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Société Publié le lundi 14 juin 2010 | Notre Défi

Déchets toxiques /Il y a un an Trafigura tuait les ivoiriens - Tout sur les déchets de la mort

© Notre Défi Par DR
Scandale des déchets toxiques : ouverture à Amsterdam (Hollande) du procès du Probo Koala
La cargaison de déchets toxiques du Probo Koala avait finalement été épandue en 2006 en Côte d`Ivoire
Le 19 aout 2006, la Côte d’ Ivoire s’est vue bousculée par une catastrophe grave relative au déversement, par un navire le ‘’ Probo Koala’’ d’une quantité importante de déchets chimiques hautement toxiques sur le territoire Abidjanais et banlieues entrainant des maladies graves, des cas de décès constatés, des eaux polluées et des plantations dévastées par contagions. Les victimes de nos jours se chiffrant à des dizaines de milliers et dont le dédommagement important nécessite un suivi médical et juridique, les organisations et associations de victimes sur le territoire national décident de mettre sur pieds la Fédération Nationale des Victimes des Déchets Toxiques de Côte d’Ivoire (FENAVIDET CI). Elle est née le samedi 24 février 2007 de l’assemblée générale constitutive des associations et fédérations des différentes communes victimes du déversement. Au regard de l’Etat de droit, des libertés individuelles, de l’égalité des individus devant la justice et de la qualité de la vie humaine, cette fédération est destinée à œuvrer à la prise en charge effective des victimes dans le respect de son fonctionnement au conformément de la loi N°60-315 du 21 Septembre 1960.

Historique

Le 2 juillet 2006, le PROBO KOALA accoste au port d’Amsterdam. Il a auparavant déchargé une cargaison d’hydrocarbures en Espagne. La citerne à déchets étant pleine de plus de 500m3 de résidus d’hydrocarbures et divers composants chimiques, TRAFIGURA cherche à s’en défaire auprès de la société Amsterdam Port Services (APS). Ces déchets sont déchargés sur une barge couplée au navire. Une puanteur inhabituelle se répand, probablement due à la forte odeur d’œufs pourris du sulfure d’hydrogène. La police des services d’environnement de la ville et les autorités portuaires interviennent. La société APS remarque lors de tests en laboratoire, que les substances ne correspondent pas aux informations données sur les déchets par le donneur d’ordre. Il s’ensuit une négociation sur le prix qui n’a pas abouti. Trafigura décide de recharger les déchets sur le PROBO KOALA, ce qui selon APS, ne s’est jamais produit. Les services de l’environnement d’Amsterdam ont tenté de faire immobiliser le navire mais sans succès. La seule injonction faite est de décharger les déchets au port suivant.

Le PROBO KOALA se rend ensuite à Paldiski en Estonie pour charger de l’essence destinée au Nigeria. Le 1ier Août, après deux escales aux Iles Canaries et à Lomé (Togo), le PROBO KOALA atteint Lagos (Nigeria). Il Livre une cargaison de pétrole. Trafigura fait une nouvelle et vaine tentative de vidange.

-Le 12 Juillet 2006, la société TOMMY est créée par, Salomon Ugborugbo, de nationalité nigériane. Elle n’obtient du ministre des transports ivoirien qu’un agrément d’approvisionnement des navires.

-Le 9 Août 2006 dix jours avant l’arrivée du PROBO KOALA, la société TOMMY est agréée pour le traitement de produits toxiques. Elle n’a jamais obtenu de contrat de ce type mais serait spécialisée dans la vidange et l’entretien des soutes de navire et décroche une autorisation du port pour récupérer les huiles usagées et les résidus d’hydrocarbures. TOMMY n’a ni les moyens ni les compétences pour cette tâche.

-Le 17 août, à Abidjan, la compagnie Puma Energy, filiale de TRAFIGURA, prend contact avec la société Waibs, un intermédiaire qui conseille de faire affaire avec la société Tommy. TOMMY s’engage à assurer le boulot.

-Le 19 Août 2006, accostage du PROBO KOALA au port d’Abidjan. La société TOMMY se charge de l’apanage des 528 tonnes dans une quinzaine d’endroits de la ville d’ABIDJAN.

-Le 20 Août une forte odeur s’empare d’Abidjan. Des populations font des allergies multiples.

-Le 21 Août, les analyses du Centre Ivoirien Antipollution (CIAPOL) attestent que l’échantillon s’apparente à du produit pétrolier proche de l’essence, avec une forte teneur en hydrogène sulfuré, substance toxique pouvant entraîner la mort immédiate en cas d’inhalation.

-Le 22 Août, malgré une demande d’immobilisation datée au port de la veille, le PROBO KOALA peut quitter sans encombre le port d’Abidjan. Le PROBO KOALA, dont l’équipage est russe est un navire pétrolier immatriculé au PANAMA, appartenant à une compagnie Grecque et affrété par la société Hollandaise et Suisse TRAFIGURA.


Description chimique de la cargaison

Trois enquêtes sont ouvertes au Pays-Bas afin de déterminer dans quelles circonstances le navire a quitté le pays alors que ses soutes ne contenaient pas que des résidus issus d’un nettoyage. Les analyses révèlent que les déchets sont constitués de soude à 10%, des thiols (mercaptans), des phénols, de l’hydrogène sulfuré, de naphte (oléfines, paraffines et hydrocarbures aromatiques),et des disulfides. L’enquête révèle qu’il s’agit des résidus d’une opération de transformation de 70000 tonnes de pétrole et de 28000 tonnes de naphte en provenance des Etats-Unis qui auraient été déchargés en Cote d’Ivoire.


Mouvement Politique et Remous sociaux

Les déversements ayant été effectués dans plusieurs endroits (curieusement) la forte odeur du produit envahit les riverains, des malaises s’ensuivent, des complications cliniques également et à la fin plusieurs cas de décès sont signalés, les populations se révoltent ça et là. Les victimes s’organisent par sites de déversement pour réclamer justice et la tête des coupables. L’opposition politique s’en mêle, le pouvoir aussi. On se disculpe de part et d’autre, tout en essayant de faire porter la responsabilité aux autres. Le 06 septembre 2006 le premier ministre ivoirien Konan Banny démissionne avec son gouvernement. Deux ministres (transports et environnement) sont limogés, tandis que sont suspendus le directeur du port d’Abidjan (qui serait un des principaux financiers du clan présidentiel), le gouverneur du district d’Abidjan et le directeur général des douanes ivoiriennes.

Après avoir nié pendant 2 mois la toxicité des déchets déversés à Abidjan, TRAFIGURA a reconnu qu’une opération de raffinage avait bien eu lieu à bord du PROBO KOALA, en pleine mer, quelques semaines avant le désastre. Cette manipulation a généré des déchets à forte toxicité et un bénéfice de quelques millions d’euros pour TRAFIGURA

Deux mois seulement après le drame ; contre toute attente, le président ivoirien Laurent GBAGBO signe plusieurs décrets prévoyant le retour à leur poste des directeurs du port autonome d’Abidjan ;du directeur générale de la douane ivoirienne et du gouverneur du district d’Abidjan réputés être très proche du président. Indignées par la décision du Chef de l’Etat les victimes et leurs associations sont sur le pied de guerre. L’opposition s’en implique fortement. Mais le Chef de l’Etat en homme politique avisé décide de lui couper l’herbe sous les pieds. Il décide de recevoir les victimes et leurs différentes associations. Ce fut là une véritable opération de charme qui a eu pour mérite de désolidariser plusieurs associations de victime des différentes manifestations prévues. A cette rencontre, il est évoqué la nécessite de création d’une fédération unique regroupant toutes les associations et organisations de victimes. Le président Laurent GBAGBO approuve et dégage des fonds à cet effet (40 millions de Frs CFA). Le 24 février 2007, à la bibliothèque national d’Abidjan plateau, la FENAVIDET-CI entendez Fédération National des Victime des Déchets Toxique de Cote d’Ivoire voit le jour. Elle a pour mission et objectif de représenter en tout lieu et en tout temps les victimes des déchets toxiques de Cote d’Ivoire et de les défendre sur tous les plans. Mais curieusement depuis la mise en place de la FENAVIDET-CI les pouvoirs publics ont évité de l’associer aux différentes tractations touchant au sort des victimes ; entres autres, le très impopulaire accord ETAT de COTE d’IVOIRE - TRAFIGURA

Accord Etat de Côte d`Ivoire - TRAFIGURA

Organisation des victimes

Pendant que les victimes à travers leur fédération attendent l’appui et l’assistance nécessaire promis par le Chef de l’Etat (appui administratif logistique et judiciaires…..) elles sont surprises en même temps que la communauté nationale et internationale de l’annonce et la publication d’un accord état de COTE d’IVOIRE - TRAFIGURA lb. Le 13 février 2007, accord à l’amiable inadmissible dans lequel TRAFIGURA s’engage a versée 152millions d’euro à la partie ivoirienne en échange de l’abandon des poursuites judiciaire contre elle. L’accord qualifié « d’accord de la honte » fut de toute évidence rejeté par la FENAVIDET-CI à sa création. Toutefois la FENAVIDET-CI décide d’endosser pour le compte des victimes les 152millions d’euro sous forme d’acompte sur la manne financière que devra payer TRAFUGURA dans le cadre du dédommagement et de l’indemnisation des victimes des déchets toxiques, mais aussi et surtout continuer tranquillement les différentes procédures judiciaires engagées contre TRAFIGURA et tous ses complices. Mais c’était sans compter la volonté du pouvoir d’Etat d’organiser un détournement des 152millions d’euro de TRAFIGURA.


Indemnisation des victimes

Pendant que les associations et organisations de victimes et leur fédération attendaient d’être invitées et associées à la gestion des 152 millions d’euros (100 milliards de franc CFA) de TRAFIGURA, elles furent surprises par une grille de partage minutieusement conçue par la présidence de la république ivoirienne. A la lecture de la grille on se rend compte que l’Etat pour qui il est prévu 22 milliards sur les 100 dans le contrat, s’octroie à lui seul et ses démembrements plus des 2/3 des 100 milliards. A l’opposé l’on n’a prévu qu’une vingtaine de milliards aux centaines de milliers de victimes qui espéraient en vain des soins médicaux appropriés. 200000FCFA (300 Euro) c’est la modique somme qui est prévue pour être reversée à chaque victime. C’est donc tout naturellement que la grille de partage est rejetée par la FENAVIDET-CI qui réclame en vain sa réécriture en association avec tous les acteurs. En pleine contestation généralisée, l’état fiers de son forfait décide de continuer sa besogne en publiant cette fois une liste dite des victimes des déchets toxiques. Liste que ne reconnaissent pas les différentes associations de victimes qui crient à l’an arque. Une an arque pour justifier une indemnisation de masse qui à la fin se révèle comme une poudre aux yeux de l’opinion nationale et internationale. On se rendra compte avec le temps que l’indemnisation annoncée tambour battant n’est en réalité qu’un détournement organisé des quelques milliards qui restait des 100 milliards de TRAFIGURA. Les victimes n’ont que leurs yeux pour pleurer.


Dépollution des sites

Une quinzaine dont 10 grands sites de déversements ont étés identifiés à travers plusieurs endroits à Abidjan. Aux premières heures des événements, sous la pression des manifestants, le gouvernement Charles K. BANNY signe un contrat de gré à gré avec TREDI-SECHE pour l’enlèvement des déchets et la dépollution des sites de déversement. 17/24 milliards sont dégagés, une partie des sites se voit dépolluée, d’aucuns par contre ne connaitront qu’un début de dépollution pendant que des sites dont quelques (4) grands sites restent à être dépollués. Les travaux engagés par la société TREDI-SECHE sont arrêtés quelques semaines plus tard. Difficultés de trésorerie dit-t-on. Conformément aux termes du contrat TREDI-SECHE attend le versement de la totalité du reste (7milliards) de ce qui lui est du avant de continuer et d’achever la dépollution du reste des sites de déversement. Les jours passent au grand désespoir des Abidjanais qui continuent de cohabiter et d’être intoxiqués par ses sites de la mort. Le 13 Février 2007, lorsque l’accord de la honte intervient, accord qui a pour seul mérite de confier le reste de la dépollution à la partie Trafigura ; les Abidjanais reprennent espoir, espoir qui se verra ruiné puisque plusieurs mois après on n’a pas vu venir la dépollution du reste des sites. Les populations continuent d’inhaler les déchets avec son cortège de malades et de décès. Aux dernières nouvelles de gros intérêts financiers retarderaient l’exécution des travaux au grand dam des souffrances du peuple. On cherche à se faire plein de sous sur le dos des populations qui se meurent. Dans une conférence de presse en date du 22 Novembre 2007 la fédération des victimes a dénoncé et décrié cette situation et a lancé un cri de cœur à l’endroit de la communauté internationale, aux organisations des droits de l’homme et environnementales afin qu’elles se mobilisent pour la dépollution effective et totale des sites.


Situation sanitaire des victimes

L’on fait le malheureux constat de ce qu’autour d’une telle catastrophe qui a causé des centaines de milliers d’intoxiqués et plusieurs cas de décès, l’Etat n’a prévu aucune structure ni de soins, ni de suivi qui puisse produire des rapports périodiques sur la situation et/ou l’évolution sanitaire des victimes. La fédération des victimes en a encore une fois fait son chemin de bataille. Aujourd’hui les malades sont abandonnées à leur sort. La situation sanitaire est dramatique. Des malades continuent de se déclarer. Plusieurs intoxiqués font aujourd’hui des complications cliniques. La liste de décès se rallonge dans le silence. Le tableau est sombre. Il est impérieux de se mobiliser pour venir en aide à toute une population en détresse.


Actions Judiciaires

A l’éclatement du scandale un bicéphalisme s’est crée au sommet de l’état .un clan dirigé par le premier ministre Charles BANNY issu des accords de paix et l’autre inspiré par le Chef de l’Etat le président Laurent GBAGBO (pour mémoire depuis 2002 la COTE d’IVOIRE est confrontée a une rébellion armée qui a occasionné plusieurs accord de paix). Pour la gestion du scandale des déchets toxiques Charles Konan BANNY met sur pied un comité de coordination des différentes actions dirigée par madame Safiatou Ba N’Daw. Le président Laurent GBAGBO, lui créé une cellule dénommée cellule présidentielle chargée des catastrophes humaines et naturelles dirigée par l’ex ministre OHOUOCHI Clotilde. C’est pourquoi sur le plan judiciaire : pendant que le chef de l’état saisi le procureur TCHIMOU pour ouvrir une enquête judiciaire, le premier ministre lui responsabilise maître Fatoumata Diakité, magistrat hors hiérarchie a la tête d’une commission d’enquête indépendante. Deux mois après, la commission d’enquête de la primature publie ses résultats apparemment contestés par le camp présidentiel qui jure de livrer les « vrais » résultats d’enquêtes dans les jours qui suivront. Rien n’y fit jusqu`à ce jour. Quant à l’information judiciaire, elle fait quelques détenus préventifs. Sept (7) ivoiriens sont inculpés et écroués, ils sont rejoints le 18 Septembre 2006 par C. Dauphin fondateur dirigeant de TRAFIGURA, et son directeur pour l’Afrique de l’ouest, J.P.Valentini, écroués à la Maison d’Arrêt et de Correction d’Abidjan (MACA). A la surprise générale, après le versement des 100 Milliards de TRAFIGURA, toutes les personnalités détenues sus-citées recouvrent la liberté le 13 février 2007. Et plus rien ! Ni responsables, ni coupables de ce scandale n’ont été connus. Les victimes et leurs associations se perdent dans des actions judiciaires dans un environnement juridique apparemment gelé par l’Etat de COTE d’IVOIRE. La fédération nationale des victimes de déchet toxique ne démord pas. Elle se réserve le droit de porter plainte contre l’état de COTE d’IVOIRE et son acolyte TRAFIGURA dans des pays européens et sous d’autres cieux.


Une enquête de Henri Medi
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