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Société Publié le samedi 25 avril 2009 | Fraternité Matin

Droits...: de l’homme : Qu’est-ce que la compétence universelle des tribunaux belges?

Il est très souvent fait mention dans la presse de
“la compétence universelle des tribunaux belges”. Pourriez-vous m’en dire plus? Merci à Fraternité Matin
pour ses éclairages.
Claude GUEFFA

Etudiant en 2ème année, Université de Cocody

BP 34 Abidjan
Réponse :

La loi dite de «compétence universelle» des tribunaux belges, votée en 1993 par le parlement de ce pays, permet à des juges belges de traduire en justice, en Belgique, des personnes coupables de génocide, de crimes contre l’humanité et de crimes de guerre, quels que soient la nationalité des auteurs et des victimes et l’endroit où ces crimes ont été commis, c’est-à-dire sans qu’aucun critère de rattachement ne soit exigé. Une première mondiale. La Belgique devient ainsi l’un des rares pays au monde (avec l’Espagne) à engager des poursuites pour des crimes graves de Droit International commis à l’étranger, sans que l’un des ses ressortissants ne soit victime, ni que l’auteur du crime ne soit présent dans l’état poursuivant.

Cette loi se fonde sur le principe de la compétence universelle, principe de droit international qui dispose que chaque état a un intérêt à traduire en justice les auteurs de crimes spécifiques de droit international, indépendamment du lieu de perpétration de ces crimes et indépendamment de la nationalité des auteurs ou des victimes. Le droit international consacre la compétence universelle pour éviter que les responsables des crimes les plus abominables puissent trouver refuge à l’étranger et échapper ainsi à la justice. Le principe de la compétence universelle qui constitue un élément essentiel d’une justice internationale émergente, constitue un important instrument de lutte contre l’impunité, surtout en ce qui concerne les graves violations des Droits de l’Homme car l’objectif fondamental est de ne laisser aucun crime grave impuni. A ce titre, les propos de l’ancien Haut Commissaire de l’ONU aux Droits de l’Homme, Sergio Viera de Mello, demeurent actuels et pertinents: « Pendant plus d’un siècle, des générations successives ont peu à peu tissé un réseau impressionnant de principes juridiques et moraux fondés sur le respect de la dignité de l’individu. Mais la Cour est la première et la seule instance internationale permanente qui ait qualité pour traduire en justice des individus –quels qu’ils soient- responsables des pires violations des Droits de l’Homme et du droit international humanitaire. Nous nous donnons enfin les moyens de traduire nos beaux discours en actes… »

En cas de violation des Droits de l’Homme, le procureur belge a le pouvoir de déclencher les poursuites pénales. Toutefois, les poursuites peuvent être consécutives à une plainte des victimes, avec constitution de partie civile auprès du juge d’instruction.
POURSUITES

Dans la pratique, la Belgique est l’un des rares pays au monde, à part l’Espagne dont la justice a inculpé le Général PINOCHET pour des crimes commis au Chili contre des chiliens, à avoir engagé des poursuites pour des crimes graves de droit international commis à l’étranger, sans que l’un de ses ressortissants ne soit victime, ni que l’auteur du crime ne soit présent dans l’Etat poursuivant.

Mais ce principe de la compétence universelle a connu des modifications et des limites substantielles (sans compter aussi les nombreuses protestations des autres pays) pour trois raisons essentielles:

Premièrement, il était nécessaire de mettre la loi belge en conformité avec le statut de Rome instituant la Cour Pénale Internationale et que la Belgique a ratifié. Il s’agissait ainsi de régler la coopération entre la justice belge et la Cour Pénale Internationale, d’une part et, d’autre part harmoniser et adapter la définition des crimes de droit international avec celles du Traité de Rome. Des pays comme les Etats-Unis d’Amérique continuent d’avoir une attitude de méfiance, si ce n’est d’hostilité envers la CPI.

Deuxièmement, il s’agissait de définir les nouvelles conditions sous lesquelles les tribunaux belges seront compétents.

Enfin, troisièmement, ces modifications avaient pour but d’harmoniser le droit belge des immunités avec le droit international.

L’une des questions les plus chaudes après la création de la Cour Pénale Internationale est celle de l’opportunité du maintien de ce principe qui n’a pas toujours été accepté dans l’ordre juridique belge. En effet le Statut de Rome constitue l’une des innovations majeures en matière de lutte contre l’impunité. Il est vrai, comme l’indique le Traité de Rome, que la CPI est compétente pour « connaitre des cas de génocide, de crime contre l’humanité et de crime de guerre lorsque les juridictions nationales refuseront de juger ces crimes ou seront dans l’incapacité de le faire. », mais son action ne sera pas rétroactive (la CPI ne sera compétente que pour les crimes commis après l’entrée en vigueur du traité de Rome, c’est-à-dire à compter du 1er juillet 2002.) De plus, la CPI ne pourra matériellement s’occuper que d’un nombre limité de cas. Enfin, son régime juridictionnel exige qu’en l’absence d’un renvoi par le Conseil de Sécurité des Nations Unies, la CPI ne sera compétente que pour des crimes commis par les ressortissants des états parties ou pour des crimes commis sur le territoire des états parties ou qui ont accepté la compétence de la Cour. Pour éviter toute brèche dont pourraient profiter les auteurs présumés de crimes de droit international, les modifications apportées par le législateur belge incluent, comme le permet l’article 84 de la Constitution belge, une “loi interprétative” qui garantit la possibilité d’engager des poursuites en Belgique même en l’absence de l’auteur présumé de crimes graves de Droit International. Cette “loi interprétative” annulera les effets des décisions de la Cour d’appel de Bruxelles qui avaient décidé que les juridictions belges n’étaient pas compétentes pour ouvrir une instruction contre des auteurs présumés de crimes graves de Droit International au motif que ces auteurs n’étaient pas présents sur le territoire belge notamment les plaintes qui ont déjà été déposées dans la mesure où elle permettra de préserver tous les actes d’instruction déjà effectués, notamment les commissions rogatoires internationales exécutées, essentiellement dans les affaires génocide Rwanda et Hissène Habré.

Le conflit reste permanent entre souveraineté et justice dans l’ordre international.

YAO Noël (*)

Journaliste-Juriste
(*) 2e Vice-président de la Commission Nationale des droits de l’Homme de Côte d’Ivoire (CNDHCI), Chargé des mécanismes de protection.

N.B: Les commentaires et idées exprimés dans cette rubrique le sont à titre individuel.

Textes et concepts

ORGANES DES TRAITES :

Appelés organes conventionnels ou organes de suivi, sept organes d’experts veillent à ce que les Etats parties exécutent leurs obligations au titre de sept instruments fondamentaux des Nations Unies relatifs aux Droits de l’Homme.

HAUT COMMISSARIAT DES NATIONS UNIES AUX DROITS DE L’HOMME

Organe établi à la suite de conférence mondiale de 1993 et qui a pour responsabilité le suivi des activités des Nations Unies en matière des Droits de l’Homme, le Haut Commissariat des Nations Unies aux Droits de l’Homme a pour mission de protéger et promouvoir les Droits de l’Homme. Il vise à renforcer le programme des Droits de l’Homme Nations Unies et à apporter un soutien de qualité aux organes des Nations Unies chargés du suivi des traités et des mécanismes spéciaux établis par la Commission des Droits de l’Homme.

DECLARATION DE DES DROITS DE L’HOMME ET DU CITOYEN DE 1789 ET DECLARATION UNIVERSELLE DES DROITS DE L’HOMME DU 10 DECEMBRE 1948

Toutes deux d’inspiration libérale, ces deux textes fondamentaux sont d’origines différentes. Si la première est d’origine française (Révolution), la seconde est d’émanation onusienne même si le français RENE CASSIN y a joué un rôle majeur. Comme la Déclaration de 1789, la DUDH reste certes un texte important en la matière mais a une valeur purement morale et non-contraignante, contrairement aux deux pactes internationaux de 1966 qui lient les Etats parties…

Pour saisir la Commission des droits de l’Homme
Vous avez vos droits violés, vous voulez saisir la Commission nationale des droits de l’homme, faites le numéro Vert 80000888 ou le secrétariat exécutif au 22448518 ou écrivez : CNDHCI 01 BP 1374 Abidjan 01
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