Dans une déclaration parvenue hier à “Notre Voie”, Me Rodrigue Dadjé Babo, Conseil de Simone Ehivet Gbagbo, Première Dame de Côte d’Ivoire, citée dans l’affaire Guy André Kieffer, dénonce le rôle partial des juges d’instruction français et rend compte de la mission des magistrats ivoiriens en France. Il relève également les non-dits sur ce dossier et s’interroge si Guy André Kieffer n’est pas en vie actuellement. Ci-dessous l’intégralité de cette déclaration. La présente communication portera sur : Les montages grossiers et mensongers faits pour prétendre impliquer Mme Simone GBAGBO et le Ministre Paul Antoine Bohoun BOUABRE Le rôle partial des juges d’instruction français ; La mission des magistrats ivoiriens en France ; Les non-dits sur ce dossier kieffer. I - Les montages grossiers et mensongers faits pour prétendre impliquer Mme Simone GBAGBO et le ministre Paul Antoine Bohoun BOUABRE dans la disparition de Guy André Kieffer L’affaire Guy André Kieffer n’a cessé de défrayer la chronique nationale et internationale depuis quelques années. Elle a été rendue d’autant plus célèbre depuis le jour où sont apparus dans la presse, les noms de Mme Simone GBAGBO et de Monsieur Paul Antoine Bouhoun BOUABRE. Comment Mme Gbagbo a été impliquée dans cette enquête française ? Un matin, dans un reportage fait par Joseph TUAL de France 3, un certain Berthé Seydou désignait Mme GBAGBO comme étant la personne ayant commandité l’enlèvement et l’assassinat de Kieffer. Ce Berthé Seydou prétendait avoir été témoin oculaire de l’opération d’enlèvement et d’assassinat de Kieffer ainsi que des communications téléphoniques passées par son ex-patron TONNY OULAÏ avec Mme GBAGBO dite Delta, pour recevoir les instructions à cet effet. Plus loin dans ledit reportage, Berthé Seydou présentait le lieu de l’assassinat de Kieffer, appelé «la ferme aux volailles». C’est à cet endroit que Tonny Oulaï aurait donné le coup d’envoi avec un tir de pistolet et que ses agents auraient mitraillé Kieffer. Pour contourner la commission rogatoire exigée par la Convention franco-ivoirienne en matière de justice, Berthé Seydou sera envoyé en avril 2007 à Ouagadougou où il va être hébergé à l’hôtel Delwende. En novembre 2007, il bénéficiera d’un laissez-passer pour aller en France par vol Air France. L’arrêt de la Chambre de l’instruction de la Cour d’appel de Paris du 9 octobre 2008, ne manquera pas d’indiquer que la Convention franco-ivoirienne en matière de justice n’avait pas à être appliquée car Berthé Seydou n’était pas résident en Côte d’Ivoire à l’époque de sa déposition en France. Berthé Seydou, le nouveau chouchou du dossier Kieffer, était donc bien reçu en France et confirmait au juge français, les déclarations faites dans le reportage de Joseph TUAL de France 3. Je suppose qu’on a dû lui promettre en échange de son faux témoignage, d’être financièrement pris en charge, et ce, à la charge du contribuable français. Au cours d’une Commission rogatoire faite par les magistrats ivoiriens en France, le nommé Berthé Seydou était de nouveau entendu. Déconvenue pour le juge d’instruction Patrick Ramaël, Berthé Seydou reconnaissait n’avoir pas été témoin oculaire des informations mensongères qu’il a données dans le reportage de France 3 fait par Joseph Tual. Il se serait contenté de raconter au journaliste de France 3, une histoire qui lui aurait été racontée par quelqu’un d’autre. Le juge d’instruction français a envoyé une équipe d’expert français pour analyser les prétendus lieux du crime et rechercher en vain, et partout à Abidjan, le corps de Kieffer. Hélas, cette expertise s’est avérée négative, remettant en cause les déclarations de Berthé Seydou. Depuis octobre 2008, un mandat d’arrêt international a été lancé contre Berthé Seydou par la justice ivoirienne pour faux témoignage, et adressé aux autorités françaises compétentes pour son exécution. Jusqu’à ce jour, soit bientôt 11 mois après, ce mandat est resté sans réponse de la justice française tandis que Berthé Seydou vit paisiblement en France, à la charge du contribuable français. Au cours de l’audition de la Première Dame à Abidjan par les juges d’instruction français, il n’y a pas eu une seule question sur les accusations mensongères de Berthé Seydou, qui ont pourtant servi de raisons pour prétendre l’impliquer dans cette affaire encore très curieuse. Comment M. Paul Antoine Bohoun Bouabré a-t-il été impliqué dans cette enquête française ? Le juge d’instruction Patrick Ramaël a toujours pensé que le ministre Bohoun Bouabré avait des choses importantes à cacher que Kieffer aurait découvert et qu’il s’apprêtait à mettre dans la presse nationale et internationale pour le salir et lui faire perdre son poste de ministre et sa crédibilité. Il s’agirait principalement de preuves que le ministre détiendrait dans un pays européen, un compte bancaire contenant des milliards. Cette information reçue par les juges d’instruction français, a été prise pour argent comptant et a donc servi de fondement pour exiger son audition et faire de cette audition l’une des clés de voûte du mystère sur la disparition de Kieffer. Les informations bancaires ayant justifié l’audition du ministre Bohoun Bouabré n’ont pas pu être produites par les juges français qui prétendaient paradoxalement être en train de faire des investigations à cet effet. Après son audition, le ministre Bohoun Bouabré a fait procéder à des vérifications en Europe puis a déposé au dossier des juges d’instruction français, la preuve que le fameux compte bancaire contenant des milliards lui appartenant n’a jamais existé. II - Le rôle partial des juges d’instruction français Les juges d’instruction français en charge de cette enquête en France, ont cru bon de se focaliser sur la piste ivoirienne, qui selon eux, est la seule piste plausible pour retrouver les personnes qui auraient fait disparaître et tuer Kieffer. Dans le principe, tout juge d’instruction instruit à charge et à décharge. Dans le cas du dossier Kieffer, les juges d’instruction français instruisent à charge, et ce, uniquement contre les autorités ivoiriennes dont ils sont convaincus du meurtre de Kieffer. On croirait qu’ils ont reçu une feuille de route de laquelle ils ne peuvent se défaire et qui consisterait uniquement à prouver comment Kieffer a été tué par les autorités ivoiriennes. Pour un juge d’instruction rationnel et objectif, la bonne tâche consiste à rechercher Kieffer, s’il retrouvait son corps, il essaierait de savoir s’il s’agit d’une mort naturelle ou d’une mort criminelle. S’il s’agissait d’une mort criminelle, à ce moment-là, il rechercherait les auteurs du meurtre. Dans notre cas d’espèce, on ne sait pas si Kieffer est en vie ou s’il est mort. Les juges d’instruction français eux, cherchent à savoir comment les autorités ivoiriennes l’ont tué alors que paradoxalement, ils n’ont dans leur dossier, aucun élément prouvant qu’il serait mort, encore moins enlevé. Il est bon de noter que la longue disparition d’une personne n’est pas forcément synonyme de sa mort. Pour mémoire, une jeune Américaine disparue à l’âge de 11 ans, a été retrouvée vivante, courant août 2009 après 18 ans de disparition. Le juge d’instruction français Patrick Ramaël a refusé d’exécuter la Commission rogatoire des magistrats ivoiriens prétextant partir en congé. La Commission rogatoire a donc été exécutée par le vice-doyen des juges d’instruction qui a fait preuve d’une excellente collaboration avec les magistrats ivoiriens. Paradoxalement, à en croire la presse, Ramaël, dans la même période où il était censé être en congé, et donc dans l’impossibilité de recevoir les magistrats ivoiriens, effectuait un voyage au Benin pour entendre le prétendu témoin Alain Gossé, le nouveau témoin venant accabler l’entourage de la Première Dame. A cette allure, je me demande si les juges d’instruction français ne collaborent pas à la fabrication des faux témoins, dans le seul but de nuire aux autorités ivoiriennes. III - La mission des magistrats ivoiriens en France Une mission judiciaire internationale conduite par Monsieur le Procureur de la République près le Tribunal de Première Instance d’Abidjan, TCHIMOU Raymond Féhou, a eu lieu à Paris du 1er au 21 août 2009. Cette mission était composée de : M. TCHIMOU Raymond Féhou, Procureur de la République près le Tribunal de Première Instance d’Abidjan-Plateau, chef de délégation ; M. Ange KESSI KOUAME, Commissaire du Gouvernement près le Tribunal Militaire ; M. AVIT M’boa Bénoît, Substitut du Procureur de la République ; Mme SERY Momoh OUATTARA, Substitut du Procureur de la République ; M. KOFFI Kouadio, Juge d’instruction du 7ème cabinet ; Dr. CISSE Losséni, Juge d’instruction du 2ème cabinet ; Après quelques difficultés surmontées, grâce à la diligence du bureau français d’entraide pénale internationale, et aussi en raison de la parfaite collaboration de M. Patrick GACHON, vice-doyen des juges d’instruction au Tribunal de Grande Instance de Paris, les magistrats ivoiriens ont pu faire exécuter certaines missions sollicitées dans leurs commissions rogatoires. Ainsi, les magistrats ivoiriens ont pu entendre à titre de témoins : Mme Osange SILOU, l’avant- dernière épouse de Guy André Kieffer ; M. Eric Latham, membre de la Corporate Commodities Consulting (CCC), société de consulting où travaillait Guy André Kieffer ; M. Stéphane de VAUCELLE, responsable de la CCC ; M. Antoine GLASER, journaliste à la Lettre du Continent ; M. Eric MONIER, journaliste à TF1 et qui est l’une des dernières personnes à avoir vu Guy André Kieffer peu avant sa disparition, le 16 avril 2004, à l’intérieur du Super marché Prima ; M. Jean Tony OULAÏ, détenu en France dans le cadre de cette enquête Kieffer. Jean Tony OULAÏ a été entendu cette fois-ci comme témoin en raison de la plainte avec constitution de partie civile par lui formulée à l’encontre de Berthé Seydou et Bernard Kieffer respectivement pour les faits de faux témoignage et complicité de faux témoignage puis subornation de témoin. Plusieurs personnes devaient être inculpées ou mises en examen à Paris par les juges d’instruction ivoiriens dans le cadre de leurs commissions rogatoires. Il s’agit entre autres de : - Seydou BERTHE pour faux témoignage et diffamation ; - Bernard KIEFFER pour complicité de faux témoignage et subornation de témoin ; - Robert DULAS pour arrestation arbitraire, séquestration, complicité d’arrestation arbitraire, complicité de séquestration et d’assassinat. Malheureusement, ces inculpations n’ont pas pu être possibles compte tenu du fait que les textes français de procédure exigeaient un délai plus long que la période dont disposaient les magistrats ivoiriens pendant leur mission en France. Il y a aussi lieu de mentionner que les nommés Bernard Kieffer et Seydou BERTHE qui devaient tout de même être entendus comme témoins, ont refusé de répondre aux convocations à eux adressées par les gendarmes français. Leur mise en examen sera donc sollicitée par les magistrats ivoiriens à leur prochaine mission d’octobre 2009. IV – Les non-dits sur ce dossier kieffer 1 – Osange Kieffer n’était pas la dernière épouse de Guy André Kieffer Osange Kieffer, prétend être la dernière épouse de Kieffer avec qui il vivait jusqu’au jour de son départ en Côte d’Ivoire. Cela paraît bien curieux car s’il est vrai que Kieffer s’est marié en 1982 avec Osange Kieffer, il ne demeure pas moins qu’en 1996, il s’est remarié à ATTA AFUA. En 1996, ATTA AFUA disposait d’une carte de séjour régulière délivrée par les autorités françaises sur laquelle elle était déjà appelée «KIEFFER ATTA AFUA», et ce clairement dans l’ordre donné, dans un pays disposant d’un état civil organisé et centralisé, où il ne pouvait subsister de bigamie. La carte de séjour indiquait l’adresse d’un domicile conjugal à Paris où Kieffer ATTA AFUA vivait avec son époux Guy André Kieffer. Pour mémoire, même la servante de Kieffer était aussi originaire du Ghana comme ATTA AFUA qui l’a recrutée. Il est bon de noter qu’en France, la bigamie est une cause légale de refus ou de retrait de la carte de séjour. Conclusion, la dernière épouse de Kieffer avec qui il a vécu en France et en Afrique, s’appelait KIEFFER ATTA AFUA et non Osange Kieffer. Sur cette base, je comprends mieux le fait qu’Osange ait prétendu avoir reçu dans la nuit du 16 avril 2004, un coup de fil anonyme l’informant que Guy André Kieffer aurait disparu et qu’elle se soit rendormi comme si de rien n’était. Selon Osange, ce n’est que le lendemain, qu’elle a pris le soin d’appeler Guy André Kieffer sur son téléphone portable qui était éteint. 2 – Guy André Kieffer n’a jamais exercé en Côte d’Ivoire comme journaliste Guy André Kieffer depuis son arrivée en Côte d’Ivoire n’a pas une seule fois exercé la profession de journaliste comme tente de le faire croire certaines personnes dont Reporters sans Frontières. Il n’est même pas certain qu’il disposait d’une carte française de journaliste en 2003. Pendant son séjour en côte d’Ivoire, il était pigiste pour la Lettre du Continent dirigée par Antoine Glazer. Ainsi, il se contentait de donner des informations à Antoine Glazer et celui-ci après avoir procédé à des vérifications, les publiaient sous sa propre plume et sous son entière responsabilité. En réalité Guy André Kieffer n’écrivait jamais lui-même les articles qui paraissait et ne les signait donc pas. Ainsi, on ne pouvait savoir que les informations traitées dans lesdits articles provenaient de lui. Au dire d’Antoine Glazer, il n’y avait aucun secret sur la filière café-cacao dont pouvait disposer Guy André kieffer et qui était susceptible de mettre sa vie en danger en Côte d’Ivoire. 3 – Guy André Kieffer disparaissait bien souvent Guy André Kieffer disparaissait souvent de la Côte d’Ivoire sans donner de ses nouvelles. Il disait communément qu’il allait se mettre au vert. En effet, comme l’ont confirmé Eric MONIER et KIEFFER ATTA AFUA son épouse, Guy André Kieffer quand il se sentait stressé, partait au Ghana se mettre au vert et ce, sans en informer préalablement son entourage. Arrivé au Ghana, Guy André Kieffer désactivait son numéro de cellulaire d’Abidjan et ne le réactivait que lorsqu’il revenait sur le territoire ivoirien. 4 – Le silence du Canada sur la prétendue disparition de Guy André Kieffer Pour mémoire, avant son mariage avec Osange en 1982, Kieffer s’était marié à deux canadiennes et avait de ce fait acquis la nationalité canadienne. Depuis la prétendue disparition de Guy André Kieffer en 2004, la diplomatie canadienne n’a pas vraiment marqué son intérêt pour cette affaire bien curieuse. Pour mémoire également, la semaine dernière une canadienne a été tuée à Yamoussoukro. La diplomatie canadienne a dépêché une équipe jusqu’à Yamoussoukro pour suivre directement cette enquête qui s’est soldée par l’arrestation du tueur. 5 – Le silence des enfants de Guy André Kieffer sur sa prétendue disparition Guy André Kieffer, a eu un fils avec une de ses épouses canadiennes. Ce fils était majeur à la date de la disparition en 2004. Par ailleurs, il semble que Kieffer aurait également eu ou adopté avec ATTA AFUA, sa dernière épouse, deux enfants dont une fille et un garçon, lesquels étaient également majeurs à la date de sa disparition. De 2004 jusqu’à ce jour, ces trois enfants de Kieffer n’ont jamais manifesté d’intérêt pour la prétendue disparition de leur père. Ils n’ont jamais été entendus comme parties civiles dans la fameuse instruction menée par les juges d’instruction français. 6 – Guy André Kieffer n’est-il pas en vie actuellement ? Beaucoup d’interrogations et de faisceaux d’indices me laissent aujourd’hui penser que nous avons pu être tous bernés par cette procédure juridico-médiatique sur la disparition de Guy André Kieffer faite dans le seul but d’embêter les autorités ivoiriennes. Guy André Kieffer pourrait bien être en vie actuellement sous une fausse identité. KIEFFER ATTA AFUA avait été la seule en son temps à dire que son époux Guy André KIEFFER n’était pas mort car elle connaissait son homme. Pourquoi les enfants de Guy André Kieffer issus de ses mariages avec la canadienne et ATTA AFUA, tous majeurs à la date de sa disparition ne le recherchent pas et ne s’intéressent pas à cette enquête. Je suis désormais inquiet, car dans le seul but de corroborer la thèse de son assassinat, on pourrait tuer le disparu Kieffer et nous ramener ses ossements en Côte d’Ivoire, et demander à un faux témoin de soutenir qu’il se rappellerait subitement de l’endroit où ils sont enterrés.
Société Publié le jeudi 24 septembre 2009 | Notre Voie