La question est provocatrice mais elle permet de poser le débat sur la place des études d’opinion dans nos démocraties en cours de construction. Dans le monde développé, elles font partie de l’essence même de la démocratie. A tel point que certains analystes déplorent la «sondomanie», la «tyrannie des sondages» que les médias sollicitent pour tout et n’importe quoi, et dont se servent les politiques pour mener des politiques opportunistes au gré des caprices des éphémères passions populaires.
Nous n’en sommes pas encore là en Côte d’Ivoire. Certes, votre quotidien préféré et quelques titres qui se comptent tout au plus sur les doigts d’une main ont commencé à commander des sondages à de jeunes instituts locaux. Certes, il est arrivé à la presse de publier des extraits de sondages de nature politique, financés par l’Opération des Nations unies en Côte d’Ivoire (ONUCI) ou par le président Laurent Gbagbo. Mais nous n’avons pas encore cette culture du «marketing politique», où chaque électeur doit avoir l’impression que l’élu qui sollicite son suffrage «traite» ses problèmes au plus près.
Nombreux sont ceux d’entre nous qui ne croient même pas à la fiabilité des sondages sous nos cieux.
Ils invoquent des spécificités difficiles à dompter par la science statistique – ce qui n’est pas recevable dans la mesure où toutes nos grandes entreprises privées procèdent, avec succès en général, à des études qui répondent à la même méthodologie avant de lancer leurs produits grand public. Pour ce qui est des sondages électoraux, ils invoquent une autre réalité qui est difficile à battre en brèche : dans notre contexte spécifique, c’est la présence ou non d’un sondé sur la liste électorale définitive qui rendra «effective» ou non l’opinion qu’il a émise quelques mois plus tôt. Autre argument invoqué : celui de la crainte qu’éprouveraient les sympathisants de l’opposition à exprimer leur «vraie» opinion, dans un contexte où la démocratie n’est pas encore bien implantée. On ne saura ce qu’il vaut qu’après l’élection présidentielle, mais dans les milieux bien informés, l’on sait qu’un institut comme SOFRES n’est pas à son premier sondage en Côte d’Ivoire. Il a eu à en réaliser pour Henri Konan Bédié, alors qu’il était encore en fonction. SOFRES a aussi réalisé un sondage avant le scrutin d’octobre 2000 opposant Laurent Gbagbo et le général Robert Guei : les résultats qui en sont sortis se rapprochaient de manière troublante au verdict final des urnes.
Peut-on faire du journalisme politique pertinent en faisant totalement l’impasse sur des résultats de sondages, électoraux, plusieurs mois avant le scrutin ? C’est en tout cas l’exercice difficile qui est imposé à la presse ivoirienne par le Conseil national de la presse (CNP). Début avril dernier, notre régulateur a infligé à six entreprises de presse (SNEPCI éditeur de Fraternité Matin, Régie Cyclone éditeur de Le Temps, SOCEF-NTIC, éditeur de L`Intelligent d`Abidjan, Olympe, éditeur de L`Inter, LES Editions Yassine (L’Expression), Les Editions Le Néré (Le Jour Plus) des amendes d’un million de FCFA, «en raison de la publication par les journaux qu`elles éditent, des résultats d`un sondage de la Tns-Sofres relatif aux intentions de vote en faveur des candidats à l`élection présidentielle en Côte d`Ivoire». En effet, «aux termes des dispositions de l`article 39 nouveau alinéa 5 de l`Ordonnance N° 2008-133 du 14 avril 2008 portant Ajustements au Code Electoral pour les élections de sortie de crise,« il est interdit de publier ou de diffuser des estimations de vote ou de procéder à l`établissement de sondages sous quelque forme que ce soit, à partir de quelque lieu que ce soit à compter de la publication de la liste électorale provisoire».
On remarquera au passage que cette interdiction est à géométrie variable. Les partis politiques procèdent aux sondages sans se faire inquiéter, mais la presse, parce qu’elle publie ce qui existe, reçoit le gros bâton sur sa tête. Pourtant, même quand ils affectent de les mépriser, les hommes politiques réagissent forcément aux enquêtes d’opinion. Peut-on dissocier le grand retour, il y a quelques semaines, du débat sur la candidature unique du Rassemblement des houphouétistes pour la démocratie et la paix (RHDP) aux résultats d’un sondage électoral commandé par l’opposition à l’institut français OpinionWay, qui appartient à un proche de Nicolas Sarkozy ? Les dernières mises en scène d’Alassane Ouattara, qui soutient les Eléphants avec passion sous les flashs des photographes ou qui va dans un Centre hospitalier universitaire (CHU) soutenir les malades et le personnel n’a pas pour effet de corriger la perception générale d’un homme éloigné du peuple qui transparaît des sondages qui circulent sous le manteau ? Silence, on ne doit pas en parler !
Nous n’en sommes pas encore là en Côte d’Ivoire. Certes, votre quotidien préféré et quelques titres qui se comptent tout au plus sur les doigts d’une main ont commencé à commander des sondages à de jeunes instituts locaux. Certes, il est arrivé à la presse de publier des extraits de sondages de nature politique, financés par l’Opération des Nations unies en Côte d’Ivoire (ONUCI) ou par le président Laurent Gbagbo. Mais nous n’avons pas encore cette culture du «marketing politique», où chaque électeur doit avoir l’impression que l’élu qui sollicite son suffrage «traite» ses problèmes au plus près.
Nombreux sont ceux d’entre nous qui ne croient même pas à la fiabilité des sondages sous nos cieux.
Ils invoquent des spécificités difficiles à dompter par la science statistique – ce qui n’est pas recevable dans la mesure où toutes nos grandes entreprises privées procèdent, avec succès en général, à des études qui répondent à la même méthodologie avant de lancer leurs produits grand public. Pour ce qui est des sondages électoraux, ils invoquent une autre réalité qui est difficile à battre en brèche : dans notre contexte spécifique, c’est la présence ou non d’un sondé sur la liste électorale définitive qui rendra «effective» ou non l’opinion qu’il a émise quelques mois plus tôt. Autre argument invoqué : celui de la crainte qu’éprouveraient les sympathisants de l’opposition à exprimer leur «vraie» opinion, dans un contexte où la démocratie n’est pas encore bien implantée. On ne saura ce qu’il vaut qu’après l’élection présidentielle, mais dans les milieux bien informés, l’on sait qu’un institut comme SOFRES n’est pas à son premier sondage en Côte d’Ivoire. Il a eu à en réaliser pour Henri Konan Bédié, alors qu’il était encore en fonction. SOFRES a aussi réalisé un sondage avant le scrutin d’octobre 2000 opposant Laurent Gbagbo et le général Robert Guei : les résultats qui en sont sortis se rapprochaient de manière troublante au verdict final des urnes.
Peut-on faire du journalisme politique pertinent en faisant totalement l’impasse sur des résultats de sondages, électoraux, plusieurs mois avant le scrutin ? C’est en tout cas l’exercice difficile qui est imposé à la presse ivoirienne par le Conseil national de la presse (CNP). Début avril dernier, notre régulateur a infligé à six entreprises de presse (SNEPCI éditeur de Fraternité Matin, Régie Cyclone éditeur de Le Temps, SOCEF-NTIC, éditeur de L`Intelligent d`Abidjan, Olympe, éditeur de L`Inter, LES Editions Yassine (L’Expression), Les Editions Le Néré (Le Jour Plus) des amendes d’un million de FCFA, «en raison de la publication par les journaux qu`elles éditent, des résultats d`un sondage de la Tns-Sofres relatif aux intentions de vote en faveur des candidats à l`élection présidentielle en Côte d`Ivoire». En effet, «aux termes des dispositions de l`article 39 nouveau alinéa 5 de l`Ordonnance N° 2008-133 du 14 avril 2008 portant Ajustements au Code Electoral pour les élections de sortie de crise,« il est interdit de publier ou de diffuser des estimations de vote ou de procéder à l`établissement de sondages sous quelque forme que ce soit, à partir de quelque lieu que ce soit à compter de la publication de la liste électorale provisoire».
On remarquera au passage que cette interdiction est à géométrie variable. Les partis politiques procèdent aux sondages sans se faire inquiéter, mais la presse, parce qu’elle publie ce qui existe, reçoit le gros bâton sur sa tête. Pourtant, même quand ils affectent de les mépriser, les hommes politiques réagissent forcément aux enquêtes d’opinion. Peut-on dissocier le grand retour, il y a quelques semaines, du débat sur la candidature unique du Rassemblement des houphouétistes pour la démocratie et la paix (RHDP) aux résultats d’un sondage électoral commandé par l’opposition à l’institut français OpinionWay, qui appartient à un proche de Nicolas Sarkozy ? Les dernières mises en scène d’Alassane Ouattara, qui soutient les Eléphants avec passion sous les flashs des photographes ou qui va dans un Centre hospitalier universitaire (CHU) soutenir les malades et le personnel n’a pas pour effet de corriger la perception générale d’un homme éloigné du peuple qui transparaît des sondages qui circulent sous le manteau ? Silence, on ne doit pas en parler !