse. Or, le Mali, qui en fait partie, n’est pas à l’abri d’une économie désarticulée. La crise alimentaire s’installe progressivement, à la faveur de l’insurrection qui se développe. Les populations en fuite se dispersent dans les pays voisins, occasionnant ainsi de nouvelles difficultés. A quand le bout du tunnel ? Après les terribles vents de sable, les peuples du Sahel vont devoir affronter les pluies de la prochaine saison. Sans conteste, le calendrier du processus se trouve aujourd’hui plombé. Dans le climat actuel et vu la partition en cours du Mali, on ne voit pas comment organiser et réussir un scrutin présidentiel. Les chefs d’Etat membres de la Cedeao n’ont aucun intérêt à voir un conflit tricéphale émerger dans un pays dont les dirigeants auront pourtant tout fait pour l’éviter.

PATRICK N’GUESSAN
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