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Politique Publié le mardi 22 juin 2010 | Le Patriote

Les dix bizarreries qui jettent la suspicion sur la procédure

Cela est de notoriété publique. Sous Laurent Gbagbo, la gestion des affaires est devenue le terreau fertile pour cultiver tous les maux dont souffrent les administrations en Afrique. Au lieu de s’y attaquer avec franchise, le chef de l’Etat privilégie le spectacle, par des effets d’annonce au détriment de l’efficacité. C’est le cas du communiqué qu’il a fait lire récemment, par son Porte-parole, à propos des affaires sales dans lesquelles son ministre de l’Intérieur, aurait trempé. Un communiqué qui laisse transparaître dix faiblesses. Que voici :

1- Le ministre de la Justice évité

Dans un Etat, il y a un gouvernement et un ministre de la Justice, de qui relève au premier chef, le Procureur de la République. La démarche de Gbagbo à ce niveau, manque d’élégance. Quoique légale, selon les spécialistes, la procédure du chef de l’Etat ne respecte pas les règles. Car, ni le gouvernement, ni le Premier ministre encore moins le ministre de la Justice ou le Procureur général n’ont été informés ou saisis au préalable. On se demande alors, à quoi sert le ministre de la Justice, si le chef de l’Etat doit directement communiquer avec le Procureur? A moins que, et c’est le cas, Gbagbo et le procureur ne veuillent cacher les conclusions au Garde des Sceaux.

2- Le préalable de la démission
C’est plus une question de morale républicaine que de justice. Par décence, le ministre de l’Intérieur devait démissionner pour donner une chance aux enquêtes d’aboutir. A défaut, Laurent Gbagbo devrait pouvoir le mettre en congé de la gestion des affaires. De par sa position, il aura forcément à influencer la conduite de l’enquête. Cette décision, plus que politique est nécessaire, comme on le voit dans les démocraties, toute personnalité soupçonnée de malversations et contre laquelle est engagée une procédure démissionne.

3- Document curieux
L’enquête ordonnée par le Chef de l’Etat tire sa source de document bien curieux. Le porte-parole de Gbagbo, dans son communiqué, s’est appuyé sur un article de presse non signé, une déclaration d’un groupe de secrétaires de section FPI. On se demande quel sérieux le Procureur accordera à ces accusations quand on sait que le réquisitoire public du Président de l’Assemblée nationale est, lui, un élément important.

4- Quel rôle pour Koulibaly?
Pourquoi Mamadou Koulibaly, l’accusateur n’est-il pas cité en tant que sachant. Ce sont ses déclarations, en effet, qui ont déclenché la polémique sur la fraude à l’Ecole de police. Au lieu de s’intéresser à des coupures de presse, Gbagbo aurait pu demander au Président de l’Assemblée nationale de se mettre à la disposition de la justice pour y faire la déposition.

5- Suspicion sur le Procureur
Pourquoi le Procureur de la République, Tchimou Raymond ne s’est-il pas saisi du dossier? Les accusations sont suffisamment graves. Elles sont portées par une des hautes personnalités de l’Etat contre un ministre en fonction. Elles portent sur l’équilibre de la République et l’équité de l’Etat. Le Procureur de la République qui, de par ses responsabilités, veille au maintien de cet équilibre social, aurait dû se saisir de l’affaire. Pour avoir attendu que le chef de l’Etat lui en donne l’ordre, son initiative est frappée de suspicion. Car, à y voir de près, Laurent Gbagbo et ses proches sont acteurs et bénéficiaires de tout ce qui est reproché à Tagro.

6- Soro visé
Chose curieuse, la présence du nom du Premier ministre dans le communiqué du chef de l’Etat, comme s’il y a quelque chose derrière le micro. Il s’agit tout de même du deuxième personnage de l’Etat, chef du gouvernement. L’exposer ainsi, dans un communiqué public, c’est faire preuve de légèreté. Ou bien, c’est dévoiler, de façon pernicieuse, une intention cachée pour le salir et salir son action.

7- Le procès de SAGEM?
L’Etat de Côte d’Ivoire est-il décidé à faire son propre procès ? La réponse est certainement positive au regard de l’initiative annoncée par le Porte-parole du chef de l’Etat sur la partition de cette société dans le processus. SAGEM est en Côte d’Ivoire depuis quatre ans à l’issue d’un appel d’offres. Les enquêtes de Tchimou, voudront dire que Gbagbo a décidé de remettre en cause le processus de paix. Si SAGEM est récusée, cela nous ramène à l’avant-identification. Autrement dit, deux ans en arrière. Or, tout le monde le sait, c’est un rêve caressé par Gbagbo.

8- Le délai d’exécution
Un mois. C’est le délai donné par Laurent Gbagbo au Procureur de la République pour boucler son enquête avec les autorités de la police judiciaire. Pourquoi le délai d’un mois, comme s’il y avait un calendrier secret que Gbagbo voudrait devoir respecter ? Le cas du scandale de la filière café-cacao est là pour édifier les Ivoiriens. Le juge peine toujours à boucler l’instruction, dans une affaire qui avait pourtant l’air d’un flagrant délit. Qu’en sera-t-il pour ces histoires complexes de corruption, de passe-droit et de tribalisme ?

9- Visées électoralistes
La période dans laquelle nous nous trouvons n’est pas innocente. Aucun pas ne se pose sans calcul. Aucune action n’est faite sans arrière-pensée. Alors, cette ambiance donne l’impression que Laurent Gbagbo est plutôt dans un coup politique. Sa procédure, au lieu d’éclairer l’opinion nationale, vise plutôt au bout, à blanchir un proche parmi ses plus proches collaborateurs.

10- Un pare-feu
A la limite, une bonne partie de l’opinion le sait. Gbagbo a court-circuité la vraie enquête. Mamadou Koulibaly et les députés du RHDP s’apprêtaient à mettre en place une Commission parlementaire d’enquête. Composée de toutes les tendances et de toutes les opinions, elle aurait la légitimité pour agir dans l’équité. C’est le cas de la Commission nationale d’enquête qu’Houphouët-Boigny avait mise en place suite aux événements de la cité universitaire de Yopougon, en 1991. Cette enquête du Procureur de la République se pose donc, pour ainsi dire, en s’opposant à la justice. En fin de compte, les Ivoiriens ne pourront avoir droit qu’à une parodie en lieu et place de la justice.
Charles Sanga

Gbagbo le vrai responsable
Laurent Gbagbo, depuis dimanche dernier, a décidé de réagir face aux accusations portées contre son ancien porte-parole, le ministre Désiré Tagro. Dans un communiqué lu par son actuel porte-parole, Gervais Coulibaly, le chef de l’Etat dit avoir saisi le procureur de la République « à l’effet d’ouvrir une enquête » sur les recrutements à l’école de police, le détournement de l’argent du hadj et les sommes allouées par Trafigura pour l’indemnisation des victimes des déchets toxiques. Scandales dans lesquelles le ministre de l’Intérieur est nommément cité. En recommandant au procureur de la République de se saisir de ces affaires, Laurent Gbagbo veut montrer à l’opinion qu’il n’a rien à voir avec. Mieux. Qu’il est blanc comme neige dans ces scandales qui font grand bruit en ce moment. Mais pour celui qui connait l’histoire récente de la Côte d’Ivoire, la posture de Laurent Gbagbo ressemble à celle du pompier pyromane. La situation actuelle qui écœure tant les Ivoiriens incombe entièrement à l’actuel locataire du palais présidentiel. Le chef de l’Etat s’il ne l’a pas créée directement, l’a encouragée. On se le rappelle lors d’une interview télévisée sur la Première chaîne, le candidat du FPI, à la question d’un journaliste qui s’inquiétait des nombreux détournements de la refondation, a répondu ceci : « Mais s’il y a des détournements, ça fait quoi ? C’est à notre tour de manger. » Devant les téléspectateurs effarés et choqués par ce qu’ils venaient d’entendre. Le chef de l’Exécutif ivoirien ne s’est pas arrêté là. Au cours d’un séminaire du FPI en juillet 2009 à Mama avec les cadres du FPI, Laurent Gbagbo a dit clairement à ses camarades : « Si je ne suis pas réélu, vos fortunes, vous les perdrez. » Au regard de ces propos, il ne serait pas exagéré d’avancer que le champion de la refondation a largement participé à la décrépitude morale que connaît la Côte d’Ivoire actuellement. Car à n’en point douter, si ces déclarations ne sont pas des invites claires au détournement, elles ressemblent au moins à un encouragement à l’enrichissement illicite. Laurent Gbagbo était informé de tout ce qui se passait. Pis. Il l’a même cautionné. Il a fallu les révélations graves du numéro 2 du régime, Mamadou Koulibaly pour le sortir de son profond sommeil. A vrai dire, le chef de l’Etat, une fois encore, fait de la diversion. Sinon, comment comprendre que pour des scandales qui ne datent pas d’aujourd’hui, c’est maintenant qu’il a décidé de réagir et qui plus est, par l’entremise du procureur de la République, un de ses obligés. On le voit, comme d’habitude, Laurent Gbagbo a une idée pas claire derrière la tête.

Jean-Claude Coulibaly
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