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Politique Publié le mardi 26 mai 2015 | L’intelligent d’Abidjan

Ouattara lors des échanges avec la presse à Odienné: « Ces histoires de commission électorale, je n’y crois pas beaucoup »

© L’intelligent d’Abidjan Par Marc Innocent
Visite dans le district du Denguélé: le Chef de l`Etat fait le bilan de sa tournée
Dimanche 24 Mai 2015. Odienné. Après le meeting de Clôture, le Président de la République SEM. Alassane Ouattara a tenu une conférence de presse en vue de faire le bilan des actions menées pendant sa tournée dans le District du Denguélé.
Ci-dessous les échanges entre le chef de l'État ivoirien et la presse le dimanche 24 mai 2015, à l'issue de sa tournée dans le Denguelé, au Nord-Ouest ivoirien.

Alassane Ouattara a précisé entre autres que « 522.000 abonnés ne verront pas l’augmentation de leurs tarifs » , et n'a pas exclu un report d'un mois de la date d'application effective de la mesure d'augmentation du prix de l'électricité.

Au terme de sa visite d’Etat dans le Denguelé, le Président de la République Alassane Ouattara a échangé à bâtons rompus avec la presse nationale et internationale le dimanche 24 mai 2015 à sa résidence présidentielle d’Odienné. Entre autres questions évoquées, la récusation de Monseigneur Ahouanan à la tête de la Conariv par les évêques, l’arrestation des cadres du Fpi, l’augmentation du prix de l’électricité. Ci-dessous l’intégralité de cette conférence de presse.

Propos liminaires

Mesdames et messieurs merci d’être là. J’ai félicité la Rti parce que nous la suivons chaque jour et elle a fait un excellent travail. Mais la presse écrite, je n’ai rien vu, car cela ne nous parvenait pas. Donc nous aurons l’occasion de juger de ce qu’il y a dans la presse écrite pour voir si des félicitations doivent être faites également ou pas. Je voudrais vous rassurer mesdames et messieurs de la presse écrite. Nous sommes donc au terme de la visite d’Etat que je viens d’effectuer dans le district du Denguélé, qui nous a permis de visiter sept départements. Minignan et Kaniasso, le jeudi dernier, Gbéléban et Samatiguila le vendredi, Madina et Séguelon, le samedi et aujourd’hui (le dimanche 24 mai), bien évidemment Odienné, qui est le Chef-lieu de région. Comme je l’ai indiqué à maintes reprises, c’est certes une visite d’état mais surtout une visite familiale, car je revenais sur les terres de mes parents maternels. Et à chacune de ces étapes, comme vous avez pu le remarquer, la mobilisation était exceptionnelle, forte et belle. Beaucoup de témoignages d’affection, d’amour et de recueillement. Je voudrais donc au nom de mon épouse, de la délégation qui m’accompagne, remercier d’abord mes parents du district du Denguélé pour toute cette affection et la manière dont les choses ce sont passées. Remercier bien évidemment, les élus, les cadres qui ont participé à l’organisation et qui ont fait un excellent travail. Et bien évidemment la notabilité et les religieux que j’ai eu l’occasion de rencontrer et qui nous ont fait des bénédictions et des prières pour la Côte d’Ivoire et pour la réussite de ma mission. Au cours de cette visite, j’ai pu faire un état des lieux des travaux que nous avons réalisés que ce soit en matière d’eau, d’électricité, d’infrastructures routières, d’éducation et de santé. Comme vous le savez, à l’occasion de chaque visite d’Etat, nous tenons un conseil des ministres et le préfet de région nous fait une présentation de la région et bien évidemment des doléances des populations. Et la présentation qui nous a été faite par le préfet de région, lors du conseil des ministres du mercredi dernier nous a permis d’apprécier l’état d’avancement des travaux dans la région et d’évaluer les chantiers qui restent à réaliser. Cette région de notre pays avait enregistré beaucoup de retard, malheureusement comme je l’ai donc indiqué. Par conséquent il y a beaucoup à faire. Et nous avons fait déjà pas mal de choses, mais il reste encore beaucoup à faire pour le développement de la région du Denguélé. Je peux rappeler un certain nombre de travaux et de projets que j’ai mentionné dans mon discours de clôture. Il y a le bitumage de l’axe Boundiali-Odienné qui desservira également Madinani, pour un coût de 70 milliards de cfa, d’un financement de la Banque Islamique de Développement ; le bitumage de l’axe Odienné-Gbéléban, pour 43 milliards de cfa, la construction d’un lycée de jeune fille, ceci est important. Dans le cadre du plan national de développement 2016-2020, nous avons prévu le bitumage de l’axe Gbélégban-Bela-Kankan en Guinée, le reprofilage lourd entre Kaniasso et Minignan, entre Banakôro- Kara-oulé et entre Manado et Koba. Nous avons prévu aussi la construction de pont Samateledougou et Sokouraba et entre Minignan et Bolozon et Minignan et Tiémé. Je voudrais dire que ce sont quelques projets et nous continuerons de renforcer ces projets en matière d’eau, d’électricité, de santé et d’éducation. Bien que je sois chez moi en famille, mais je voudrais terminer en vous remerciant pour votre présence à nos côtés à chaque fois. Nous voulons vous dire que nous avons fort apprécié tous les reportages, de la Rti et de Radio Côte d’Ivoire que j’écoutais chaque matin. C’est une visite qui restera mémorable pour moi autant la dimension affective était grande. Je voudrais vous féliciter pour le traitement professionnel qui a été fait et dire à la presse écrite que, je pense sans doute que l’événement a été couvert de manière professionnelle au niveau des différents journaux. Je remercie les cadres, les élus et la délégation qui m’a accompagné. Tous les services, techniques, restauration…Tout a été parfaitement organisé. Bravo, aux ministres Adama Toungara, Gaoussou Touré, Affousiata Bamba, Madame le maire. Je suis très fier de la manière dont cette visite a été organisée. Bien évidemment je ne suis pas surpris. Merci et je me tiens à votre disposition pour d’éventuelles questions.

ECHANGES AVEC LA PRESSE

On a vu quelque chose d’inhabituel pendant cette visite d’Etat. Partout où vous êtes passés, il n’a pas été question d’argent. Récemment quand vous étiez dans la Mé, vous avez promis d’investir 50 milliards. A San Pedro, c’était 6000 milliards…Mais ici, avec vos parents, c’est un discours d’hommage, d’affection, de recueillement. Peut-on savoir l’enveloppe globale d’investissement dans le Denguélé ?

Comme je l’ai dit c’était en grande partie une visite familiale. Le retour de l’enfant, le neveu. Parce que chez les Odiennéka le neveu est plus fort que le fils auprès des ses oncles et de ses tantes. Et donc c’est une visite d’affection, de reconnaissance. Par ailleurs vous savez, ce qui a été fait ici en quelques mois va au-delà de ce qui a été fait pour cette région en un demi-siècle. Donc les populations sont rassurées. Elles n’ont pas besoin de demander, de faire une liste de doléances parce que nous sommes allés au delà de ce qu’elles auraient souhaité. Et nous continuerons de le faire. Cette région a besoin de tout. Nous devons faire en sorte de la mettre au niveau des autres du pays. Je considère que c’était très élégant de leur part, très attentionné puisque c’est aussi une marque de satisfaction par rapport à ce que le gouvernement a entrepris. Regardez par exemple la question du pont sur Gbahanla. Moi je ne m’attendais pas à cela quelques semaines avant. Quand j’en ai informé le président Alpha Condé, il était pleinement heureux. Il a décidé de venir pour que nous puissions l’inaugurer ensemble. Donc je félicite le gouvernement pour toutes les initiatives qui ont été prises. Par rapport à la suite, bien évidemment, nous avons un programme pour chaque région et nous continuerons de dérouler ce programme. Bien sûr avec les financements que nous allons obtenir et avec l’efficacité du gouvernement qui est au travail. Un gouvernement remarquable par sa capacité à résoudre les problèmes des Ivoiriens.

La Coalition nationale pour le changement demande que les Forces de l’Onuci assurent la sécurisation des élections en lieu et place des Frci. Qu’est ce que vous en pensez ?

Concernant la Coalition nationale pour le changement, je n’étais pas informé du fait qu’ils demandaient le remplacement des Frci par l’Onuci. Je n’étais pas informé, mais je me demande s’ils sont vraiment en Côte d’Ivoire parce que la paix et la sécurité règnent dans le pays. D’ailleurs mon intention c’est de demander le départ de l’Onuci après les élections, soit en 2017, soit en 2018. Si on faisait cela, comment ils organiseraient les élections en 2020. Il faut que les gens soient un peu patriotes. Pourtant, on les entend dire qu’ils sont patriotes. Il faut que les Ivoiriens se prennent en charge aussi bien au niveau militaire qu’au niveau électoral. Et c’est ce qui se passe. Les Frci, les Forces de sécurité font un travail exceptionnel. L’indice de sécurité en Côte d’Ivoire aujourd’hui est au même niveau que celui de Genève et de New York. Je crois savoir qu’à Genève, c’est le ministère de l’Intérieur qui organise les élections tandis qu’à New York cela incombe à la municipalité. Monsieur le ministre de l’Intérieur, on devait vous demander d’organiser les élections pour bien montrer que nous sommes au même niveau que les autres et que nous avons la capacité de le faire. Nous sommes très fiers des Forces de Défense et de Sécurité pour le travail qu’ils abattent. Ils le font surtout dans le sens du respect des citoyens et de l’État de droit. Et cela a bien commencé dans notre pays.

Monsieur le président, au cours de votre meeting de clôture, vous avez encouragé Mgr Paul Siméon Ahouanan et la Commission nationale de réconciliation et d’indemnisation des victimes. Mais il se trouve que l’Eglise catholique à laquelle appartient Mgr Ahouanan dit n’avoir pas été associée à cette nomination. L’Eglise est même allée loin en se désolidarisant de cette mission de Mgr Ahouanan à la Conariv en précisant que ce dernier sera le seul comptable des actes qu’il aura à poser au sein de cette commission. Comment appréhendez-vous monsieur le président, cette position tranchée de l’Eglise et pensez-vous que Mgr Ahouanan a les coudées franches pour réussir la mission que vous lui avez confiée ?

Effectivement, j’ai lu dans la presse qu’il y a quelques échanges au sein de la conférence épiscopale. Je tiens à préciser que nous ne voulons pas nous mêler des questions religieuses. Mais la chose que je peux vous dire, c’est que Mgr Ahouanan était membre de la Cdvr. Le président de la Cdvr a démissionné, nous avons reconduit tout simplement tous ceux qui étaient là. Nous avons décidé que ce serait bon que Mgr Ahouanan qui était l’un des vice-présidents soit le président. Et avant de le faire, j’ai informé le cardinal Kutwa et le Nonce apostolique. Je ne veux pas me mêler des dissensions éventuelles au sein de la Conférence épiscopale. Mgr Ahouanan fait un excellent travail. Il a un calendrier et nous allons le soutenir pour qu’il aille jusqu’au terme du travail que nous lui avons confié. Il n’y pas que Mgr Ahouanan au sein de cette commission. Il n’est donc pas le seul comptable des actes de la Conariv. Au sein de cette commission, il y a des évangéliques, des musulmans et la société civile. C’est tout ce bloc qui va faire un rapport. Ce n’est pas la Conariv de Mgr Ahouanan. C’est une Conariv présidée par Mgr Ahouanan qui a d’ailleurs à ses côtés, trois vice-présidents. Il y a le roi de Bassam, l’ambassadeur Tanoe, le Cheick Boikary Fofana et le Bishop Benjamin Boni. C’est un travail collégial et collectif et je fais confiance à la Commission.

Monsieur le président, vous avez dit au stade Mamadou Coulibaly que dans une élection, on gagne ou on perd. Je ne veux pas être un oiseau de mauvais augure. Mais, au cas où vous perdez ces élections, seriez-vous prêt à céder le fauteuil au vainqueur comme l’a fait votre ami Goodluck Jonathan au Nigéria ?

C’est vrai, les élections, on les gagne ou on les perd. Et je voudrais de plus en plus que nous hommes politiques en Côte d’Ivoire, on essaie d’avoir du respect pour nos concitoyens. On ne peut pas aller à une élection et dire on gagne ou on gagne. C’est ce qui a amené la guerre. Parce que ceux qui avaient perdu ont voulu dire qu’ils ont gagné. Ça ne sera jamais ma philosophie. Ou je gagne ou je perds. Mais là, je suis certain que je vais gagner. Les sondages sont là, tout le monde connaît la composition de ce pays. Le Pdci, le Rdr, l’Udpci, le Mfa et l’Upci ensemble font 90% du parlement et des régions. Nous voulons que ces élections soient organisées de manière totalement transparente, équitable et apaisée. Et nous n’accepterons pas la chienlit. Je veux le dire à tous ceux qui voudront créer la chienlit dans le processus électoral. Parce que ce que nous voulons, c’est que la Côte d’Ivoire fasse preuve de maturité démocratique et politique. Les uns et les autres doivent aller comme je l’ai dit partout où ils veulent présenter leur programme et critiquer mon programme et dire ce que nous proposons et laisser le soin aux citoyens le jour du vote de voter. Et celui qui gagne, gagnera. Et ceux qui ne gagneront pas, j’espère auront la délicatesse comme l’a fait le président Jonathan mon ami, de téléphoner à la personne qui aura gagné pour la féliciter. Je souhaite bien sur que ce soit moi.

Monsieur le président, vous parlez de paix et de cohésion partout afin que le pays se développe. Pensez-vous qu’avec les arrestations répétées des cadres du Fpi, cette paix que vous souhaitez tant puisse voir le jour ?

Parlant de l’arrestation dont vous parlez je crois que la question est mal posée. Nous n’arrêtons pas les gens en fonction de leur couleur politique. Le ministère de la sécurité fait son travail en fonction des lois et règlements de ce pays. Il y a des lois et ceux qui enfreignent aux lois, si on prend quelqu’un en train de violer ces lois , on l’arrête et on l’envoie au tribunal. Ces gens apparemment ont violé la loi. Ils savaient bien qu’ils ne devaient pas organiser cette manifestation. Ils ont voulu donc tenir tête aux forces de l’ordre. Et tout simplement la loi a été appliquée. Et nous serons sans état d’âme. Nous le ferons avec fermeté. Bien sûr nous voulons la cohésion, la réconciliation. Mais nous ne voulons pas un Etat de désordre. Nous ferons en sorte que les Ivoiriens soient en paix. Que la sécurité continue de régner dans ce pays. Il ne faut pas que les gens prennent pour prétexte la période électorale pour intimider quelques ivoiriens que ce soit. Il faut que nous allions à ces élections de manière apaisée, ensemble vraiment dans un esprit ouvert et démocratique. Parce que moi, je veux une Côte d’ivoire moderne. Je vais vous laisser non seulement un pays émergent en partant en 2020, mais vous laisser également un pays qui sera reconnu comme ayant des Institutions fortes, ayant la capacité de faire des élections démocratiques, des élections transparentes. Et puis d’ailleurs après ça, ces histoires de commission électorale, je n’y crois pas beaucoup. Elles seront remplacées par le ministère de l’intérieur et c’est le cas pour tous les pays démocrates, c’est le cas en France, au Sénégal. Qu’il y ait une commission d’observation d’accord. Mais la commission électorale existe , c’est parce que nous acceptions que c’est une sortie de crise. Autrement dès cette année, j’aurais fait organiser les élections par le ministère de l’intérieur et de la sécurité. Parce que le ministère de l’intérieur en a la capacité. Mais je pense que cette commission électorale est équilibrée. Moi, je pense que pour cette dernière élection, la commission peut faire ce travail et puis après nous passerons au ministère de l’intérieur.

Excellence Monsieur le Président de la République, parmi les projets évoqués pour la région, les populations ont tendu l’oreille pour deux autres grands projets. Il s’agit du port sec d’Odienné et du projet Soja qui était soutenu par la Banque africaine de développement en 2002. Que pouvez-vous nous dire sur cette préoccupation?

Alors, pour le projet de port sec et le projet Soja, bien sûr, le ministre Gaoussou Touré et les autres ont ces projets. Par conséquent, ce ne sont pas des projets oubliés mais l’occasion n’était pas faite pour présenter des doléances. Mais nous constatons que cette région peut produire encore beaucoup plus de riz, peut-être mieux que toutes les autres cultures. C’est pour cela que j’ai mis l’accent sur le riz. Et cela demande des barrages. Nous allons investir dans l’approvisionnement en eau, en irrigation pour que cela soit possible en matière de production agricole.

Ma deuxième question est plus politique. Vous avez accepté de perdre six mois de votre mandat afin de respecter la date constitutionnelle des élections. Est-ce qu’il en sera de même pour les législatives et les élections locales qui se sont déroulées en 2012 et en 2013 ?

C’est vrai que j’ai prêté serment devant le Conseil constitutionnel verbalement en mai 2011. Mais quand j’ai constaté mon élection par la Commission électorale indépendante, j’avais fait un serment par écrit , je crois, le 2 ou le 3 décembre 2010. Donc mon mandat, pour moi, court à partir de décembre 2010 et c’était tout à fait normal. Et je veux être conforme à la Constitution. La Constitution dit que l’élection du président se fait le mois d’octobre de la cinquième année du mandat présidentiel. Mon mandat ayant commencé en décembre 2010, pour moi, même si je n’ai pris effectivement fonction qu’en mai 2011, je veux être conforme à la Constitution. C’est vrai, j’ai passé quatre mois et demi voir cinq mois à l’hôtel du Golf. Mais je crois que nous avons largement rattrapé ce temps. En quatre ans, nous avons fait plus que notre prédécesseur a fait en dix ans. Donc ce qui m’intéresse c’est ce que nous faisons pour les Ivoiriens et non pas la durée de mon mandat. Maintenant, par rapport aux élections locales, l’idéal serait pour nous qu’on revienne bien sûr à normaliser la situation en Côte d’Ivoire. Que les élections présidentielles aient lieu en octobre, les élections législatives en novembre et les élections locales (municipales et régionales) en décembre de la même année. C’est un débat que nous auront bien sûr avec la classe politique pour voir si nous avons besoin de ramener toutes les élections dans le dernier trimestre de cette année ou s’il faut attendre et trouver un autre moment pour le faire. Moi je suis indifférent mais je pense que nous devons avoir un débat avec la classe politique avant d’arriver à cette décision.

Ici même à Odienné, le Conseil des ministres a décidé d’augmenter le prix de l’électricité. Qu’est-ce qui peut bien expliquer cette augmentation ? Est-ce que cela ne va pas à l’encontre de votre politique sociale qui consiste à améliorer les conditions de vie des Ivoiriens, d’autant plus que ceux-ci se plaignent ? Ils disent même que le premier jour de la mise en exécution de la mesure sera déclaré journée noire en Côte d’Ivoire pour exprimer leur mécontentement face à cette augmentation de l’électricité.

C’est vrai le Conseil des ministres a fait le point de la situation du secteur de l’énergie et nous avons considéré que ce secteur était en déséquilibre. Un déséquilibre important. Ce que je ne veux pas, c’est que notre pays se retrouve dans la situation d’autres pays que je ne nommerai pas par décence, des pays voisins, où les coupures d’électricité, c’est 100 heures par an. Parce que les gouvernements n’ont pas eu le courage de prendre les mesures qu’il fallait pour faire des investissements nécessaires pour améliorer la distribution et la production de l’électricité. Je me réjouis déjà que nous sommes quand même le pays le mieux placé sur le continent en matière de nombre d’heures de coupure d’électricité par an. Je crois que nous sommes à 40 heures, je pense même que l’Afrique du sud est à 42 heures. Tout ça, c’est parce que nous avons fait de gros investissements et ces investissements nécessitent d’être financés. Voyez-vous, si nous avons réussi à faire de gros investissements dans le pont Henri Konan Bédié, c’est parce qu’il y a le péage. Un investissement demande à être financé. Donc ces investissements demanderont à être financés. Et le financement devient l’augmentation du prix de l’électricité jusqu’à un certain point, ce qui permet d’augmenter l’offre. Et quand l’offre devient abondante, le prix de l’électricité va baisser. Dans l’immédiat, ce que nous comptons faire, c’est de faire en sorte que les consommateurs d’électricité de quantité faible qui ont les ménages sociaux, ne verront pas d’augmentation de leurs tarifs. En fait, je crois que pour cela, il y a un tarif social pour 522.000 abonnés, soit 40% des abonnés. On ne va pas toucher du tout aux tarifs de ces personnes. C’est quand même 40% des abonnés qui ne verront pas l’augmentation du tarif de l’électricité sur les 1,3 million d’abonnés. L’augmentation sera d’ailleurs modérée pour les autres. J’ai demandé qu’un travail soit fait pour m’assurer que tout cela est équitable aussi par rapport aux moyens des uns et des autres. Est-ce que ce travail peut être fait en une semaine ? Je le souhaite. Pour les autres ménages qui ont des consommations plus élevées, des revenus plus élevés, et qui ont des augmentations de salaires plus fortes, en ce moment là, l’augmentation prendra effet le 1er juin. Mais si nous n’arrivons pas à le faire le 1er juin, nous le ferons certainement pour le 1er juillet parce qu’il faut financer le secteur de l’énergie. Nous voulons passer dès l’année prochaine à moins de 30 heures de coupure d’électricité par an. Vous savez, certains pays voisins que je ne veux pas nommer, pour la plupart en Afrique de l’ouest, ont entre 100 et 500 heures de coupure d’électricité par an. Même chez nous, il y a quatre ans, il y avait des coupures d’électricité tout le temps. Mais aujourd’hui, ce n’est plus le cas. Prenons la ville d’Odienné. La couverture en électricité était de 22% et aujourd’hui nous sommes à 75%. Pour le Denguélé, nous étions à 22% et aujourd’hui nous sommes à 77%. Voyez-vous, quand vous financez des programmes comme ça, il faut bien que ce soit payé. Ce n’est pas gratuit. Le pont Henri Konan Bédié, nous l’avons financé. Ça faisait des années qu’on attendait ce pont. On n’a pas eu le courage politique de mon prédécesseur d’aller faire les emprunts nécessaires. Maintenant, nous l’avons financé, nous avons mis un péage, les Ivoiriens ont bien compris et grâce à ce péage, nous sommes à plus de 50.000 véhicules par jour. Dès qu’on atteindra le chiffre de 70.000 véhicules par jour, ce pont sera financé tout seul. C’est ça le courage politique, c’est pour cela, je reviendrai à votre question ; il faut que les gens aient le courage de dire aux Ivoiriens : nous voulons améliorer vos conditions de vie. Nous voulons prendre des mesures, certaines ne seront pas faciles mais nous le faisons parce que c’est bon pour la majorité des Ivoiriens et c’est bon pour vos enfants et vos petits enfants. La question de l’électricité, nous sommes troisième aujourd’hui en matière de couverture en électricité après l’Afrique du sud qui fait de la production nucléaire et le Maroc. Voyez-vous le progrès qui a été fait. Il y a quatre ans, je ne vous dis pas notre rang. Nous étions cinquantième ou je ne sais quoi. Tout ça, c’est parce que nous avons le courage politique de faire des investissements. Ces investissements doivent être pris. Je dis en même temps au gouvernement, chaque fois que vous le faites, je veux que les ménages à faible revenu soient épargnés. Et je répète, que pour les 40% des abonnés sociaux, les tarifs sociaux, il n’y aura pas d’augmentation. Ce sera donc pour les gros consommateurs et ce sera déterminé par le gouvernement dans les jours qui viennent. Monsieur le ministre d’Etat (Amadou Gon Coulibaly, assis à sa droite) parlez avec le Premier ministre pour que ce travail soit fait au besoin et très rapidement. Je suis prêt à prendre des décisions dès la semaine prochaine pour que les augmentations pour les autres aient lieu dès le premier juillet. C’est important pour l’équilibre du secteur. Après cela, nous avons toute une série de barrages, je sais que le ministre de l’Energie a eu l’occasion de le faire de sorte qu’aujourd’hui, nous sommes à 1900 MW. Quand j’ai pris fonction, nous étions à 1100 MW. Mon objectif, c’est de passer à 4000 MW en 2020. C’est la production du Nigeria aujourd’hui. Et le Nigeria a 170 millions d’habitants. Donc si on fait des investissements de cette importance, il faut les financer. C’est ce que nous ferons. Mais les financer par ceux qui ont les moyens de payer un peu plus que ceux qui n’ont pas les moyens de payer les augmentations. Voici un peu ma philosophie.

Nous savons que dans cette région, les conflits entre agriculteurs et éleveurs sont récurrents, quels sont les dispositions que le gouvernement envisage de prendre pour régler définitivement ce problème ?

Cela se développe un peu partout pas ici seulement mais dans d’autres départements , notamment à kong et ailleurs. Les préfets et les sous préfets nous aident beaucoup. Avec le Premier ministre et Hamed Bakayoko, on essaie d’éviter que ça ne dégénère. Effectivement ce sont des questions qui font partie des situations que nous vivons surtout que dans ces pays où il y a plusieurs ethnies qui qui vivent ensemble et certains pensent que les bœufs vont endommager leurs produits. Mais c’est par le dialogue qu’il faut continuer à régler ce problème.

Excellence M. le Président de la République, vous l’avez dit tantôt, cette visite est mémorable pour vous. Quelles sont justement les images fortes qui restent gravées dans votre mémoire au moment de quitter le Denguélé ?

Je vais vous le dire sincèrement. J’ai été quand même bouleversé à Gbéléban quand le jeune Amadou (Coulibaly) nous a relatés ce qui est arrivé à ma mère. C’était des moments très douloureux pour nous. C’était un moment vraiment difficile. Mais, fondamentalement, l’amour des populations ici ne m’a jamais fait défaut. Je dois dire que j’ai beaucoup de chances d’avoir une telle affection de mes parents maternels. Je me souviens de combien ma mère était attachée à Odienné. Tout le temps qu’elle passait ici, elle allait dans toutes les familles pendant les fêtes. Et pendant le mois de ramadan, même si c’était un carton de sucre, elle faisait des dons aux familles. Elle les envoyait elle-même, quand elle le pouvait ou envoyait des gens . Elle était présente également à toutes les cérémonies notamment les mariages. Bref, je peux vous parler de ça durant des heures et des heures. Je bénéficie un peu de son image et des œuvres qu’elle a eues à faire pour ses frères et sœurs de cette région et qui me le rendent d’ailleurs bien, tous sans exception. A commencer par mes frères qui sont à Gbéléban, et aussi Mme le maire d’Odienné, qui fait un travail remarquable. Je me réjouis aussi de savoir que dans la région, nous avons quatre femmes qui sont maires. Je crois que c’est du jamais vu en Côte d’Ivoire. Pour moi qui suis pour la politique du genre, je m’en félicite et je dis aussi que c’est chez moi que ça se passe (rires). Je suis très fier de ça. En matière de gestion communale, je pense que Nassénéba Touré fait un bon travail, ainsi qu’Affoussy Bamba au niveau du gouvernement. Nous sommes fiers de cette municipalité. Quand je vois Odienné que j’ai visitée en 2010 pendant la campagne (électorale) et Odienné d’aujourd’hui, c’est vraiment une métamorphose. Et je suis sûr que dans deux ou trois ans quand je reviendrai ce sera encore bien meilleur. N’est-ce pas Mme le maire ? Nous vous donnerons les moyens pour le faire, parce que vous le méritez.

Après l’Appel de Daoukro lancé le 17 septembre 2014 par votre aîné le président Henri Konan Bédié, vous avez lancé aujourd’hui (ndlr : dimanche 24 mai 2015) ce que l’on pourrait appeler, avec votre permission, l’Appel d’Odienné, dans lequel vous demandez aux populations d’exiger du concret aux candidats à l’élection présidentielle d’octobre prochain. Est-ce à dire que vous avez le sentiment que vos potentiels adversaires à ce scrutin vendent des illusions aux Ivoiriens ?

Vous avez dit qu’après l’Appel de Daoukro, il y a maintenant l’Appel d’Odienné. Vous savez, moi, j’ai décidé de faire de la politique parce que je voulais apporter une contribution à mes concitoyens et mon pays. Ce n’était pas pour avoir un poste. Je l’ai dit pendant la campagne de 2009 et 2010. Je ne souhaite pas me répéter. J’étais très à l’aise à Washington. En tant que directeur général adjoint du FMI, je touchais mieux que Bill Clinton qui était président des Etats-Unis. Ce n’était pas une question d’argent ou de poste. Mais, je voulais aider mes concitoyens. J’ai emmené des projets, un programme. J’ai dit comment j’allais le financer. Des gens ont pensé que c’était impossible. Maintenant, nous faisons plus de projets et de financements que prévu. Je veux que ceux qui aspirent à cette haute fonction, donc à la confiance des Ivoiriens soient plus sérieux dans ce qu’ils vont proposer à nos concitoyens. Je pense que les Ivoiriens sont mûrs. Il ne s’agit pas seulement des jeunes, mais également les vieux. Nous avons plus d’un demi-siècle d’indépendance. Dans cette campagne, il faut arrêter la division, éviter de lancer des propos qui ne correspondent à rien du tout. Et il faut apporter du concret aux Ivoiriens et dire ce qu’on va faire pour eux. Et ce concret, ce n’est pas seulement le matériel. Il y a aussi l’affection, l’amour, la réconciliation. C’est tout ça qui fait une nation et ce que je voudrais dire c’est que nous devons avoir des hommes politiques d’une race nouvelle qui pense d’abord aux populations plutôt que de penser à eux-mêmes. Cela est très important. Je souhaite qu’après moi, ce soit vraiment une nouvelle génération d’hommes politiques qui va en faire en sorte de continuer à servir le peuple, et non pas se servir comme le Président Houphouët le disait. Ils ne doivent pas servir leurs parents, ou leurs amis. Ils doivent plutôt servir le peuple, tous les Ivoiriens partout en Côte d’Ivoire. Je vous remercie.

Propos recueillis par T.A.B
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