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Politique Publié le mardi 10 mai 2011 | L’intelligent d’Abidjan

Commission Dialogue, Vérité et Réconciliation Attention aux faux pas et aux dérapages !

Charles Konan Banny, ex-Premier ministre de réconciliation, issu de la résolution 1621 de l’ONU est aux commandes de la Commission Dialogue, Vérité et Réconciliation. C’est le choix du Président de la République. Il sera aidé dans cette mission d’envergure historique par deux religieux. Il s’agit du Président du COSIM, Boikary Fofana et d’Ahouana Siméon, archevêque de Bouaké. Ces réconciliateurs ont bonne conscience de leurs charges qu’ils doivent remplir dans l’intérêt supérieur de la nation. La tâche ne sera pas aisée, certes, mais elle n’est pas impossible, à en croire les décisions du gouvernement qui entend mettre les bouchées doubles pour sortir définitivement la Côte d’Ivoire de l’impasse, même si certains analystes politiques craignent certains dérapages et faux pas.

Des problèmes
de leadership demeurent
« Ne pensez pas qu’un tapis rouge sera déroulé à Banny et à ses Vice-Présidents, car la tâche qui les attend est difficile », fait remarquer un politologue qui estime que la crise a atteint son paroxysme et la fracture sociale est très profonde. L’ex-Premier ministre Banny qui a fait plus de deux ans à la primature a eu l’avantage de toucher de près les questions qui fâchent. Ce qui lui donne de bons points. Mais par contre, il lui est reproché d’être trop marqué politiquement et d’appartenir au même groupement politique que le Président de la République. Mais là-dessus, seul le Chef de l’Etat a les raisons de son choix et détermine le profil de la personnalité apte à remplir les missions liées à la charge. Du côté des deux vice-présidences réservées aux religieux, l’unanimité semble prendre un sérieux coup. Mgr Ahouana incarne-t-il l’unanimité ou le choix du clergé catholique ? Ses positions passées ne sont-elles pas un obstacle ? Pourquoi avoir peur d’associer les adversaires d’hier qu’on veut réconcilier ? Ils sont nombreux les Ivoiriens qui tiennent pour responsables les guides religieux qui, très souvent, déclarent-ils, ont manqué de courage pour dire la vérité aux hommes politiques. Puisque, soutiennent-ils, ces religieux se sont maintes fois fourvoyés quand la plupart d’entre eux s’acoquinaient avec les différents régimes qui se sont succédé. Pour bon nombre d’observateurs, des pasteurs, prêtres et imams se sont discrédités aux yeux du peuple. Les critiques les plus acerbes proviennent des chrétiens où trois groupes se disputent le droit de leadership. Les catholiques, les protestants et les évangélistes. Des responsables des autres courants du christianisme estiment que leurs églises sont mises à la remorque de l’église catholique. Vrai ou faux ? Dans tous les cas, ils auraient souhaité que l’un des postes de vice- présidence revienne aux évangélistes et protestants qui représentent une couche importante de la population chrétienne. De telles assertions se trouvent rejetées du revers de la main par des fidèles catholiques. Mais les problèmes d’intérêts partisans ne doivent pas perdre de vue le problème essentiel de survie nationale : la Réconciliation de tous les Ivoiriens.

Eviter une réconciliation au forceps
Dialoguer dans la vérité pour se réconcilier est un facteur clé pour apaiser les cœurs et recevoir et accepter le pardon des uns et des autres. Personne ne pourra être un obligé à la réconciliation. Car le pardon, dit-on, ne s’arrache pas à coups de canons et de lance-roquettes. Accepter de dialoguer, c’est s’accepter mutuellement sans différence de couleurs, de religions, d’ethnies et de régions. C’est vrai que le Président Banny va procéder à des consultations pour que personne ne se sente pas exclu de ce processus pourtant irréversible pour faire redécoller une nation longtemps traumatisée par des crises interminables. Les responsables de la commission de devront en aucun cas céder à la provocation. Il faudra, cependant, bannir le langage de la langue de bois. Les travaux de cette commission ne devront pas donner lieu à des foires aux injures ou offrir un Forum bis dont les résolutions sont restées lettres mortes et ont ouvert la voie à toutes les contradictions.

Ce qu’il faut craindre
Les schémas d’une telle initiative font date à travers le monde et les exemples abondent. Le cas sud-africain inspire personnellement le Président de la République. D’où son invitation à Desmond Tutu qui s’est rendu en Côte d’Ivoire en compagnie de Kofi Annan pour proposer le plan sud-africain qui a sorti le pays de Mandela de l’Apartheid. Faut-il faire de l’expérience sud-africaine une copie conforme, copier-coller ou prêt-à-porter ? La combinaison des réalités ivoiriennes aux solutions africaines sera-t-elle susceptible d’atteindre le résultat escompté ? Mais de l’avis de certains juristes, l’Assemblée nationale doit être saisie en la matière pour la prise d’une loi conséquente à la résolution définitive du conflit inter –ivoirien. Comme l’a proposé Desmond Tutu. Mais le hic est de savoir laquelle Assemblée nationale va-t-elle siéger à l’effet de traduire en lois les missions assignées à la Commission Dialogue, Vérité et Réconciliation. L’actuelle ou la future Assemblée nationale ? Pour l’heure, la question n’est pas inscrite à l’ordre du jour. Dans la mesure où la Commission s’apprête à entamer sa mission. Devra-t-elle alors se contenter d’une ordonnance du Président de la République, là où un débat national sur sa mission et les attentes sont avant toute action ?

De l’avenir
de la Côte d’Ivoire
Le pays doit se rebâtir et repartir à nouveau. Cela a un prix. L’échec d’un tel rendez-vous serait suicidaire pour une nation en déliquescence. La réalisation des objectifs de cette commission fera renaître l’espoir de tout un chacun et sera source d’un deuxième miracle ivoirien. C’est possible, car le pays regorge un brassage culturel qui repose sur des alliances interethniques capables de le faire rebondir. La recherche obstinée de la paix ne doit en aucun cas s’encombrer de fioritures afin de rabattre le caquet à tous ceux qui doutent encore de la volonté politique des nouvelles autorités à réconcilier les Ivoiriens et les unir dans leur diversité. Le Président Alassane Ouattara, à en croire, son serment, s’est fait sienne l’aspiration profonde du peuple de Côte d’Ivoire à vivre dans la paix, facteur indispensable à tout développement.
Patrice Pohé
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