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Société Publié le jeudi 10 septembre 2009 | L’intelligent d’Abidjan

Affaire cliniques-boutiques de Vavoua’’/ Daha Didier, secrétaire général du syndicat des préparateurs et gestionnaires en Pharmacie se vide :‘’Le directeur départemental Tia André s’est comporté comme un trafiquant de médicaments’’

L’affaire clinique-boutique fait des vagues dans le milieu de la Santé. En sa qualité de leader syndical dudit milieu, Daha Didier s’est prononcé. Sans prendre des gants, le leader des préparateurs et gestionnaires en pharmacie assène ses vérités au Directeur départemental, coupable selon lui, d’un trafic de médicaments. En affectant des produits de la PSP destinés aux structures homologuées à des opérateurs illégaux de la santé. Interview.
En votre qualité de leader d’un syndicat de la santé, quelle est votre réaction sur l’affaire des cliniques-boutiques de Vavoua qui alimente l’actualité de votre secteur actuellement ?
Avant d’aborder le sujet de Vavoua, je voudrais féliciter le journal L’intelligent d’Abidjan pour son engagement à aborder avec beaucoup de perspicacité les problèmes qui minent le secteur de la santé. Notre milieu d’activité est miné par plusieurs problèmes qui, en fait, devraient être endigués depuis belle lurette. Mais, la lutte n’arrive pas à porter car les premiers responsables des dysfonctionnements se trouvent être des animateurs du système de santé. La preuve nous est donnée une fois de plus avec le dossier de Vavoua. Aujourd’hui, si ce ne sont pas les cliniques privées qui pullulent à tout coin de rue, ce sont les médicaments de la mort non autorisés à rentrer sur le territoire ivoirien qui sont là et sont vendus en toute impunité à ciel ouvert dans nos rues, dans nos marchés comme du vivrier. Et personne n’ose lever le doigt pour aborder des sujets aussi intéressants qui participent de la lutte contre l’insécurité sanitaire des populations. Et l’Intelligent d’Abidjan a eu le courage de s’attaquer à l’un de ces maux qu’est le foisonnement des cliniques-boutiques principalement dans le département de Vavoua. Nous ne sommes pas surpris de voir ces faits aussi dramatiques relevés dans votre enquête puisque nous-mêmes avons été dans la zone et nous avons constaté que des cliniques sans autorisation sont installées dans les forêts classées.

Ce que vous relevez là est tout de même grave…
Je l’avoue mais c’est la réalité. Des cliniques du département de Vavoua avec la bénédiction, j’allais dire l’encadrement du directeur départemental le Dr Tia André, sont ouvertes en pleine forêt classée. En plus de s’établir de manière irrégulière dans des forêts classées, les cliniciens s’adonnent à des pratiques irrégulières étant donné qu’ils n’ont pas le niveau d’exercice de la fonction de santé. D’ailleurs, dans un courrier plein d’incohérences tant dans la forme que dans le fond qu’il a lui-même adressé avec précipitation au ministre Allah Kouadio dont nous avons eu une copie par le biais de ses amis D.D qui ont si tôt crié victoire en faisant distiller la thèse du complot de la part du journal l’Intelligent d’Abidjan contre leur collègue qui a subtilement associé à son déboire le directeur régional de santé et le ministre de la Santé pour couvrir sa forfaiture, y reconnaît lui-même que les clandestins n’ont pas le niveau et la compétence requis.

Pouvez-vous nous instruire sur ce qu’il note dans ce courrier concernant les infirmeries privées ?
Dans ce courrier, il écrit : « Depuis ma prise de fonction au mois d’octobre 2007, j’ai à l’occasion des visites régulières de terrain, constaté la prolifération d’infirmeries privées exerçant sans autorisation légale. Ces infirmeries sont tenues par des personnes qui n’ont aucun diplôme et aucune formation qui atteste de leur qualité d’infirmier. Il s’agit en réalité d’ex-combattants, de planteurs, d’ex-garçons et filles de salle en majorité d’origine étrangère pour la plupart burkinabé et guinéen. Sachant que nous recevons dans nos structures sanitaires publiques des complications venant de ces centres clandestins, (…) j’ai demandé de les encadrer afin qu’ils fassent moins de dégâts ». Implicitement, le Dr Tia reconnaît que ceux qu’il appelle lui-même les clandestins font des dégâts et il s’engage à les former et leur faire payer à titre personnel cette formation irrégulière pendant que les professionnels sont laissés-pour-compte. C’est grave ce qui se passe à Vavoua ville mais c’est dramatique ce qui se passe dans les villages et campements avec des succursales de pharmacie et cliniques ouvertes en pleine forêt classée. Votre enquête a plus ciblé la ville de Vavoua mais allez dans les villages, dans les campements. Les populations de ces zones en toute ignorance font face à un désastre sanitaire et quand la bombe va exploser, ce seront les professionnels de la santé ignorés par le D.D, dont il ne se préoccupe guère du renforcement des capacités et le fait plutôt à titre privée pour des clandestins, qui vont se porter au chevet des populations. Voyez-vous, le responsable d’une aire sanitaire, celui même qui est censé mettre de l’ordre mange sur le dos des clandestins. Il initie avec le service public une activité irrégulière privée à titre privé. C’est de cela qu’il s’agit avec son soi-disant projet d’encadrement ou de formation. Vous avez touché un problème grave et je comprends dès lors pourquoi l’on veuille attenter à votre vie ou encore que l’on cherche à vous intimider avec un soi-disant procès pour escroquerie, ou chantage. Ce dossier qui est une vraie plaie ne sera pas noyé avec ces artifices-là. Quand on agit comme on ne devrait le faire, on n’impute pas la responsabilité à un tiers.

Dans l’entretien que le Dr Tia nous a accordé pour livrer sa part de vérité, il soutient avoir été contrarié par la situation de Vavoua surtout avec l’absence de la police sanitaire. Comment réagissez-vous à ces propos ?
C’est une fuite de responsabilités et c’est irresponsable de la part du DD Dr Tia. C’est cela mon appréciation. La police sanitaire n’est pas présente mais cela ne l’a pas empêché de monter un projet de formation et de le faire exécuter sur le terrain sous la menace de faire fermer les infirmeries dont les promoteurs n’allaient pas payer. Les gens sont venus payer sous la contrainte. Cette même contrainte, il pouvait la brandir pour faire arrêter l’activité privée illégale des non professionnels de la santé établis à tout bout de rue de Vavoua. Il ne l’a pas fait mais a plutôt profité de la clandestinité, de la bonne foi et de l’ignorance notoire des non professionnels qui ont vu en lui un messie capable de leur donner une autorisation alors qu’il ne cherchait qu’à se faire une fortune sur leur dos. Aujourd’hui, le désenchantement doit être total chez les promoteurs des infirmeries privées qui se rendent compte aujourd’hui que le DD Dr Tia les a roulés dans la farine. C’est le laissez-faire qui a provoqué la prolifération des cliniques-boutiques et non la situation de crise. On l’a tous vu ici, même au plus fort de la guerre, les dirigeants de la rébellion n’ont donné aucun diplôme aux élèves ou aux étudiants de leurs zones. Ils ont œuvré à la réunification de l’école. Au niveau de la santé, un DD ne pouvait prendre la décision sur lui de faire former des clandestins et leur promettre des attestations si ce n’était pas pour se faire de l’argent. Et c’est cela qui a provoqué la prolifération des cliniques-boutiques à Vavoua. Et comme les populations voient que ses structures sont ouvertes et font l’objet de visite, d’encadrement du DD, elles se disent que c’est légal et elles les fréquentent au détriment des structures homologuées. Cela fait fructifier cette affaire et tout le monde cherche à être acteur de ce business suicidaire.

Qu’aurait-il dû faire en l’espèce ?
Etant donné qu’il est le premier responsable d’une aire sanitaire et représentant du ministre de la Santé et de l’Hygiène Publique, il doit veiller à ce que seuls n’exercent que les professionnels. Et il doit se donner les moyens à cet effet. Il doit travailler à ce que l’exercice de la santé qui est très délicat soit fait par les professionnels uniquement. Et dans les règles établies par la loi. Mais lorsqu’un directeur départemental de la Santé fait appel à un personnel irrégulier, pour leur donner comme il le prétend lui-même une formation, c’est au mépris de la vie de la population dont il est investi de la charge de protéger. Son encadrement des cliniques-boutiques dont il a lui-même le secret des motivations profondes, est un acte de mépris pour la sécurité sanitaire des populations de Vavoua. Nous disons en tant qu’agent de santé qu’il est en porte-à-faux avec les raisons pour lesquelles il est à Vavoua. Moi, je suis ingénieur des techniques sanitaires mais je ne peux pas jouer le rôle de gynécologue ou de chirurgien. Les rôles sont bien établis et moi qui suis professionnel, je ne peux pas, à plus forte raison quelqu’un qui n’a aucun niveau scolaire vient jouer le rôle de médecin, de gynécologue accoucheur. C’est vraiment un problème et nous pensons que c’est le moment d’agir, de poser les bases de l’assainissement du secteur de la santé parce que, nous le pensons, le ministre de la Santé a laissé trop faire et dans cette affaire, il doit montrer sa position véritable. Il doit faire mentir ceux qui pensent tout bas qu’il est complice des pratiques irrégulières, illégales et scandaleuses de ces représentants dans les aires sanitaires dont celui de Vavoua à savoir le Dr Tia. Pour l’heure, nous constatons un mutisme. Devant un problème aussi grave que celui de Vavoua, ce mutisme ressemble à une complicité avec le Dr Tia. Cela peut être interprété comme une complicité puisque le DD lui-même dit qu’il a le soutien du cabinet.

Pensez-vous réellement qu’il a la caution du cabinet ?
Nous n’y croyons pas véritablement mais cela n’est pas à écarter car le problème ne date pas d’aujourd’hui. L’on pourra me dire que le ministre n’avait pas l’information. Le Dr Tia n’a pas fait remonter l’information. Vous, le journal l’Intelligent d’Abidjan, l’avez fait au risque de votre vie. Maintenant, le ministre Allah Kouadio a le dossier entre ses mains et nous attendons la suite qu’il va donner à cette affaire. Tous les agents de santé regardent de près la gestion de cette affaire par leur ministre de tutelle. Ils attendent de voir comment leur ministre va gérer ce dossier. Au-delà du ministre, l’Ordre des médecins doit se saisir du dossier et prendre les mesures disciplinaires qui s’imposent pour qu’à l’avenir, un médecin ne se rende coupable d’un acte de mépris à la sécurité sanitaire des populations. Le ministre Allah Kouadio doit ouvrir les yeux sur les pratiques irrégulières de ses représentants départementaux et régionaux. Voyez-vous, des DD font courir la rumeur de votre future arrestation pour avoir soutiré de l’argent à leur collègue Dr Tia et qu’ils détiennent des enregistrements de votre chantage. Mais, ils doivent demander à leur collègue ce qu’il se reproche pour avoir tenté de soudoyer un journaliste. Il faut qu’il le leur dise. Si vous, un jeune si frêle, avez pu faire chanter un responsable de son niveau, il y a beaucoup de choses à comprendre. Il pense vous avoir piégé. Il ne sait pas que vous avez toujours donné la conduite à tenir à chaque fois qu’il voulait vous rencontrer. S’il était futé, il se poserait des questions pour savoir pourquoi le Dr Atté Boka s’est retrouvé sur le lieu d’une de vos rencontres en compagnie du directeur régional avec qui il était allé récupérer le matériel de vaccination. Et comme il aime tant les sous, il s’est même permis de demander la situation de la grille salariale revalorisée des personnels de santé pour laquelle au niveau du collectif, nous menons de grandes actions. Pourquoi, il ne mentionne pas cette rencontre dans son courrier ? Que veut-il cacher ? Que recherche-t-il à faire courir des rumeurs sur ces propres manigances qui ont foiré ? Pourquoi les collègues DD du Dr Tia sont-ils subitement en transe et font cas d’enregistrement secret ? Ce sont autant d’interrogations qui doivent interpeller le ministre Allah Kouadio. Le gouvernement n’a pas créé un ministère de la Santé pour tuer les Ivoiriens mais pour assurer leur sécurité sanitaire. Mais que constate-t-on sur le terrain ? Certes Vavoua, c’est l’exagération totale, mais cela se passe un peu partout. Les forêts classées sont devenues des officines de santé qui y ont poussé comme du champignon. On voit partout des médecins ambulants, des gens qui ont un scanner en plein Plateau, ils se promènent et sont souvent même dans les ascenseurs, arpentent même les couloirs et escaliers du cabinet de la Santé pour prendre la tension des usagers de soins. Tous ceux-là, que fait-on pour les arrêter ? Aujourd’hui, on est devant des maladies dont on est incapable d’arrêter la résurgence. Il y a des pratiques qui suscitent et entretiennent cette situation. Pour en revenir au cas de Vavoua dont le DD se comporte un chef bandit en mettant sur écoute un journaliste, ce qui m’écœure le plus, c’est la vente des médicaments de la pharmacie du district sanitaire pour les distribuer dans les cliniques-boutiques, les cliniques non conventionnelles.

Peut-on savoir pourquoi cet aspect vous irrite le plus ?
C’est tout simple. C’est du scandale. C’est un trafic de médicaments. Voilà des structures homologuées qui n’arrivent même pas à avoir une dotation suffisante en médicaments et le directeur départemental prend sur lui la décision, de vendre, de livrer des produits destinés à celles-ci aux cliniques-boutiques. C’est un scandale. La Pharmacie de la Santé Publique qui est le fournisseur exclusif des formations sanitaires publiques, est en deçà aujourd’hui de 30 % de capacités en matière de fournitures, d’approvisionnement. Quand tu déposes une demande de 90.000 F Cfa en médicaments, ce n’est pas sûr que la PSP puisse te livrer au moins 30.000 F. Et le peu que les structures officielles arrivent à obtenir, un directeur départemental en affecte une partie pour des clandestins. Le fait de dispatcher ce peu de médicaments livrés par la PSP dans des formations non homologuées, c’est scandaleux. C’est du trafic de médicaments dont le DD se rend coupable. En partageant les médicaments livrés aux formations officielles, Dr Tia a agi comme un véritable trafiquant de médicaments. Il s’est comporté comme un trafiquant de médicament en orientant les livraisons de la PSP vers une destination illégale à titre privé et cela est très grave car en aval, l’on va assister à une rupture de médicaments dans les centres de l’Etat. A ce même moment, ce sont seulement les clandestins qui en disposeront. C’est là le drame dans cette affaire et je pense que le ministre Allah Kouadio doit jauger toute l’ampleur de ce scandale. L’Ordre des médecins doit l’interpeller sur cet autre point. Le ministre Allah Kouadio également. Nous ne doutons pas de son engagement à assainir le milieu. Nous le savons courageux et c’est le moment pour lui de mettre le doigt sur des dysfonctionnements aussi graves et les réprimer sévèrement. Maintenant pour ce qui est des rumeurs que les DD font courir, soyez sereins. Je vous sais serein. On sait qui avait intérêt à ce que le dossier ne sorte. On sait les démarches qui ont été initiées dans ce sens, qui les a fait et comment l’auteur s’y est-il pris. Un DD qui fait une proposition à un journaliste, c’est qu’il a quelque chose à se reprocher. Et s’il a pu donner 500.000 F, c’est qu’il l’a bien pris dans une destination illégale. Car si on prend son salaire plus ses indemnités, le total n’atteint pas 500.000 F. A ce niveau, s’il pense pouvoir couvrir son indélicatesse sur un journal, qu’il engage son action. Son piège, quand nous avons été informés de sa démarche, nous vous avions conseillé la prudence et les faits nous donnent raison aujourd’hui. Il croyait pouvoir vous piéger et vous narguer. C’est le même piège qu’il prépare pour ceux qui ont collaboré avec lui pour la formation. A ceux-ci, ils proposent maintenant une rétribution de la formation. Le conseil que je puisse donner aux formateurs, pour finir, notamment le pharmacien du district le Dr Koné à qui le DD a proposé 400.000 F comme rétribution, c’est de refuser. L’enveloppe qu’il propose pour rétribuer la formation dispensée est un piège. S’il l’accepte, il sera mis au banc des accusés de la part du Dr Tia qui ne veut pas couler seul après avoir mangé tout seul les recettes d’une formation irrégulière de duperie. Nous lui conseillons de se mettre en rapport avec le ministère pour dénoncer la forfaiture de son supérieur qui n’a eu le mérite de ce poste qu’à un simple lien de parenté avec le ministre Mabri, qui l’a nommé.
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