La tension était assez vive, le vendredi 10 septembre 2010, au corridor sud de Tiébissou, entre des éléments de la police nationale et les membres d’un convoi militaire en provenance de Bouaké. Au bout du compte, l’agent de police, le sergent-chef Gnénéka Yodé Joël, en poste au commissariat de Tiébissou bastonné et déshabillé a été conduit, de force, au poste de police par des militaires surexcités et visiblement sous l’effet de l’alcool. Des sources proches de cette affaire indiquent qu’aux environs de 16h, un contingent de 20 soldats, placé sous le commandement d’un des chefs militaires du pays installé au niveau de Yamoussoukro, était de retour de Bouaké, le fief des forces nouvelles. Invités par le commandant Issiaka Ouattara dit Wattao autour d’une table, ces derniers avaient été bien reçus. Arrivés au niveau de ce poste de contrôle, le sergent chef Yodé se propose de recueillir quelques informations sur leur provenance, comme cela est requis, surtout par ces temps de crise militaro-politique. Mais malgré les salutations de nature fraternelle de l’agent de police, les militaires refusent de se soumettre à cette procédure. L’un des soldats intime l’ordre à ses collaborateurs de descendre afin de s’occuper du sort de ce policier jugé capricieux et plein de zèle. Les instants qui suivent sont difficilement supportables pour le sergent chef. Il sera copieusement tabassé par ces collègues d’armes, violemment traîné par terre, jeté sans ménagement dans le cargo pour être conduit au commissariat. Mais avant, il sera entièrement déshabillé, malgré le sang frais qui coule sur son corps. Il est dépossédé de tous les attributs que lui confère le noble titre de policier. Une fois au commissariat qu’ils assiègent littéralement, les soldats se montrent encore plus menaçants. Trois coups de feu sont tirés par un sergent des Forces armées nationales de Côte d’Ivoire (Fanci), le plus excité. Il manque de peu d’atteindre un adjudant en poste sur les lieux. Le bureau du commissaire sera en définitive la cible de ces balles qui brisent ainsi les vitres d’une des fenêtres. Pendant trois heures, les fêtards venus de Bouaké sèmeront la terreur et la panique à Tiébissou avant de se retirer. Quelque temps, plus tard, leur chef de file se rend compte de la gravité des actes que venaient de commettre ses hommes, sous l’effet de l’ivresse et de l’instinct du groupe. Il se confond dans des pardons et menace même de radier l’élément en question. Notons que l’infortunée victime que nous avons jointe par téléphone, hier, a déclaré être très mal en point. ell a dit souffrir d’atroces douleurs aux épaules et au cou. Aussi, le policier a-t-il indiqué qu’il avait l’intention de porter l’affaire devant le tribunal militaire où il a rendez-vous dès ce lundi. ‘‘J’ai établi un certificat médical à cet effet, suite à une échographie. Je prends, toutefois, acte des démarches de conciliation de la hiérarchie militaire’’, a déclaré Joël Yodé. Notons qu’un affrontement entre policiers et militaires a été évité de justesse. En ce sens que les policiers du commissariat de Tiébissou se sentant humiliés, agressés par cette «descente armée», avaient l’intention de riposter. Soulignons que nos tentatives d’avoir la version des militaires ont été vaines.
Camille SIABA
(A Yamoussoukro)
Camille SIABA
(A Yamoussoukro)