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Société Publié le vendredi 20 juin 2014 | AFP

A Abidjan, la pluie tue les plus pauvres

© AFP Par DR
Au moins quatre personnes ont été tuées dans un glissement de terrain consécutif
Mardi 17 juin 2014. Abidjan. Au moins quatre personnes ont été tuées dans un glissement de terrain, à Mossikro, consécutif à une forte pluie qui s’est abattue, sur la capitale économique ivoirienne.
Abidjan, Un torrent de boue et puis plus rien : la petite mosquée dans laquelle dormait une trentaine de Nigériens pauvres a disparu, faisant six morts dans des glissements de terrain à Abidjan qui ont fait 23 tués depuis une quinzaine de jours.

Le théâtre de l’incident, un quartier dit "précaire" proche du siège de
l’ONU en Côte d’Ivoire, affiche son dénuement. Des pneus remplis de terre font office d’escaliers. Des ruisseaux d’eau jaunâtre serpentent entre les maisons.

Les déchets en plastique sont littéralement incrustés dans la terre.
A quelques mètres de la place centrale, plus une brique ne rappelle
l’ancienne mosquée, rasée. Jeudi à 05H30 du matin, "un énorme bruit" réveille Arouna Issa, qui dort avec une trentaine d’autres Nigériens sous un toit de tôle jouxtant le lieu de culte.

A dix mètres de sa couche, un glissement de terrain a emporté six de ses compatriotes et en a blessé 23 autres. Tous sont de petits marchands venus chercher fortune en Côte d’Ivoire.

L’un d’eux, Issouf Zakari, 21 ans, des coupures au visage et aux jambes, raconte qu’un mur lui est tombé dessus. "J’ai eu de la chance".

Le sinistre s’est produit en contrebas d’une colline d’une trentaine de
mètres de hauteur. Des tonnes de terre gorgée d’eau ont subitement dévalé la pente abrupte. La terrasse d’une maison nichée à son sommet, aux fondations désormais à nu, pourrait très vite suivre le même chemin.

"On a peur", reconnaît Ablaye Yaya, ferrailleur de son état, qui rentre
"parfois au bout d’un an, parfois au bout de deux" au Niger voir sa femme et ses deux enfants.

Sékondo Kassissan, un Burkinabè de 49 ans dont quatre voisins ont péri dans un autre glissement de terrain mardi, à quelques kilomètres de là, se montre fataliste.

"Là vivait une femme ivoirienne, enceinte, avec son enfant. A côté, il y
avait un couple d’étrangers", souffle cet ancien vendeur, pointant les restes d’une petite maison peinte en bleu.

- "Tombé-mort" -

"C’est la pauvreté qui nous emmène ici", se désole M. Kassissan, qui
jusqu’alors payait 15.000 francs CFA (23 euros) de loyer mensuel pour la bicoque voisine, désormais inhabitable.

La mairie d’Attécoubé, où les deux sinistres se sont produits, en a détruit un pan entier, le laissant à la rue. Plusieurs baraques alentour ont subi le même traitement afin d’éviter de nouvelles victimes.

"Nous avons décidé de sécuriser ces habitants contre leur gré" après
"beaucoup de réunions de sensibilisation" infructueuses, affirme le maire de cette commune, Paulin Claude Danho.

Les populations, peu éduquées et inconscientes du danger, risquent leur vie au quotidien, faute de solution de repli. "Quand le salon est parti (dans un éboulement), les familles amènent les meubles dans les chambres", dit-il.

Attécoubé, situé à quelques kilomètres du Plateau, le centre administratif et d’affaires d’Abidjan, et du grand marché d’Adjamé, compte 350.000 habitants vivant "agglutinés près des bassins d’emploi", analyse M. Danho.

La moitié d’entre eux, Ivoiriens pauvres ou immigrés nigériens, maliens, burkinabè... vivote dans 17 quartiers précaires, sur la quarantaine que compte la commune. Quatre, trop dangereux, doivent être détruits.

L’un de ces endroits est surnommé "Tombé-mort", observe le maire, car "quand on y dort, on peut tomber. Mort", avec le reste de la maison.

"La Côte d’Ivoire, en tant que pays en développement, n’échappe pas à la règle des bidonvilles, qui se construisent souvent à côté des immeubles, des gratte-ciels", constate Benoît Guihy, directeur du cabinet du ministre de la Construction, qui dénombre 75 quartiers précaires à Abidjan.

Les petits salaires, qui ne peuvent payer les transports en commun,
s’établissent à proximité de leur travail, explique-t-il. Dans la zone
bourgeoise de Cocody, des villas opulentes ont vue sur les "bas-fonds",
construits en contrebas en terrain inondable.

L’Etat ivoirien, fragilisé par la crise politico-militaire de 2002-2011,
est pourtant mobilisé, affirme ce haut fonctionnaire, dans un entretien avec l’AFP.

Les démolitions préventives se sont multipliées au printemps. Certaines familles ont reçu une aide correspondant à dix mois de loyer, soit 150.000 FCFA (230 euros), remarque-t-il.

Des dizaines de milliards de FCFA (dizaines de millions d’euros) sont
budgétisés pour des projets d’aménagement et assainissement dans les quartiers précaires.

Mais ces sommes restent faibles vu l’ampleur des besoins. A Abidjan, des pluies diluviennes continuaient de tomber vendredi. Le bilan provisoire de 23 morts devrait immanquablement s’alourdir.

jf/jlb
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