Nous voulons que le Président de la République Laurent Gbagbo nous donne le Burida pour que nous puissions mettre fin à la piraterie.» Cette phrase a longtemps été sur les lèvres des créateurs des œuvres de l’esprit se réclamant de l’Union nationale des artistes de Côte d’Ivoire (Unartci).
Ils ne rataient aucune occasion, en effet, de voler dans les plumes de tous ceux qui ont géré le Bureau ivoirien des droits d’auteur avant la mise en place du Conseil d’administration dirigé par Gadji Céli. Estimant de leurs positions que rien n’était fait pour endiguer le mal. En conséquence, ils n’hésitaient pas, par moments, sans même se référer à la Brigade culturelle, structure étatique de la lutte contre la piraterie, à prendre leurs responsabilités et descendre sur le terrain. Des opérations qui, très souvent, se soldaient par des blessés dans les rangs des artistes. Le chanteur de reggae Fadal Dey a failli y laisser un œil lors d’une descente d’un collectif d’artistes à la «Sorbonne» au Plateau, il y a de cela trois ans. Fort de ces expériences malheureuses, les créateurs réunis au sein de l’Unartci mènent des démarches pour prendre le contrôle du Burida en vue de mettre en place leur politique qui prendrait en compte la lutte efficace contre la piraterie. Le ministère de la Culture et de la Francophonie organisé, à cet effet, un atelier de modification des anciens textes du Burida. Les réformes permettent l’entrée de tous les corps de métiers dans la maison verte des Deux-Plateaux. Suite à l’assemblée générale ordinaire de juillet, Gadji Céli, président de l’Unartci, est élu président du conseil d’administration du Burida. Le vœu des artistes est donc exaucé. Ils ont désormais le contrôle de la maison des créateurs. Mais, huit mois après, le constat demeure le même. La piraterie continue de sévir. Il suffit de circuler au Black Market à Adjamé, au rond-point d’Abobo, à Liberté des 220 logements (Adjamé), au grand carrefour de Koumassi, pour ne citer que ces endroits, pour s’en convaincre. Une fois à l’étrier, les «pourfendeurs» d’hier se rendent compte certainement de la complexité de la tâche. A la limite, les jeunes gens qui opèrent dans le secteur les narguent. «Vous savez, lorsque nous entendons des artistes dire qu’ils vont nous déloger, nous ne faisons que rire. Personne ne peut nous faire quoi que ce soit. Est-ce qu’ils savent les origines de la piraterie ?», lance Goguenard T. Vincent, un vendeur de CD piratés au grand carrefour de Koumassi. Et de poursuivre : «C’est parce que l’équipe de Gadji Céli ignorait beaucoup de choses qu’elle parlait beaucoup. En l’état actuel des choses, ils ne peuvent rien contre nous et contre la piraterie». Il raconte que récemment, une équipe de la brigade a failli se faire lyncher sur les lieux, n’eût été le renfort venu du côté du Camp Commando. Un autre plus virulent refuse d’entendre parler de l’éradication du fléau. «Nous qui vendons les CD piratés avons fait de grandes études pour la plupart. Aujourd’hui, il n’y a pas de travail, c’est pourquoi nous nous défendons ici», explique Adama D. Avant de menacer : «Gare à celui qui va vouloir mettre fin à notre activité. Ce commerce constitue notre gagne-pain.» A la «Sorbonne» au Plateau, le discours reste invariable. Les vendeurs de ce lieu n’ont surtout pas apprécié la dernière descente musclée de la Brigade culturelle. «Nous avons été surpris par les policiers, mais nous avons riposté», se réjouit Gohi Bi. Et d’ajouter : «Ceux qui sont au Burida doivent comprendre que ce n’est pas par une baguette magique qu’ils vont mettre fin à la piraterie. Il faut qu’ils comprennent une bonne fois pour toutes que nous avons des barons là-haut qui nous protègent.» Quant à David Guéhi, il indique le nid de la piraterie. «Au lieu de venir nous fatiguer au Plateau, il faut qu’ils partent sur le campus où tous les CD sont piratés. C’est là-bas qu’il y a la vérité. S’ils réussissent, je saurai qu’ils sont des garçons.» Au «Black Market» d’Adjamé, les pirates affichent aussi leur sérénité. «Malgré le fait qu’il y a souvent des arrestations parmi nous, nous ne sommes nullement ébranlés quant à la poursuite de nos activités. La vente des CD nous permet de nous défendre et de gagner la pitance quotidienne», indique Ousmane Souaré.
Interrogé sur le plan d’action du Burida pour combattre le fléau, Serges Kassy, responsable de ce volet au Conseil d’administration, s’est voulu optimiste. «On avait commencé de grands actes quand la crise politique actuelle est survenue. Nous avons été obligés de stopper», se justifie-t-il. Puis, il révèle qu’avant 2000, la marge de la piraterie sur le plan national était comprise entre 20 et 24%. Tout en mentionnant qu’il est impossible de ramener le fléau à zéro pour cent, il affirme que l’objectif du Burida est de diminuer la marge de progression qui a atteint 93% aujourd’hui. Il annonce de grandes actions avec la fermeture des marchés à ciel ouvert. Le commissaire de la Brigade culturelle se veut plus réaliste. Il estime qu’il est possible d’endiguer le mal. «La piraterie peut prendre fin», à condition, ajoute-t-il, qu’il ait les moyens humains et matériels pour agir sur le terrain.
Issa T. Yéo
Ils ne rataient aucune occasion, en effet, de voler dans les plumes de tous ceux qui ont géré le Bureau ivoirien des droits d’auteur avant la mise en place du Conseil d’administration dirigé par Gadji Céli. Estimant de leurs positions que rien n’était fait pour endiguer le mal. En conséquence, ils n’hésitaient pas, par moments, sans même se référer à la Brigade culturelle, structure étatique de la lutte contre la piraterie, à prendre leurs responsabilités et descendre sur le terrain. Des opérations qui, très souvent, se soldaient par des blessés dans les rangs des artistes. Le chanteur de reggae Fadal Dey a failli y laisser un œil lors d’une descente d’un collectif d’artistes à la «Sorbonne» au Plateau, il y a de cela trois ans. Fort de ces expériences malheureuses, les créateurs réunis au sein de l’Unartci mènent des démarches pour prendre le contrôle du Burida en vue de mettre en place leur politique qui prendrait en compte la lutte efficace contre la piraterie. Le ministère de la Culture et de la Francophonie organisé, à cet effet, un atelier de modification des anciens textes du Burida. Les réformes permettent l’entrée de tous les corps de métiers dans la maison verte des Deux-Plateaux. Suite à l’assemblée générale ordinaire de juillet, Gadji Céli, président de l’Unartci, est élu président du conseil d’administration du Burida. Le vœu des artistes est donc exaucé. Ils ont désormais le contrôle de la maison des créateurs. Mais, huit mois après, le constat demeure le même. La piraterie continue de sévir. Il suffit de circuler au Black Market à Adjamé, au rond-point d’Abobo, à Liberté des 220 logements (Adjamé), au grand carrefour de Koumassi, pour ne citer que ces endroits, pour s’en convaincre. Une fois à l’étrier, les «pourfendeurs» d’hier se rendent compte certainement de la complexité de la tâche. A la limite, les jeunes gens qui opèrent dans le secteur les narguent. «Vous savez, lorsque nous entendons des artistes dire qu’ils vont nous déloger, nous ne faisons que rire. Personne ne peut nous faire quoi que ce soit. Est-ce qu’ils savent les origines de la piraterie ?», lance Goguenard T. Vincent, un vendeur de CD piratés au grand carrefour de Koumassi. Et de poursuivre : «C’est parce que l’équipe de Gadji Céli ignorait beaucoup de choses qu’elle parlait beaucoup. En l’état actuel des choses, ils ne peuvent rien contre nous et contre la piraterie». Il raconte que récemment, une équipe de la brigade a failli se faire lyncher sur les lieux, n’eût été le renfort venu du côté du Camp Commando. Un autre plus virulent refuse d’entendre parler de l’éradication du fléau. «Nous qui vendons les CD piratés avons fait de grandes études pour la plupart. Aujourd’hui, il n’y a pas de travail, c’est pourquoi nous nous défendons ici», explique Adama D. Avant de menacer : «Gare à celui qui va vouloir mettre fin à notre activité. Ce commerce constitue notre gagne-pain.» A la «Sorbonne» au Plateau, le discours reste invariable. Les vendeurs de ce lieu n’ont surtout pas apprécié la dernière descente musclée de la Brigade culturelle. «Nous avons été surpris par les policiers, mais nous avons riposté», se réjouit Gohi Bi. Et d’ajouter : «Ceux qui sont au Burida doivent comprendre que ce n’est pas par une baguette magique qu’ils vont mettre fin à la piraterie. Il faut qu’ils comprennent une bonne fois pour toutes que nous avons des barons là-haut qui nous protègent.» Quant à David Guéhi, il indique le nid de la piraterie. «Au lieu de venir nous fatiguer au Plateau, il faut qu’ils partent sur le campus où tous les CD sont piratés. C’est là-bas qu’il y a la vérité. S’ils réussissent, je saurai qu’ils sont des garçons.» Au «Black Market» d’Adjamé, les pirates affichent aussi leur sérénité. «Malgré le fait qu’il y a souvent des arrestations parmi nous, nous ne sommes nullement ébranlés quant à la poursuite de nos activités. La vente des CD nous permet de nous défendre et de gagner la pitance quotidienne», indique Ousmane Souaré.
Interrogé sur le plan d’action du Burida pour combattre le fléau, Serges Kassy, responsable de ce volet au Conseil d’administration, s’est voulu optimiste. «On avait commencé de grands actes quand la crise politique actuelle est survenue. Nous avons été obligés de stopper», se justifie-t-il. Puis, il révèle qu’avant 2000, la marge de la piraterie sur le plan national était comprise entre 20 et 24%. Tout en mentionnant qu’il est impossible de ramener le fléau à zéro pour cent, il affirme que l’objectif du Burida est de diminuer la marge de progression qui a atteint 93% aujourd’hui. Il annonce de grandes actions avec la fermeture des marchés à ciel ouvert. Le commissaire de la Brigade culturelle se veut plus réaliste. Il estime qu’il est possible d’endiguer le mal. «La piraterie peut prendre fin», à condition, ajoute-t-il, qu’il ait les moyens humains et matériels pour agir sur le terrain.
Issa T. Yéo