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Art et Culture Publié le samedi 18 février 2012 | L’intelligent d’Abidjan

Les samedis de Biton : Demain la victoire

Le 16 juillet 1950. A Rio de Janeiro. C’est la finale de la coupe du monde de football. Le Brésil, pays organisateur, est opposé à son petit voisin, l’Uruguay. Le pays vient de construire le plus grand stade au monde baptisé le Maracana. Avec deux cents mille places. Le Brésil était déjà réputé comme un pays où les gens adorent le football au même niveau que Dieu. La passion de la population est à son paroxysme dans cette coupe du monde. La première après la deuxième guerre du monde. Le petit voisin est aussi un pays où le football est roi. En plus, presque toute la population masculine a joué du football ou possède une licence. Mais pour les Brésiliens, il n’y a rien en face. A juste titre. La sélection brésilienne est beaucoup plus forte que celle de l’Uruguay sur tous les plans. Durant le match, personne ne semblait croire à ce qui se passait à commencer par les joueurs uruguayens. C’était comme de la magie. Et pourtant c’est au Brésil que le Vaudou est une religion. L’arbitre a peur de siffler la fin du match. Malgré les minutes additionnelles, le Brésil n’arrive pas à égaliser pour bénéficier d’une prolongation. Dans la vie, toute chose a une fin. Par deux buts contre un, le Brésil perd sa finale minutieusement préparée. La foule hurle, gronde, pleure. Des suicides sont enregistrés dans le stade comme dans plusieurs villes du pays. C’est la plus grande tragédie du pays. Impossible dans une telle atmosphère de remettre la coupe au vainqueur sauf, le faire à la sauvette. Les gagnants s’enferment dans les vestiaires pendant des heures et ne quitteront le Maracana qu’à minuit, dans un camion, pour rejoindre leur pays tout juste à côté. En ce jour de deuil national, un enfant, à peine neuf ans, pleure de tout son corps. Il jure de venger, un jour, son pays de cette humiliation. Edson Arantes do Nascimento que le monde connaîtra sous le pseudonyme de Pelé est habité par une grande foi. Le Brésil doit absolument avoir une coupe du monde. On connaît la suite. Le roi Pelé était dans le stade de l’amitié de Libreville. A l’instar du Brésil de 1950, la Côte d’Ivoire doit garder espoir. Demain sera la victoire. Tôt ou tard, l’affront doit être lavé. Pas à cause des modestes joueurs zambiens mais à cause et surtout d’un public rempli de haine contre nos valeureux joueurs beaucoup plus victimes d’un système de jeu prôné par leur entraîneur que d’une faiblesse ou de la malchance. Demain se prépare aujourd’hui. De l’obscurité jaillit toujours la lumière. Quand le régime de Sékou Touré, en 1984, tomba, les nouveaux dirigeants militaires libérèrent les prisonniers du camp Boiro. Le camp Boiro est un camp militaire en plein centre de Conakry. Les habitants de la ville ne pouvaient pas imaginer ce qui s’y passait. Mais à l’étranger, le nom Boiro rappelait la peur, la torture, la mort et la dictature sanguinaire. Quand on ouvrit les portes des geôles, les libérateurs n’en crurent pas leurs yeux. Il était impossible de vivre plus de dix jours dans de telles cellules sans mourir. Des cellules qui ne permettaient même pas de s’asseoir ou de dormir. Et pire, la plupart des prisonniers étaient soumis à la diète. La diète c’est priver l’incarcéré de nourriture pendant des mois, ni aliment, ni eau. D’autres venaient de faire des années dans cette situation. C’est vrai que beaucoup d’autres périrent tel que le premier secrétaire général de l’Organisation de l’Unité Africaine. D’autres sortirent de la prison aveugles, sourdes ou handicapés de tous les membres. Une seule question revenait aux lèvres : « Comment avez-vous tenu aussi longtemps dans cette sinistre prison ? » Chaque détenu donnait la même réponse : « Dieu. » La foi en Dieu. Dans plusieurs cellules, ils avaient écrits des versets louant Dieu, l’Eternel. Un mystique du moyen âge écrivait : « Que rien ne te trouble. Que rien ne t’épouvante. Tout passe. Dieu ne change pas. La patience triomphe de tout. Celui qui possède Dieu ne manque de rien.» Voir un président de la République pleurer avec ses joueurs et une partie des habitants de son pays montrer que cette finale perdue est certainement l’une des plus grandes tragédies sportives de notre nation. Pour ceux qui croient fermement en Dieu, tout est grâce. On doit même remercier le Seigneur pour cette défaite. Ses voies sont impénétrables. Nous sommes dans la situation du Brésil de 1950. Cette défaite ne peut qu’être le point de départ de plusieurs victoires à venir. On parle de la fin d’une génération en oubliant que l’Académie avait trois promotions. Ce n’est que la première qui est en fin de parcours. Drogba sera vengé tôt ou tard par plusieurs trophées. Des enfants ont pleuré le dimanche dernier. Parmi eux, se trouvent les «justiciers» de demain. Comme les prisonniers du camp Boiro, gardons espoir. Ayons comme eux la foi. Ne nous laissons pas abattre par le découragement. Karol Wotyla ne s’imaginait pas Pape de l’église catholique à l’issue du premier conclave qui choisit Jean-Paul 1er. En moins de quarante-cinq jours le voilà devenu Jean-Paul 2. Séchons nos larmes. Retrouvons le sourire. Demain n’est plus loin. Eternel tout puissant, bénis-nous. Ainsi va l’Afrique. A la semaine prochaine.

Par Isaïe Biton Koulibaly
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