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Société Publié le mercredi 24 février 2010 | Islam Info

Cheick Bah Ishaq (Fondateur de l`institut Dar El-Qourâne El- Karim) : “Rien de meilleur ne peut et ne pourra remplacer le Coran”

Dans le but de faire connaître nos institutions académiques musulmanes, nous avons visité, dans le mois d'octobre 2009, l'institut de mémorisation du saint Coran, Dar El-Qourâne El-Karim, à Anyama. Le fondateur de l'institut Cheick Bah Ishaq, nous a accordé une interview pour donner des informations sur son établissement et la valeur de l'enseignement coranique.

Cheick Bah Ishaq, qui est-il ?

Cheick Bah Ishaq est un missionnaire de la Ligue Islamique Mondiale, basé à la Mecque en Arabie Saoudite. Il a été envoyé par cette ligue en Côte d'Ivoire, pour une mission d'enseignement islamique et de prédication. Il a fait ses études à l'Institut Supérieur des Etudes Islamiques et Coraniques à Nouakchott en Mauritanie, en tant que généraliste en sciences islamiques. Il a également étudié les différents types de la lecture du Saint Coran ou lectionnaires, le Tafsir (commentaire du Coran), l'hadith et la jurisprudence. Après le baccalauréat, Il a fait des études en science coranique. Il a obtenu le diplôme Idjazat (un diplôme supérieur au Bac et inférieur à la licence) dans les dix lectionnaires du Saint Coran. En 1979, Cheick Bah a eu, en théologie, le diplôme de fin d'études islamique. Il a été envoyé en Côte d'Ivoire, par la ligue islamique mondiale depuis 1980.


Islam Info : Où et quand avez-vous commencé l'enseignement du Coran ?

B. I : Cela fait bientôt 29 ans que je l'ai commencé en Côte d'Ivoire précisément à Anyama deux mois après mon arrivé dans cette ville. C'était dans un bâtiment qui m'a été offert par mon tuteur El Hadj Souleymane Bamba, qui est un entrepreneur. Il est l'oncle de feu Dr. Saliha Bamba. J'ai passé plus de dix ans dans ce local avant d'avoir un terrain. J'ai d'abord construit ma résidence sur une partie avant de transférer l'école quelques temps après sur l'autre partie du terrain. Aujourd'hui, l'école a changé. On a ouvert un internat pour les élèves.


I I : Avant d'être enseignant coranique ici en Côte d'Ivoire, avez-vous enseigné ailleurs ?

B. I : Quand j'étais étudiant, j'apprenais et j'enseignais le Coran partout où je me trouvais, chez moi à la maison ou à la mosquée. Cela depuis que j'ai mémorisé le Coran. Tout cela avant l'obtention de mes diplômes. C'est après l'obtention de mes diplômes que la Ligue Islamique Mondiale m'a affecté en Côte d'Ivoire.


I I : Quelles sont vos méthodes pour faciliter la mémorisation du Coran ?

B.I: Au départ, nous les faisions mémoriser le Coran en combinaison avec d’autres leçons en science islamique. C'est une bonne méthode parce que l'élève acquiert une bonne maîtrise de la langue arabe et une initiation appréciable à la science islamique. Mais en cela la force de mémoriser devient peu chez l'élève. Seuls les élèves ayant une très grande intelligence arrive à mémoriser. Et comme cette méthode s'est avérée lente du fait du nombre élevé des matières, nous avons donc choisi l'ancienne méthode qui permet aux élèves d'être rattachés à la mosquée. Elle consiste pour l'élève à rester dans la mosquée pour mémoriser le Coran et venir faire la répétition chez le maître en classe.


II : Quels sont vos besoins ?

B. I : Par la grâce d'Allah rien ne nous manque. Seulement, l'homme de par sa nature doit tendre vers l'amélioration et la perfection de son œuvre.


II : Rencontrez-vous des difficultés dans cette mission ?

Tout travail comporte des problèmes et des difficultés. Mais la conviction et la détermination nous permettent de réussir beaucoup de choses. Nous rencontrons des problèmes de construction par exemple. La mosquée dans laquelle se tient le cercle de mémorisation n'est pas encore terminée. L'institut de formation aussi, on travaille dans le sens de la finition pour que ce soit une faculté du Coran plus tard. Nous ne sommes pas les seuls à avoir ces genres de problèmes. C'est pourquoi ça ne nous gène pas et nous empêche pas d'aller de l'avant, car notre conviction est irréversible. Allah a dit au Prophète que « lorsque tu décides de faire quelque chose, confie-toi à Allah. » Ici, la volonté et la détermination précèdent la confiance. Parce que se confier à Allah sans aucune volonté, sans conviction et dévouement, n'apporte absolument rien. Nous avons la volonté et nous sommes dévoués à aller de l'avant. Avoir quelques difficultés dans un tel travail est donc naturel.


II : Est-ce que vous recevez de aide de l'extérieure ?
B. I : Non. Nous ne recevons pas d'aide de l'extérieur.


II : Comment arrivez-vous à subvenir à vos besoins quand on sait qu'une école comme la votre ne peut pas marcher sans gros financement ?

B. I : Il n'y a pas d'aide extérieure à part ce que nous avons reçu pour la construction de la mosquée. Et cette aide n'a pas couvert la totalité des frais des travaux. Seulement des individus viennent visiter l'école et participe au travail parce qu'ils apprécient notre œuvre. Ces participations peuvent être matérielles ou morales. Ces personnes sont de la Côte d'Ivoire et non de l'extérieur.


II : Pourquoi avez-vous choisi l'enseignement comme métier ?

B. I : Parce que le Prophète (SAW) dit : « le meilleur parmi vous est celui qui a appris le Coran et l'a enseigné à son tour, aux autres ». Donc avant que je ne sois enseignant coranique, j'ai beaucoup aimé le Coran. Donc, j'ai été élevé avec l'enseignement du Coran. Quand je suis devenu majeur et je me suis spécialisé en sciences coraniques, cela a favorisé mon amour pour l'enseignement Une année, une délégation de la ligue islamique mondiale est venue en Mauritanie pour chercher des mémorisateurs du Coran et les employer comme missionnaires en vue de vulgariser le Coran et ses sciences en Afrique de l'ouest. Le gouvernement mauritanien, a alors donné son accord pour collaborer avec la ligue dans son projet. Ainsi, ils ont crée un institut pour la formation des mémorisateurs. Un grand nombre de d'élèves ont été formés. Ils ont été affectés partout en Afrique de l'ouest, au (Niger, Burkina Faso, Mali, Guinée Conakry, Guinée-Bissau, Ghana , Togo,Côte d'Ivoire etc).


II : Est-ce que vous avez d'autres fonctions ou activités ?

B. I : Je suis un prédicateur, un Imam, tout cela avec ma fonction d'enseignant.


II : Vos élèves terminent-ils toujours leur formation?

B. I : Oui, la majorité poursuit et termine leur formation. Nous avons les nouvelles de beaucoup parmi eux. Il y en a parmi eux qui sont devenus des Imams et des enseignants. D'autres ont continué leur formation ailleurs qu'en Côte d'Ivoire. Ceux qui ne sont pas allés en profondeur mettent en pratique le peu qu'ils ont appris. Nous saluons leurs efforts. Les relations sont bonnes entre nous. Ils nous appellent, nous écrivent et nous rendent visite souvent.


II :Les élèves paient-ils correctement la scolarité?

B. I : Il y a trois (3) types de groupes qui constituent les élèves. Il y a un groupe qui paie les études. Ce sont des élèves dont les parents ont les moyens. Un autre groupe de minorité qui bénéficie des prises en charge de la part de certaines bonnes volontés. Le troisième groupe, c'est l'institut même qui s'en charge. Il s'agit des élèves brillants dont les parents n'ont pas les moyens. On se charge d'eux selon nos moyens. Et ils bénéficient d'un même programme d'enseignement.


II : Combien paye chaque élève ?

B. I : Nous avons pris en compte la situation financière du niveau social le plus bas. A ce titre, la somme que les parents paient par mois s’élève à 15.000 f CFA. Cette somme couvre la nourriture, l'eau, l'électricité, le dortoir, le per diem des cuisinières, l'hygiène et les salaires des enseignants.
Nous avons étudié et vu que cette somme peut être à la portée de tout le monde quelque soit le rang social. Il y en a qui payent régulièrement d''autres pas.


II : Combien sont-ils actuellement ?
B. I : Ils sont 1000 élèves environ, avec 400 élèves en interne et 600 qui vivent chez leur parent.


II : Comment se fait la restauration des élèves ?

B. I : On a partagé les élèves en trois groupes. Ma famille s'occupe d'un groupe, le secrétaire de l'institut et le financier s'occupent des 2 autres groupes. Il y a des servantes qui aident ces familles en matière de repas, à faire la vaisselle et le marché. Les épouses des responsables citées supervisent et coordonnent toute les démarches. L'institut se charge du financement. Les élèves mangent tous dans un même endroit.


II : Celles qui font ces travaux sont-elles des employées de l'institut ?

B. I : Elles sont des bénévoles par ce qu'elles ne prennent pas de salaire. Ce sont les épouses du Directeur, du Secrétaire Général et du conseiller.


II : Comment se fait le suivi sanitaire des élèves ?

B. I : On les suit en essayant d'apporter les premiers soins médicaux. Mais certains médecins, que je salue, sont venus ici en visite plusieurs fois. Ils nous ont affirmé leur volonté de nous aider. C'est une association de médecins avec à leur tête le Dr Abass Kéita. Ils nous ont donné le contact d'un médecin dans chacun des hôpitaux d'Abidjan et banlieue. Nous les contactons chaque fois qu'on a besoin d'eux. Il y a encore d'autres médecins qui viennent volontairement toutes les deux semaines chez moi à la maison pour observer l'état de santé des élèves.


II : Combien sont les promotions qui sont sorties de votre école depuis sa création ?

B. I : Les instituts de mémorisation du Coran ne sont pas comme les écoles ordinaires. Les sorties d'élèves ne se font pas en terme de promotion. C'est individuel. Les élèves ne sont pas regroupés en classe pendant les années de mémorisation. Ce qui fait qu'ils finissent l'un après l'autre. Certains peuvent commencer ensemble le même jour mais ne finissent pas ensemble. C'est en fonction de leur intelligence. Nous célébrions les élèves qui finissaient ensemble dans la même année. Mais on a arrêté cela d'abord.


II : Quel est l'appel que vous voulez lancer à la communauté musulmane entière ?

B. I : Louange à Allah. Mon appel à la communauté musulmane, c'est de lui recommander de revenir au livre saint d'Allah. Sa guidance, son éducation, son honneur et son progrès s'y trouvent. La communauté musulmane ne trouvera autre référence au delà des enseignements de ce livre saint. Parce que c'est le livre qu'a révélé Allah (Exalté soit-il) pour guider l'humanité toute entière. Mais certaines personnes peuvent croire qu'autre chose peut substituer au Coran en matière de référence et de législation. Rien de meilleur ne peut et ne pourra le remplacer ou l'égaler pour les humains. Ce Coran nous trace une voie divine qui prend en compte les besoins des hommes dans ce monde et dans la vie future. J'appelle donc la communauté en générale à revenir à la source qui est le noble livre d'Allah.

Particulièrement, j'interpelle les premiers responsables des musulmans en Côte d'Ivoire à vulgariser le Coran à travers tout le pays pas seulement dans les écoles. Mais ils doivent initier spécialement des cercles de mémorisation du Coran dans toutes les mosquées. Ils doivent créer des instituts pour les sciences coraniques.

La mémorisation du coran n'est pas seulement l'affaire des enfants comme le pensent certaines personnes. La plupart des compagnons du Prophète (saw) ont mémorisé le Coran pendant qu'ils étaient adultes. Pendant ce temps, ils étaient des opérateurs économiques et ils menaient bien d'autres activités. L'enfant acquiert la connaissance à bas âge et la conserve. C'est quand il grandit qu'il commence à la mettre en pratique. La personne adulte l'apprend et la pratique sur le champ. Donc c'est les adultes qui ont le plus de devoirs d'apprendre.


II : Quel avenir prévoyez-vous pour votre école ?

B. I : Je veux que cette école soit un institut de renommé en matière d'enseignement coranique et éducation des enfants musulmans. J'envisage un institut qui forme les enfants sur l'Islam dans la bonne voie et par la meilleure méthode, sans qu'ils ne dérapent. L'islam est la religion du juste milieu. « …Et dans ta prière, ne récite pas à voix haute ; et ne l'y abaisse pas trop, mais cherches le juste milieu entre les deux. » S : 17, V : 110. « Ne porte pas ta main enchaînée à ton cou (par avarice), et ne l'étend pas non plus trop largement… » S : 17, V : 29. « Les serviteurs du Tout Miséricordieux sont ceux … qui, lorsqu'ils dépensent, ne sont ni prodigues ni avares mais se tiennent au juste milieu. » S : 25, V : 67. Tous ces versets montrent qu'on doit prendre le juste milieu. C'est ce type d'élèves que nous voulons former. Des futurs prédicateurs qui pourront vivre avec tout homme de toute tendance confondue. Parce que le mot « Islam » qui d'origine arabe est tiré du mot « salâm », signifie « paix ». L'islam appelle à la paix. C'est pourquoi lorsque tu rencontres ton frère musulman vous vous dites « Assalam Alaykoum » (Paix sur vous). En te saluant ainsi, c'est comme s'il te disait : sois tranquille et que ton cœur soit apaisé. Rien ne viendra de moi vers toi si ce n'est le bien et le convenable. Cela veut dire que l'être humain, de nature, doit œuvrer pour la paix. Donc les musulmans, c'est ceux qui sont les guides et les messagers de la paix. Ceux qui appellent à la paix et à la bonne cohabitation. Qui appellent à l'islam par leurs comportements. S'ils sont en voisinage avec des non musulmans, ils peuvent appeler ceux-ci par leurs mœurs sans leur parler. Donc on veut former des ambassadeurs qui puissent représenter l'islam dignement partout où ils se trouvent, sans salir l'image de notre religion.

Par Sanogo Abou Amirat

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