IL Y A toutes les chances pour que le testament africain de Jacques Chirac, au final, se limite à une liste de noms. Ceux de dirigeants, d'"amitiés" cultivées avec soin et souvent décriées. Gnassingbé Eyadéma, El Hadj Omar Bongo Ondimba, Félix Houphouët-Boigny, Mobutu Sese Seko... La galerie de portraits porte de plus en plus de crêpes, et les derniers aux affaires, le Tchadien Idriss Déby ou le Camerounais Paul Biya, plus alliés qu'amis, sont assis sur des trônes branlants.
Portée par les relations personnelles mais vieillissantes du président et de ses émissaires sur le continent, la politique africaine de la France a continué, depuis 1995, de se faire à l'Elysée. Au risque de brouiller le sens de son "amour de l'Afrique", porté en bannière, et susceptible d'être confondu, pour ses adversaires, avec un opportunisme néocolonial mâtiné d'esprit de bande, au mépris des peuples. Les gages de fidélité donnés jusque dans sa mort au président togolais Gnassingbé Eyadéma, en entérinant le "coup d'Etat" amenant son fils aux affaires, ont fâché, pour longtemps, la rue togolaise avec la France et son président.
Il est une amitié africaine qui a compté, de l'avis général, pour M. Chirac, et celle-ci est morte également. Elle l'unissait à un homme qui fut ministre d'Etat en France avant d'être président de la Côte d'Ivoire, Félix Houphouët-Boigny. Pour M. Chirac, "le Vieux" constituait un authentique objet d'affection, et le pilier de granit du dispositif complexe liant la France et ses anciennes colonies, pour lequel il avait du reste forgé un néologisme promis à un bel avenir, la "Françafrique". Dans la Côte d'Ivoire d'Houphouët, M. Chirac, maire de Paris, pouvait, en 1990, déclarer que "le multipartisme est une sorte de luxe que les pays en voie de développement (...) n'ont pas les moyens de s'offrir".
La dévotion aux "rapports personnels qui, en Afrique, sont tout", comme il le rappelle volontiers, aura été l'un des mauvais génies de sa politique sur le continent, alors que ses rapports avec le président ivoirien Laurent Gbagbo passaient du médiocre à l'exécrable. Un ambassadeur en poste à Abidjan se souvient d'une conversation téléphonique entre les deux hommes. "C'était très embarrassant. Chirac le tutoyait et n'arrêtait pas de lui dire : "Mais qu'est-ce que tu as fait du pays magnifique que le Vieux a laissé, hein, qu'est-ce que tu en as fait ?"."
Jean-Philippe Rémy
Article paru dans l'édition du 13.03.07
Portée par les relations personnelles mais vieillissantes du président et de ses émissaires sur le continent, la politique africaine de la France a continué, depuis 1995, de se faire à l'Elysée. Au risque de brouiller le sens de son "amour de l'Afrique", porté en bannière, et susceptible d'être confondu, pour ses adversaires, avec un opportunisme néocolonial mâtiné d'esprit de bande, au mépris des peuples. Les gages de fidélité donnés jusque dans sa mort au président togolais Gnassingbé Eyadéma, en entérinant le "coup d'Etat" amenant son fils aux affaires, ont fâché, pour longtemps, la rue togolaise avec la France et son président.
Il est une amitié africaine qui a compté, de l'avis général, pour M. Chirac, et celle-ci est morte également. Elle l'unissait à un homme qui fut ministre d'Etat en France avant d'être président de la Côte d'Ivoire, Félix Houphouët-Boigny. Pour M. Chirac, "le Vieux" constituait un authentique objet d'affection, et le pilier de granit du dispositif complexe liant la France et ses anciennes colonies, pour lequel il avait du reste forgé un néologisme promis à un bel avenir, la "Françafrique". Dans la Côte d'Ivoire d'Houphouët, M. Chirac, maire de Paris, pouvait, en 1990, déclarer que "le multipartisme est une sorte de luxe que les pays en voie de développement (...) n'ont pas les moyens de s'offrir".
La dévotion aux "rapports personnels qui, en Afrique, sont tout", comme il le rappelle volontiers, aura été l'un des mauvais génies de sa politique sur le continent, alors que ses rapports avec le président ivoirien Laurent Gbagbo passaient du médiocre à l'exécrable. Un ambassadeur en poste à Abidjan se souvient d'une conversation téléphonique entre les deux hommes. "C'était très embarrassant. Chirac le tutoyait et n'arrêtait pas de lui dire : "Mais qu'est-ce que tu as fait du pays magnifique que le Vieux a laissé, hein, qu'est-ce que tu en as fait ?"."
Jean-Philippe Rémy
Article paru dans l'édition du 13.03.07