Le Professeur titulaire Lazare M.Poamé, est l’actuel Doyen de l’Ufr Communication milieu et société (CMS) de l’Université de Bouaké. Il est par ailleurs, président du Comité Consultatif National de Bioéthique (Ccnb) de la République de Côte d’Ivoire. Cet Universitaire de renommée mondiale qui consacre toute son existence au service de l’Institution Universitaire est candidat à la Présidence de l’Université de Bouaké. Dans cette interview, il parle de ses ambitions pour cette Institution.
Le premier atelier d’assistance aux comités de bioéthique a été organisé les 2, 3 et 4 décembre 2009 par l’UNESCO. De quoi a-t-il été question ?
Lazare Poamé : Effectivement, c’était un important évènement. C’est d’ailleurs la toute première fois que cet atelier est organisé ici, en Côte d’Ivoire. C’est un atelier consacré à la formation des membres de comités nationaux de bioéthique. Cet atelier a réuni les présidents de comités de bioéthique du Gabon, du Togo, de la Guinée et de la Côte d’Ivoire. L’élément qui nous a paru le plus important à la fin de cet atelier et qui en démontre l’enjeu, c’est le protocole d’accord signé entre l’Unesco et la Côte d’Ivoire, en l’occurrence le Comité Consultatif National de Bioéthique. Ce Comité va désormais bénéficier d’une assistance à la fois technique et financière de la part de l’UNESCO. C’est une marque de confiance que nous avons pu décrocher dans nos rapports avec l’UNESCO. Nous pensons que cette marque devra être bénéfique aux Institutions au sein desquelles j’occupe des fonctions relativement importantes. Je pense tout naturellement au Comité Consultatif National de Bioéthique et à l’Université de Bouaké.
Apparemment vous faites beaucoup de choses avec l’UNESCO. Nous apprenons que vous venez d’ouvrir le Master d’éthique et de bioéthique. Pouvez-vous faire le lien entre l’évènement dont vous parlez et le Master ?
L.P : Le lien, c’est encore l’UNESCO. C’est avec le soutien à la fois technique et financier de l’UNESCO que nous avons pu ouvrir le Master d’éthique et de bioéthique. C’est le premier du genre en Afrique noire francophone. Ce Master dont la phase une est en train de s’achever avec des auditeurs venus du Burkina, du Gabon, du Mali et du Sénégal va favoriser l’ouverture de l’Université de Bouaké sur le monde ; il donnera une plus grande visibilité à notre Institution et en même temps, aidera à obtenir des financements pour la recherche et pour la formation. Ces financements pourront arriver en provenance de l’UNESCO et de toutes les Institutions de financement de la recherche. Vous savez, l’UNESCO n’est certes pas un gros bailleur de fonds, mais lorsque vous avez la caution morale de cette prestigieuse organisation, toutes les autres institutions vous ouvrent leurs portes.
Cela parait donc stratégique pour la Côte d’Ivoire et les Universités ivoiriennes ?
L.P : Exactement ; ce que nous faisons n’est pas seulement pour l’Université de Bouaké. Nous le faisons pour toutes les Universités de Côte d’Ivoire et pour toutes les Universités d’Afrique noire francophone pour lesquelles nous avons ouvert le Master d’éthique et bioéthique qui a fait venir en Côte d’Ivoire des Professeurs de renommée internationale.
Une Université déplacée qui présente un tel dynamisme, comment l’expliquez-vous ?
L.P : Ce dynamisme est dû à notre foi. Notre foi en l’avenir. Il est également dû à toute une équipe qui également, comme nous, a foi en l’avenir. Et donc, en conjuguant nos efforts avec une synergie hautement constructive, nous avons réussi d’abord à ressusciter l’Université qui était quasiment morte après les événements du 19 septembre 2002. Certains pensaient même que l’Université de Bouaké allait fermer pour de bon, mais nous avons réussi, avec une équipe réunie au sein d’un comité de crise composé des Professeurs Zigui Koléa Paulin, Latte Jean Michel et Dadié Célestin à ranimer l’institution. Nous sommes allés à la Maison de la radio, à la télévision et nous avons lancé des appels qui ont été entendus par la communauté universitaire sur laquelle nous savons pouvoir compter pour défendre les intérêts légitimes des animateurs de l’institution. Nous avons conduit des réunions à visée thérapeutique (logothérapie) et tout cela a permis la résurrection de l’Université. Naturellement, dans ces efforts conjugués par les enseignants que je viens de nommer, il y a eu ceux des autres enseignants, des membres du personnel administratif, ceux de la présidence de l’Université qui nous ont accompagnés. Ils nous ont épaulés pour que l’Université puisse aujourd’hui fonctionner sous la curieuse dénomination d’Université de Bouaké à Abidjan.
C’est une Université qui a une intense activité de publication. L’année dernière, c’était un numéro d’une Revue spéciale ’’Penser la crise ivoirienne’’. Vous semblez annoncer un nouvel élément en terme de publication…
L.P : Au niveau des publications, nous avons voulu être témoin de notre histoire récente. Cette crise qui a fait parler d’elle à travers le monde entier interpelle les intellectuels ivoiriens et africains. D’ailleurs, des universitaires et d’autres intellectuels du monde entier se sont autoproclamés spécialistes de la crise ivoirienne. En réaction à cette situation, les universitaires ivoiriens et surtout ceux de l’Université de Bouaké ont publié un ouvrage, le premier numéro de la revue Repères « International » sous le titre ’’Penser la crise ivoirienne’’.
En fait, un regard de l’intérieur
L.P : Un regard de l’intérieur, mais en même temps, très objectif. Un regard profond, un regard pluridimensionnel, pluridirectionnel, cohérent, rigoureux. Je dirais un regard historico-critique.
De la crise à la reconstruction…
L.P : Le deuxième numéro qui vient de paraitre, c’est un grand évènement que nous allons célébrer les mardi 15 et mercredi 16 décembre 2009 à l’Institut Goethe d’Abidjan. Ce numéro vient de paraitre sous le titre ’’Penser la reconstruction post-conflit en Côte d’Ivoire’’. Là encore, l’Université de Bouaké veut apporter sa contribution au processus de reconstruction, de sortie de crise en publiant ce numéro.
Quelle est la différence entre ces deux publications ?
L.P : Entre ’’Penser la crise ivoirienne’’ et ’’Penser la reconstruction post conflit en Côte d’Ivoire’’, nous avons voulu présenter deux choses différentes, mais complémentaires. ’’Penser la crise ivoirienne’’, c’est un numéro qui avait été consacré au volet herméneutique de la crise ivoirienne, c’est-à-dire, la tendance à expliquer, à interpréter la crise ivoirienne l’emportait sur tout le reste.
Avec ce deuxième numéro, nous passons de la phase de l’interprétation à celle de la reconstruction proprement dite. Il s’agit d’ouvrir les grands chantiers de la Côte d’Ivoire nouvelle. Après avoir expliqué et fait comprendre la crise ivoirienne, il faut maintenant s’atteler à produire les matériaux de reconstruction mentale et physique de ce pays défiguré par la guerre.
Vous êtes candidat à la présidence de l’Université de Bouaké…
L.P : C’est toujours avec ce même souci, reconstruire, bâtir et rebâtir. L’Université de Bouaké est aujourd’hui une Institution sinistrée. Je voudrais rappeler qu’il y a trois phases qui marquent la vie de cette Institution.
La première est celle de la création. En tant que pionnier, j’ai contribué à créer cette Université dans des conditions extrêmement difficiles. Je serais même tenté de dire que cette Institution a été créée presque ex nihilo, pratiquement à partir de rien sous la houlette de son premier Président, le Professeur Kouakou N’Guessan François. L’une des différences fondamentales entre les autres candidats et moi est plus visible à ce niveau : tous sont arrivés longtemps après moi à l’Université de Bouaké et n’en connaissent pas les problèmes génétiques et génésiaques dont nous avons les solutions.
La deuxième phase est celle d’une Institution sinistrée. Moins d’une décennie après sa création, elle a été frappée de plein fouet par la guerre. Disloquée, délocalisée, elle a frôlé le néant d’être.
La troisième phase est placée sous le triptyque : résurrection-maturation-rayonnement.
Qu’entendez-vous par ce triptyque ?
Ce sont trois dimensions importantes qui ramassent véritablement à la fois le passé, le présent et l’avenir de l’Université de Bouaké que nous voulons rebâtir avec une équipe constituée de personnes dynamiques, pour la plupart des hommes et des femmes de conviction que nous avons pu identifier à la faveur des renouvellements des différents conseils (1997 – 2008) et de la présente campagne électorale. Avec ces personnes, notre institution sera résolument engagée sur la voie d’une gouvernance universitaire innovante.
Vous parlez de gouvernance universitaire innovante. Qu’est-ce qu’il y aura de novateur ?
L.P : Il y aura de grandes innovations. Pour rebâtir cette maison commune, nous allons d’abord et avant tout la rebaptiser : Université de Bouaké-la-neuve.
Une autre marque de l’innovation sera le mode de gestion des ressources humaines. Nous allons valoriser le capital humain académique. Ensuite, ce sera l’innovation par une gestion décentralisée et interconnectée des ressources financières, déjouant ainsi toute philosophie du soupçon. On notera également une extraordinaire débauche d’énergie pour la mobilisation des ressources financières destinées à améliorer les conditions de travail et d’existence des premiers acteurs que sont les enseignants-chercheurs, le personnel administratif et technique et les étudiants.
Au niveau de la recherche, nous développerons de façon concomitante la recherche fondamentale et la recherche-action avec des moyens conséquents.
Sur le mode de gouvernance, nous pouvons nous permettre d’avancer l’idée d’une rupture radicale (entendez à la racine) avec le mode de gouvernance de l’équipe sortante. En quoi consiste cette rupture?
Elle va consister en une grande loyauté au sein de la nouvelle équipe et au sens élevé de la co-responsabilité dans l’exercice des fonctions de Président et de Vice-président.
Concrètement, qu’allez-vous apporter à vos collègues enseignants-chercheurs ?
L.P : A nos collègues enseignants-chercheurs, nous allons leur apporter un renforcement, une consolidation des compétences scientifiques et des ressources financières importantes pour « booster » la recherche et améliorer leur cadre de vie.
Est-ce que ce ne sont pas des promesses qu’on a déjà entendues ?
L.P : Certainement que ceux qui le disent, le déclarent simplement parce qu’ils estiment qu’il faut peut-être flatter l’électorat. Nous, nous le disons parce que nous avons déjà pris des contacts. Lorsque nous disons que nous allons trouver des ressources additionnelles pour booster la recherche, les contacts sont déjà pris. Lorsque nous disons que nous allons pouvoir améliorer les conditions de vie et de travail, les contacts sont déjà noués. Nous opérons nous-mêmes comme expert au sein des organisations internationales où nous avons déjà tracé les sillons de l’aide que recevra l’Université de Bouaké lorsque nous serons à la tête de cette Institution.
Qu’est-ce que les étudiants peuvent attendre de vous ?
L.P : Les étudiants verront d’abord s’améliorer les conditions de travail. Ensuite, ils verront leur vie associative s’améliorer. Voilà des étudiants qui généralement, pour organiser leurs activités, sont obligés de faire des quêtes auprès des enseignants ou encore de chercher un parrain qui n’est en réalité qu’un bailleur de fonds. Désormais, ils n’auront plus besoin de tout cela pour avoir de quoi financer leurs activités associatives que nous considérons comme le prolongement des activités académiques. Ils auront de l’argent. On leur fera ouvrir un compte bancaire qui sera approvisionné avec des ressources propres rationnellement contrôlées. Ils auront de quoi s’épanouir, ici à Abidjan, dans une phase transitoire. Lorsque nous irons à Bouaké, les cadres seront créés pour que ces étudiants puissent s’épanouir à tous les niveaux.
Qu’envisagez-vous pour le personnel administratif et technique ?
L.P : Cela nous fait souvent de la peine de voir les membres du personnel de l’Université s’engouffrer de façon dégradante dans le « Gbaka » (véhicule de transport en commun privé) pour se rendre à l’Université ou rentrer chez eux.
Nous envisageons à court terme pour ces braves travailleurs la possibilité d’assurer le transport du personnel avec des cars de l’Université.
Bouaké-la-neuve, qu’est-ce que c’est ?
L.P : Bouaké-la-neuve, cela signifie que nous allons innover à tous les niveaux et présenter au monde une institution toute nouvelle. L’innovation commence par la dénomination même de notre Institution. ’’Université de Bouaké-la-neuve’’. Cette dénomination appelle à un changement à tous les niveaux. Au niveau de la formation, de la recherche, de la vie universitaire, des rapports interhumains marqués du sceau de la fraternité universelle dont rêvait le philosophe Claude-Henri de Saint-Simon. L’Université de Bouaké-la-neuve, c’est vraiment l’innovation pluridirectionnelle, l’innovation dans toutes ses dimensions humaines, infrastructurelles, économiques, financières ; c’est vraiment la grande innovation.
Ça fait rêver tout ça ?
L.P : Oui, cela fait vraiment rêver. Mais tant que je suis seul à rêver, on peut avoir des raisons de douter. Or, je rêve avec des collègues enseignants, avec le personnel administratif et technique, avec les étudiants. Ce rêve, en devenant collectif, revêt le statut du réel sensible ou phénoménal; il devient la réalité caractéristique de l’Université de Bouaké-la-neuve, une Université qui doit se développer conformément à son essence et aux exigences du millénaire.
Can you do it?
L. P : Yes I can, mieux, we can!
Le premier atelier d’assistance aux comités de bioéthique a été organisé les 2, 3 et 4 décembre 2009 par l’UNESCO. De quoi a-t-il été question ?
Lazare Poamé : Effectivement, c’était un important évènement. C’est d’ailleurs la toute première fois que cet atelier est organisé ici, en Côte d’Ivoire. C’est un atelier consacré à la formation des membres de comités nationaux de bioéthique. Cet atelier a réuni les présidents de comités de bioéthique du Gabon, du Togo, de la Guinée et de la Côte d’Ivoire. L’élément qui nous a paru le plus important à la fin de cet atelier et qui en démontre l’enjeu, c’est le protocole d’accord signé entre l’Unesco et la Côte d’Ivoire, en l’occurrence le Comité Consultatif National de Bioéthique. Ce Comité va désormais bénéficier d’une assistance à la fois technique et financière de la part de l’UNESCO. C’est une marque de confiance que nous avons pu décrocher dans nos rapports avec l’UNESCO. Nous pensons que cette marque devra être bénéfique aux Institutions au sein desquelles j’occupe des fonctions relativement importantes. Je pense tout naturellement au Comité Consultatif National de Bioéthique et à l’Université de Bouaké.
Apparemment vous faites beaucoup de choses avec l’UNESCO. Nous apprenons que vous venez d’ouvrir le Master d’éthique et de bioéthique. Pouvez-vous faire le lien entre l’évènement dont vous parlez et le Master ?
L.P : Le lien, c’est encore l’UNESCO. C’est avec le soutien à la fois technique et financier de l’UNESCO que nous avons pu ouvrir le Master d’éthique et de bioéthique. C’est le premier du genre en Afrique noire francophone. Ce Master dont la phase une est en train de s’achever avec des auditeurs venus du Burkina, du Gabon, du Mali et du Sénégal va favoriser l’ouverture de l’Université de Bouaké sur le monde ; il donnera une plus grande visibilité à notre Institution et en même temps, aidera à obtenir des financements pour la recherche et pour la formation. Ces financements pourront arriver en provenance de l’UNESCO et de toutes les Institutions de financement de la recherche. Vous savez, l’UNESCO n’est certes pas un gros bailleur de fonds, mais lorsque vous avez la caution morale de cette prestigieuse organisation, toutes les autres institutions vous ouvrent leurs portes.
Cela parait donc stratégique pour la Côte d’Ivoire et les Universités ivoiriennes ?
L.P : Exactement ; ce que nous faisons n’est pas seulement pour l’Université de Bouaké. Nous le faisons pour toutes les Universités de Côte d’Ivoire et pour toutes les Universités d’Afrique noire francophone pour lesquelles nous avons ouvert le Master d’éthique et bioéthique qui a fait venir en Côte d’Ivoire des Professeurs de renommée internationale.
Une Université déplacée qui présente un tel dynamisme, comment l’expliquez-vous ?
L.P : Ce dynamisme est dû à notre foi. Notre foi en l’avenir. Il est également dû à toute une équipe qui également, comme nous, a foi en l’avenir. Et donc, en conjuguant nos efforts avec une synergie hautement constructive, nous avons réussi d’abord à ressusciter l’Université qui était quasiment morte après les événements du 19 septembre 2002. Certains pensaient même que l’Université de Bouaké allait fermer pour de bon, mais nous avons réussi, avec une équipe réunie au sein d’un comité de crise composé des Professeurs Zigui Koléa Paulin, Latte Jean Michel et Dadié Célestin à ranimer l’institution. Nous sommes allés à la Maison de la radio, à la télévision et nous avons lancé des appels qui ont été entendus par la communauté universitaire sur laquelle nous savons pouvoir compter pour défendre les intérêts légitimes des animateurs de l’institution. Nous avons conduit des réunions à visée thérapeutique (logothérapie) et tout cela a permis la résurrection de l’Université. Naturellement, dans ces efforts conjugués par les enseignants que je viens de nommer, il y a eu ceux des autres enseignants, des membres du personnel administratif, ceux de la présidence de l’Université qui nous ont accompagnés. Ils nous ont épaulés pour que l’Université puisse aujourd’hui fonctionner sous la curieuse dénomination d’Université de Bouaké à Abidjan.
C’est une Université qui a une intense activité de publication. L’année dernière, c’était un numéro d’une Revue spéciale ’’Penser la crise ivoirienne’’. Vous semblez annoncer un nouvel élément en terme de publication…
L.P : Au niveau des publications, nous avons voulu être témoin de notre histoire récente. Cette crise qui a fait parler d’elle à travers le monde entier interpelle les intellectuels ivoiriens et africains. D’ailleurs, des universitaires et d’autres intellectuels du monde entier se sont autoproclamés spécialistes de la crise ivoirienne. En réaction à cette situation, les universitaires ivoiriens et surtout ceux de l’Université de Bouaké ont publié un ouvrage, le premier numéro de la revue Repères « International » sous le titre ’’Penser la crise ivoirienne’’.
En fait, un regard de l’intérieur
L.P : Un regard de l’intérieur, mais en même temps, très objectif. Un regard profond, un regard pluridimensionnel, pluridirectionnel, cohérent, rigoureux. Je dirais un regard historico-critique.
De la crise à la reconstruction…
L.P : Le deuxième numéro qui vient de paraitre, c’est un grand évènement que nous allons célébrer les mardi 15 et mercredi 16 décembre 2009 à l’Institut Goethe d’Abidjan. Ce numéro vient de paraitre sous le titre ’’Penser la reconstruction post-conflit en Côte d’Ivoire’’. Là encore, l’Université de Bouaké veut apporter sa contribution au processus de reconstruction, de sortie de crise en publiant ce numéro.
Quelle est la différence entre ces deux publications ?
L.P : Entre ’’Penser la crise ivoirienne’’ et ’’Penser la reconstruction post conflit en Côte d’Ivoire’’, nous avons voulu présenter deux choses différentes, mais complémentaires. ’’Penser la crise ivoirienne’’, c’est un numéro qui avait été consacré au volet herméneutique de la crise ivoirienne, c’est-à-dire, la tendance à expliquer, à interpréter la crise ivoirienne l’emportait sur tout le reste.
Avec ce deuxième numéro, nous passons de la phase de l’interprétation à celle de la reconstruction proprement dite. Il s’agit d’ouvrir les grands chantiers de la Côte d’Ivoire nouvelle. Après avoir expliqué et fait comprendre la crise ivoirienne, il faut maintenant s’atteler à produire les matériaux de reconstruction mentale et physique de ce pays défiguré par la guerre.
Vous êtes candidat à la présidence de l’Université de Bouaké…
L.P : C’est toujours avec ce même souci, reconstruire, bâtir et rebâtir. L’Université de Bouaké est aujourd’hui une Institution sinistrée. Je voudrais rappeler qu’il y a trois phases qui marquent la vie de cette Institution.
La première est celle de la création. En tant que pionnier, j’ai contribué à créer cette Université dans des conditions extrêmement difficiles. Je serais même tenté de dire que cette Institution a été créée presque ex nihilo, pratiquement à partir de rien sous la houlette de son premier Président, le Professeur Kouakou N’Guessan François. L’une des différences fondamentales entre les autres candidats et moi est plus visible à ce niveau : tous sont arrivés longtemps après moi à l’Université de Bouaké et n’en connaissent pas les problèmes génétiques et génésiaques dont nous avons les solutions.
La deuxième phase est celle d’une Institution sinistrée. Moins d’une décennie après sa création, elle a été frappée de plein fouet par la guerre. Disloquée, délocalisée, elle a frôlé le néant d’être.
La troisième phase est placée sous le triptyque : résurrection-maturation-rayonnement.
Qu’entendez-vous par ce triptyque ?
Ce sont trois dimensions importantes qui ramassent véritablement à la fois le passé, le présent et l’avenir de l’Université de Bouaké que nous voulons rebâtir avec une équipe constituée de personnes dynamiques, pour la plupart des hommes et des femmes de conviction que nous avons pu identifier à la faveur des renouvellements des différents conseils (1997 – 2008) et de la présente campagne électorale. Avec ces personnes, notre institution sera résolument engagée sur la voie d’une gouvernance universitaire innovante.
Vous parlez de gouvernance universitaire innovante. Qu’est-ce qu’il y aura de novateur ?
L.P : Il y aura de grandes innovations. Pour rebâtir cette maison commune, nous allons d’abord et avant tout la rebaptiser : Université de Bouaké-la-neuve.
Une autre marque de l’innovation sera le mode de gestion des ressources humaines. Nous allons valoriser le capital humain académique. Ensuite, ce sera l’innovation par une gestion décentralisée et interconnectée des ressources financières, déjouant ainsi toute philosophie du soupçon. On notera également une extraordinaire débauche d’énergie pour la mobilisation des ressources financières destinées à améliorer les conditions de travail et d’existence des premiers acteurs que sont les enseignants-chercheurs, le personnel administratif et technique et les étudiants.
Au niveau de la recherche, nous développerons de façon concomitante la recherche fondamentale et la recherche-action avec des moyens conséquents.
Sur le mode de gouvernance, nous pouvons nous permettre d’avancer l’idée d’une rupture radicale (entendez à la racine) avec le mode de gouvernance de l’équipe sortante. En quoi consiste cette rupture?
Elle va consister en une grande loyauté au sein de la nouvelle équipe et au sens élevé de la co-responsabilité dans l’exercice des fonctions de Président et de Vice-président.
Concrètement, qu’allez-vous apporter à vos collègues enseignants-chercheurs ?
L.P : A nos collègues enseignants-chercheurs, nous allons leur apporter un renforcement, une consolidation des compétences scientifiques et des ressources financières importantes pour « booster » la recherche et améliorer leur cadre de vie.
Est-ce que ce ne sont pas des promesses qu’on a déjà entendues ?
L.P : Certainement que ceux qui le disent, le déclarent simplement parce qu’ils estiment qu’il faut peut-être flatter l’électorat. Nous, nous le disons parce que nous avons déjà pris des contacts. Lorsque nous disons que nous allons trouver des ressources additionnelles pour booster la recherche, les contacts sont déjà pris. Lorsque nous disons que nous allons pouvoir améliorer les conditions de vie et de travail, les contacts sont déjà noués. Nous opérons nous-mêmes comme expert au sein des organisations internationales où nous avons déjà tracé les sillons de l’aide que recevra l’Université de Bouaké lorsque nous serons à la tête de cette Institution.
Qu’est-ce que les étudiants peuvent attendre de vous ?
L.P : Les étudiants verront d’abord s’améliorer les conditions de travail. Ensuite, ils verront leur vie associative s’améliorer. Voilà des étudiants qui généralement, pour organiser leurs activités, sont obligés de faire des quêtes auprès des enseignants ou encore de chercher un parrain qui n’est en réalité qu’un bailleur de fonds. Désormais, ils n’auront plus besoin de tout cela pour avoir de quoi financer leurs activités associatives que nous considérons comme le prolongement des activités académiques. Ils auront de l’argent. On leur fera ouvrir un compte bancaire qui sera approvisionné avec des ressources propres rationnellement contrôlées. Ils auront de quoi s’épanouir, ici à Abidjan, dans une phase transitoire. Lorsque nous irons à Bouaké, les cadres seront créés pour que ces étudiants puissent s’épanouir à tous les niveaux.
Qu’envisagez-vous pour le personnel administratif et technique ?
L.P : Cela nous fait souvent de la peine de voir les membres du personnel de l’Université s’engouffrer de façon dégradante dans le « Gbaka » (véhicule de transport en commun privé) pour se rendre à l’Université ou rentrer chez eux.
Nous envisageons à court terme pour ces braves travailleurs la possibilité d’assurer le transport du personnel avec des cars de l’Université.
Bouaké-la-neuve, qu’est-ce que c’est ?
L.P : Bouaké-la-neuve, cela signifie que nous allons innover à tous les niveaux et présenter au monde une institution toute nouvelle. L’innovation commence par la dénomination même de notre Institution. ’’Université de Bouaké-la-neuve’’. Cette dénomination appelle à un changement à tous les niveaux. Au niveau de la formation, de la recherche, de la vie universitaire, des rapports interhumains marqués du sceau de la fraternité universelle dont rêvait le philosophe Claude-Henri de Saint-Simon. L’Université de Bouaké-la-neuve, c’est vraiment l’innovation pluridirectionnelle, l’innovation dans toutes ses dimensions humaines, infrastructurelles, économiques, financières ; c’est vraiment la grande innovation.
Ça fait rêver tout ça ?
L.P : Oui, cela fait vraiment rêver. Mais tant que je suis seul à rêver, on peut avoir des raisons de douter. Or, je rêve avec des collègues enseignants, avec le personnel administratif et technique, avec les étudiants. Ce rêve, en devenant collectif, revêt le statut du réel sensible ou phénoménal; il devient la réalité caractéristique de l’Université de Bouaké-la-neuve, une Université qui doit se développer conformément à son essence et aux exigences du millénaire.
Can you do it?
L. P : Yes I can, mieux, we can!