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Politique Publié le jeudi 3 février 2011 | Le Patriote

Lettre ouverte à Laurent Dona Fologo - “Tonton, tu as fini avec ça !”

Mon très cher tonton, après Laurent Gbagbo et Jean-Jacques Béchio, j’ai décidé de t’écrire aussi. Je suis optimiste sur le fait que tu me liras, parce que tu t’es remis de la maladie qui t’a frappé ces derniers temps. L’autre soir, quand je t’ai vu parler sur le plateau de la télévision de Gbagbo, pardon la RTI, j’étais vraiment aux anges. Tu nous avais tant manqués. Tes faux logos aussi ! Quand je t’ai vu parler, je me suis dit qu’enfin, toi tonton, qui prétendait servir la Côte d’Ivoire et qui criait au « sursaut national » pour la République, tu viendrais dire la vérité sur la présidentielle du 28 novembre dernier. J’espérais que tu viendrais dire aux inconditionnels de Gbagbo que ce dernier n’a pas gagné et que le Président de la Côte d’Ivoire s’appelle désormais Alassane Ouattara. Malheureusement pour moi, le miracle ne s’est pas produit. Tu es resté dans le mirage entretenu par la refondation et ses soudards. Sans aucune honte pour les gens de ton âge, tu as claironné que Gbagbo a gagné le scrutin, non sans nous dire tout ce qu’il a fait pour toi, durant sa décennie de pouvoir. Tonton Fologo, moi qui pensais que les gens ne t’aimaient pas, qui te présentaient comme un arriviste et un opportuniste notoire, je me suis vite ravisé. Vraiment tonton, « tu as fini avec ça », pour parler comme dans nos quartiers populaires. Rien qu’à regarder ta longévité politique, on comprend aisément que tu n’es pas un homme ordinaire. Comme le serpent, tu adores les contorsions, pour être toujours au cœur du pouvoir ou à sa périphérie. Peu importe, pourvu que tu « manges » ! Tonton, tu es vraiment « un puissant môgô », un trapéziste de grand talent, qui retombe toujours sur ses pieds et qui renait toujours de ses cendres. Comme le Phoenix, cet oiseau mythique. Enfant, on t’a vu « ambassadeur » de la Côte d’Ivoire en Afrique du Sud sous le règne de l’Apartheid. J’ai encore en souvenir tes délectations sur l’étonnement des blancs devant ledélégué noir que tu étais à Pretoria, flanqué de son épouse blanche. Tu nous a même dit que ta présence a été un déclic dans le comportement des blancs vis-à-vis des noirs. On était vraiment contents du rôle que tu as joué dans la chute de l’Apartheid. Tu as été pendant 22 ans, ministre dans le gouvernement de Félix Houphouët Boigny. Tu te réjouissais même d’être son plus grand disciple. C’est pourquoi, quand les cris se faisaient entendre en 1990, réclamant la restauration du pluralisme politique, tu n’as pas manqué de lancer ces propos à l’endroit de Laurent Gbagbo : « le multipartisme est une vue de l’esprit ». En son temps, les « démocrates » ivoiriens t’avaient voué aux gémonies, te traitant de tous les noms. Serein, tu as encore lancé ce discours à la cantonade : « Gbagbo et le FPI peuvent marcher à user leurs sandales, ce sont les cordonniers qui seront les plus heureux ». A présent, je relis encore tes propos avec beaucoup d’amertume et de désolation. En son temps, Gbagbo ne s’est pas gêné à te tourner en dérision : « quand Fologo parle, l’opposition gagne des voix ». Tonton, tu n’en avais que cure. Tu étais un Houphouétiste indécrottable. Ainsi quand le père de la nation a été rappelé à Dieu, tu t’es mis au service de son successeur, le Président Henri Konan Bédié. Qui ne se rappelle pas encore tes louanges et logorrhées à l’endroit de l’héritier de Boigny : « je serai fidèle à Bédié jusque dans la tombe ». Pendant six ans, tu as chanté la gloire de Bédié, que tu honnis aujourd’hui. Quand en décembre 99, le Général Robert Guéi a évincé le PDCI RDA du pouvoir, tu t’es aussitôt rangé du côté de la junte militaire, non sans clouer au pilori ton ancien bienfaiteur. Pendant que Bédié était en exil en France, tu as tenté de donner le PDCI à son tombeur, Robert Guéi. Je me rappelle encore tes propos qui résonnent dans la mémoire collective : « on ne peut pas diriger le PDCI en restant à 6000 kilomètres ». En réaction, KKB et Gnamien Yao t’avaient tourné en bourrique, en mettant à nu ta grande duplicité : « On ne peut pas diriger le PDCI en restant à 6000km mais on peut recevoir de l’argent à partir de la même distance ». Dès que Robert Guéi est tombé, tu t’es trouvé un nouveau maître en la personne de Laurent Gbagbo. Houphouët, Bédié, Guéi, Gbagbo ! On ne peut pas dire que tu n’as pas une longévité politique. Pour narguer tes détracteurs, tonton, tu n’as pas manqué de marteler ce message : « Aujourd’hui je suis avec Gbagbo. Qui sait ? Peut être que demain, ce sera avec Guillaume Soro ». Tonton, tu es fort dêh ! Ta formule est toute faite, à tort ou à raison : « la politique est la saine appréciation de la réalité, bonne ou mauvaise ». Je ne te le fais pas dire. Tu aimes te comparer au célèbre Talleyrand, cet homme politique et diplomate français, qui a brillé sous de nombreux pouvoirs. A la vérité, tonton, tu ne lui ressembles pas. Talleyrand était connu pour être un homme très brillant, qui s’imposait par son savoir et ses qualités. Or toi, mon tonton, tu ne sais que faire la cour à tous les régimes, depuis Félix Houphouët Boigny. A la vérité, tu avais livré ton vrai visage aux Ivoiriens, le vendredi 10 décembre 99, deux semaines avant le coup d’Etat du Général Guéi, à l’émission « 90 minutes pour convaincre » : « Je ne me vois jamais dans l’opposition ». On ne peut pas dire que tu n’as pas été clair avec tes compatriotes, sur ton obsession à être toujours dans « le cortège des vainqueurs » et « à sécher tes habits là où le soleil brille ». Mon cher tonton, je suis vraiment peiné pour toi, surtout quand j’entends ce que les refondateurs disent de toi. Ceux que tu qualifiais hier de gestionnaires du « ministère de la parole » n’ont aucune considération pour toi. Ils disent que tu n’es pas sincère avec eux et que tout ce qui t’intéresse, c’est l’argent. Toujours l’argent, rien que l’argent ! Moi, j’ai été fâché d’entendre cela ! Tonton, je vais te faire des confidences. Avec les refondateurs, il faut faire très attention. Ils sont très rancuniers et n’ont pas oublié tes discours à leur endroit pendant leurs années d’opposition. La première confidence que je voudrais te faire a eu lieu l’année dernière à Yamoussoukro, lors de la rencontre des fameux « houphouétistes pour Gbagbo ». La veille de cette cérémonie, tu es allé, aux environs de 10h voir Laurent Gbagbo. Tu as passé cinq heures dans la salle d’attente. Devant ton impatience, un garde est allé insister sur ta présence. Tonton, sais-tu ce que le « Seplou de Mama » a dit ce jour-là ? Il a lancé sèchement à ses collaborateurs : « ce monsieur-là, il aime trop l’argent » ! Quand on m’a rapporté ces propos, parce que nous avons des amis là bas aussi, j’ai eu très mal. Pourquoi traite-t-on ainsi mon oncle bien aimé ? A bien y réfléchir, je me suis dit que Laurent Gbagbo n’avait pas vraiment tort de le dire. Un de mes proches, qui travaille au Conseil Economique et Social m’a dit un soir que tu avais demandé et obtenu, en 2009, la somme de 700 millions pour faire la clôture de l’institution. Depuis, on attend toujours la fameuse clôture, qui n’est pas encore une réalité. Une autre fois, tu étais allé en Chine, représenter l’ancien chef de l’Etat. Tu es revenu avec un don de cinq milliards fait aux Ivoiriens par les autorités chinoises. Après que l’argent eut été déposé au Trésor, tu n’as pas hésité à demander une commission. On t’a demandé de justifier les 700 millions de la clôture imaginaire. Tu n’as pas encore donné de réponse. Tonton, je suis affligé de voir que ton nom est si « déchiré » en Côte d’Ivoire. Quand on l’évoque, il est automatiquement synonyme d’opportunisme, d’arrivisme et de grand penchant pour les deniers publics. Honnêtement, quand le sieur Paul Yao N’dré a invalidé le suffrage du Nord, celui de tes parents, je pensais que tu réagirais avec la dernière énergie du refus. Malheureusement, tu n’as rien dit. Bien au contraire, tu as montré ton village avec la main gauche et tu as hurlé avec les loups. La semaine dernière encore, Laurent Gbagbo a coupé l’eau et l’électricité dans le Nord. Je ne t’ai pas vu lever le petit doigt de la désapprobation. Tu es resté muet comme une carpe devant ce crime contre tes parents. Tonton, excuse moi de te le dire, si tu le sais pas que trop, « ton nom est gâté » en Côte d’Ivoire, parce que « tu as fini » avec la duplicité, le clair-obscur et l’opportunisme. Pardonne-moi si je t’offense. C’est avec toi et au regard de ton parcours que j’ai compris que la sagesse ne se mesure pas à l’aune du grand âge.
Bien à toi cher tonton !
Bakary Nimaga


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