L'intervention militaire qui consiste selon les diplomates africains à faire usage de la forme légitime pour déloger Gbagbo et installer Ouattara à la Présidence de la République est plus que jamais d'actualité. Surtout après l'échec de la médiation africaine conduite le lundi dernier par le Premier ministre kényan Raila Odinga. Avant cette ultime médiation et avant son terme, l'espoir de voir Laurent Gbagbo faire preuve de réalisme et céder de façon pacifique et de plein gré le fauteuil faisait dire à plus d'un que l'usage de la force ne devrait qu'être un tout dernier recours. Car en fait, aucun pays n'est véritablement pour la force brute. Mais le régime Gbagbo, qui ruse avec les différents médiateurs, semble ne laisser aucun choix à la communauté internationale. Pendant que M. Odinga menait la énième médiation à Abidjan, le comité des chefs d'état-major des armées des pays de la CEDEAO était en conclave à Bamako au Mali pour décider de l'ossature et de la stratégie de cette force ouest africaine ; le conseil de sécurité de l'ONU était en réunion à New-York pour voir l'opportunité de l'envoi d'effectifs supplémentaires de casques bleus en Côte d'Ivoire. Sans le dire clairement, la décision de ces deux instances dépendait fortement de l'issue de la médiation menée par Odinga. En lui infligeant un cinglant échec, le régime Gbagbo a de facto coupé court à toutes les illusions d'une résolution pacifique de la crise. Il a donc donné le libre arbitre aux CEMA de la CEDEAO de prendre toutes les dispositions stratégiques et logistiques pour l'intervention ; et l'ONU de prendre la résolution qui "autorise le déploiement de 2 000 militaires supplémentaires à l'Opération des Nations Unies en Côte d'Ivoire (ONUCI) jusqu'au 30 juin 2011". De fait, l'ONU, l'UA et la CEDEAO comprennent qu'elles ne doivent pas attendre grand-chose de Laurent Gbagbo. L'option militaire est donc la dernière envisagée pour le déloger. Et tout semble prêt. L'ECOMOG avec la participation directe de 9 pays (qui fournissent les hommes) et l'appui logistique des USA, de l'Angleterre et le soutien de l'UA et de l'UE, alignera environ 20.000 hommes dont "un bataillon, un escadron de combat, un escadron d`hélicoptères d`attaque MI35, une compagnie de communication et un état-major de bataillon, des forces spéciales et des forces maritimes pour un blocus maritime ". Elle semble désormais avoir les hommes et les moyens de son action. Reste que leur en soit donné l'ordre. " Nos préparations sont très bien avancées et nous sommes prêts à passer à l`action si nécessaire et il faut que cela soit clair ", avait déclaré lundi un officier supérieur nigérian, Olusegun Petinrin. Avec les renforts, l'ONU aura sur place plus de 9000 hommes dont le mandat ne s'arrête plus à l'accompagnement du processus. Mais à bien plus. Le jeudi après quatre jours de conclave, les chefs d'état-major de la CEDEAO affirment être désormais outillés pour l'usage de la force : " Nous sommes prêts sur le plan militaire, il appartient aux chefs d'Etat de nous donner les instructions… Nous sommes maintenant à l'écoute des chefs d'Etat: s'ils nous disent d'aller en Côte d'Ivoire rétablir la démocratie, nous irons ", a déclaré le général Petinrin. Les militaires étant prêts, il ne reste plus que les politiques en donnent l'ordre pour que l'opération de dégagement de Gbagbo s'ébranle. Pour ne pas être surpris par une décision politique, les militaires, selon des indiscrétions aménagent déjà en Côte d'Ivoire, via Bouaké et d'autres villes du nord. La logistique est déterminée et commence à faire son entrée. Et des ballets incessants de gros porteurs ne passe pas inaperçu comme ne le sont pas aussi les mouvements des hommes. Une formidable opération militaire est en train d'être mise en place tant du point de vue humain que matériel, car à la vérité, les stratèges de la communauté internationale mesurent bien les velléités de résistance de Gbagbo, de ses milices et des ses mercenaires. Il s'agira pour l'Ecomog de réussir une rapide opération d'extirpation de Laurent Gbagbo et de ses radicaux sans donner l'impression d'une force d'occupation de la Côte d'Ivoire. Une opération rapide et précise. Face à l'armada qui devrait arriver, les soldats radicaux pro Gbagbo sont-ils à même de résister ? Rien n'est moins sûr, quand on sait que de plus en plus des langues se délient et parlent de ralliements des troupes à Ouattara que dans bien de milieux militaire et politique, la question se pose de plus en plus : " Vaut-il la peine de mourir pour Gbagbo ? " En outre depuis hier, l’on observe qu’une frilosité s’est emparée du camp Gbagbo. Tous ceux qui disaient ne pas redouter une intervention de l’Ecomog sont pris de panique à l’annonce du débarquement de matériels de guerre à Bouaké. La “Une” des journaux bleus en est une illustration parfaite.
Ouattara Chérif
Ouattara Chérif