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Politique Publié le mercredi 29 décembre 2010 | Le Patriote

Interview / Fanny Ibrahima (Maire de Bouaké) - “Il n’y aura pas de guerre civile ”

Le maire de Bouaké, Fanny Ibrahima, se prononce sur la crise post électorale que vit la Côte d’Ivoire. Il invite les militaires et surtout les officiers à regagner le camp de la légalité républicaine qui est incarné par le Président élu, Alassane Ouattara.
Le Patriote : M. le maire, cela fait exactement un mois jour pour jour que la présidentielle est terminée et le résultat est connu de tous, pourtant le président élu qui est votre candidat n’a pas encore pris fonction. Qu’avez-vous à dire face à cette situation de blocage que vit la Côte d’Ivoire?
Fanny Ibrahima : C’est une situation extrêmement grave pour note pays, pour le continent africain et même pour le monde entier. C’est trop facile de perdre des élections et de s’accrocher au pouvoir. Je suis d’autant plus gêné que c’est dans une frange de la population qui se dit intellectuelle que nous rencontrons les auteurs de ce fait.

LP : Selon vous, à quel niveau se situent les responsabilités qui sont à la base de ce blocage ?
FI : Ecoutez, vous savez bien que c’est M. Gbagbo Laurent, président sortant, qui est responsable de cette situation en premier lieu. Et en deuxième lieu, le président du Conseil constitutionnel, M. Paul Yao N’Dré. Le premier n’a pas une haute conscience de ses fonctions de chef d’Etat. Il oublie qu’il a aujourd’hui le destin d’un pays en main et il s’amuse à ce jeu. Ensuite le deuxième, alors lui, il n’a même pas lu le droit. Il a fait ce qu’il voulait d’une façon malhonnête. Il est venu créer une situation dramatique dans notre pays et les conséquences sont très graves pour l’avenir de ce pays. Donc en ce qui me concerne, la responsabilité incombe à ces deux personnalités.

LP : Pouvez-vous nous dire jusqu’à quelle niveau on peut estimer les conséquences de cette situation dramatique ?
FI : Les conséquences dans le fonctionnement d’un pays sont graves. D’abord, nous sommes déstabilisés vis-à-vis du monde entier. Ensuite, les bailleurs de fonds vont nous couper les vivres. Donc à cette allure, un moment viendra où nous ne pourront même plus payer les fonctionnaires et les travailleurs. Eux, ne pourront plus payer les loyers et la nourriture et cela va entrainer des cascades de soulèvement qui vont nous entrainer dans une misère noire. Donc, il est temps que ces gens-là comprennent cette situation et se ressaisissent. Parce que nous allons directement au fond de l’abîme. M. Ouattara a brillamment gagné les élections et malgré tous les points litigieux qu’on a supprimés, il a largement gagné. Donc qu’on le laisse exercer son pouvoir.

LP : M. le maire, beaucoup d’exactions ont été relevés pendant cette crise à Abidjan et dans d’autres localités sous la responsabilité sécuritaire des FDS. Et les FDS sont nommément cités dans ces exactions. Qu’elle est votre réaction par rapport à cette attitude des militaires ivoiriens ?
FI : Moi je suis peiné. Parce que j’ai fait quand même mes obligations militaires, j’ai même fait le cours de sous-officier. Donc pour le comportement d’un militaire, c’est autre chose que je vois là. Gbagbo est allé recruter une bande de mercenaires qui vient tuer vos populations sous vos yeux. Et on nous dit que les FDS ne sont pas dedans. Moi, je ne comprends pas. Les FDS ne sont pas dedans, ils sont dans quoi ? Ils ne savent pas qu’il faut protéger les populations ? Vous ne pouvez pas aller chercher des gens pour venir faire mon travail pour lequel je suis payé et le faire mal au risque de m’en faire porter le chapeau sans que je ne bouge le petit doigt. Où sont donc les militaires républicains ? Où ils sont avec la légalité qui est incarnée aujourd’hui par le Président qui a gagné les élections ? Logiquement, ils devraient mettre hors d’état de nuire tous ces mercenaires qu’on paye à coup de milliards. Parce que l’histoire retiendra que ce sont les militaires qui tirent sur les populations. Le peuple s’en fout que ça soit des mercenaires. Il dira que ce sont des militaires ivoiriens. Donc pour leur crédibilité et pour leur honneur, ce sont des choses qu’ils ne doivent pas accepter. Je trouve cela inacceptable pour des gens dont certains sont de brillants officiers, qui ont franchit régulièrement leurs échelons. A mon avis, ils acceptent d’être complice des tueries. Si pour le moment le Général Mangou et le Général Kassaraté sont sortis de la liste de gens proposés au TPI, à la longue, les gens seront obligés de les y inscrire. Parce que l’Etat-major, le commandement supérieur de la gendarmerie, ce sont les deux poumons de notre armée. Et on tue les gens sous vos yeux. Il y a aussi le Général Brindou de la police. Ces trois hommes sont les éléments vitaux de notre sécurité. Alors ils acceptent que des gens viennent tuer leurs frères pour empocher de l’argent et repartir. Je trouve cela inacceptable.

L P : Quel conseil avez-vous à donner aux Généraux Mangou et Kassaraté en ce moment précis de l’histoire de notre pays ?
FI : Ecoutez, le général Mangou et le général Kassaraté sont des messieurs que j’admire. Ce ne sont pas des amis, mais nous avons de bonnes relations, je considère Mangou comme nos cadets à Adjamé, quant au Général Kassaraté, j’ai eu l’honneur de le recevoir chez moi, il y a dix ans et nous avons sympathisé, donc je considère que ce sont des frères. Je leur demande de faire le bon choix. Le peuple ivoirien s’est prononcé en faveur du docteur Alassane Ouattara qui est ivoirien comme eux. Mais eux, ils devraient s’en foutre que le président soit Alassane ou Gbagbo. C’est cela la légalité. Or ils savent que tout le monde entier ne reconnait qu’Alassane. Alors pourquoi tergiversent-ils ? Mais que font-ils ? où sont-ils? Même si on ne les voit pas tirer, mais c’est leur responsabilité qui est en jeu. Gbagbo ne peut pas venir les blaguer comme des enfants, les mouiller avec lui. Parce que cette affaire va mal se passer pour le pays, moi je vois venir. Ils n’ont pas les hommes et les armements pour contrer la communauté internationale. Parce que nulle part ailleurs, la communauté internationale n’a été vaincue. Voilà un peu le conseil que je donne à mes amis militaires. Ce sont des hommes d’un certain niveau sous d’autres cieux, pourquoi chez nous ils deviennent des marginaux ? Aujourd’hui, qu’ils aillent dire à Gbagbo, de grâce tu n’as pas été élu, ne nous emmène pas à l’abattoir.

LP : M. le maire, une des réalités, c’est que le Président élu Alassane Ouattara est depuis un mois au Golf hôtel. En tant que cadre du RHDP, êtes-vous en contact avec votre président et aussi avec les autres membres du parti qui s’y trouvent ?
FI : Je m’honore de la sympathie que notre président a pour moi et aussi de l’amitié que pratiquement la majorité des cadres du parti ont pour moi. Donc je suis en parfaite relation avec eux. Mais il y a des choses qu’un président ne fait plus. Je pouvais appeler le président lorsqu’il était à la tête du RDR. Maintenant qu’il est président de la république, je ne peux plus me permettre de l’appeler. Bien que je serai très heureux qu’il me fasse appeler de temps en temps pour prendre de mes nouvelles. Je sais que le Président se porte bien. Il y a des collaborateurs proches de lui que j’ai souvent au téléphone. Donc je sais que le Président est très chargé, je sais ces soucis, donc je m’en accommode. Et puis, vous savez que Tiébissou reste un problème pour nous. Tout le monde me conseille de ne pas prendre la route. Pour le moment, nous sommes à Bouaké, si nous avons des actions à mener nous les menons dans l’intérêt général du RHDP qui est aujourd’hui un parti comblé.

LP : Laurent Gbagbo se fonde sur le conseil constitutionnel pour dire qu’il a gagné les élections. Selon vous, M. Paul Yao N’dré, président de cette institution a-t-il dit le droit?
FI : Ecoutez, c’est vrai, moi je suis un géographe. Mais pour ceux qui connaissent le droit, M. Yao N’dré n’a pas dit le droit. Je rappelle que j’ai eu l’honneur d’être parmi les dix Ivoiriens qu’on avait sélectionné à l’époque pour écrire la nouvelle constitution de Côte d’Ivoire. M. Mamadou Soumahoro et le grand frère Lamine Diabaté ainsi que moi-même, avions représenté le RDR. L’article 64 qui autorise le président du conseil constitutionnel à annuler des votes, prévoit aussi qu’il a 45 jours pour organiser de nouvelles élections. Mais en vertu de quoi, M. Paul Yao N’dré décide d’éliminer des régions de l’élection électorale. Pour qui se pend-il ? Moi, je pense qu’il n’a pas lu le droit et le plus grand constitutionnaliste que la Côte d’Ivoire connait s’appelle Francis Wodié. Il y a eu trop de lapsus dans les prises de position de Yao N’dré. C’est un monsieur qui est venu créer la pagaille dans le pays, créer la chienlit et je pense qu’il a presque réussit.

LP : La CEDEAO brandit la menace d’une intervention militaire légitime pour déloger Laurent Gbagbo s’il ne se pliait pas dans les prochains jours, à la volonté de son peuple. Qu’en pensez-vous ?
F I : La CEDEAO a tardé. Je pense que l’ex-chef de l’Etat risque de perdre gros. Car, malgré tout ce qu’on lui a envoyé, il persiste. Il n’a même pas honte de ce qu’il a fait et il persiste. Lorsque tout le monde, sur la base de preuves irréfutables, crie que vous avez volé des élections, à sa place, je serai très mal à l’aise. On lui a demandé de sortir de la manière la plus propre. Mais Gbagbo refuse. Au point que la communauté internationale s’est fâchée et menace de l’enlever par la force. Ça coûtera ce que ça coûtera. Mais, c’est ce qui va arriver. Mon sentiment, c’est que la CEDEAO réfléchisse à la bonne formule. Ils doivent repérer là où il est et aller le chercher. Ceux qui vont les empêcher de le prendre, que ça soit ceux là leurs victimes et non les populations innocentes.

LP : Le porte-parole du camp Gbagbo, Ahoua Don Mélo, a jugé inacceptable cette menace de la CEDEAO estimant que cela conduirait à une guerre civile. Qu’aviez-vous à dire ?
FI : Il n’y aura aucune guerre civile. Eux, ils tuent les gens tous les jours, pourquoi il n’y a pas de guerre civile ? Il n’y aura rien du tout, car ceux qui viennent chercher Gbagbo savent ce qu’ils ont à faire. Tout le monde n’a qu’à rester chez lui. Les soldats de la CEDEAO vont le prendre là où il est, c’est simple. Si tu ne sors pas, comment ils vont d’avoir pour te tuer ! C’est peut-être eux qui vont en profiter pour faire du grabuge. Mais, ils trouveront des gens en face d’eux, je peux les rassurer. Ahoua Don Mélo s’est retrouvé sur une liste de soi disant ministre, il faut qu’il s’exhibe un peu pour justifier le choix porté sur lui. C’est un choix bidon ! Soyez rassuré, ils s’en iront.
MAIGA Idrissa à Bouaké
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