Toutes les tentatives de médiation menées par l’Union africaine (UA) et la communauté des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) n’ont jusque-là pas trouvé une issue pacifique à la crise post-électorale qui secoue la Côte d’Ivoire depuis le scrutin présidentiel du 28 novembre 2010. Cette impasse laisse libre cours aux supputations d’une intervention armée pour déloger Laurent Gbagbo du palais présidentiel qu’il occupe sur la base de sa victoire proclamée par le Conseil constitutionnel. Comme une traînée de poudre, les rumeurs les plus folles faisant cas de la présence de soldats de la force militaire ouest africaine, l’ECOMOG, à Bouaké se font de plus en plus persistantes. Et ce, avec une amplification orchestrée par une certaine presse qui en fait largement écho dans ses colonnes. La présence de la force ouest-africaine à Bouaké est-elle une réalité ou une guerre psychologique pour contraindre le locataire du palais présidentiel à abdiquer ? La réalité est que dans la capitale du centre, aucun mouvement de troupe semblable à celui d’une force africaine de maintien de la paix ou d’intervention armée n’est encore perceptible, ni dans les rues, ni dans les casernes. Une visite effectuée dans les différents camps militaires et même à la base aérienne militaire de Bouaké n’a pu mettre en évidence les signes de la présence d’une force étrangère, autre que celle de l’opération des Nations Unies en Côte d’Ivoire (l’ONUCI). Pour en savoir davantage sur la présence ou non de l’ECOMOG dans la capitale du centre, fief de l’ex-rébellion qui a pris fait et cause pour Alassane Ouattara, déclaré vainqueur du scrutin présidentiel du 28 novembre 2010 par la Commission électorale indépendante (CEI), nous avons approché certaines autorités des Forces nouvelles. Celles-ci ont levé un coin du voile sur cette question, sous le sceau de l’anonymat. « Actuellement, l’ECOMOG n’est pas à Bouaké même si c’est certain qu’elle viendra. Le Premier ministre Guillaume Soro, après le Mali, se trouve présentement en Afrique du Sud et compte parcourir plusieurs capitales africaines pour peaufiner l’arrivée de l’ECOMOG. Des instructeurs sont venus dans le cadre de la reconnaissance de terrain, mais aucune troupe n’est ici à Bouaké. Vous convenez avec moi que le président en exercice de la CEDEAO a écrit à l’UA et à l’ONU pour avoir leur autorisation et leur appui. Donc avant leur OK, aucune troupe ne peut venir à Bouaké. Ce sont des rumeurs entretenues par le camp Gbagbo pour chauffer à blanc leurs partisans », a souligné cette source très introduite dans le camp des Forces nouvelles. Mais quelle explication peut-on donner à cette rumeur pourtant persistante qui prend désormais force d’une vérité et qui trouble le sommeil de la population ? Dans le périmètre de l’aéroport de Bouaké, l’ONUCI entreprend un vaste chantier pour, selon des sources, désengorger sa base de Sébroko à Abidjan, eu égard aux nombreuses attaques et menaces dont cette institution fait l’objet dans la capitale économique de la Côte d’Ivoire. Ainsi une grande partie de sa logistique a été déplacée dans la capitale du centre pour mener de façon paisible sa mission de paix. Les installations de la GESTOCI , à quelques mètres de l’aéroport, sont occupées par l’ONUCI pour la gestion du carburant. A cela s’ajoutent les ballets de sa flotte aérienne qui assure le relais des troupes en fin de mission. Bref, Bouaké est devenu depuis le déclenchement de la crise post-électorale et les attaques contre l’ONUCI à Abidjan, la base stratégique de l’Opération des Nations Unies en Côte d’Ivoire. Pour preuve, le dernier contingent de Bangladeshi qui vient de terminer sa mission, a pris son vol depuis Bouaké. Tous ces facteurs donnent une ambiance particulière au niveau de l’aéroport de Bouaké et tranchent avec le climat de morosité qui y prévalait avant la tenue du scrutin et la crise post-électorale. Ce qui en quelque sorte alimente les rumeurs sur la présence de l’ECOMOG à Bouaké.
Francis N’Goran à Bouaké
Francis N’Goran à Bouaké