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Société Publié le vendredi 29 juin 2012 | Le Temps

Plus de 60 ans après, la Sicogi veut arracher des maisons à leurs locataires

Depuis quelques semaines, la Société ivoirienne de construction et de gestion immobilière (Sicogi), a entrepris l’expulsion par la force, de plusieurs locataires des logements situés à Adjamé dans les environs de l’immeuble le Mirador. Les habitants se sont bravement opposés à cette expulsion. Ce qui a fait reculer un tant soit peu, la Sicogi. Dans la même veine, elle vient de lancer un avis d’expulsion depuis le 27 juin 2012, aux locataires des logements situés dans les quartiers Bel Air, ancien Cocody, Adjamé, Treichville Autoroute, Treichville Aras et Treichville Belle ville. Un tour hier jeudi 28 juin 2012, dans ces quartiers concernés, permet de se rendre compte de la tension qui y règne. Il est environ 9 h lorsque nous prénons attache avec les habitants du quartier Treichville Autoroute. Apparemment, le secteur est calme, et les populations vaquent tranquillement à leurs occupations. Les premiers habitants rencontrés n’ont eu aucun mal à expliquer leur étonnement, après tant d’années vécues dans leurs maisons, de recevoir un avis d’expulsion de la part d’un huissier commis par la Sicogi. C’est le cas de Mme Yao Venance qui depuis 1958, vit dans la maison qui l’a vue grandir. «Je vis ici depuis l’âge de 18 ans. C’est ici que je vivais avec mon défunt mari depuis notre tendre jeunesse. J’ai eu tout mes enfants dans cette maison. Il est hors de question que je quitte cette maison parce que la Sicogi en a décidé ainsi. A l’époque, le loyer était fixé à 4.500 Fcfa. Je ne bougerai pas d’ici», ne cesse de décolérer cette dame fortement choquée par cette décision d’expulsion. C’est le même son de cloche chez les enfants de la famille Ezan, ainsi que chez les petits enfants de la grande famille Wodié Robert, tout comme chez Porquet Mouchy. Là aussi, les enfants se plaignent de l’attitude arbitraire de la Sicogi qui a décidé de les expulser, en leur donnant un délai de trois mois après 60 ans de vie dans leur maison familiale. Dans le quartier, les locataires s’organisent à la riposte. Ils préparent une grande réunion à laquelle ils comptent associer tous les locataires d’Adjamé, du quartier Aras, Treichville Belle ville, Treichville Bel air et ancien Cocody. La tension est vive et la colère ne fait que monter. Il suffit d’une étincelle pour que le feu s’allume. Le Secrétaire général des locataires de la Sicogi, N’guessan Kouao René Antoine, explique avec éloquence, l’orgueil ainsi que la détermination de la Sicogi de vouloir à tout pris les exproprier. Pour lui, cette société se comporte en vulgaire délinquant et dit des contres vérités. Il voudrait tout simplement considérer que c’est un nouveau départ pour la société. La première opération de la Sicogi apprend-on, a démarré en 1994. Cela concernait selon les explications du Secrétaire général des locataires de la Sicogi, la vente du patrimoine locatif. «Depuis 1994, poursuit-il, les maisons en question ont été vendues aux locataires».

A l’époque, Banga Koné était le Dg de cette entreprise. Puis, arrive la seconde opération de la Sicogi au cours de laquelle, il a été unilatéralement décidé d’augmenter les prix des loyers, soit 18 années après. «A cette époque précise-t-il, les locataires sur instance du ministre d’alors, Albert Tiapani Kacou, ancien ministre de la Construction et de l’Urbanisme du président Bédié, ont décidé de suspendre le paiement des loyers». Depuis ce temps, les négociations entre les locataires et la Sicogi sont été gelées. Les locataires n’apprécient pas du tout qu’aujourd’hui, la Sicogi envoie des huissiers pour encaisser le loyer avec à l’appui des menaces. Des locataires ont tenu à expliquer qu’après échanges avec les services d’exploitation de la Sicogi, un protocole d’accord a été trouvé. Cet accord permettait aux locataires d’apurer leurs arriérés de loyers à leur convenance, en attendant de voir clair dans la gestion scandaleuse de paiement de leurs loyers. Mais contre toute attente, la Sicogi envoie des papiers pour l’expulsion des locataires, sous le prétexte d’une réhabilitation du quartier. A cet effet, le représentant des locataires tient à faire des précisions. Pour les habitants, le quartier est à 100 % bitumé, les maisons ne souffrent d’aucun défaut et l’environnement est bien portant. Aussi, parmi les locataires, certains disposent déjà de leur titre foncier. Cependant ! La Sicogi fait payer des impôts aux locataires simples. Toute chose qui est contestée par bon nombre des habitants.

Face donc à cette situation, les locataires sont obligés d’utiliser tous les moyens dont ils disposent pour contacter Alassane Ouattara et le président Henri Konan Bédié pour mettre fin à leur calvaire. Car pour eux, le quartier est pratiquement vendu, à part quelques maisons qui aspirent à la vente. Les locataires soutiennent qu’ils ne sont pas à rénover. Selon le représentant des locataires Kouao, il existe une signature de protocole de retrait de charge conforme à ce que le ministre Tiapani Albert Kacou a donné et qui est respecté par les locataires. Il est 13 h40 lorsque nous mettions le cap sur l’habitat Craonne. Pour les 513 locataires de ladite localité, communément appelé Gbatanikro, ils demeurent inflexibles et très déterminés. Ils demandent une seule chose. Que les maisons leur soient vendues comme il en est dans les quartiers Koumassi et Marcory où les locataires sont entrés en possession de leurs maisons comme propriétaires. Pour eux, les maisons n’ont pas été construites par la Sicogi. Ils déclarent tous sur l’honneur que leurs parents ont acquis ces maisons depuis l’origine.

C’est à dire dès que le promoteur colon français M. Clouget avait achevé la construction des logements, leurs parents ont été les premiers locataires. C’est seulement après que la Sicogère est venue reprendre la gérance à l’annonce des indépendances des pays africains dont fait partie la Côte d’Ivoire. Depuis 1950 donc, ils sont propriétaires de leurs maisons. Un patriarche des années1950, maçon de son état à l’époque où se déroulaient les faits est formel. Sous anonymat, il insiste et signe. «La Sicogi n’est pas propriétaire de ces logements, qu’ils laissent les locataires tranquille». Il joint sa voix à celles de ses filleuls et exige que la Sicogi vende les maisons aux locataires actuels. Ses propos ont été appuyés par les «enfants» du quartier qu’il a vu naître et qui luttent pour leurs parents. Il s’agit de M. Tagbo Harrisson et de M. Tiérou Christophe, des ainés du quartier Gbatanikro déterminés à défendre les droits de leurs parents.

Jean-Baptiste Essis, jean.essisàgmail.com
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