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Sport Publié le samedi 21 mars 2009 | People Mag

Abdoulaye Traoré - Ancien footballeur: "Les gens ne respectent plus les anciennes gloires"

Abdoulaye Traoré ou si vous préférez, Ben Badi, a connu un parcours atypique au sein de l’Asec Mimosas et de l’équipe nationale de Côte d’Ivoire. C’est cet homme que People Magazine a rencontré pour lever le voile sur sa vie.


Pourrais-tu nous retracer ton parcours ?

Je m’appelle Abdoulaye Traoré, ex footballeur international ivoirien, né le 4 mars 1967. J’ai commencé à l’âge de 9 ans, à Marcory non loin du stade Champroux. J’ai débuté ma carrière avec les grands frères comme feu Sékou Bamba, Soro Jean. Après un test, j’ai intégré le Stella cadet. Trois mois après, j’ai rejoint les seniors et on a été champion de Côte d’Ivoire en 1984. Ensuite, je suis allé à l’Asec en début de championnat, un transfert qui a d’ailleurs fait couler beaucoup d’encre et de salive. Il a fallu que le ministre Fologo fasse passer un décret disant que j’ai le droit de jouer dans le club de mon choix. C’est-à-dire à l’Asec. Je suis allé à l’Asec parce que c’est le club le plus populaire qui avait en son sein de grands joueurs tels que Youssouf Fofana, que j’admire beaucoup, Kassi Kouadio, N’Diaye Aboubacar et bien d’autres. Aussi, je voulais me faire connaître, donc c’était là ma seule chance.

J’arrive à l’Asec, je fais juste 7 mois et après, je suis contacté par le FC Metz en France en 1985. Mais il faut dire que ça été difficile pour moi de m’adapter à cause du clima. Après je suis allé au Portugal. Je suis revenu en France au Sporting club de Toulon. Un an après, j’ai été prêté à Avignon, un club de troisième division que, par la grâce de Dieu, j’ai fait remonter en D2. Ensuite, je suis revenu à l’Asec sous la direction de Idriss Diallo et Mr Roger Ouégnin qui avaient pour ambition de refaire de l’Asec un grand club. C’est ainsi que je suis revenu avec d’autres joueurs tels que Gadji Céli, Bédé James et Philipe Troussier, entraineur qui a permis à l’Asec d’être en tête du championnat pendant un bon moment. Mais en 1995, après la finale perdue de la coupe d’Afrique, beaucoup de joueurs sont partis. Je suis allé en Arabie Saoudite où j’ai passé 5 années. Suite à des blessures successives, j’ai préféré arrêter.

Mais je suis toujours dans le milieu du football car avec des amis, on a mis sur pieds une structure pour gérer la carrière des joueurs qui veulent évoluer à l’étranger. Aussi, depuis bientôt 3 ans, je suis à la FIF, avec le président Jacques Anouma. Je suis son chargé de mission auprès des sélections des cadets, minimes et juniors.


As-tu des regrets par rapport à ta carrière qu’on annonçait prometteuse ?

Les regrets, on en a toujours. J’aurais voulu faire une grande carrière mais j’ai manqué de chance. Dieu merci, j’ai fini ma carrière sans blessure grave. Et je pense que j’ai encore beaucoup à donner aux sélections de jeunes.


Et l’aventure avec l’équipe nationale ?

J’ai eu près de 150 sélections en équipe nationale et j’ai marqué 96 buts. Je ne regrette pas d’avoir fait une carrière en sélection vu le couronnement à Sénégal 92 qui est un souvenir inoubliable.

On avait un groupe solidaire, pas forcement la meilleure équipe du tournoi mais on jouait avec le cœur et c’est ce qui a fait la différence. Ce sacre a été un grand tournant dans ma carrière.


Penses-tu que la Côte d’Ivoire pourra reéditer cet exploit ?

Je pense que oui car nous avons des joueurs de qualité qui sont dans de grands clubs en Europe. Je souhaiterais qu’ils mettent leur talent au profit de l’équipe nationale. Il suffit d’être solidaires pour faire la différence.


Que penses-tu du football ivoirien d’aujourd’hui ?

Il y a une très grande différence. Maintenant, le football est très médiatisé, c’est un grand avantage. Le foot est devenu une industrie, raison pour laquelle je suis content pour les jeunes Ivoiriens qui évoluent en Europe. Ils portent haut le drapeau de notre pays. Ils méritent tout ce qu’ils gagnent aujourd’hui. A notre époque, personne n’imaginait jouer dans de grands clubs comme Barcelone ou Chelsea.


Parlons de la prestation très décevante des Eléphants locaux au CHAN. Y a-t-il des responsabilités à situer ?

L’équipe a un entraineur qui a une forte personnalité, Kouadio Georges . Nous avons certes de bons joueurs mais ils manquaient de compétition. Et puis, la préparation a été bâclée par certains matchs amicaux qui, pour moi, ne valaient pas la peine comme celui contre la Guinée Equatoriale. Ce n’était pas un bon match test. J’accuse un peu les joueurs parce qu’on peut mettre tous les moyens à la disposition de l’équipe mais si vous n’êtes pas prêts, ça sera difficile d’avoir un bon résultat. Quand on joue un match et que le président de la République est au stade, ça devrait déjà nous galvaniser et nous apporter un plus même si techniquement on n’est pas prêts. Pour moi, la faute incombe aux joueurs qui m’ont déçu. On doit aussi revoir le système du football ivoirien, mettre tout le monde à sa place. Je souhaite que la fédération fasse librement son travail sans qu’on lui mette des bâtons dans les roues.


Revenons à ta vie et à tes activités...

Le foot m’a tout donné, il est difficile de sortir de ce milieu, je suis toujours dans le foot, je suis à la fédération. J’use de mes relations en Europe et dans le Golf pour aider certains jeunes qui ont envie de faire carrière là-bas.


Que sont devenus les dons reçus du Président Houphouët en 92 ?

Je n’ai pas envie d’en parler parce que chacun a le droit de faire ce qu’il veut de sa vie, chacun essaie, de gérer à son niveau ses biens. Il y a beaucoup de choses qui ont été dites. Certes il y a certains qui ont vendu leurs maisons. Mais je pense que chacun se responsabilise comme il peut pour gérer sa fin de carrière. Je crois que je ne me reproche rien, je fais ce que je peux, je remercie Dieu.


Comment Ben Badi se distrait-il ?

Avec des amis, on arrive à sortir une fois en passant. Je vais dans les bars, les restos et en boîtes quand j’en ai la possibilité. Je ne fume pas, je ne bois pas.


Pratiques-tu d’autres sports à part le foot ?

Il m’arrive souvent de jouer au tennis avec mon ami Gouaméné Alain, d’aller souvent à la pêche à Assinie. Je lis beaucoup.


On a entendu dire que ta carrière professionnelle n’a pas décollé parce que tu souffrais de la cleptomanie.

(Fous rires) ça fait deux fois qu’on me pose cette question. Un autre journaliste m’en a parlé, j’étais tellement dépassé que j’en ai rigolé. Je me dis, lorsque tu es un homme publique, tu ne peux rien contre les rumeurs. J’ai jamais été cleptomane, je ne sais pas de quoi vous parlez. Si ça n’a pas marché, je pense que j’ai un problème physique. Je ne peux pas tenir un match pendant 90mn. Et il y a le facteur chance qu’il faut prendre aussi en compte.


Es-tu resté fidèle à tes amis d’enfance, au quartier où tu as commencé ?

Ma mère y habite toujours. J’ai perdu mon père mais presque chaque après midi, je suis là-bas même si beaucoup de mes amis d’enfance ont quitté le quartier. J’ai de bonnes relations avec tous ceux qui sont encore au quartier à Marcory. Et avec la mairie, on essaie d’organiser des choses.


On comprend tout de suite que toi, frimer, ce n’est pas ton genre.

Je crois que ça dépend de l’éducation. Quand tu sais d’où tu viens et où tu vas, il y a le minimum qu’il faut garder. C’est le respect des autres car sans les autres nous ne sommes rien. Il faut toujours rester humble.



Quelle différence existe-t-il entre ces 3 références ivoiriennes en matière de football : Laurent Pokou, Abdoulaye Traoré et Didier Drogba ?

On est tous des buteurs. C’est trois styles différents. Avec des défauts et des qualités. Pour le reste, à vous de juger.


Et à propos de ta situation matrimoniale. Qu’en est-il actuellement ?

Marié en 2001 et divorcé en 2002. J’ai 3 enfants de ce mariage. Actuellement, j’ai quelqu’un dans ma vie mais c’est difficile de se remettre tout de suite sans prendre le temps de bien réfléchir. Je ne suis pas parfait mais j’essaie d’être assez correct.


On a entendu dire que tu battais ton ex épouse ?

Non, non pas du tout, c’était un problème d’incompréhension. J’étais en Arabie Saoudite, et on avait deux caractères chauds, carrément différents. C’est tout. Je ne l’ai jamais battue. Elle peut le témoigner.


Ton style de femme donc ?

Humble, d’une très bonne éducation. Le physique, ça ne m’intéresse pas trop. L’important, c’est ce qu’elle a dans la tête et sur le cœur.


Ta nourriture préférée

Le poulet panné avec des frittes ou de l’attiéké


Comment peut-on devenir grande star de foot selon toi ?

Dans l’humilité et le travail. On ne devient pas grande star ou grand joueur du jour au lendemain. Il faut se donner à fond. Dans tout ce qu’on fait, il faut se battre toujours dans la légalité et l’honnêteté.


Et le respect des anciennes gloires, quel est ton avis là-dessus ?

C’est une question de mentalité. Dans ce pays, les gens n’ont pas beaucoup de respect pour les anciennes gloires. Je vous donne mon exemple. La dernière fois, nous étions au comité d’organisation du championnat d’Afrique des nations de football (CHAN) avec Yéo Martial, Gouamélé Alain etc… à attendre les badges, de 9h à 13 heures. Et on vient nous annoncer qu’on n’y a pas droit. C’est des frustrations inutiles qui blessent. Les anciens n’ont pas été conviés au CHAN. Alors que, la confédération africaine de football (CAF) a fait venir quelques gloires, dont Anthony Baffoué, pour le CHAN. Aujourd’hui, moi, certes j’ai la chance d’être à la fédération. Je suis le chargé de mission du Président Jacques Anouma auprès des sélections jeunes. C’est déjà un bon départ. Mais je souhaite qu’on respecte les anciennes gloires.


Ton ambition ?

Mon ambition, c’est d’entraîner l’équipe nationale de Côte d’Ivoire. Une ambition ne s’achète pas. Elle se nourrit, il suffit d’avoir la volonté.

Priscae N’Guessan
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