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Afrique Publié le lundi 20 septembre 2010 | Le Patriote

Election présidentielle en Guinée - Les raisons du report du second tour

C’est hier que devait avoir lieu le deuxième tour du scrutin présidentiel en Guinée. Mais la Commission électorale nationale indépendante (CENI) avec l’accord des autorités de la transition a décidé de reporter le deuxième round de l’élection présidentielle à une date ultérieure. Officiellement, les raisons avancées par la CENI sont le manque de moyens et de temps. Mais en réalité, la vérité est tout autre. Selon des indiscrétions au niveau de la CENI, l’ajournement du vote du dimanche dernier est dû en grande partie aux surenchères des partis politiques. Depuis le lundi dernier, les camions chargés de transporter le matériel électoral dans les différentes régions du pays étaient prêts à partir. La CENI en donnant la date du 19 septembre était prête. Au moment où les camions s’apprêtaient à quitter Conakry, de nouvelles exigences ont été posées par les différents candidats. Principalement par le camp du Pr. Alpha Condé qui estime qu’au premier tour, la CENI n’a pas fait son travail dans la transparence comme elle laisse entendre. Aussi, pour apaiser les esprits, les autorités de la transition et la CENI ont-elle accepté que les règles du jeu soient modifiées. En flagrante contradiction avec le code électoral. Lors des différentes séances de travail, plus de 1400 nouveaux bureaux de vote ont été créés. Les votes avec les simples récépissés qui ont été acceptés au premier tour, sont interdits. Désormais pour voter, il faut avoir sa carte d’électeur. Ce sont ces deux principales exigences qui ont amené la CENI à dire aux autorités de la transition qu’elle n’est pas prête. Les raisons sont simples. La création de plus d’un milliers nouveaux bureaux de vote entraîne une véritable chamboulement dans l’organisation de la CENI. Cette nouvelle donne amène l’institution chargée d’organiser les élections en Guinée de recruter plus 50 mille nouveaux agents de bureau de vote qu’il faut former. Une formation pour des raisons évidentes qui ne se fera pas en une journée. La CENI a donc demandé un minimum de trois jours pour boucler la formation accélérée et par vagues de ces agents. En plus de cela, il faut attendre que les démembrements locaux puissent former et valider les différentes équipes chargées de superviser le scrutin dans les bureaux de vote. Après ce travail, la liste des membres des nouveaux bureaux de vote doit être retournée au siège de la CENI à Conakry par les Commissions préfectorales et sous-préfectorales électorales. Quant à la deuxième décision principale, elle oblige la CENI à passer d’autres commandes de cartes d’électeurs. Or les cartes d’électeurs délivrées par la structure organisatrice des élections en Guinée, pour des soucis de transparence, sont éditées en Afrique du Sud. Il faut au moins une semaine, selon des sources proches de la CENI, pour que ces cartes soient prêtes et acheminées en Guinée. Face à ces nouveaux défis, le directeur des opérations à la CENI, M. Pathé Dieng a été obligé de dire au Premier ministre de la transition Jean-Marie Doré le mercredi dernier au cours d’une rencontre avec les responsables de la CENI, que les Guinéens ne pouvaient dans ces conditions aller au vote le 19 septembre. Cette rencontre s’est faite en présence des deux candidats et aux observateurs internationaux. En outre, il fallait que les deux candidats du second tour se mettent d’accord sur ces nouveaux points. Cet accord n’a été obtenu qu’à la veille le 15 septembre. Leurs représentants se sont entendus sur le répertoire ainsi que sur d’autres points. C’est après l’obtention de cet accord que les premiers camions chargés de transporter le matériel électoral ont pris la direction de l’intérieur du pays. Le chef de l’Etat, le général Sékouba Konaté, excédé dans un premier temps par les surenchères et tergiversations des deux camps, avait demandé aux deux candidats d’aller voir le médiateur dans la crise guinéenne, le président Blaise Compaoré, à Ouagadougou. Mais les deux candidats, l’ancien Premier ministre Cellou Dalein Diallo et le Pr. Alpha Condé n’ont pas trouvé cela nécessaire. Finalement, le chef de l’Etat guinéen a fait une déclaration le mercredi dernier dans la soirée pour annoncer le report du scrutin à une date ultérieure. Cette nouvelle a eu le mérite de faire baisser la tension qui montait de plus en plus dans le pays entre les partisans du candidat de l’Union des Forces démocratiques de Guinée, Cellou Dalein Diallo et celui du Rassemblement du Peuple de Guinée, le Pr. Alpha Condé. Une tension qui s’est matérialisée par des affrontements le dimanche 12 septembre dernier qui ont fait un mort et plusieurs blessés. La décision du report a surtout permis aux Guinéens d’enterrer dignement le président de la CENI, M. Ben Sékou Sylla, décédé la semaine dernière en France. C’est en présence de parents, d’amis et de plusieurs personnalités qu’il a été inhumé hier au cimetière de Conakry. Mais avec l’incendie qui est intervenu jeudi dernier au camp Samory Touré (et non au camp Alpha Yaya comme nous l’avions écrit dans notre dernière édition) qui a vu une partie du matériel électoral parti en fumée, les Guinéens deviennent de plus en plus sceptiques quant à l’issue de cette élection présidentielle. Pour l’heure, en attendant la nouvelle date du second tour de l’élection présidentielle, les commentaires dans la capitale guinéenne vont bon train. Selon des sources proches de la CENI, le second tour se tiendra soit le 3 septembre soit le 10 septembre.
Jean-Claude Coulibaly (Envoyé spécial)
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