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Politique Publié le jeudi 30 juillet 2009 | Nord-Sud

Les députés ont adopté hier le traité ivoiro-burkinabé : Tout sur le mariage Gbagbo-Compaoré

Lors des plénières marquant la clôture de sa première session, l'Assemblée nationale a adopté hier, dans sa majorité écrasante (128 voix pour et 2 contre), le projet de loi autorisant le président Laurent Gbagbo à ratifier le traité d'amitié et de coopération entre Abidjan et Ouaga. Nous vous livrons ici de larges extraits du rapport général présenté par la Commission des relations extérieures présidée par Mme Bobi Assah Emilienne. Il définit les avantages du traité et relève les réserves formulées par les députés avant son adoption.


Rapport général

«La Commission des relations extérieures a examiné, le mercredi 15 juillet 2009, le projet de loi autorisant le président de la République à ratifier le traité d'amitié et de coopération entre la Côte d'Ivoire et le Burkina-Faso, signé le 29 juillet 2008 à Ouagadougou, au Burkina-Faso. (…) Ce traité vient conforter une coopération séculaire et multiforme entre deux nations liées par la géographie et l'histoire. Cette coopération a eu très tôt pour point d'encrage les questions économiques à travers notamment les recrutements de mains-d'œuvre dont les activités ont, à beaucoup d'égards, contribué au développement du secteur agricole ivoirien et à la construction de chemin de fer Abidjan-Niger, demeuré pendant longtemps le symbole du rapprochement entre les deux pays. Ainsi, ce traité qui ouvre une nouvelle ère dans les relations de coopération entre les deux pays, vise 3 objectifs principaux, à savoir : la création d'un cadre de concertation permanent pour garantir la stabilité et la prospérité des deux nations, le développement de la coopération dans les domaines d'intérêts communs, politique, socio-économique, culturel, scientifique, judiciaire, de défense et de sécurité, d'environnement et de droits humains, la promotion du bien-être des peuples burkinabés et ivoiriens. Par ailleurs les deux pays s'engagent à soumettre à leurs partenaires des projets communs de développement. Ces projets concerneront entre autres les infrastructures, la communication, les transports, l'agriculture, la production animale afin de conforter les relations privilégiées existantes. Ainsi, pour s'assurer de l'application efficiente du présent traité, les parties ont décidé d'instituer trois organes. La conférence- sommet des chefs d'Etat, les rencontres ministérielles sectorielles et les autres rencontres qui auront en charge sa mise en œuvre. Au regard du rôle crucial que joue le Burkina-Faso dans le règlement de la crise ivoirienne, de la proximité géographique, des liens historiques entre les deux pays, la ratification de ce traité apparaît comme un instrument pour une coopération de qualité entre le Burkina-Faso et la Côte d'Ivoire.

(…) Les parlementaires ont manifesté un vif intérêt à l'examen de ce projet de loi qui vient renforcer les relations d'amitié et de coopération entre la Côte d'Ivoire et le Burkina Faso. En raison de liens particuliers qui lient les peuples ivoirien et burkinabé, et au vu du développement récent de leur histoire commune, les parlementaires ont fait des observations sur les points suivants : Le bénéfice mutuel de la coopération passée. L'opportunité de la ratification et de l'efficacité du traité, la réciprocité du droit d'établissement, l'impact du présent traité sur la sortie de crise.


Bénéfice mutuel de la coopération passée

Pour les députés, affirmer que «cette coopération a eu très tôt pour point d'encrage les questions économiques à travers notamment les recrutements de main d'œuvre dont les activités ont à beaucoup d'égards contribué au développement du secteur agricole ivoirien et à la construction du chemin de fer Abidjan-Niger demeuré pendant longtemps un symbole de rapprochement entre les deux pays», ne traduit pas le bénéfice réel et mutuel de coopération séculaire entre les deux nations. En outre, il laisse transparaitre un sentiment de culpabilité de la part des Ivoiriens. Aussi a-t-il été souhaité la réécriture de cet article. Le gouvernement qui reconnait la pertinence de cette remarque s'est dit favorable à la réécriture de ce paragraphe afin de rétablir la vérité historique. Les paragraphes 2 et 3 de l'exposé des motifs ont été reformulés ainsi qu'il suit : «Il vient en effet conforter une coopération séculaire et multiforme entre deux nations liées par la géographie et l'histoire qui date des années de lutte pour l'indépendance et pour la liberté. Cette coopération a eu très tôt pour point d'encrage les questions économiques à travers notamment, les recrutements de main d'œuvre dont les activités ont, à beaucoup d'égards contribué au développement mutuel des deux pays».


De l'opportunité de la ratification et de l'efficacité du traité

Certains députés ont estimé qu'il n'était pas opportun de ratifier ce traité en l'état actuel du processus de sortie de crise. En effet, l'intégrité du territoire national n'est pas encore recouvrée dans sa partie septentrionale. De même, du point de vue de l'armement, la Côte d'Ivoire est toujours sous embargo. Par ailleurs, la Côte d'Ivoire a déjà ratifié de nombreux traités sous-régionaux dans lesquels elle se retrouve avec le Burkina Faso, notamment dans le Conseil de l'Entente, l'Uemoa et la Cedeao. Ces traités énoncent pour l'essentiel, des objectifs similaires à ceux du présent accord bilatéral. En outre, la Côte d'Ivoire et le Burkina Faso ont déjà signé des accords sectoriels bilatéraux. Ces nombreux accords n'ayant pas empêché la survenance de la crise du 19 septembre 2002, les députés se sont interrogés sur l'opportunité réelle de la ratification de ce traité. D'autres députés par contre, ont exprimé leur entière adhésion à la ratification du présent traité. Ils ont estimé que la Côte d'Ivoire et le Burkina Faso à l'image de la France et de l'Allemagne après la deuxième guerre mondiale doivent pouvoir dépasser les clivages afin de consolider les liens séculaires qui les unissent. Pour le gouvernement, il s'agit d'un traité d'amitié qui vise à restaurer le climat de fraternité et d'entente qui a toujours existé entre les deux peuples et qui a été mis à mal avec la survenance de la crise du 19 septembre 2002. Toujours selon le gouvernement, ce traité bilatéral permettra d'instaurer un cadre de concertation permanente entre la Côte d'Ivoire et le Burkina Faso. Toutes les questions touchant aux intérêts des deux pays (trafic d'armes, problèmes fonciers, sécurisation de frontières, fuite des produits agricoles…) pourraient trouver ainsi des réponses.


De la réciprocité du droit d'établissement

Le présent traité en son article 2, stipule : «En vue de viabiliser les objectifs ci-dessus définis, les deux parties conviennent de se conformer aux principes suivants : Le droit d'établissement et de séjour de leurs ressortissants dans chacun des deux Etats». A ce propos, les députés se sont interrogés sur les motivations du gouvernement à faire adopter une telle disposition en faveur du Burkina Faso. Alors que dans le cadre de la Cedeao, le parlement ivoirien avait ajourné son adoption. Par ailleurs, ils ont voulu être informés, sur l'existence d'un mécanisme de réciprocité dans la mise en œuvre de ce droit d'établissement. En réponse, le gouvernement a rassuré la Commission en indiquant que dans le cadre général de la Cedeao, l'ajournement du projet de loi par le parlement ivoirien ne se justifiait que pour des raisons de supplément d'information. Les députés ayant souhaité avoir plus d'informations sur la réciprocité du droit d'établissement. En l'espèce, il s'agit d'un cadre bilatéral restreint où la question de la réciprocité pourra être discutée en tenant compte de l'intérêt des professions et des secteurs d'activités des Etats parties.


De l'impact du présent traité sur la sortie de crise

Les parlementaires ont souhaité être éclairés sur l'impact de la ratification du présent traité sur la sortie de crise. Selon le gouvernement, la ratification de ce traité permettra de préparer l'après crise à travers la sécurisation des frontières communes, la lutte contre la circulation des armes légères, petits calibres, ainsi que la libre circulation des personnes et des biens. Il s'agit également du renforcement de la coopération dans tous les secteurs. En outre, il a été rappelé que l'esprit du dialogue direct doit prévaloir dans la normalisation des relations entre la Côte d'Ivoire et le Burkina Faso à travers la ratification de ce traité. L'avènement de cet environnement apaisé contribuera à la sortie de crise (…)».

Retranscrit par Djama Stanislas & A.K.
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