La guerre d’Abidjan entre forces pro-Gbagbo et pro- gouvernementales, début avril, n’a pas épargné le célèbre Stade Félix Houphouet-Boigny et ses 32.000 places assises. Mais contrairement aux rumeurs faisant état de la présence de mines antipersonnel sur la pelouse, l’essentiel a été préservé.
Nous étions au Stade Félix Houphouet-Boigny, hier, vers midi. Curieux comme des écureuils, nous tenions à voir le visage de cette aire de jeu après la guerre d’il y a un mois. Par chance, le soleil est resté caché. Mieux, une fine pluie nous a souhaité la bonne arrivée. Il y a peu de monde.
Seuls les bruits de voitures rappellent que nous sommes dans le quartier des affaires. L’espace est resté intact. Derrière les grilles d’entrée, quelques agents de sécurité sont reconnaissables par leurs tuniques jaunes. Il y a aussi deux éléments des Forces républicaines de Côte d’Ivoire (Frci). Avenant et très respectueux, Kader, l’un d’entre eux, avoue sans chichis qu’ils sont sur place depuis deux semaines et qu’un obus a effectivement explosé au siège de la Fédération ivoirienne de karaté et disciplines associées pendant les combats. Il faut dire que les bureaux de cette Fédération sont situés dans les entrailles du « Félicia ». Nous l’incitons à tout nous raconter mais, un peu taciturne, il nous oriente vers quelqu’un d’autre. Les visites sont filtrées. Malgré la présentation de notre carte professionnelle, Bertin A. fait quelques difficultés à nous permettre de visiter les lieux. Il tient à savoir si nous avons rendez-vous avant de nous laisser redécouvrir le théâtre de tous les rêves des sportifs ivoiriens. Son collègue, Alain, qui vient juste d’arriver, paraît plus spontané. Plus gai aussi. D’un commerce facile, il est même prêt à nous présenter les séquelles (bien visibles) de l’éclat d’obus. Entre deux appels aux responsables de l’Office national des Sports (ONS), toutefois, Bertin, devenu plus ouvert, fait quelques confidences. « Les gens aiment parler de ce qu’ils ne savent pas. Nous avons été surpris par la guerre au début du mois d’avril et nous sommes restés coincés sur le site du Stade Houphouet-Boigny. Il n’y a ni mines explosives sur la pelouse, ni des snipers pro-Gbagbo dans les gradins. Je reconnais seulement que nous avons ramassé plusieurs douilles de balles (et même des balles) sur la piste d’athlétisme et la pelouse… ».
Stade cherche joueurs
Chérif Ouattara, employé au service comptabilité de l’ONS, confirme. Nous entraînant devant l’Ambassade du Nigeria, il tente de nous montrer le gros impact qu’a laissé, en souvenir, l’obus. «
Les différents stades du pays n’ont rien eu. Le championnat national pourra se jouer sans problème. Mais le Stade Houphouet-Boigny est réservé aux compétitions internationales.
Lorsque le responsable du stade, Diopieu Eric, sera de retour, il vous en dira plus puisque les éclats d’obus ont atteint son bureau… », croit savoir, le très disponible, Chérif. Le patron des lieux, nous l’attendrons. En vain. Quelques agents de l’ONS se tournent les pouces. Anicet Gnanzi, le boss, est également absent. Impossible de le joindre. La pelouse du Stade Houphouet-Boigny, elle, est méconnaissable. Normal, depuis le meeting de Laurent Gbagbo et les cris guerriers de ses partisans (Y a rien en face !), avant le premier tour du scrutin présidentiel (31 octobre 2010), plus personne n’y a (re)mis les pieds. Conséquence, les herbes sauvages s’y sont bien installées. Les jardiniers du coin ont du boulot. Beaucoup de boulot. Pour le reste, le temple du football ivoirien n’a guère changé. Sa mine est seulement devenue un peu triste. Les gradins attendent les spectateurs comme un veilleur de nuit attend l’aube. Ils attendent surtout un nouveau spectacle. « Nous sommes pressés de revoir des matches ici. Il y a longtemps…», souffle un autre agent de sécurité, nostalgique. Et de s’interroger : « Certainement que le match aller de l’Asec mimosas en Ligue des champions contre le Primero d’Agosto se jouera au Félicia…». Peut-être, peut-être… Mais ce sera compliqué vu que la rencontre est programmée le 28 ou le 29 mai. Il faut dire qu’un important travail doit être fait pour rendre les lieux opérationnels.
« C’est un petit problème… En un jour, on peut le faire », rassurent mes amis d’un jour.
«Nous étions dans notre bunker…»
L’entrée de la tribune officielle reste bien gardée par le père de la nation. Sa gravure est toujours bien en place. Le « vieux » n’aurait pas toléré que le stade de football qui porte son nom soit abîmé par une « sale » guerre. Justement, nos amis qui n’ont pas vraiment de boulot racontent : « la voie qui passe devant le stade mène directement au palais présidentiel et à la radio. Comprenez qu’il y a eu de rudes combats ici. Nous avons survécu grâce à un petit champ de patates (derrière) le stade. C’est ce que nous avons bouffé durant tout le temps qu’a duré la guerre », explique Bertin. Où dormiez-vous ? «Nous étions dans notre bunker…», lancent-ils, quasiment en chœur, en se tordant de rire. Le seul mauvais souvenir que tous gardent dans un coin de leur tête, reste les graves blessures que gardera Me Assi. Emprisonné au siège de la Fédération de karaté, il a eu le malheur d’être là-bas au mauvais moment. Mais après des soins dans un centre hospitalier, ses jours ne sont plus en danger. Tant mieux.
Guy-Florentin Yaméogo
Nous étions au Stade Félix Houphouet-Boigny, hier, vers midi. Curieux comme des écureuils, nous tenions à voir le visage de cette aire de jeu après la guerre d’il y a un mois. Par chance, le soleil est resté caché. Mieux, une fine pluie nous a souhaité la bonne arrivée. Il y a peu de monde.
Seuls les bruits de voitures rappellent que nous sommes dans le quartier des affaires. L’espace est resté intact. Derrière les grilles d’entrée, quelques agents de sécurité sont reconnaissables par leurs tuniques jaunes. Il y a aussi deux éléments des Forces républicaines de Côte d’Ivoire (Frci). Avenant et très respectueux, Kader, l’un d’entre eux, avoue sans chichis qu’ils sont sur place depuis deux semaines et qu’un obus a effectivement explosé au siège de la Fédération ivoirienne de karaté et disciplines associées pendant les combats. Il faut dire que les bureaux de cette Fédération sont situés dans les entrailles du « Félicia ». Nous l’incitons à tout nous raconter mais, un peu taciturne, il nous oriente vers quelqu’un d’autre. Les visites sont filtrées. Malgré la présentation de notre carte professionnelle, Bertin A. fait quelques difficultés à nous permettre de visiter les lieux. Il tient à savoir si nous avons rendez-vous avant de nous laisser redécouvrir le théâtre de tous les rêves des sportifs ivoiriens. Son collègue, Alain, qui vient juste d’arriver, paraît plus spontané. Plus gai aussi. D’un commerce facile, il est même prêt à nous présenter les séquelles (bien visibles) de l’éclat d’obus. Entre deux appels aux responsables de l’Office national des Sports (ONS), toutefois, Bertin, devenu plus ouvert, fait quelques confidences. « Les gens aiment parler de ce qu’ils ne savent pas. Nous avons été surpris par la guerre au début du mois d’avril et nous sommes restés coincés sur le site du Stade Houphouet-Boigny. Il n’y a ni mines explosives sur la pelouse, ni des snipers pro-Gbagbo dans les gradins. Je reconnais seulement que nous avons ramassé plusieurs douilles de balles (et même des balles) sur la piste d’athlétisme et la pelouse… ».
Stade cherche joueurs
Chérif Ouattara, employé au service comptabilité de l’ONS, confirme. Nous entraînant devant l’Ambassade du Nigeria, il tente de nous montrer le gros impact qu’a laissé, en souvenir, l’obus. «
Les différents stades du pays n’ont rien eu. Le championnat national pourra se jouer sans problème. Mais le Stade Houphouet-Boigny est réservé aux compétitions internationales.
Lorsque le responsable du stade, Diopieu Eric, sera de retour, il vous en dira plus puisque les éclats d’obus ont atteint son bureau… », croit savoir, le très disponible, Chérif. Le patron des lieux, nous l’attendrons. En vain. Quelques agents de l’ONS se tournent les pouces. Anicet Gnanzi, le boss, est également absent. Impossible de le joindre. La pelouse du Stade Houphouet-Boigny, elle, est méconnaissable. Normal, depuis le meeting de Laurent Gbagbo et les cris guerriers de ses partisans (Y a rien en face !), avant le premier tour du scrutin présidentiel (31 octobre 2010), plus personne n’y a (re)mis les pieds. Conséquence, les herbes sauvages s’y sont bien installées. Les jardiniers du coin ont du boulot. Beaucoup de boulot. Pour le reste, le temple du football ivoirien n’a guère changé. Sa mine est seulement devenue un peu triste. Les gradins attendent les spectateurs comme un veilleur de nuit attend l’aube. Ils attendent surtout un nouveau spectacle. « Nous sommes pressés de revoir des matches ici. Il y a longtemps…», souffle un autre agent de sécurité, nostalgique. Et de s’interroger : « Certainement que le match aller de l’Asec mimosas en Ligue des champions contre le Primero d’Agosto se jouera au Félicia…». Peut-être, peut-être… Mais ce sera compliqué vu que la rencontre est programmée le 28 ou le 29 mai. Il faut dire qu’un important travail doit être fait pour rendre les lieux opérationnels.
« C’est un petit problème… En un jour, on peut le faire », rassurent mes amis d’un jour.
«Nous étions dans notre bunker…»
L’entrée de la tribune officielle reste bien gardée par le père de la nation. Sa gravure est toujours bien en place. Le « vieux » n’aurait pas toléré que le stade de football qui porte son nom soit abîmé par une « sale » guerre. Justement, nos amis qui n’ont pas vraiment de boulot racontent : « la voie qui passe devant le stade mène directement au palais présidentiel et à la radio. Comprenez qu’il y a eu de rudes combats ici. Nous avons survécu grâce à un petit champ de patates (derrière) le stade. C’est ce que nous avons bouffé durant tout le temps qu’a duré la guerre », explique Bertin. Où dormiez-vous ? «Nous étions dans notre bunker…», lancent-ils, quasiment en chœur, en se tordant de rire. Le seul mauvais souvenir que tous gardent dans un coin de leur tête, reste les graves blessures que gardera Me Assi. Emprisonné au siège de la Fédération de karaté, il a eu le malheur d’être là-bas au mauvais moment. Mais après des soins dans un centre hospitalier, ses jours ne sont plus en danger. Tant mieux.
Guy-Florentin Yaméogo