M. Claude Sahi est le président de ‘’Espérance Côte d’Ivoire’’. Un jeune parti politique dont il veut en faire une force de réflexion et de propositions, pour contribuer à la renaissance de l’Afrique. Du 20 au 22 juillet 2010 à Abidjan, Claude Sahi et sa formation politique, organisent un colloque en Côte d’Ivoire sur la résolution des conflits en Afrique. Les Opérations de paix de l’ONU, la CEDEAO, les mécanismes de négociation et leur efficacité sont analysés dans cette interview.
1) Président Claude Sahi, pourquoi un colloque sur la résolution des conflits en Afrique ?
Claude Sahi : Le cinquantenaire de nos Etats africains crée la nécessité de faire un bilan. A travers le thème du colloque : la résolution des conflits en Afrique : quelles contributions efficaces des organisations internationales. Les cas du Libéria, de la Sierra-Léone et de la Côte d’Ivoire ; nous tenterons d’apporter notre contribution dans les débats sur le parcours de nos jeunes Etats.
Ensuite, à la création de notre jeune parti politique, nous nous sommes imposés d’être une force de réflexion et de propositions. D’où notre volonté de contribuer à la renaissance de l’Afrique. Cela signifie pour nous, faire en sorte que l’Afrique compte sur l’échiquier international. Or, quand on fait le bilan de nos indépendances, les cinquante dernières années sont émaillées par la survenance de nombreuses crises qui ont eu des fortunes plus ou moins diverses en matière de résolution de conflits. Souvent les Etats, la société civile, et surtout la communauté internationale s’y sont impliquées.
Nous avons voulu engager une réflexion sur cette question afin d’élaborer une méthodologie qui servirait de bréviaire à la résolution des conflits futurs.
En le disant, nous n’innovons pas. C’est une réflexion qui a été engagée par le Chef de l’Etat en s’interrogeant solennellement à la tribune de l’ONU sur l’efficacité de cette organisation mondiale dans la résolution de certains conflits en Afrique.
C’est donc une préoccupation majeure qui est soulevée au sommet de l’Etat. Et nous, notre rôle en tant qu’acteurs politiques, c’est d’engager la réflexion sur ces préoccupations majeures de l’Etat et de la société dans laquelle nous vivons. Parce que la politique est faite par les hommes et pour les hommes.
2) Concrètement, comment ce colloque va-t-il se dérouler ?
C.S : Le colloque se déroulera dans la ville d’Abidjan, plus précisément au Centre de Conférences Internationales du Ministère des Affaires Etrangères au Plateau. Il consistera à rassembler en trois jours, les 20,21 et 22 juillet 2010 d’éminents spécialistes en prévention et gestion des conflits. Le colloque sera axé autour de cinq communications principales :
les opérations de maintien de la paix et le principe de souveraineté des Etas à l’heure de la mondialisation : regards croisés de la société civile et des acteurs internationaux.
les mécanismes de négociation de paix et leur efficacité.
l’ancrage territorial des opérations de maintien de la paix : quelles synergies avec les acteurs locaux.
les mécanismes de préventions des conflits par le système d’alerte précoce.
quel bilan des opérations de maintien de paix de la CEDEAO et l’ONU au Libéria, en Sierra-Léone et en Côte d’Ivoire ?
Ces communications majeures seront prononcées par des experts internationaux et nationaux et suivies des travaux en commissions destinés à faire des propositions dans le sens d’améliorer la situation des pays africains en matière de prévention et de résolution de conflits.
3) Peut-on avoir les noms de quelques éminents spécialistes invités au colloque d’Abidjan ?
C.S : Nous avons la chance d’associer à la fois des experts internationaux et nationaux.
En international on aura les Professeurs Albert Tévodjéré du Benin, Alioun Sall du Sénégal et S.E.M Vincent Zakané du Burkina Faso.
Au plan national nous aurons la contribution du Docteur Essis Essoh Jean-Mathieu, PhD en sciences politiques et conférencier émérite ; puis celle du Professeur Kouassi Yao, Docteur en histoire moderne et contemporaine, spécialiste des conflits armés en Afrique.
4) Pourquoi la présence du Professeur Albert Tévodjéré et de monsieur Vincent Zakané qui sont connus pour leur engagement politique dans leurs pays respectifs ?
C.S : Ce choix s’est imposé à nous à cause de leur riche expérience et leur compétence en la matière. Pour mémoire, rappelons que le Professeur Albert Tévodjéré fut le premier représentant spécial du Secrétaire de l’ONU dans la crise ivoirienne. Il est actuellement le Grand Médiateur de la République du Bénin. Il traitera de la question des opérations de maintien de la paix et le principe de souveraineté des Etas à l’heure de la mondialisation : regards croisés de la société civile et des acteurs internationaux.
Il s’agira de voir comment les différents acteurs appréhendent les interventions internationales en lien avec le principe de souveraineté des Etats.
Quant à monsieur Vincent Zakané, il est l’actuel Directeur de Cabinet du Président du Burkina Faso, Blaise Compaoré, qui passe depuis le départ des Présidents Félix Houphouët Boigny et Gnassingbé Eyadema, comme le médiateur attitré des différentes crises africaines. Le Directeur de Cabinet d’une telle personnalité est nécessairement un «sachant», et c’est à ce titre que nous l’avons invité à venir partager cette somme d’expériences avec nous. Car la résolution des conflits n’est pas seulement ce qui se fait et se dit devant les micros et les caméras. Mais c’est aussi le dense travail abattu, dans la discrétion, par des personnes de dossiers. C’est pourquoi, nous sommes honorés qu’une telle personnalité accepte de sortir de ses dossiers et venir partager cette expérience avec nous. Monsieur Zakané abordera la question des mécanismes de négociation de paix et leur efficacité. Il s’agira d’identifier les modes de négociation et de facilitation utilisés dans le cadre de la résolution des conflits et de voir les conditions ayant favorisé leur succès ou leur échec.
5) Pourquoi, le choix de la Côte d’Ivoire au lieu d’un autre Etat de la sous-région ouest africaine pour abriter le colloque ?
C.S : cela fait beaucoup de « pourquoi» depuis le début de l’entretien. (Éclats de rires)
Soyons sérieux pour dire que fondamentalement trois raisons essentielles ont guidé notre choix.
La première est d’abord d’ordre matériel. Notre parti politique est jeune et ne dispose pas de moyens immenses pour organiser une manifestation de cette envergure dans un autre pays. Je fais allusion à toute la logistique qui accompagne l’organisation d’un tel événement. Il nous est apparu plus sage de concentrer nos énergies dans un espace que nous maitrisons et où nous pourrons très facilement dominer certains paramètres d’ordre organisationnel. Ensuite, étant ivoiriens et de surcroit acteurs politiques de ce pays, il était évident que la crise ivoirienne, dans sa longueur, sa spécificité et la profondeur du mal qu’elle a causée, pouvait être étudiée comme cas d’école afin de nourrir la réflexion. Enfin, au moment où le gouvernement ivoirien fait des efforts pour repositionner le pays sur la scène internationale en négociant le retour de certaines institutions, il ne nous semblait pas judicieux de délocaliser un tel événement qui justement parle de résolution des conflits en Afrique. C’est donc une façon pour nous de contribuer à la tentative de normalisation des choses dans notre pays.
6) Monsieur le président, êtes vous d’accord que le continent africain n’a qu’une seule image : la guerre et la souffrance ?
C.S : Je pense que cette image de l’Afrique est excessive et tout extrémisme est nuisible. Il n’y a pas que du noir et du blanc. Entre ces deux couleurs, il y a des nuances qu’il faut prendre en compte. Certes, la guerre et son corollaire de souffrances ont rythmé la vie de nos Etats, mais ce serait trop réducteur que de retenir l’Afrique des armes, l’Afrique des larmes et des pleurs. Car au-delà, certaines facettes de l’Afrique sont d’énormes sources de satisfaction. Au plan culturel et sportif, c’est une Afrique décomplexée qui rivalise avec les grandes nations. Au plan politique, on peut noter des avancées démocratiques. Quand on prend l’exemple du Bénin, du Mali, de l’Afrique du sud ou même du Ghana, on peut exprimer des motifs de satisfaction. En outre, le fait que les coups d’Etats commencent à ne plus être regardés comme des moyens normaux d’accession au pouvoir, l’on peut aisément espérer de l’Afrique. Au plan économique, l’idée du NEPAD, même si concrètement ses résultats ne sont pas encore probants, sa conception est source d’espoir. On pourrait citer plusieurs domaines de ce genre. Je terminerai par l’Afrique des ressources humaines. Le continent regorge d’experts, d’éminents spécialistes dans tous les secteurs d’activités qui rivalisent sans complexe avec leurs homologues étrangers.
7) Soit ! Mais tout cela ne peut pas cacher l’Afrique des conflits ?
Votre analyse est juste. L’Afrique de cette fin de siècle présente au monde l’image d’une terre en perdition où la guerre, la famine, la maladie, la souffrance et la mort constituent «le pain quotidien» d’une large majorité des habitants. Les nombreux conflits ont fait tant de maux à l’Afrique que fatalement, c’est cette image qu’on finit par nous coller. Or je dis et je le répète il y a plusieurs Afrique. C’est d’ailleurs pourquoi, afin de gommer définitivement toutes ces images néfastes que nous initions de telles rencontres de réflexions.
8) Generalement quand on parle de maintien de la paix, on pense automatiquement aux opérations sur le continent. Monsieur le président êtes vous d’accord que la stratégie de maintien de la paix est un succès en Afrique ?
C.S : Tout d’abord, je voudrais rectifier pour dire que les conflits, ce n’est seulement en Afrique. Il en existe sur tous les continents. En Europe de l’est, il y a des conflits. En Europe occidentale, notamment en Irlande existent des conflits. En plein cœur de l’Europe, entre Flamands et Wallons, en Belgique il y a des conflits. En Amérique, notamment en Colombie et au Costa Rica, il y a des conflits. En Asie, que dire des deux Corées. Au Pakistan, en Irak en Afghanistan…Je pourrais en citer d’autres où les conflits existent. Ce n’est pas seulement qu’en Afrique.
Ceci dit venons au fond de votre question pour dire que les opérations de maintien de la paix rentrent dans la stratégie globale de la communauté internationale dans la résolution des crises. Il y a eu des conflits en Afrique qui n’ont pas connu l’intervention de la communauté internationale. Mais ceux dans lesquels l’ONU est intervenue et où elle a eu à établir des forces de maintien de la paix, on peut légitimement s’interroger de savoir si elles ont été un succès. On peut en douter. En ce moment, l’ONU compte plus d’une dizaine d’opération de maintien de la paix en Afrique et le quart des ressources que l’organisation utilise pour le maintien de la paix dans le monde est consacré à l’Afrique. Et pourtant, de plus en plus, ces organisations, quand elles ne sont pas taxées de soutenir une des parties en conflit, elles sont tout simplement conspuées et vues comme des armées d’occupation. Pour d’autres, elles sont totalement inefficaces à résoudre le conflit pour lequel elles sont présentes. Si on suit l’actualité, on s’interrogera sur les décisions des souverains de la République du Tchad et celle du Congo Démocratique de faire partir les forces onusiennes de leur sol. On peut donc douter des réponses de ses organisations mondiales à prévenir et résoudre des conflits. Mais rappelons nous ma précédente maxime : «tout extrémisme est nuisible». Car à côté de ces cas de faiblesses on peut voir les cas du Libéria, de la Sierra-Léone et bien d’autres où les forces mondiales ont permis le retour au calme et à la démocratie.
C’est de tout cela que nous voulons parler au cours de ce colloque. Où l’objectif sera de sortir des aprioris pour coller aux réalités saines et objectives.
9) En dehors du maintien de la paix par l’ONU, Claude Sahi connait-il d’autres mécanismes de résolutions de conflits adaptés aux réalités africaines ?
C.S : Je voudrais préciser que Claude Sahi n’est que le porte-parole du parti qui est lui-même organisateur du colloque. Pour revenir à la question, je dirai qu’il existe certainement d’autres mécanismes de résolution mais aussi de prévention de conflits adaptés à nos réalités propres. Mais comme nous ne ferons pas le colloque au cours de cette interview, permettez que nous réservions la primeur des réflexions aux débateurs qui viendront. Et soyez rassurez, vous serez édifiés des actes et recommandations qui sortiront du colloque.
10) Mobiliser plusieurs pays africains à Abidjan, avec les institutions internationales autour de l’épineuse question de la résolution des conflits en Afrique. Ce n’est pas trop ambitieux ?
C.S : Rien de grand ne se fait sans rêve. Si on ne rêve pas on ne vit pas. Nous, à Espérance Côte d’Ivoire, nous avons l’ambition de gouverner la Côte d’Ivoire de demain. Il faut donc commencer à penser ; Penser la Côte d’Ivoire et à penser l’Afrique et le monde de demain. C’est cette ambition que nous poursuivons. Ce n’est donc pas de la démesure. C’est une preuve de notre amour pour notre pays et pour notre continent.
C’est pour cette raison qu’il nous faut remercier la hauteur de vue du Chef de l’Etat et du Ministre des Affaires Etrangères qui n’ont pas hésité à soutenir notre projet et s’impliquer dans son organisation. Car au-delà de notre jeune formation politique, il s’agira de réfléchir sur une préoccupation majeure de notre pays en particulier et de notre continent en général.
Réalisée par Ben Ismaël
1) Président Claude Sahi, pourquoi un colloque sur la résolution des conflits en Afrique ?
Claude Sahi : Le cinquantenaire de nos Etats africains crée la nécessité de faire un bilan. A travers le thème du colloque : la résolution des conflits en Afrique : quelles contributions efficaces des organisations internationales. Les cas du Libéria, de la Sierra-Léone et de la Côte d’Ivoire ; nous tenterons d’apporter notre contribution dans les débats sur le parcours de nos jeunes Etats.
Ensuite, à la création de notre jeune parti politique, nous nous sommes imposés d’être une force de réflexion et de propositions. D’où notre volonté de contribuer à la renaissance de l’Afrique. Cela signifie pour nous, faire en sorte que l’Afrique compte sur l’échiquier international. Or, quand on fait le bilan de nos indépendances, les cinquante dernières années sont émaillées par la survenance de nombreuses crises qui ont eu des fortunes plus ou moins diverses en matière de résolution de conflits. Souvent les Etats, la société civile, et surtout la communauté internationale s’y sont impliquées.
Nous avons voulu engager une réflexion sur cette question afin d’élaborer une méthodologie qui servirait de bréviaire à la résolution des conflits futurs.
En le disant, nous n’innovons pas. C’est une réflexion qui a été engagée par le Chef de l’Etat en s’interrogeant solennellement à la tribune de l’ONU sur l’efficacité de cette organisation mondiale dans la résolution de certains conflits en Afrique.
C’est donc une préoccupation majeure qui est soulevée au sommet de l’Etat. Et nous, notre rôle en tant qu’acteurs politiques, c’est d’engager la réflexion sur ces préoccupations majeures de l’Etat et de la société dans laquelle nous vivons. Parce que la politique est faite par les hommes et pour les hommes.
2) Concrètement, comment ce colloque va-t-il se dérouler ?
C.S : Le colloque se déroulera dans la ville d’Abidjan, plus précisément au Centre de Conférences Internationales du Ministère des Affaires Etrangères au Plateau. Il consistera à rassembler en trois jours, les 20,21 et 22 juillet 2010 d’éminents spécialistes en prévention et gestion des conflits. Le colloque sera axé autour de cinq communications principales :
les opérations de maintien de la paix et le principe de souveraineté des Etas à l’heure de la mondialisation : regards croisés de la société civile et des acteurs internationaux.
les mécanismes de négociation de paix et leur efficacité.
l’ancrage territorial des opérations de maintien de la paix : quelles synergies avec les acteurs locaux.
les mécanismes de préventions des conflits par le système d’alerte précoce.
quel bilan des opérations de maintien de paix de la CEDEAO et l’ONU au Libéria, en Sierra-Léone et en Côte d’Ivoire ?
Ces communications majeures seront prononcées par des experts internationaux et nationaux et suivies des travaux en commissions destinés à faire des propositions dans le sens d’améliorer la situation des pays africains en matière de prévention et de résolution de conflits.
3) Peut-on avoir les noms de quelques éminents spécialistes invités au colloque d’Abidjan ?
C.S : Nous avons la chance d’associer à la fois des experts internationaux et nationaux.
En international on aura les Professeurs Albert Tévodjéré du Benin, Alioun Sall du Sénégal et S.E.M Vincent Zakané du Burkina Faso.
Au plan national nous aurons la contribution du Docteur Essis Essoh Jean-Mathieu, PhD en sciences politiques et conférencier émérite ; puis celle du Professeur Kouassi Yao, Docteur en histoire moderne et contemporaine, spécialiste des conflits armés en Afrique.
4) Pourquoi la présence du Professeur Albert Tévodjéré et de monsieur Vincent Zakané qui sont connus pour leur engagement politique dans leurs pays respectifs ?
C.S : Ce choix s’est imposé à nous à cause de leur riche expérience et leur compétence en la matière. Pour mémoire, rappelons que le Professeur Albert Tévodjéré fut le premier représentant spécial du Secrétaire de l’ONU dans la crise ivoirienne. Il est actuellement le Grand Médiateur de la République du Bénin. Il traitera de la question des opérations de maintien de la paix et le principe de souveraineté des Etas à l’heure de la mondialisation : regards croisés de la société civile et des acteurs internationaux.
Il s’agira de voir comment les différents acteurs appréhendent les interventions internationales en lien avec le principe de souveraineté des Etats.
Quant à monsieur Vincent Zakané, il est l’actuel Directeur de Cabinet du Président du Burkina Faso, Blaise Compaoré, qui passe depuis le départ des Présidents Félix Houphouët Boigny et Gnassingbé Eyadema, comme le médiateur attitré des différentes crises africaines. Le Directeur de Cabinet d’une telle personnalité est nécessairement un «sachant», et c’est à ce titre que nous l’avons invité à venir partager cette somme d’expériences avec nous. Car la résolution des conflits n’est pas seulement ce qui se fait et se dit devant les micros et les caméras. Mais c’est aussi le dense travail abattu, dans la discrétion, par des personnes de dossiers. C’est pourquoi, nous sommes honorés qu’une telle personnalité accepte de sortir de ses dossiers et venir partager cette expérience avec nous. Monsieur Zakané abordera la question des mécanismes de négociation de paix et leur efficacité. Il s’agira d’identifier les modes de négociation et de facilitation utilisés dans le cadre de la résolution des conflits et de voir les conditions ayant favorisé leur succès ou leur échec.
5) Pourquoi, le choix de la Côte d’Ivoire au lieu d’un autre Etat de la sous-région ouest africaine pour abriter le colloque ?
C.S : cela fait beaucoup de « pourquoi» depuis le début de l’entretien. (Éclats de rires)
Soyons sérieux pour dire que fondamentalement trois raisons essentielles ont guidé notre choix.
La première est d’abord d’ordre matériel. Notre parti politique est jeune et ne dispose pas de moyens immenses pour organiser une manifestation de cette envergure dans un autre pays. Je fais allusion à toute la logistique qui accompagne l’organisation d’un tel événement. Il nous est apparu plus sage de concentrer nos énergies dans un espace que nous maitrisons et où nous pourrons très facilement dominer certains paramètres d’ordre organisationnel. Ensuite, étant ivoiriens et de surcroit acteurs politiques de ce pays, il était évident que la crise ivoirienne, dans sa longueur, sa spécificité et la profondeur du mal qu’elle a causée, pouvait être étudiée comme cas d’école afin de nourrir la réflexion. Enfin, au moment où le gouvernement ivoirien fait des efforts pour repositionner le pays sur la scène internationale en négociant le retour de certaines institutions, il ne nous semblait pas judicieux de délocaliser un tel événement qui justement parle de résolution des conflits en Afrique. C’est donc une façon pour nous de contribuer à la tentative de normalisation des choses dans notre pays.
6) Monsieur le président, êtes vous d’accord que le continent africain n’a qu’une seule image : la guerre et la souffrance ?
C.S : Je pense que cette image de l’Afrique est excessive et tout extrémisme est nuisible. Il n’y a pas que du noir et du blanc. Entre ces deux couleurs, il y a des nuances qu’il faut prendre en compte. Certes, la guerre et son corollaire de souffrances ont rythmé la vie de nos Etats, mais ce serait trop réducteur que de retenir l’Afrique des armes, l’Afrique des larmes et des pleurs. Car au-delà, certaines facettes de l’Afrique sont d’énormes sources de satisfaction. Au plan culturel et sportif, c’est une Afrique décomplexée qui rivalise avec les grandes nations. Au plan politique, on peut noter des avancées démocratiques. Quand on prend l’exemple du Bénin, du Mali, de l’Afrique du sud ou même du Ghana, on peut exprimer des motifs de satisfaction. En outre, le fait que les coups d’Etats commencent à ne plus être regardés comme des moyens normaux d’accession au pouvoir, l’on peut aisément espérer de l’Afrique. Au plan économique, l’idée du NEPAD, même si concrètement ses résultats ne sont pas encore probants, sa conception est source d’espoir. On pourrait citer plusieurs domaines de ce genre. Je terminerai par l’Afrique des ressources humaines. Le continent regorge d’experts, d’éminents spécialistes dans tous les secteurs d’activités qui rivalisent sans complexe avec leurs homologues étrangers.
7) Soit ! Mais tout cela ne peut pas cacher l’Afrique des conflits ?
Votre analyse est juste. L’Afrique de cette fin de siècle présente au monde l’image d’une terre en perdition où la guerre, la famine, la maladie, la souffrance et la mort constituent «le pain quotidien» d’une large majorité des habitants. Les nombreux conflits ont fait tant de maux à l’Afrique que fatalement, c’est cette image qu’on finit par nous coller. Or je dis et je le répète il y a plusieurs Afrique. C’est d’ailleurs pourquoi, afin de gommer définitivement toutes ces images néfastes que nous initions de telles rencontres de réflexions.
8) Generalement quand on parle de maintien de la paix, on pense automatiquement aux opérations sur le continent. Monsieur le président êtes vous d’accord que la stratégie de maintien de la paix est un succès en Afrique ?
C.S : Tout d’abord, je voudrais rectifier pour dire que les conflits, ce n’est seulement en Afrique. Il en existe sur tous les continents. En Europe de l’est, il y a des conflits. En Europe occidentale, notamment en Irlande existent des conflits. En plein cœur de l’Europe, entre Flamands et Wallons, en Belgique il y a des conflits. En Amérique, notamment en Colombie et au Costa Rica, il y a des conflits. En Asie, que dire des deux Corées. Au Pakistan, en Irak en Afghanistan…Je pourrais en citer d’autres où les conflits existent. Ce n’est pas seulement qu’en Afrique.
Ceci dit venons au fond de votre question pour dire que les opérations de maintien de la paix rentrent dans la stratégie globale de la communauté internationale dans la résolution des crises. Il y a eu des conflits en Afrique qui n’ont pas connu l’intervention de la communauté internationale. Mais ceux dans lesquels l’ONU est intervenue et où elle a eu à établir des forces de maintien de la paix, on peut légitimement s’interroger de savoir si elles ont été un succès. On peut en douter. En ce moment, l’ONU compte plus d’une dizaine d’opération de maintien de la paix en Afrique et le quart des ressources que l’organisation utilise pour le maintien de la paix dans le monde est consacré à l’Afrique. Et pourtant, de plus en plus, ces organisations, quand elles ne sont pas taxées de soutenir une des parties en conflit, elles sont tout simplement conspuées et vues comme des armées d’occupation. Pour d’autres, elles sont totalement inefficaces à résoudre le conflit pour lequel elles sont présentes. Si on suit l’actualité, on s’interrogera sur les décisions des souverains de la République du Tchad et celle du Congo Démocratique de faire partir les forces onusiennes de leur sol. On peut donc douter des réponses de ses organisations mondiales à prévenir et résoudre des conflits. Mais rappelons nous ma précédente maxime : «tout extrémisme est nuisible». Car à côté de ces cas de faiblesses on peut voir les cas du Libéria, de la Sierra-Léone et bien d’autres où les forces mondiales ont permis le retour au calme et à la démocratie.
C’est de tout cela que nous voulons parler au cours de ce colloque. Où l’objectif sera de sortir des aprioris pour coller aux réalités saines et objectives.
9) En dehors du maintien de la paix par l’ONU, Claude Sahi connait-il d’autres mécanismes de résolutions de conflits adaptés aux réalités africaines ?
C.S : Je voudrais préciser que Claude Sahi n’est que le porte-parole du parti qui est lui-même organisateur du colloque. Pour revenir à la question, je dirai qu’il existe certainement d’autres mécanismes de résolution mais aussi de prévention de conflits adaptés à nos réalités propres. Mais comme nous ne ferons pas le colloque au cours de cette interview, permettez que nous réservions la primeur des réflexions aux débateurs qui viendront. Et soyez rassurez, vous serez édifiés des actes et recommandations qui sortiront du colloque.
10) Mobiliser plusieurs pays africains à Abidjan, avec les institutions internationales autour de l’épineuse question de la résolution des conflits en Afrique. Ce n’est pas trop ambitieux ?
C.S : Rien de grand ne se fait sans rêve. Si on ne rêve pas on ne vit pas. Nous, à Espérance Côte d’Ivoire, nous avons l’ambition de gouverner la Côte d’Ivoire de demain. Il faut donc commencer à penser ; Penser la Côte d’Ivoire et à penser l’Afrique et le monde de demain. C’est cette ambition que nous poursuivons. Ce n’est donc pas de la démesure. C’est une preuve de notre amour pour notre pays et pour notre continent.
C’est pour cette raison qu’il nous faut remercier la hauteur de vue du Chef de l’Etat et du Ministre des Affaires Etrangères qui n’ont pas hésité à soutenir notre projet et s’impliquer dans son organisation. Car au-delà de notre jeune formation politique, il s’agira de réfléchir sur une préoccupation majeure de notre pays en particulier et de notre continent en général.
Réalisée par Ben Ismaël