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Société Publié le vendredi 11 juin 2010 | Le Mandat

Dossier/ Examens de fin d’année : La traite des hommes de Dieu, charlatans et enseignants

Les examens de fin d’année, moment de stress pour les nombreux candidats constituent pour les enseignants, hommes de Dieu et charlatans, une occasion de s’en mettre plein les poches.

Les examens de fin d’année suscitent un réel engouement auprès des candidats et de leurs parents. L’échec à ces épreuves est considéré comme un déshonneur pour certaines familles quand cela représente pour des candidats, la fin de leur vie. Ainsi, mettant en doute leurs valeurs intrinsèques, des candidats préfèrent avoir recours à des pratiques occultes, veillée de prières et corruption des examinateurs le jour des épreuves. Les églises et mosquées sont, à chaque période d’examens de fin d’année, envahies par les fidèles (candidats) qui espèrent bénéficier du soutien de Dieu dans ces épreuves. Les veillées de prières, croisades d’évangélisation et groupe de prières dans les églises sont privilégiées au détriment des études. Certains candidats même désertent les foyers pour vivre dans les temples et autres lieux de culte.


Des candidats à la recherche de Dieu pour réussir aux examens

« Nous n’avons pas besoin d’étudier. Dieu nous donnera la connaissance et l’intelligence pour affronter les examens. Car lui-même a dit : ‘’Demandez, et l’on vous donnera’’ (Matthieu 7,7). Tout s’obtient par la prière », affirme la majorité d’entre eux. Ce mode de pensée de certains candidats profite à coup sûr à des hommes de Dieu. Les lieux de cultes sont envahis par ces derniers à la recherche du succès. Une occasion que ne laissent pas passer des dignitaires religieux. Ils multiplient les veillées de prières sous prétexte de prier pour Dieu afin qu’il exauce les prières des candidats, à condition qu’ils déboursent de l’argent. Ils exigent le plus souvent entre 100 mille F CFA et plus en promettant de faire des miracles. « Il faut donner beaucoup, pour avoir la grâce de Dieu », convainquent-ils. Ainsi, ils s’en mettent plein les poches, sans que souvent le miracle ne s’opère. Pour ce faire, ils investissent dans des spots publicitaires et envoient leurs disciples dans les rues pour attirer plus de monde.


Les charlatans dans la danse

Les animistes qui, le plus souvent, ont recours aux pratiques occultes pour avoir du succès, mettent à contribution les charlatans pour la réussite aux examens de fin d’année. Ces individus qui, généralement sont, des personnes incultes, promettent le succès à tous leurs clients à condition que des sacrifices d’animaux soient faits. 10 poulets, 1 bœuf, 2 moutons, de l’argent… sont autant de choses qu’ils demandent pour accomplir le miracle. « Ma maman m’a envoyé chez un charlatan à Abobo, qui m’a dit, après avoir fait les sacrifices, d’aller dormir, de ne plus casser ma tête dans les révisions, parce que je suis déjà admis », a rapporté, un candidat à l’examen du Bac session 2010. En attendant que le miracle ne se produise pour ce jeune homme, ce qui n’est pas évident parce que plusieurs candidats sont passés par là sans avoir le succès, les vendeurs d’illusion continuent de se faire plein les poches sur le dos des candidats naïfs souvent poussés par des parents irresponsables. Comme si la réussite à un examen tombe du ciel ou se trouve dans mains occultes.


Les enseignants ne démordent pas

La période des examens est un miment faste pour bon nombre d’enseignants. Que ce soit dans le primaire ou dans le secondaire et supérieur, plusieurs méthodes sont utilisées par les enseignants pour se faire du sou. Dans le primaire, les instituteurs traitent avec les parents d’élèves qui veulent que leurs progénitures franchissent coûte que coût la classe de Cm2 avec le Cepe dans la poche. Ainsi, des sommes oscillant entre 5000 et 20000 F cfa sont déboursées par des parents au profit de véreux instituteurs. Une fois cette somme obtenue, l’indélicat enseignant use de toutes les stratégies pour voler au secours de son protéger. Mme, s’il n’est pas affecté dans le centre d’examen de ce dernier, il fera tout pour lui venir en aide. Car ne dit on pas qu’un client satisfait peut toujours vous faire parvenir un autre. Tout comme dans le primaire, le cycle secondaire est miné par ce genre de pratiques ignobles. Les épreuves orales sont d’abord la première période de vaches grasses. Pour attribuer de bonnes notes aux candidats, des examinateurs leur demandent une somme variant entre 1000 F cfa et 3000 F cfa. Dans cette pratique, les enseignants du privé sont beaucoup pointés du doigt. M. Adon Roland du conseil consultatif de l’éducation nationale (Ccen) affirmait récemment que sur 10 enseignants examinateurs épinglés, 8 sont du privé. En effet, les enseignants du privé ne bénéficiant pas d’un traitement salarial, profitent pour la grande majorité des périodes d’examens pour renflouer leur poche. Surtout que pour eux, l’année scolaire ne dure que 7 mois et après, ils ne reçoivent aucun centime de leur fondateur pendant les mois de vacance. Beaucoup ont donc recours à ces pratiques malsaines pour se préparer des moments de vacance à l’abri de besoin. Au cours des épreuves écrites, des examinateurs viennent en aide à des candidats en salle de composition en contrepartie d’une enveloppe. Les sommes déboursées pour mouiller leur barbe oscillent entre 5000 et 25000 F cfa. Il arrive des fois où le candidat paie plus de 25000 F cfa. Il s’agit des cas où le parent prend directement contact avec un enseignant afin que ce dernier traite les épreuves pour son enfant. La somme de 30.000 F cfa à 50.000 F cfa est nécessaire dans ce cas.


L’ « opération Hibou » toujours de mise

L’ « opération Hibou », est la technique qui permet à un candidat ayant composé dans la journée de revenir reprendre ses compositions une fois la nuit tombée. Cette stratégie est réalisée avec la complicité des responsables de centre. Il n’est pas permis à tous les candidats de bénéficier d’un tel privilège. Car, il nécessite une manne financière importante. L’enveloppe exigée oscille entre 100.000 F cfa et 200.000 F cfa. A l’approche des examens, des personnes véreuses proposent des réseaux aux candidats pour l’obtention du Brevet de technicien supérieur (Bts). Malgré les différentes techniques de filtrage mises sur pieds par la direction des examens et concours de l’enseignement supérieur, ces derniers arrivent à fournir très couvent de faux diplômes à leurs protégés quand ils n’arrivent à leur assurer le succès. En 2006, ce sont environ 804 faux diplômes qui ont été décelés par la direction des examens et concours de l’enseignement supérieur, de Doulaye Coulibaly. Malgré ce fait, pratique à la peur dure. Comme on peut le constater, la période des examens est un moment de vache grasse pour beaucoup d’enseignants, qui décident de monnayer leur connaissance contre des espèces sonnantes et trébuchantes que leur offrent des parents d’élèves pour le succès de leurs enfants. Il faut cependant que ces pratiques ignobles cessent. La Côte d’Ivoire a besoin de cadres bien formés.

Aboubakar Sangaré
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