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Économie Publié le vendredi 4 décembre 2009 | Nord-Sud

Reconstruction post-crise - PME : Que d’obstacles devant les porteurs de projets !

L’Etat a annoncé que la reconstruction post-crise sera l’affaire des Petites et moyennes entreprises. Malheureusement, tout concourt à la mort de ce secteur.

Permettre aux Petites et moyennes entreprises (PME) de relancer leurs activités afin de favoriser la reconstruction post-crise, le gouvernement ivoirien affirme en faire une priorité. «Nous pensons que remettre la petite entreprise sur les rails est essentiel pour booster notre économie. C’est pourquoi, nous avons fait du paiement de la dette aux fournisseurs de l’Etat, une préoccupation majeure», souligne le ministre de l’Economie et des Finances à la rentrée budgétaire. Selon Charles Diby Koffi, du sang neuf et de qualité, il en faut au secteur des PME. Malheureusement, les statistiques fournies par la Fédération ivoiriennes des petites et moyennes entreprises (FIPME) invitent à la réserve. Ainsi, sur 1.000 créations en 2008, environ 300 ont nécessité moins de 25 mi­llions Fcfa d’investissement de démarrage. Parmi ces créations, seules 17 % ont bénéficié d’un concours bancaire. Selon Achille Coulibaly, responsable d’une société d’intermédiation, plus le projet est petit, plus l’accès au crédit bancaire est difficile : ainsi les créateurs apportant moins de 500.000 Fcfa de capital représentent 35 % de l’ensemble des créateurs, mais seulement 8 % d’entre eux obtiennent un financement bancaire. Les données disponibles en matière de capital-risque montrent également que, ces dernières années, le démarrage ne représente encore qu’une petite fraction (de l’ordre de 1% des opérations). Autrement dit, il existe un besoin de micro-financement qu’aujourd’hui le marché ivoirien ne satisfait pas. Selon M. Coulibaly, il est plus difficile pour un petit promoteur, de trouver les premières ressources qu’à une entreprise technologique cotée en bourse de lever des milliards Fcfa. «La très grande majorité des projets de création d’entreprise sont de petits projets qui, paradoxalement, éprouvent plus de difficultés à accéder au financement que les projets plus conséquents»,explique-t-il.


Pas d’argent pour les PME

En Côte d’Ivoire, en effet, les obstacles à la création d’entreprise sont multiples : difficultés d’accès au financement, carences des dispositifs de soutien à la création d’entreprise, ina­dé­quation des politiques publiques. De fait, aux difficultés liées à la constitution et au démarrage, s’ajoute un risque financier et patrimonial qu’aucun filet de sécurité ne vient atténuer. Pour Faustin Gré, entrepreneur et président du Syndicat national des fournisseurs de l’Etat de Côte d’Ivoire (Synafeci), la création d’entreprise est presque devenue un mythe. «Avec les difficultés que nous éprouvons dans nos relations avec la puissance publique, le constat s’impose : la création d’entreprise se présente comme un parcours hérissé d’obstacles infranchissables, exigeant de celui qui veut s’y lancer des mérites extraordinaires. Il faut passer par toutes les affres de la complexité. Quelque chose de surhumain », fulmine M. Gré à l’occasion d’un sit-in devant la Banque mondiale. Au fond, observe-t-il, il ne faut pas s’étonner si, aujourd’hui, en Côte d’Ivoire, l’entreprenariat s’effrite. Au-delà des aspects psychologiques, la prise de risque, bien réelle, semble en effet disproportionnée. Outres les dysfonctionnements administratifs, le système juridique ivoirien se caractérise par un fort cloisonnement et par une pénalisation excessive du chef d’entreprise en cas d’échec. Pour Me Arsène Kouamé, avocat d’affaires, cette rigidité ivoirienne est d’autant plus préoccupante qu’elle empêche de tirer les pleins bénéfices de la «nouvelle économie», liée notamment aux nouvelles technologies, qui fait fleurir, dans les économies occidentales, une profusion de très petites entreprises et qui «tire» la croissance et l’emploi.

Ouvrir les marchés publics

Cette carence prépare mal l’économie ivoirienne à un avenir prometteur. Selon le directeur général adjoint de l’Agence de gestion des routes (Ageroute) Marius Pokou, une étude financée par les partenaires au développement existe pour promouvoir l’émergence des PME dans le domaine des infrastructures routières. Cette étude devrait prendre en compte, outre le financement des petites entreprises, la formation. Quelle qu’en soit la forme, font remarquer les experts, l’accompagnement d’un projet de création d’entreprise est un facteur déterminant de la pérennité. Or, comme le souligne le rapport sur la création d’entreprise, les entrepreneurs ne sont pas accompagnés pendant la phase de création. Les dispositifs d’accompagnement souffrent, par ailleurs, de l’absence de prise en compte par la loi de leur existence. Chaque administration poursuit sa propre logique, multiplie des formalités qui constituent une véritable source de découragement pour les petites entreprises. Le droit des marchés publics est, à cet égard, emblématique, d’une part, de la complexité des procédures administratives et, d’autre part, de la faible prise en compte des besoins des PME par l’ensemble des acteurs publics. Selon Zoliba Koné, économiste-consultant, disposant de moyens limités pour accéder à l’information sur les besoins des acheteurs, pour suivre les différentes phases de la procédure de passation des marchés et pour maîtriser les contraintes d’une procédure par ailleurs trop complexe, les PME accèdent peu aux marchés publics, et le plus souvent en tant que sous-traitantes, dans des conditions peu satisfaisantes. Le directeur du Bureau international du travail (BIT) à Abidjan, Ben Lakp Low, affirme qu’il s’agit d’une problématique nationale qui a besoin d’être résorbée si l’on veut donner un contenu à la reconstruction post-crise. «Il faut que les petites et mo­yennes entreprise continuent de prendre de l’importance dans le tissu économique ivoirien », dit-il.
Mais pour certains, les entrepreneurs ivoiriens sont pénalisés par le manque de vision. Au cours de la conférence des partenaires de la Société Financière In­­terna­­tionale, tenue à Mumbai, un industriel indien a confié aux consultants présents que son entreprise travaillait à fabriquer des produits avant que les clients n’en éprouvent le besoin. «Produire avant que les gens n’en aient besoin et pour y arriver, il faut anticiper», a-t-il déclaré. Par ailleurs, l’Etat est mauvais payeur. La dette intérieure, lourde, prive les entreprises de ressources pour financer leur trésorerie, moderniser et élargir leurs outils de production, donc produire des richesses, créer des emplois, payer leurs actionnaires et distribuer du pouvoir d’achat à leurs employés.

Lanciné Bakayoko
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