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Société Publié le samedi 24 juillet 2010 | L’intelligent d’Abidjan

Les Samedis de Biton : Un redoublant honoré

Quel paradoxe que ce continent africain ! Comment accueillir dans la joie et l’allégresse un redoublant, quelqu’un qui reprend sa classe et qui est sur le chemin du renvoi. C’est un vrai encouragement à s’abonner à la défaite. Et dire que l’équipe du Ghana, à la dernière coupe du monde, a été récompensée de la plus belle manière. Vraiment les époques changent. A l’époque primaire, dans les années 60, à la mission catholique de Treichville, les prêtres nous poussaient à aimer l’excellence. Tous les trois mois un classement. Les résultats étaient donnés d’une manière spectaculaire. On commençait à appeler le premier de la classe. Il s’asseyait à la première place, un petit fanion de l’école devant lui pour tout le trimestre suivant. Le dernier de la classe était conspué, humilié. Durant la récréation, on le suivait et toute l’école s’autorisait à le conspuer dans la cour. Il devenait une figure qu’on montrait du doigt durant tout le trimestre. Il était rare, extrêmement rare de voir un écolier tenir la dernière place deux fois de suite. On connaissait la honte. Pour les compositions de passage c’était encore plus grave. Devant toute l’école, et non plus la classe, et je crois devant aussi les parents. Ceux qui redoublaient la classe, étaient comme le dernier du trimestre. Quelle déchéance que de reprendre sa classe ! Déjà, enfants nous étions familiarisés avec la victoire. Pour ceux qui reprenaient leur classe une seule action meublait leurs trois mois de vacances. Prendre des cours. A la rentrée suivante, tous les redoublants filtraient avec les premières places et continuaient les classes suivantes vers le haut du tableau. Tout sauf traverser les rues du quartier et montrer du doigt. Dernier de la classe ou redoublant. Moi, j’ai été le premier de la classe à deux reprises. J’étais abonné à la cinquième et à la septième place. J’ai été une fois troisième. Depuis l’enfance, sans doute à cause du catéchisme ou des leçons enseignées dans les mouvements de jeunes, je n’aimais pas les premières places. Je ne veux pas qu’on me regarde, qu’on parle de moi. Alors cinquième ou septième c’était bon à prendre. Excellent mais pas spectaculaire. En plus, j’aimais les multiplications par cinq ou sept. Ce trait de mon caractère est toujours présent. Je me cache dans la rue, je préfère la marche la nuit pour qu’on ne me reconnaisse pas. Tous ceux qui me rencontrent pour la première fois ont le même mot à la bouche. Humble. Cela prend sa source à l’école primaire. Quand dans le petit futé on me cite parmi les grands écrivains de la Côte d’Ivoire, celui qui vient après Dadié et Kourouma, je ne pense pas qu’il s’agit de moi. Je n’aime pas ce genre de classement. Je me suis toujours battu pour être parmi les premiers mais je ne veux pas être le premier mais pas du tout celui qui redouble sa classe. J’étais donc prédisposé à ne pas apprécier la situation du Ghana. J’ai supporté l’équipe contre tout bon africain mais, je n’ai pas applaudi l’équipe à la fin du match. Elle se classait comme les redoublants de notre époque à la fin de l’année. Une équipe bonne à conspuer. Souvenez-vous qu’il y a quatre ans, l’équipe du Ghana était éliminée en huitième de finale avec tous les honneurs. Cette fois-ci, elle montre en quart de finale et pour tous, c’est un exploit après quatre ans. Et de les féliciter. Non, c’est une redoublante. Trop de circonstances font qu’on ne peut pas les encourager. Les joueurs avaient le public à leur disposition. Toute l’Afrique derrière eux. L’équipe a montré durant toute la compétition un jeu stérile sous la poussée d’un entraîneur qui ne voulait ni perdre ni gagner. Et quand Gyan Assamoah tire avec désinvolture son pénalty et qui le rate, c’est toute l’Afrique qui voit son année à reprendre. Une seule place pouvait honorer le Ghana, la troisième place. Ou plus. Un enfant qui a bien travaillé en classe durant l’année scolaire et qui échoue à son examen n’est pas à encourager. On aurait dû accueillir l’équipe dans la sobriété afin de montrer que nous ne sommes pas contents d’elle. Prochainement, ils viseront la première place. Il n’est pas normal qu’on applaudisse celui qui ne figure pas dans le tableau d’honneur après deux participations successives. Surtout après ce pénalty raté. On me dira mais le Ghana au moins a été loin et la Côte d’Ivoire, elle est comme un élève exclu de la classe. C’est vrai, mais on ne tire pas sur une ambulance. Que cet échec sensationnel de l’équipe du Ghana aux portes du paradis nous enseigne à tous de viser toujours plus haut. On sait tous ce qu’il faut faire pour atteindre le sommet. C’est le travail. Rien que le travail. Pas autre solution. Le travail veut dire des heures supplémentaires de travail par la réduction de certaines futilités dans notre vie quotidienne. On ne sera pas forcement le premier mais on sera toujours sur le podium. Toujours chercher à savoir pourquoi on est dans le bas du tableau et les autres devant et voilà déjà la clé du succès. Pour notre équipe déjà confortement installée dans son ambulance c’est le moment d’en sortir et de ne plus y retourner en se posant des questions et en interrogeant toutes les couches de la population. Comme sur les carnets de note des élèves moyens, l’équipe peut bien faire. Ainsi, va l’Afrique. A la semaine prochaine

Par Isaïe Biton Koulibaly
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