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Société Publié le vendredi 1 octobre 2010 | Nord-Sud

Ferkessédougou : Escale dans un ‘’grin’’ de filles

Comme la majorité des jeunes hommes de la capitale des Savanes, des filles ont leur grin. C’est un endroit où elles se retrouvent pour décortiquer le quotidien. Récit d’un instant entre femmes !

Il faut attendre le crépuscule pour les voir se rassembler devant un domicile. Ces demoiselles occupent un espace d’à peine 2 m2. Un seul banc sert de siège pour trois à quatre d’entre-elles. Certaines prennent place sur un tabouret chacune. Nous sommes dans un grin de filles sur une artère de Ferkessédougou, la cité des Niaraforo, ce 25 septembre. Le grin, c’est un lieu de prédilection où on se retrouve entre amis pour discuter autour d’un verre de thé. Pour atteindre cet endroit, à partir de l’hôtel le Château, il faut longer la rue qui mène au marché de la ville. Puis, dès le deuxième carrefour, tourner à droite du cybercafé géré par un certain Empereur, homme d’affaires célèbre du coin. Une vapeur s’élève de la théière bleue posée sur le petit fourneau incandescent. Deux petits verres suffisent pour se partager le thé. Un mélange de menthe cultivé sur place et de sucre agrémente la saveur de la tisane venue de l’empire du milieu. Tout ceci donne une saveur particulière à la soirée après les travaux ménagers. La causerie va donc bon train. Ici, on ne parle pas de politique. Seuls des événements qui défraient l’actualité, peuvent conduire à la causette, comme la dissolution du gouvernement ou une marche de protestation. Sinon, rien. Même la présence d’un candidat à l’élection présidentielle dans la région n’emballe pas les filles On a mieux à faire. Les filles, apparemment en dessous de la trentaine, se racontent plutôt leur journée. L’une parle de son amoureux. Qui compte lui offrir une moto, qu’elle a, du reste, elle-même exigée. C’est le rêve de toute jeune fille de la région que de posséder l’un de ces engins à deux roues. A vive allure, elles se pavanent avec ce bien sur la grande voie. Kady la plus âgée, prend la parole, toute souriante. La commerçante de boubous vient de faire une bonne affaire. Une délégation venue d’Abidjan s’est arraché ses marchandises. Awa, une autre fille du grin, se tient juste près de Kady. Elle avale d’un trait le contenu du verre et respire profondément. Awa doit être une branchée de la mode. Elle porte sur la tête, un tissage en vogue dans la capitale économique : le techtonik. Awa prend soin de limer ses ongles pendant que le temps passe. D’où est venue l’idée d’un grin de filles ? Prolixe, Kady note que la création s’est faite spontanément. Elles avaient l’habitude de s’asseoir ici les soirs. « Quand les garçons faisaient le thé, ils nous envoyaient notre part. Et nous nous sommes dit pourquoi ne pas en faire nous-mêmes ? » De là est parti le tailler la bavette entre filles autour du thé, comme chez les hommes. Kady continue quand son téléphone portable sonne. Elle décroche. Les autres filles poursuivent la causette. Pour cerner la suite, il faut comprendre le malinké. Une tâche difficile pour nous. Il est presque nuit. Un autre rendez-vous nous attend. Il faut s’éclipser. Après un verre de thé.


Nesmon De Laure, envoyée spéciale
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