Révérend Père,
Cher frère dans le sacerdoce,
j'ai lu avec intérêt dans le journal "Le Nouveau Réveil", cet article intitulé "M. Gbagbo, pourquoi jouez-vous à cache-cache avec le peuple ?". Je l'ai lu avec d'autant plus de sérieux qu'il est signé d'un prêtre. Et c'est justement à ce titre, en tant que prêtre que je me suis autorisé à t'écrire. Parce que la parole publique d'un prêtre peut engager et dans cette hypothèse-ci, engage, tous les prêtres et, pour le peuple, peut prêter à confusion. Je n'écris pas au nom de tous les prêtres encore moins au nom de l'Eglise de Côte d'Ivoire. Des voix plus autorisées le feront peut-être un jour, mais je me suis senti personnellement interpellé par les propos qu'un confrère d'une grande capacité intellectuelle a pu ainsi dire à toute la Côte d'Ivoire.
Cher frère, je comprends ta colère, je la respecte et je la partage dans son principe. Oui, nous sommes tous inquiets de ce que les élections soient encore incertaines. Nous sommes fatigués des dates jamais respectées. Oui, les voies publiques sont dégradées, et la pauvreté a fait le lit à la prostitution, à la corruption, à l'escroquerie…Je partage moi aussi la souffrance du peuple. Mais je refuse qu'au nom de la liberté d'expression qui plus est demeure la pierre angulaire d'une société démocratique, cette démocratie que tu mets en doute et qui pourtant te permet de traiter ton président de "roublard" sans être inquiété, je refuse que sous le couvert de la triple casquette que tu revendiques en tant que prêtre et professeur de philosophie et de sciences politiques, tu te permettes de dire tout et n'importe quoi sans la moindre preuve en jetant le discrédit sur une partie du peuple.
Mais non mon cher frère, tous les hommes politiques ne sont pas " pris dans le tourbillon de leurs désirs effrénés et incontrôlés de l'argent, maison, voitures et sexe ". Non, je ne crois pas qu'ils soient tous des voleurs et des menteurs. Je ne crois pas non plus que toute " la jeunesse féminine se bouscule inexorablement pour séduire certains (des) hommes (politiques), dans l'espoir de leur arracher des billets de banque. Ils sont trop peu nombreux ces hommes ayant autant d'argent pour satisfaire la "soif dévergondée" de toutes les filles et femmes de Côte d'Ivoire. Attention mon frère à ce que tu peux penser et dire. Je ne veux pas que tu couvres d'opprobres ces vaillantes femmes qui travaillent de leurs mains et de leur intelligence pour tenir des magasins de pagnes, de cosmétiques, de produits divers afin de sortir leur mari au chômage et leurs enfants de la misère. Et celles qui ont pu s'acquérir des voitures de marque ne sont pas toutes des "maîtresses de refondateurs". Il faut un peu de respect et pour nos hommes politiques et pour le peuple qu'on est censé défendre.
Mon cher frère, tu es prêtre. Tu sais que le prêtre est un sage. Nous l'avons appris ensemble dans ce séminaire d'Anyama qui nous a formés parce que nous avons eu les mêmes professeurs même si pour des raisons qui te sont bien personnelles tu n'as pas terminé ta formation ici en Côte d'Ivoire. Le prêtre, je n'ai rien à t'apprendre, est un rassembleur et par conséquent son discours doit épouser les contours de la sagesse et de la mesure. Je suis sûr que le peuple saura te juger sur tes paroles parce que nos actes et nos paroles révèlent aussi ce que nous sommes.
Mon cher frère, tu es professeur de philosophie. Dis-moi dans quel établissement et qui sont tes étudiants? Qu'ils puissent comprendre que le maître est celui qui est capable de maîtriser sa colère, ses peurs, ses doutes et qui ne se laisse pas aller à dévoiler à tous ses propres turpitudes.
Mon cher ami, tu es professeur de sciences politiques Où as-tu fait tes études? Qui t'a dit que politiquement tu as le droit de traiter ton président de roublard et tous les hommes politiques de voleurs, de menteurs et d'infidèles sans que tu en aies la moindre preuve. Et tu parles d'impunité? Oui j'en conviens, puisque c'est cette même impunité qui te permet d'être encore en liberté parce que politiquement, on trouvera antidémocratique de jeter en prison quelqu'un qui donne dans la diffamation. Peut-être qu'il te faudra ajouter à ta longue formation des études de droit, et tu comprendras que la diffamation est un délit pénal.
Je te prie de laisser aux hommes politiques et à l'opposition ivoirienne leur rôle pour faire avancer la démocratie. Ils le font déjà si bien. Je crois qu'ils n'ont pas besoin que les prêtres viennent leur donner un coup de main. Nous ne sommes pas payés pour jouer l'opposition politique. Garde-toi bien de telles dérives…
Je vais terminer en m'adressant aux chrétiens et aux hommes de bonnes volonté. Chers frères, nous sommes tous dans la barque de la Côte d'Ivoire. Nous sommes tous frères et sœurs d'une même nation. Dieu nous aime tous aussi bien les hommes politiques que le petit paysan de mon village. Nous n'avons plus besoin de nous déchirer pour survivre. Je crois comme vous que nous sortirons de cette crise plus forts que jamais. Le temps dit-on est l'autre nom de Dieu. Laissons le temps au temps. Quand le moment que Dieu a choisi viendra, nous irons aux urnes et alors chacun aura l'occasion de s'exprimer. Ayons confiance parce que dans ce monde, il y a un temps pour tout. Que Dieu vous bénisse!!!
Père Charles KOFFI
Ordonné prêtre le 27 décembre 1998
En la Cathédrale St Paul d'Abidjan
Etudiant en master de droit
À l'université de Rennes 1 (France)
7 rue de la maraudais
35700 Rennes Mail: k19charles@yahoo.fr
Cher frère dans le sacerdoce,
j'ai lu avec intérêt dans le journal "Le Nouveau Réveil", cet article intitulé "M. Gbagbo, pourquoi jouez-vous à cache-cache avec le peuple ?". Je l'ai lu avec d'autant plus de sérieux qu'il est signé d'un prêtre. Et c'est justement à ce titre, en tant que prêtre que je me suis autorisé à t'écrire. Parce que la parole publique d'un prêtre peut engager et dans cette hypothèse-ci, engage, tous les prêtres et, pour le peuple, peut prêter à confusion. Je n'écris pas au nom de tous les prêtres encore moins au nom de l'Eglise de Côte d'Ivoire. Des voix plus autorisées le feront peut-être un jour, mais je me suis senti personnellement interpellé par les propos qu'un confrère d'une grande capacité intellectuelle a pu ainsi dire à toute la Côte d'Ivoire.
Cher frère, je comprends ta colère, je la respecte et je la partage dans son principe. Oui, nous sommes tous inquiets de ce que les élections soient encore incertaines. Nous sommes fatigués des dates jamais respectées. Oui, les voies publiques sont dégradées, et la pauvreté a fait le lit à la prostitution, à la corruption, à l'escroquerie…Je partage moi aussi la souffrance du peuple. Mais je refuse qu'au nom de la liberté d'expression qui plus est demeure la pierre angulaire d'une société démocratique, cette démocratie que tu mets en doute et qui pourtant te permet de traiter ton président de "roublard" sans être inquiété, je refuse que sous le couvert de la triple casquette que tu revendiques en tant que prêtre et professeur de philosophie et de sciences politiques, tu te permettes de dire tout et n'importe quoi sans la moindre preuve en jetant le discrédit sur une partie du peuple.
Mais non mon cher frère, tous les hommes politiques ne sont pas " pris dans le tourbillon de leurs désirs effrénés et incontrôlés de l'argent, maison, voitures et sexe ". Non, je ne crois pas qu'ils soient tous des voleurs et des menteurs. Je ne crois pas non plus que toute " la jeunesse féminine se bouscule inexorablement pour séduire certains (des) hommes (politiques), dans l'espoir de leur arracher des billets de banque. Ils sont trop peu nombreux ces hommes ayant autant d'argent pour satisfaire la "soif dévergondée" de toutes les filles et femmes de Côte d'Ivoire. Attention mon frère à ce que tu peux penser et dire. Je ne veux pas que tu couvres d'opprobres ces vaillantes femmes qui travaillent de leurs mains et de leur intelligence pour tenir des magasins de pagnes, de cosmétiques, de produits divers afin de sortir leur mari au chômage et leurs enfants de la misère. Et celles qui ont pu s'acquérir des voitures de marque ne sont pas toutes des "maîtresses de refondateurs". Il faut un peu de respect et pour nos hommes politiques et pour le peuple qu'on est censé défendre.
Mon cher frère, tu es prêtre. Tu sais que le prêtre est un sage. Nous l'avons appris ensemble dans ce séminaire d'Anyama qui nous a formés parce que nous avons eu les mêmes professeurs même si pour des raisons qui te sont bien personnelles tu n'as pas terminé ta formation ici en Côte d'Ivoire. Le prêtre, je n'ai rien à t'apprendre, est un rassembleur et par conséquent son discours doit épouser les contours de la sagesse et de la mesure. Je suis sûr que le peuple saura te juger sur tes paroles parce que nos actes et nos paroles révèlent aussi ce que nous sommes.
Mon cher frère, tu es professeur de philosophie. Dis-moi dans quel établissement et qui sont tes étudiants? Qu'ils puissent comprendre que le maître est celui qui est capable de maîtriser sa colère, ses peurs, ses doutes et qui ne se laisse pas aller à dévoiler à tous ses propres turpitudes.
Mon cher ami, tu es professeur de sciences politiques Où as-tu fait tes études? Qui t'a dit que politiquement tu as le droit de traiter ton président de roublard et tous les hommes politiques de voleurs, de menteurs et d'infidèles sans que tu en aies la moindre preuve. Et tu parles d'impunité? Oui j'en conviens, puisque c'est cette même impunité qui te permet d'être encore en liberté parce que politiquement, on trouvera antidémocratique de jeter en prison quelqu'un qui donne dans la diffamation. Peut-être qu'il te faudra ajouter à ta longue formation des études de droit, et tu comprendras que la diffamation est un délit pénal.
Je te prie de laisser aux hommes politiques et à l'opposition ivoirienne leur rôle pour faire avancer la démocratie. Ils le font déjà si bien. Je crois qu'ils n'ont pas besoin que les prêtres viennent leur donner un coup de main. Nous ne sommes pas payés pour jouer l'opposition politique. Garde-toi bien de telles dérives…
Je vais terminer en m'adressant aux chrétiens et aux hommes de bonnes volonté. Chers frères, nous sommes tous dans la barque de la Côte d'Ivoire. Nous sommes tous frères et sœurs d'une même nation. Dieu nous aime tous aussi bien les hommes politiques que le petit paysan de mon village. Nous n'avons plus besoin de nous déchirer pour survivre. Je crois comme vous que nous sortirons de cette crise plus forts que jamais. Le temps dit-on est l'autre nom de Dieu. Laissons le temps au temps. Quand le moment que Dieu a choisi viendra, nous irons aux urnes et alors chacun aura l'occasion de s'exprimer. Ayons confiance parce que dans ce monde, il y a un temps pour tout. Que Dieu vous bénisse!!!
Père Charles KOFFI
Ordonné prêtre le 27 décembre 1998
En la Cathédrale St Paul d'Abidjan
Etudiant en master de droit
À l'université de Rennes 1 (France)
7 rue de la maraudais
35700 Rennes Mail: k19charles@yahoo.fr