Où en est-on avec la question du livre en Côte d’Ivoire? Notamment celle de la gratuité des livres scolaires lancée par le Chef de l’Etat, lors de sa campagne en 2000; notion à laquelle avaient adhéré massivement des maisons d’édition. Si rien n’a filtré de cette audience accordée aux PDG du Ceda, Venance Kacou, et des Nei, Guy Lambin, qu’accompagnaient le Pca Dosso Lemissa et Ozé G. Roger, directeur commercial et du développement, il ressort du bref résumé de M. Kacou, que la discussion se poursuit pour établir le bilan de la notion de gratuité des ouvrages scolaires et trouver des solutions aux difficultés que rencontrent les maisons d’édition. Il ajoutera d’ailleurs, au nom des maisons d’édition qui ont obtenu ce marché: «Nous adhérons tous à cette notion qui va dans le bon sens; faire en sorte que les livres soient accessibles à tous les enfants, en vue de leur éducation». Bientôt dix ans, en attendant d’en faire le bilan, il a préféré s’interroger. Une interrogation qui porte en elle toutes leurs inquiétudes aussi: «La bonne idée, l’initiative généreuse du Président de la République ; que chaque enfant soit en possession des ouvrages que les éditeurs ont mis en place sur le marché à travers les appels d’offre, a-t-elle atteint son objectif?». Sa réponse invite à l’attente: «Le bilan? Vous en saurez un peu plus, après. Pour le moment, nous sommes en pourparlers. Il reste cependant tout de même d’accord avec nous que cette notion doit être affinée, pour que les enfants de Côte d’Ivoire aient leurs livres». Il ressort de nos investigations, l’existence de sept maisons d’édition : Nei-Ceda, Eburnie, Frat-Mat Editions, Puci, Neter, Edilis et les Classiques ivoiriens. Parmi elles, quatre (Ceda, Nei, Frat-Mat Editions et Eburnie) se partagent le marché de l’édition scolaire primaire en Côte d’Ivoire. Et ces maisons, aujourd’hui, rencontrent des problèmes liés, entre autres, au fait que l’Etat n’a pas encore pu s’acquitter de ce qui leur est dû; c’est-à-dire leur verser les 15%, à la signature du bon à tirer; les 40% à la livraison des ouvrages et le solde, après la distribution effective des manuels dans les inspections de l’enseignement primaire et dans les écoles publiques (Epp). Sur prêts bancaires, Ceda, Nei, Frat- Mat Editions et Eburnie ont pu financer la production des manuels des classes de Ce1 et Ce2. Soit près de 2 millions 500 mille exemplaires pour l’ensemble des disciplines, afin d’accompagner cette politique de gratuité des ouvrages. Dans ce contexte de libéralisation du marché, c’est peu de dire qu’elles éprouvent d’énormes difficultés, surtout qu’elles n’ont pas encore obtenu l’autorisation des ministères de l’Education nationale, du Commerce et de la Culture de commercialiser ces ouvrages sur le marché privé, donc aux élèves de l’enseignement privé de Côte d’Ivoire. A ce jour, aucun imprimeur n’a reçu un centime. Ce qui met à mal leurs trésoreries. Venance Kacou attirait, en décembre dernier, l’attention des autorités sur la question globale du livre en ce sens: «Il faut comprendre qu’un libéralisme économique de bon aloi, doit aussi se faire avec un minimum de protectionnisme de certains secteurs avant une ouverture tous azimuts…». Guy Lambin, Pdg de Nei, ajoutait d’ailleurs: «Depuis 1994, où l’Etat nous a accordé une subvention compensatoire d’équilibre au titre de la dévaluation, nous ne bénéficions d’aucun avantage fiscal ou de subventions ponctuelles. Et, force est de constater qu’en dépit du doublement des prix des intrants, les prix des manuels scolaires sont restés quasi-inchangés depuis 15 ans! Ce qui est scandaleux. En plus, dans le cas de la gratuité du livre scolaire, que nous saluons, c’est que des personnes aient pu développer des circuits informels pour revendre à des coûts plus élevés les ouvrages que nous éditons, sur le marché privé…». (Fraternité du 12 décembre 2008. P. 3). Faut-il le rappeler, 75 à 90% du marché global du livre en Afrique sont dominés par le livre scolaire.
Michel Koffi
Michel Koffi