Réconciliation et reconstruction nationale/Le Front populaire ivoirien (Fpi) est-il capable de repentance ?

Nous nous souvenons tous du fiasco retentissant enregistré par le forum dit de réconciliation nationale organisé en 2001 avec fanfares et trompettes par le pouvoir Fpi, officiellement pour que nous fassions table rase du passé et que nous pansions les plaies des blessures que nous nous serions faites, volontairement ou involontairement, les uns aux autres, afin que l`harmonie règne dans le pays, et que les Ivoiriens cessent de se regarder en chiens de faïence.
Ce forum supposait en effet que tout esprit de vengeance et tout esprit polémique étaient désormais bannis parce qu`on était disposé à pardonner les torts qu`on aurait subis ou qu`on aurait causés pour revivre ensemble dans l`amitié, voire dans la fraternité et la confiance.
Les différents intervenants à ce forum devaient donc souligner ce qui, selon eux, n`allait pas dans le pays et proposer les mesures idoines pour éradiquer le mal qui était supposé ronger la société ivoirienne.
Il se trouve hélas que ce fameux forum a aussitôt dérapé dès qu`il a commencé, le président de la République d`alors, monsieur Laurent Gbagbo, qui s`arrangeait toujours pour ne jamais intervenir en premier dans un débat parce qu`il n`aurait alors jamais rien à dire, s`étant présenté à la tribune pour donner la réplique au Président BEDIE qui l`avait précédé, faussant ainsi comme à son habitude les règles du jeu !
Il est dommage que le bureau de séance n`ait pas jugé utile de le rappeler à l`ordre, ouvrant ainsi la boîte de Pandore qu`il ne pourra plus refermer.
A partir de cet instant, le forum, supposé être celui de la réconciliation, devenait, insidieusement puis ouvertement le forum du procès du Pdci-Rda.
Parce que tout simplement le Front populaire ivoirien et son mentor, monsieur Laurent Gbagbo, n`étaient jamais responsables ni coupables de rien, tout ce qui arrivait de mal et de mauvais dans le pays étant totalement imputable au Parti bâtisseur de la Côte-d`Ivoire !
On remontait donc allègrement jusqu`en 1949 pour accuser le Pdci-Rda de tous les péchés d`Israël.
Les évènements du Sanwi, le complot de 1963, la mort tragique du ministre Ernest Boka et, surtout, la tentative de sécession de monsieur Kragbé Gnangbé étaient le terreau de toutes les logorrhées qui vouaient le parti du Président HOUPHOUET-BOIGNY aux gémonies parce que censé être seul responsable d`une fracture qui se serait installée entre Ivoiriens.
Plutôt que de chercher alors à exorciser le mal qu`on aurait débusqué, tous ceux qui, en mission pour le compte du Fpi, montaient à la tribune, exigeaient que le Pdci leur rendît des comptes allant jusqu`à réclamer la restitution de la tête de monsieur Kragbé Gnangbé qui aurait servi de soubassement à la Basilique Notre Dame de la Paix de Yamoussoukro !
Nous comprenons mieux cette accusation à partir des dépouilles et autres ossements qu`on découvre sous les horribles monuments édifiés par les refondateurs à travers la ville d`Abidjan !
Dans la foulée, on avançait le chiffre ahurissant et invraisemblable de six mille (6 000) Guébié tués par l`Armée nationale en mission de pacification et de sécurisation de la région de Gagnoa face à la rébellion-cessession de monsieur Kragbé Gnangbé, le premier à prendre les armes contre son pays, et pourtant considéré comme un héros par monsieur Gbagbo Laurent qui s`est déclaré son héritier.
Même si un seul mort est toujours un mort de trop, il faut retenir qu`il n`y a eu que cent soixante et onze (171) victimes à déplorer !
Il est surprenant que les refondateurs aient considéré la rébellion animée par monsieur Guillaume Soro comme une œuvre du diable eux qui sacralisent celle de monsieur Kragbé Gnangbé.
Avec un tel esprit, le forum pour la réconciliation nationale ne pouvait que faire chou blanc, nonobstant le champagne qui a réuni messieurs Gbagbo, Guéi et Ouattara, le président BEDIE ayant choisi de ne pas participer à cette comédie qui ne rimait à rien.
Comme mentionné plus haut, le Front populaire ivoirien n`est jamais responsable ni coupable de rien.
Qui peut oublier l`argument de l`ancien chef de l`Etat pour expliquer ou plutôt justifier les délestages : c`est parce que le Pdci avait cessé d`investir dans l`hydroélectricité.
Tous les sachants étaient alors restés bouche bée, frappés de stupeur et d`étonnement. Même le vulgum pecus était perplexe.
En supposant en effet que le Pdci avait cessé de construire des barrages hydroélectriques, pourquoi alors monsieur Gbagbo et le Fpi n`ont-ils pas corrigé le tir en dix ans de pouvoir ?
Or, il est connu que le dossier pour la construction du barrage de Soubré était bouclé et son financement trouvé avant le coup d`Etat de 1999.
Comme pour le troisième pont et bien d`autres projets, il suffisait aux refondateurs de reprendre le dossier et de le réaliser.
Mais cela était trop difficile pour nos bricoleurs au pouvoir plus occupés à s`en mettre les poches qu`à développer le pays.
Adeptes acharnés du mensonge, ils ne pouvaient pas admettre qu`ils ont failli !
Pour en revenir au forum de 2001, monsieur Gbagbo et le Fpi savent que s`il y a fracture sociale, cela n`est nullement imputable au Pdci qui s`est employé pendant près de quarante ans à bâtir une nation après avoir hérité d`un Etat à l`indépendance.
Monsieur Gbagbo et le Fpi savent que cette fracture est née avec le multipartisme qui n`en n`est pas pour autant responsable.
La responsabilité de cette fracture incombe exclusivement à la violence et au mensonge que monsieur Gbagbo et le Fpi ont introduits dans le jeu et l`arène politiques.
Qu`on se souvienne du meurtre de Thierry Zébié par la Fesci, le bras armé du Fpi et surtout de l`assaut final en février 1992.
Que dire de toutes les actions pour rendre le pays ingouvernable !
Les Ivoiriens, habitués à une certaine élégance dans la gestion des problèmes politiques, découvraient hébétés qu`ils devaient désormais faire avec l`agressivité, la rage et la duplicité.
Le fameux "asseyons-nous et discutons" de monsieur Gbagbo n`était qu`un écran de fumée, de la poudre aux yeux car, le vrai credo, c`est "mille morts à droite, mille morts à gauche, moi j`avance."
Tant qu`on n`a pas tout cédé à monsieur Gbagbo et au Fpi, tant qu`on n`a pas obéi à leur diktat, on est responsable des actes vils et destructeurs qu`ils posent à l`encontre du pays !
Les derniers évènements démontrent à quel point le Front populaire ivoirien reste convaincu qu`il n`est jamais responsable ni coupable de rien.
Les sorties arrogantes et donneuses de leçon de monsieur Mamadou Koulibaly, les tentatives de déstabilisation de monsieur Affi N`guessan, le refus de monsieur Yao-N`dré d`assumer les conséquences de son inconséquence, se permettant d`en rendre responsable l`ensemble des Ivoiriens, sont la démonstration patente de ce que le Front populaire ivoirien et ses dirigeants considèrent que quoi qu`ils fassent, ils sont dans le vrai et qu`ils n`ont rien à se reprocher !
Les détournements massifs de denier public par le régime des refondateurs, les pillages systématiques des richesses nationales qu`ils ont perpétrés, les enlèvements-disparitions de citoyens ivoiriens et d`ailleurs, les meurtres et assassinats, les tueries massives et indiscriminées auxquels s`est livré ce régime sont des actes normaux, sans conséquence aucune et qui n`agissent nullement sur la conscience de ces refondateurs !
En 10 ans de pouvoir, monsieur Gbagbo et le Fpi ont fait plus de morts que la pénétration et l`occupation coloniales.
La crise post-électorale et ses milliers de morts, de blessés et de disparus sont pour le Fpi et ses dirigeants, imputables au président Ouattara et au Rhdp, coupables de ne pas avoir accepté de se faire voler leur victoire !
La question qu`on est donc en droit de se poser est celle de savoir si le travail de la Commission Dialogue, Vérité et Réconciliation ne va pas ressembler à celui du forum pour la réconciliation nationale et aboutir au même résultat.
Ce ne sont en effet pas les sourires empoisonnés lancés au Président Ouattara en guise de ralliement qui changeront fondamentalement l`être, le penser et l`agir des refondateurs. Ils sont la vérité absolue et ne pas accepter cette certitude vous met au ban de la société, de leur société.
Or, sans la reconnaissance de ses limites, de ses erreurs, de ses fautes et de ses crimes pour demander le pardon qui s`impose parce qu`on en a le regret réel et sincère, on nous fera jouer une autre comédie dont nous pouvons nous passer !
Le Front populaire pvoirien est-il capable de cela ? le Front populaire ivoirien est-il capable de repentance ?
Nous osons espérer que la main de Dieu touchera ces dirigeants et militants fanatiques qui pensent que la mauvaise foi est la denrée la mieux partagée au monde, afin qu`ils comprennent enfin qu`ils sont des humains donc faillibles !
Le travail de la Commission Dialogue, Vérité et Réconciliation ne saurait signifier, "j`embrasse mon ennemi, mais c`est pour mieux l`étouffer !"
Doubé Binty