Hier mercredi 04 août 2010, les ex-combattants démobilisés des Forces nouvelles ont donné de la voix à Bouaké pour décrier leurs conditions de vie misérables. C’était à l’occasion de la journée de commémoration des démobilisés, parrainée par le commandant Issiaka Ouattara dit « Wattao », chef d’état-major adjoint des Forces armées des Forces nouvelles (Fafn). Le chef de la compagnie « Anaconda » de l'ex-rébellion a saisi cette tribune pour assener ses vérités aux organisateurs du cinquantenaire de l’indépendance de la Côte d’Ivoire. « Il faut chercher à régulariser la situation des démobilisés avant l’organisation du cinquantenaire. 20 milliards pour aller fêter alors que les démobilisés meurent de faim. Réglez la question des milices et des démobilisés avant le Cinquantenaire » a interpellé le commandant Wattao. S’insurgeant ainsi contre l’organisation grandiose du cinquantième anniversaire du pays, le commandant de la zone de Séguela veut tirer la sonnette d’alarme sur la question de la réinsertion des ex-combattants non pris en compte dans la nouvelle armée en constitution. Car, soutient-il, « c’est anormal que des gens qui ont combattu pour leur pays, on les laisse comme ça ». L’autre raison évoquée par l’adjoint du général Soumaila Bakayoko, chef d’état-major des Fafn en s’attaquant à l’aspect festif du Cinquantenaire, c'est le piétinement de l’encasernement des volontaires pour la nouvelle armée pour cause de moyens financiers. Pour le nouvel homme fort de Séguela, le regroupement entamé à Korhogo depuis le 15 juin dernier n’est pas effectif parce qu’il n’y a pas d’argent alors qu’ « on a 20 milliards pour fêter ». En dénonçant cet état de laissés pour-compte des démobilisés, Wattao a également battu en brèches les allégations selon lesquelles il « veut utiliser les démobilisés pour aller au soulèvement ». Après avoir pris fait et cause pour ces ex-combattants en attente de leur insertion dans le tissu socio-économique, le patron de la compagnie « Anaconda » a donné l’assurance que « personne ne sortira zéro », surtout avec l’appui du Premier ministre Guillaume Soro, leader des Forces nouvelles. « C’est vous qui avez fait de lui un Premier ministre, il ne va pas vous abandonner. Soro n’est pas un vendu. Wattao n’est pas un vendu. Si j’étais un vendu, je serais resté aux Etats-Unis avec ma famille », a-t-il rassuré les démobilisés. Au cours de son intervention par moments musclé, Wattao n’a pas manqué de lancer des piques à ses détracteurs, qui selon lui, utilisent les ex-combattants à des fins personnelles. « Celui qui pense qu’il dit la vérité, qu’il vienne sur la place publique comme je le fais aujourd’hui en plein midi (…).Je sais qu’après mon discours, il y aura des remue-ménages, mais je suis prêt », a averti le patron de la zone 5 de Séguela. Avant l’intervention du CEMA adjoint des Fafn, M. Sékongo Félicien est intervenu au nom du Premier ministre Guillaume Soro, en s’apitoyant sur le sort des ex-combattants. « Comment ne pas être attristé par cette situation des démobilisés (…) ? La question des démobilisés trouble le sommeil du Premier ministre Guillaume Soro », a-t-il indiqué, non sans rappeler la contribution de ces éléments de l’ex-rébellion à l’instauration de la liberté, de la justice et de la démocratie. Faut-il le rappeler, la question de la réinsertion des ex-combattants démobilisés connait des difficultés. Sur les 12000 ex-combattants à réinsérer dans le tissu socio-économique, environ 4000 soldats seulement issus des rangs de l’ex-rébellion ont pu bénéficier de financement de projets. Au moment où la Côte d’Ivoire amorce le dernier virage du processus de sortie de crise, l’inquiétude gagne du terrain dans le camp de ces ex-combattants démobilisés.
Francis N’Goran à Bouaké
Francis N’Goran à Bouaké