Malgré la médiation du chef de l'Etat, les deux tendances de l'église méthodiste de Côte d'Ivoire restent sur le pied de guerre. Nord-Sud Quotidien a enquêté sur les causes de cette crise qui dure depuis une dizaine d'années.
Le feu couve sous la cendre à l'Eglise méthodiste. Après l'affrontement sanglant du 11 avril, à Kpass, village de la sous-préfecture de Dabou, c'est la veillée d'armes chez les deux tendances de cette confession religieuse, riche de plus de 100 mille fidèles. Dans plusieurs communautés, et particulièrement celles du Léboutou, où est basée la religion, protestants méthodistes et méthodistes unis préparent d'autres batailles pour le contrôle d'un patrimoine. Le second groupe défend le changement de dénomination de l'association religieuse. Pour lui, l'appellation d'Eglise protestante méthodiste de Côte d'Ivoire appartient désormais au passé. Il ne reconnait désormais que l'Eglise méthodiste unie de Côte d'Ivoire. L'entité reste la même à ses yeux, et garde, par conséquent, la propriété de ses temples, écoles, etc.
Les premiers sont opposés au changement de dénomination. Ils considèrent que tous les biens appartiennent à la vieille église. Pour eux, les partisans de l'Eglise méthodiste unie, qu'ils considèrent comme une nouvelle église, différente de l'ancienne, doivent se trouver de nouveaux lieux de culte.
L'histoire d'une crise
Après l'éclatement de la crise, grâce à sa majorité de pasteurs et de fidèles, la tendance méthodiste unie, dirigée par le bishop Benjamin Boni, a pris le contrôle de la majorité des temples. A défaut d'avoir obtenu le départ des fidèles du camp adverse, les partisans de l'Eglise protestante méthodiste ont souhaité que les heures de prière soient séparées. Si cette utilisation commune des temples a été possible dans certains villages comme Ousrou B ou Youhoulil, ce n'est pas le cas dans de nombreuses localités où les méthodistes unis s'y opposent. C'est le cas de Kpass. Ce résumé était nécessaire pour éviter que vous vous perdiez dans la complexité de cette crise qui commence au début des années 2000.
Au cours de ses voyages aux Etats-Unis, Benjamin Boni, chef de l'Eglise protestante méthodiste de Côte d'Ivoire, à l'époque, se rapproche des responsables des ''Eglises unies évangéliques et frères'' du pays de l'Oncle Sam. Les deux parties se découvrent beaucoup de ressemblances au plan doctrinal. Il en résulte l'idée d'un rapprochement qui devait permettre à la puissante église des Usa d'apporter un appui matériel à sa sœur ivoirienne, régulièrement confrontée à des difficultés de trésorerie. Pour cette raison, le projet de rapprochement est bien accueilli, au départ, par l'ensemble de la communauté méthodiste de Côte d'Ivoire. Mais, au moment de la mise en pratique, naîtra la division. Elle oppose la direction de l'église à neuf pasteurs qui s'élèvent contre une fusion qui leur aurait été initialement présentée comme un simple partenariat. Ils contestent le changement de dénomination né du mariage.
En effet, selon le révérend-pasteur Alphonse Affi Dadié, pasteur du temple ''Espérance''de Kpass, et secrétaire général du district de l'Eglise méthodiste unie à Dabou, pour avoir décidé de former une seule église, Américains et Ivoiriens ont décidé de se trouver une appellation harmonisée. « On ne pouvait pas dire : Eglise méthodiste et frères unis. Nous avons abandonné le terme frère à leur niveau, et chez nous, nous avons laissé tomber le mot protestant. Ce qui a donné le nom : Eglise méthodiste unie. Quel mal en cela ?», s'interroge-t-il.
En face, l'on ne voit pas la chose de cet œil. Pour les protestants méthodistes, le changement de dénomination est contraire aux textes de l'église ivoirienne. Cela, aussi bien dans la forme que dans le fond.
Au niveau de la forme, les méthodistes protestants affirment que l'intégration à l'église américaine n'a jamais été approuvée par la Conférence, organe suprême de l'Eglise méthodiste ivoirienne.
Ce qui oppose les deux camps
Concernant le fond, ils soutiennent que la nouvelle doctrine est contraire aux principes de l'Eglise protestante méthodiste. « Notre doctrine est celle de la sanctification. Quand tu commets un péché, tu dois le reconnaître et te repentir. Le péché n'est pas toléré sous quelle que forme que ce soit. Mais, au moins, l'église interpelle. L'homosexualité et la transsexualité sont des péchés. On ne doit pas les tolérer. Là-bas (dans l'église américaine), c'est l'abomination. Des pasteurs homosexuels dirigent les cultes. L'homosexualité est reconnue comme un péché mais il est toléré », précise Akpa Metchro Dénis qui joue le rôle de coordonnateur de la branche protestant méthodiste. Son interview, et celle du révérend Affi que nous vous proposerons, demain, vous permettront de mieux comprendre les positions des deux camps sur ces aspects religieux et sur la violation, ou non, des statuts et règlements.
L'église va vivre silencieusement la crise de 2002 jusqu'en 2008, où, un fait va révolter les partisans de la tendance protestant méthodiste. Ils découvrent qu'un arrêté a été pris par le ministre de l'Administration du territoire d'alors, pour officialiser le changement de nom. C'est l'arrêté n°384/MEMET/DGAP/SDVAC portant modification de l'organe de direction et de la dénomination de l'Eglise protestante méthodiste de Côte d'Ivoire(Epmci). L'arrêté s'est appuyé sur le procès-verbal d'une assemblée générale, tenue le 21 octobre 2003. Considérant que cette assemblée n'a jamais eu lieu, et que seule la conférence de l'église est habilitée à prendre une telle décision, les contestataires conduits par Dr Amari Esmel Louis, le pasteur Gnagne Agnes Erneste, le pasteur Jean Mac Athangba et Akpa Metchro Denis, vont traduire le bishop Benjamin Boni devant le tribunal correctionnel du Plateau, pour faux et usage de faux.
Ils seront déboutés par le juge qui, s'appuyant à son tour, sur l'arrêté obtenu par l'autre camp, va se prononcer en faveur du changement de dénomination et de l'appartenance du patrimoine à la nouvelle église.
La médiation de Gbagbo
Parallèlement à cette bataille juridique, le chef de l'Etat, comme il l'a fait pour la communauté musulmane et celle de l'église du christianisme céleste, va mettre en place un comité de médiation, pour tenter, à l'amiable, de ramener l'unité chez les méthodistes. Il choisit pour cela des cadres qui ont été ou qui sont encore fidèles de cette église. Parmi eux, Kahé Eric, Mel Eg Théodore, Mme Ekra, le directeur de cabinet du président de la Cour suprême, l'ex-président de la Commission électorale indépendante, Mambé Robert, et Lida Kouassi Moïse, que nous avons tenté de joindre, en vain. Après avoir entendu les deux parties, ce comité a proposé que la poire soit coupée en deux. Dans cet arrangement que nous publions déjà en en juillet 2009, la tendance protestant méthodiste devait renoncer au mot protestant. Les partisans de la nouvelle dénomination devaient, quant à eux, abandonner le terme unie, pour la dénomination simplifiée, mais réconciliatrice d'Eglise méthodiste de Côte d'Ivoire. La proposition a été acceptée par les protestants méthodistes. Elle a été refusée par le camp méthodiste unie qui ne veut plus remettre en cause son mariage avec l'église américaine. Par ailleurs, il estime que c'est aux protestataires qu'il revient de rejoindre leur famille. Avec son nouveau nom.
Cissé Sindou
Le feu couve sous la cendre à l'Eglise méthodiste. Après l'affrontement sanglant du 11 avril, à Kpass, village de la sous-préfecture de Dabou, c'est la veillée d'armes chez les deux tendances de cette confession religieuse, riche de plus de 100 mille fidèles. Dans plusieurs communautés, et particulièrement celles du Léboutou, où est basée la religion, protestants méthodistes et méthodistes unis préparent d'autres batailles pour le contrôle d'un patrimoine. Le second groupe défend le changement de dénomination de l'association religieuse. Pour lui, l'appellation d'Eglise protestante méthodiste de Côte d'Ivoire appartient désormais au passé. Il ne reconnait désormais que l'Eglise méthodiste unie de Côte d'Ivoire. L'entité reste la même à ses yeux, et garde, par conséquent, la propriété de ses temples, écoles, etc.
Les premiers sont opposés au changement de dénomination. Ils considèrent que tous les biens appartiennent à la vieille église. Pour eux, les partisans de l'Eglise méthodiste unie, qu'ils considèrent comme une nouvelle église, différente de l'ancienne, doivent se trouver de nouveaux lieux de culte.
L'histoire d'une crise
Après l'éclatement de la crise, grâce à sa majorité de pasteurs et de fidèles, la tendance méthodiste unie, dirigée par le bishop Benjamin Boni, a pris le contrôle de la majorité des temples. A défaut d'avoir obtenu le départ des fidèles du camp adverse, les partisans de l'Eglise protestante méthodiste ont souhaité que les heures de prière soient séparées. Si cette utilisation commune des temples a été possible dans certains villages comme Ousrou B ou Youhoulil, ce n'est pas le cas dans de nombreuses localités où les méthodistes unis s'y opposent. C'est le cas de Kpass. Ce résumé était nécessaire pour éviter que vous vous perdiez dans la complexité de cette crise qui commence au début des années 2000.
Au cours de ses voyages aux Etats-Unis, Benjamin Boni, chef de l'Eglise protestante méthodiste de Côte d'Ivoire, à l'époque, se rapproche des responsables des ''Eglises unies évangéliques et frères'' du pays de l'Oncle Sam. Les deux parties se découvrent beaucoup de ressemblances au plan doctrinal. Il en résulte l'idée d'un rapprochement qui devait permettre à la puissante église des Usa d'apporter un appui matériel à sa sœur ivoirienne, régulièrement confrontée à des difficultés de trésorerie. Pour cette raison, le projet de rapprochement est bien accueilli, au départ, par l'ensemble de la communauté méthodiste de Côte d'Ivoire. Mais, au moment de la mise en pratique, naîtra la division. Elle oppose la direction de l'église à neuf pasteurs qui s'élèvent contre une fusion qui leur aurait été initialement présentée comme un simple partenariat. Ils contestent le changement de dénomination né du mariage.
En effet, selon le révérend-pasteur Alphonse Affi Dadié, pasteur du temple ''Espérance''de Kpass, et secrétaire général du district de l'Eglise méthodiste unie à Dabou, pour avoir décidé de former une seule église, Américains et Ivoiriens ont décidé de se trouver une appellation harmonisée. « On ne pouvait pas dire : Eglise méthodiste et frères unis. Nous avons abandonné le terme frère à leur niveau, et chez nous, nous avons laissé tomber le mot protestant. Ce qui a donné le nom : Eglise méthodiste unie. Quel mal en cela ?», s'interroge-t-il.
En face, l'on ne voit pas la chose de cet œil. Pour les protestants méthodistes, le changement de dénomination est contraire aux textes de l'église ivoirienne. Cela, aussi bien dans la forme que dans le fond.
Au niveau de la forme, les méthodistes protestants affirment que l'intégration à l'église américaine n'a jamais été approuvée par la Conférence, organe suprême de l'Eglise méthodiste ivoirienne.
Ce qui oppose les deux camps
Concernant le fond, ils soutiennent que la nouvelle doctrine est contraire aux principes de l'Eglise protestante méthodiste. « Notre doctrine est celle de la sanctification. Quand tu commets un péché, tu dois le reconnaître et te repentir. Le péché n'est pas toléré sous quelle que forme que ce soit. Mais, au moins, l'église interpelle. L'homosexualité et la transsexualité sont des péchés. On ne doit pas les tolérer. Là-bas (dans l'église américaine), c'est l'abomination. Des pasteurs homosexuels dirigent les cultes. L'homosexualité est reconnue comme un péché mais il est toléré », précise Akpa Metchro Dénis qui joue le rôle de coordonnateur de la branche protestant méthodiste. Son interview, et celle du révérend Affi que nous vous proposerons, demain, vous permettront de mieux comprendre les positions des deux camps sur ces aspects religieux et sur la violation, ou non, des statuts et règlements.
L'église va vivre silencieusement la crise de 2002 jusqu'en 2008, où, un fait va révolter les partisans de la tendance protestant méthodiste. Ils découvrent qu'un arrêté a été pris par le ministre de l'Administration du territoire d'alors, pour officialiser le changement de nom. C'est l'arrêté n°384/MEMET/DGAP/SDVAC portant modification de l'organe de direction et de la dénomination de l'Eglise protestante méthodiste de Côte d'Ivoire(Epmci). L'arrêté s'est appuyé sur le procès-verbal d'une assemblée générale, tenue le 21 octobre 2003. Considérant que cette assemblée n'a jamais eu lieu, et que seule la conférence de l'église est habilitée à prendre une telle décision, les contestataires conduits par Dr Amari Esmel Louis, le pasteur Gnagne Agnes Erneste, le pasteur Jean Mac Athangba et Akpa Metchro Denis, vont traduire le bishop Benjamin Boni devant le tribunal correctionnel du Plateau, pour faux et usage de faux.
Ils seront déboutés par le juge qui, s'appuyant à son tour, sur l'arrêté obtenu par l'autre camp, va se prononcer en faveur du changement de dénomination et de l'appartenance du patrimoine à la nouvelle église.
La médiation de Gbagbo
Parallèlement à cette bataille juridique, le chef de l'Etat, comme il l'a fait pour la communauté musulmane et celle de l'église du christianisme céleste, va mettre en place un comité de médiation, pour tenter, à l'amiable, de ramener l'unité chez les méthodistes. Il choisit pour cela des cadres qui ont été ou qui sont encore fidèles de cette église. Parmi eux, Kahé Eric, Mel Eg Théodore, Mme Ekra, le directeur de cabinet du président de la Cour suprême, l'ex-président de la Commission électorale indépendante, Mambé Robert, et Lida Kouassi Moïse, que nous avons tenté de joindre, en vain. Après avoir entendu les deux parties, ce comité a proposé que la poire soit coupée en deux. Dans cet arrangement que nous publions déjà en en juillet 2009, la tendance protestant méthodiste devait renoncer au mot protestant. Les partisans de la nouvelle dénomination devaient, quant à eux, abandonner le terme unie, pour la dénomination simplifiée, mais réconciliatrice d'Eglise méthodiste de Côte d'Ivoire. La proposition a été acceptée par les protestants méthodistes. Elle a été refusée par le camp méthodiste unie qui ne veut plus remettre en cause son mariage avec l'église américaine. Par ailleurs, il estime que c'est aux protestataires qu'il revient de rejoindre leur famille. Avec son nouveau nom.
Cissé Sindou