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Politique Publié le lundi 20 septembre 2010 | Le Mandat

Reportage/ Menace sur le Transfert de la capitale à Yamoussoukro -Le Village de Bezro crie à l’expropriation de ses terres -Les travaux bientôt bloqués

Le gouverneur N’dri Appolinaire et le Dr Gérard au banc des accusés
Le village de Bezro-Commune de Yamoussoukro est actuellement angoissé et réduit à la précarité. Menacé par le transfert de la capitale à Yamoussoukro, les villageois annoncent des actions d’envergure.

Le village de Bezro-Commune de Yamoussoukro est actuellement angoissé et réduit à la précarité. Si pour le reste de la Côte d’Ivoire, le programme spécial du transfert de la capitale à Yamoussoukro (Pstcy) est un grand rêve, il est devenu pour le moment, un grand cauchemar pour ce village de plus de 2500 âmes selon le chef dudit village. Car, à cause de ce projet, le village est menacé de délocalisation et de spoliation de 700 hectares sur les 918 dont il dispose. Depuis lors, Bezro vit dans la précarité. Après plusieurs démarches infructueuses auprès du ministre Danon Djédjé en 2007, le Maire de Yamoussoukro, Gnrangbé Jean, le gouverneur du district de Yamoussoukro, N’Dri Appolinaire et l’ex directeur exécutif du Pstcy, Degri Antoine ainsi que l’actuel, Dr N’Goran Gérard, le village du chef Nanan Angban Kouakou Vincent, a décidé d’interpeller par voie de presse, le chef de l’Etat, Laurent Gbagbo, l’opinion nationale et internationale. Le Directeur Exécutif du (Pstcy), Dr N’Goran Gérard et les élus locaux, pointent du doigt la misère qu’ils vivent depuis l’annonce de ce projet dans leur localité. Ils ont donc porté leur choix, sur votre organe de presse préféré "Le Mandat", le journal du ‘’rien que la vérité’’. C’est ainsi que le samedi 11 Septembre dernier, nous avons déposé aux environs de 17 heures 15 minutes, nos valises dans ce village situé à moins de 15 minutes de route de la commune de Yamoussoukro. Nous avons été frappés, au premier contact, par la précarité des habitations. Sur environ 200 maisons, plus de 98 % sont construites en terre battue. Pas de poteaux électriques. Ce qui annonçait une nuit très obscure que nous devrions affronter. Très rapidement, nous sommes présentés au chef du village et ses notables par le président du comité de suivi de la purge des droits coutumiers de Bezro, (Cspdcb) M. Kouamé Brou Lazare. Un coup d’œil lancé ici et là nous permet de découvrir des spectacles qui ne nous ont pas laissés indifférents. Mais comment un village-commune peut-il vivre dans une telle précarité ? Pas d’eau potable, ni de centre de santé. Dans les foyers, de grands nuages de fumée sont dégagés par les bois de chauffe. A la ‘’résidence du chef du village’’, nous constatons le délabrement très avancé de sa maison et de sa cuisine. Pour des réponses adéquates à cette situation, le chef et sa notabilité nous recommandent d’attendre la journée du dimanche 12 septembre.

Des accouchements à domicile imposés au village
Mme N’Goran Akissi Félicienne, présidente des femmes du village et par ailleurs cuisinière à l’Hôtel Président, qui devrait reprendre son service le lendemain bénéficie de l’accord de la chefferie pour nous donner le point de vue des femmes. Avec beaucoup d’amertume, elle affirme que les femmes de Bezro sont confrontées à d’énormes difficultés. « Le village souffre du manque criard d’infrastructures de base pour son développement et son épanouissement. Cela, malgré sa situation géographique dans la commune de Yamoussoukro. Il n’y a pas de centre de santé. Ce qui fait que les accouchements sont un grand problème. Le taxi qui nous sert d’ambulance est très souvent absent du village. Des femmes accouchent dans le village avec tous les risques que cela comporte. C’est vrai que nous n’avons pas encore enregistré de drame mais cela ne saurait tarder si rien n’est fait pour nous aider. Il faut que le chef de l’Etat, Laurent Gbagbo pense à nous, sinon nous souffrons trop ici. Le village n’est pas loti. Il n’y a pas d’eau potable. Ce n’est pas à cause du transfert de la capitale qu’ils vont nous tuer, quand même!» A-t-elle dénoncé, presque les larmes aux yeux. Nous sentons par ses propos que la journée du dimanche sera très riche en émotion. Il est 18 heures 45 minutes quand le soleil se couche sur le village de Bezro! C’est l’obscurité totale. Du village, l’on peut apercevoir. les lumières des lampadaires de la commune de Yamoussoukro. « Vous voyez comment cela est frustrant » s’indigne M. Kouassi Victorien, un fils du village. Dans le village, chaque famille, avec les moyens de fortune, essaye de donner de la lumière à son habitation. Sur la place publique du village, des jeunes à l’aide d’une mini-chaîne alimentée par un groupe électrogène, essayent de donner un peu de gaîté à cette atmosphère morose imposée par l’obscurité. Nous nous abandonnons aux bras de Morphée sur le coup de 22h 35 minutes. Dans la matinée du dimanche, le village est quasiment vide. Nous nous rendrons compte plus tard que les villageois étaient aux cultes. Dans le village, cohabitent, les adèptes de Dehima, les églises protestantes ainsi que des musulmans.

Pas question de quitter le village et de céder les 700 hectares à l’Etat
Le vice président de la mutuelle du village, M. N’Guessan Yao, explique que : « La mutuelle souhaite que le village ne soit pas déplacé. Il n’y a même pas eu de concertation entre les responsables du programme de tranfert de la capitale et le village à ce sujet. Aujourd’hui, nous souhaitons qu’il y ait une rencontre avec les responsables du projet et notre village afin d’aplanir les diférends. On ne peut pas prendre 700 hectares à un village sans même échanger avec les filles et fils de ce village. Actuellement, le palais de la présidence est en train d’être construit sur notre terre sans qu’il n’y ait eu de négociations au préalable. Ce n’est pas normal.» A la grande rencontre avec le chef du village en début d’après midi, ces mêmes propos ont été repris par les différents intervenants. Le moins qu’on puisse dire, c’est que toutes les filles et fils du village de Bezro sont unanimes sur un fait. « Pas question pour eux de quitter leur site actuel pour aller habiter ailleurs et céder 700 hectares de terre sans négocitaion préalable. «Le village est dans cet état de pauvreté parce que nous n’avons plus de forêts et, quasiment plus de terres cultivables. Nos plantations ont été rasées du temps du président Houphouët-Boigny là où on est en train de construire actuellement le palais de la présidence. Il faut que soit arrêtée la construction du palais de la présidence, pour que nous rentrions en négociation. Il est vrai que le directeur Dr N’Goran Gérard nous a remis 1 millions Fcfa (200 mille pour les soins médicaux du chef, l’argent qui n’a pas suffi, et 800 mille Fcfa pour la cérémonie de libation), mais cela ne saurait être une garantie de notre accord pour nous l’exproprier. En outre, nous ne voulons pas quitter ce village qui est bâti sur la terre de nos ancêtres. Au contraire, nous demandons aux autorités en charge du dossier du transfert de la capitale, de reconstruire notre village en y mettant toutes les commodités (habitations modernes, châteaux d’eau, école avec habitation des maîtres, dispensaire ; électrification…) qui en feront un village moderne. Nous avons des témoignages très tristes de certains villages (N’Gbêssou et Alangoua) qui ont déjà été delocalisés. Ils n’ont plus de terres cultivables et ont des difficultés de réinsertion. C’est pourquoi, nous ne voulons pas partir de notre site actuel » a souligné le chef du village de Bezro, Nanan Angban Kouakou Vincent, entouré de sa notabilité. A la question de savoir, s’ils n’ont pas été reçus par le chef de l’Etat Laurent Gbagbo, Nanan Angban Kouakou Vincent a revélé que le gouverneur du District de Yamoussoukro, M N’Dri Koffi Appolinaire, fait tout pour ne pas que son village rencontre le chef de l’Etat. « Il y a eu une rencontre à Yamoussoukro entre le chef de l’Etat et les villages touchés par le transfert de la capitale. Mais le gouverneur qui était chargé d’inviter les villages, ne nous y a pas conviés pour des raisons que nous ignorons. Néanmoins nous continuons de mener des démarches auprès de lui, ainsi que les autres acteurs du transfert de la capitale afin de pouvoir rencontrer le chef de l‘Etat qui mettra certainement fin à notre angoisse » a indiqué le chef du village de Bezro. M. N’Gatta Kouassi, de la famille Diby, M. Kouakou Yao Mathurin, chef de la famille Goussè et M.Yao Koffi Augustin, chef de la famille Kouadio, au nom des trois grandes familles du village, ont martelé qu’ils ne se laisseraient pas exproprier de leur terre. Même s’ils n’ont pas reçu de lettre d’attribution, M Diby Kouakou Jean, président du comité de délimitation des terrains villageois de Bezro, a affirmé que ces 918 hectares étaient bel et bien la propriété du village. « Nous avons fait la délimitation avec les autres villages de 2004 à 2007. C’est le Bnetd qui nous a donné la superficie exacte de notre terre. Tout dernièrement nous étions à la réunion à la Maison des Députés, le directeur du Cct, M. Konan nous a montré les cartes de titre foncier. Il nous a dit qu’il y a quatre villages qui n’ont pas encore délimité leur terroir. C’est quand ils vont finir que les cartes seront remises » a-t-il révélé.

Nous allons bloquer les travaux du palais présidentiel.
Ils demandent également une audience au chef de l’Etat, Laurent Gbagbo avant la poursuite des travaux sur les 700 hectares dont l’Etat veut les « exproprier en violation de l’article 15 de la constitution ivoirienne ». Tout comme le reste du village, ils ont martelé que leur déguerpissement du site actuel du village n’est pas à l’ordre du jour. « Que l’Etat vienne construire notre village. Il n’est pas question que nous quittions notre site actuel » ont-t-il laissé entendre. Le président des jeunes du village, M. N’Goran Yao Bruno, ne soutiendra pas le contraire. Selon lui, c’est l’avenir de la jeunesse du village qui est menacé par cette situation. Il faut donc une rencontre entre le village et les principaux acteurs intervenant dans le tranfert de la capitale. Faute de quoi, les villagois menacent de bloquer les travaux. Si certains intervenants s’en sont remis à Dieu, d’autres ont annoncé que tous les bras valides du village seront mobilisés pour « «chasser les travailleurs et gardiens » qui sont actuellement au palais en construction. Dans la matinée de lundi 13 septembre dernier, nous avons quitté Bezro pour la ville de Yamoussoukro en vue de rencontrer les autorités citées dans ce dossier. C’est ainsi que nous avons joint au téléphone, le gouverneur du District de Yamoussoukro, N’Dri Appolinaire. Il nous a demandé d’ « écrire ce que nous voulons » et qu’il n’avait rien à nous dire. Du côté de la direction du programme spécial du transfert de la capitale à Yamoussoukro, l’on affirme faire le point sur cette situation dans deux semaines. Quand au maire de Yamoussoukro, Kouakou Gnranbé Jean, dont les villagois ont salué les efforts à leur égard, nous n’avons pas pu le rencontrer à cause de son programme très chargé. En attendant une réaction très rapide du chef de l’Etat et des autorités en charge de ce programme, le village de Bezro ploie toujours sous le poids de la misère.
Aboubakar Sangaré
sangabou2000@yahoo.fr
(Envoyé spécial)
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