Yamoussoukro, Fondation Félix Houphouët-Boigny. Nous sommes samedi 21mai 2011. Une date dont il faudra désormais se souvenir. Il est exactement 12h50 min. La grande salle de conférence, archicomble, d’illustres, d’anonymes mais surtout d’importantes personnalités dont 21 chefs d’Etat africains et le président français Nicolas Sarkozy venu expressément de Paris, retient son souffle. Tous les yeux sont rivés vers la scène, superbement mais sobrement décorée. Alassane Ouattara, le vainqueur de la présidentielle du 28 novembre dernier, se lève d’un fauteuil rouge, style Louis IV, et se tient debout. En face de lui, Henriette Dagri-Diabaté, la Grande chancelière de l’ordre national. L’instant est à la fois saisissant et solennel. Normal, il résume vingt années de combat, pour la démocratie et la justice en Côte d’Ivoire. Lui a connu l’exil, elle, la prison, avec à la clé, beaucoup de souffrances et d’humiliation.
Silence total, comme si tous les cœurs avaient, devant la solennité de l’événement, cessé de battre. Un jeune élève de l’EMPT s’avance, à pas feutrés et cadencés sous une musique militaire, vers Mme Dagri-Diabaté. Sur le coussin rouge qu’il tient soigneusement entre ses deux mains, trône un collier doré. L’élève militaire s’immobilise à côté de celle que tous les militants du RDR appellent affectueusement « Tantie ».
« M. Alassane Ouattara, Président de la République, au nom du peuple de Côte d’Ivoire et en vertu des pouvoirs qui nous sont conférés, nous vous reconnaissons comme chef suprême et Grand Maître des Ordres et nous vous remettons le grand collier, insigne de votre distinction ; », prononce-t-elle d’une voix étreinte par l’émotion. Tonnerre d’applaudissements. Ensuite, moment d’intenses émotions, elle prend le collier et le met autour du cou d’Alassane Ouattara. Nouvelle salve d’applaudissements. Le vainqueur de la présidentielle du 28 novembre dernier est ainsi investi Président de la République de Côte d’Ivoire. Précisément, il est le Grand Maître de l’Ordre national. Soit la distinction la plus honorifique de l’Etat.
L’image est touchante. Dans la salle, l’émotion se lit sur les visages. Certains peinent à réaliser qu’ils ne rêvent pas, que ce qu’ils sont en train de vivre est loin d’être une fiction. Au premier rang, le secrétaire de l’ONU, Ban Ki Moon, les présidents Sarkozy (France), Obiang Nguema Teodoro (Guinée-Bissau), Goodluck Jonathan (Nigeria), Paul Biya (Cameroun), Sassou N’guesso (Congo)… se pâment d’admiration. En filigrane, on sent à travers leurs regards, la fierté d’avoir Alassane Ouattara comme un des leurs. Un Président, un vrai au sens noble du terme, mais surtout à la hauteur du pays immense qu’est la Côte d’Ivoire.
Puis, arrive l’instant que tout le pays et avec lui toute l’Afrique voire le monde attend : l’intervention du président fraîchement investi. Alassane Ouattara se dirige, à son tour vers le pupitre en plexiglas installé, pour lui et sur lequel a été scotchée une belle affiche de la cérémonie.
D’un ton posé et calme, il salue respectueusement la vingtaine de chefs d’Etat et de chefs de gouvernement qui ont effectué le déplacement dans la capitale politique du pays, remercie ces amis de la Côte d’Ivoire pour leur soutien et leur engagement à faire respecter le verdict des urnes. A travers ces illustres invités, c’est à toute la communauté internationale qu’il témoigne sa gratitude pour son élan de solidarité à l’égard des autorités légitimes du pays.
Cette cérémonie d’investiture marque, à ses yeux, le début d’une ère nouvelle pour la Côte d’Ivoire, symbolise le retour de la Côte d’Ivoire sur la scène africaine et internationale.
De son intervention qui durera une trentaine de minutes, on retiendra un hommage appuyé aux présidents Houphouët-Boigny et Henri Konan Bédié. Le premier, qui a guidé ses pas en politique, fut un père pour lui. Le second est un grand-frère qui a contribué à son élection et lui fait partager aujourd’hui son expérience à la tête de la Côte d’Ivoire.
On retiendra également le « grand merci » du peuple ivoirien à la France qui a permis, par son engagement dans la crise ivoirienne, sous mandat des Nations unies, de sauver de nombreuses vies. Et aussi au Président américain Barack Obama.
Autre temps fort du speech du Chef de l’Etat, l’appel à la réconciliation et à l’espérance. Une réconciliation qui doit se faire dans le dialogue, la vérité et la justice.
« L’Union sera le creuset de notre développement », annonce t-il, avant de promettre une « nation plus juste, équitable, dotée d’institutions fortes ».
Pour lui, il ne fait l’ombre d’aucun doute : Alassane Ouattara sera le président de tous les Ivoiriens. Son accession au pouvoir, il ne la voit pas comme la victoire d’un camp sur un autre, mais plutôt celle de la fraternité et singulièrement l’amorce d’un nouveau départ.
C’est donc le temps, professe t-il, pour les Ivoiriens, de taire leurs rancœurs, de sécher leurs larmes et de se mettre au travail. Un renouveau qu’il entend appuyer par des réformes pour redonner de l’espoir à la jeunesse en assurant son éducation et en créant de l’emploi pour les jeunes, redynamiser le secteur agricole, faciliter l’accès des populations aux soins.
D’ici là, il annonce, pour les prochains jours, un gouvernement d’union nationale, qui réunira des hommes et des femmes selon des critères de compétence et de probité. Et avant la fin de l’année, la tenue d’élections législatives.
En attendant, à la Fondation Félix Houphouët-Boigny, l’heure est encore à la fête. Mme Dominique Ouattara apporte son soutien à son époux sur la scène. La tendre complicité entre le couple présidentiel séduit. Puis, trois générations d’Ivoiriens élèves et écoliers, jeunes et adultes, entonnent l’Abidjanaise que la salle reprend en chœur. Arrive enfin le moment des félicitations. Tour à tour, le président Sarkozy, ses pairs du continent, Ban Ki Moon, Raila Odinga, Premier ministre kenyan, félicitent Alassane Ouattara. Les poignées de mains sont chaleureuses, les échanges cordiaux. Nicolas Sarkozy, s’est entre-temps éclipsé, emploi du temps serré oblige. Il doit rencontrer la communauté française à Abidjan, au 43ème BIMA. Ce beau monde prend place sur le podium, pour une mémorable photo de famille. On se croirait à un sommet de l’Union africaine, tant l’entente est fraternelle entre ces grands d’Afrique. Le président Ouattara et ses convives se retrouvent ensuite sur l’esplanade de la Fondation Félix Houphouët-Boigny pour la prise d’armes, ultime étape de cette cérémonie qui aura tenu toutes ses promesses. Il est exactement 13h35.
Trois heures plus tôt, l’émotion était déjà à son comble. Et l’ambiance, très bonne enfant. Quand Henriette Diabaté fait son entrée dans la salle, elle est accueillie par des applaudissements nourris. Lorsqu’Alain Juppé, ministre français des Affaires étrangères, fait son apparition, quelques minutes après, c’est le standing ovation. « Juppé, Juppé, Juppé » scande le public. Comme lui, les représentants du corps diplomatique sont aussi acclamés. Mais le mercure monte d’un cran, dès que le véhicule du Chef de l’Etat s’immobilise sur le parvis de la Fondation Félix Houphouët-Boigny. Après les honneurs au drapeau, il découvre à son tour une salle bondée qui explose aussitôt. « Prési ! Prési ! Prési ! », entend-t-on, partout. Certains ne tiennent plus sur leur siège. C’est l’hystérie totale. Des cris de joie par-ci, des mots de félicitations par-là.
A l’instar du président Ouattara, ses invités sont également accueillis dans une liesse totale, surtout le Français Sarkozy, qui a eu droit à un grand standing ovation avec en chœur « Sarko ! Sarko ! Sarko ! ». Ban Ki Moon, Blaise Compaoré, Goodluck Jonathan, Abdoulaye Wade et bien d’autres chefs d’Etat n’ont pas échappé non plus à cette frénésie populaire.
Avant que le président Ouattara ne prenne la parole, le maire de Yamoussoukro, Kakou Gnrangbé Jean avait dit toute la fierté de sa cité d’abriter cette manifestation et toute la symbolique que cette investiture représente pour elle.
A sa suite, Mme Henriette Dagri-Diabaté avait souligné la foi qu’Alassane Ouattara place en la femme. Lui qui pour la première fois avait nommé une femme (ndlr : Jacques Lohoues Oble) à un ministère de souveraineté (celui de la justice en 1990), une autre, secrétaire générale d’un parti politique(le RDR) et aujourd’hui, grande chancelière de l’ordre nationale ( Henriette Dagri-Diabaté).
« La victoire de ce jour, nous la devons à votre qualité exceptionnelle de pardon et de paix », devait-elle relevé pour finir.
Avec cette cérémonie d’investiture, la Côte d’Ivoire ouvre une nouvelle page de son histoire. Qui, on l’espère, sera glorieuse. Le fait d’y croire est déjà un grand pas…vers le bonheur !
De nos envoyés spéciaux
Y. Sangaré
Silence total, comme si tous les cœurs avaient, devant la solennité de l’événement, cessé de battre. Un jeune élève de l’EMPT s’avance, à pas feutrés et cadencés sous une musique militaire, vers Mme Dagri-Diabaté. Sur le coussin rouge qu’il tient soigneusement entre ses deux mains, trône un collier doré. L’élève militaire s’immobilise à côté de celle que tous les militants du RDR appellent affectueusement « Tantie ».
« M. Alassane Ouattara, Président de la République, au nom du peuple de Côte d’Ivoire et en vertu des pouvoirs qui nous sont conférés, nous vous reconnaissons comme chef suprême et Grand Maître des Ordres et nous vous remettons le grand collier, insigne de votre distinction ; », prononce-t-elle d’une voix étreinte par l’émotion. Tonnerre d’applaudissements. Ensuite, moment d’intenses émotions, elle prend le collier et le met autour du cou d’Alassane Ouattara. Nouvelle salve d’applaudissements. Le vainqueur de la présidentielle du 28 novembre dernier est ainsi investi Président de la République de Côte d’Ivoire. Précisément, il est le Grand Maître de l’Ordre national. Soit la distinction la plus honorifique de l’Etat.
L’image est touchante. Dans la salle, l’émotion se lit sur les visages. Certains peinent à réaliser qu’ils ne rêvent pas, que ce qu’ils sont en train de vivre est loin d’être une fiction. Au premier rang, le secrétaire de l’ONU, Ban Ki Moon, les présidents Sarkozy (France), Obiang Nguema Teodoro (Guinée-Bissau), Goodluck Jonathan (Nigeria), Paul Biya (Cameroun), Sassou N’guesso (Congo)… se pâment d’admiration. En filigrane, on sent à travers leurs regards, la fierté d’avoir Alassane Ouattara comme un des leurs. Un Président, un vrai au sens noble du terme, mais surtout à la hauteur du pays immense qu’est la Côte d’Ivoire.
Puis, arrive l’instant que tout le pays et avec lui toute l’Afrique voire le monde attend : l’intervention du président fraîchement investi. Alassane Ouattara se dirige, à son tour vers le pupitre en plexiglas installé, pour lui et sur lequel a été scotchée une belle affiche de la cérémonie.
D’un ton posé et calme, il salue respectueusement la vingtaine de chefs d’Etat et de chefs de gouvernement qui ont effectué le déplacement dans la capitale politique du pays, remercie ces amis de la Côte d’Ivoire pour leur soutien et leur engagement à faire respecter le verdict des urnes. A travers ces illustres invités, c’est à toute la communauté internationale qu’il témoigne sa gratitude pour son élan de solidarité à l’égard des autorités légitimes du pays.
Cette cérémonie d’investiture marque, à ses yeux, le début d’une ère nouvelle pour la Côte d’Ivoire, symbolise le retour de la Côte d’Ivoire sur la scène africaine et internationale.
De son intervention qui durera une trentaine de minutes, on retiendra un hommage appuyé aux présidents Houphouët-Boigny et Henri Konan Bédié. Le premier, qui a guidé ses pas en politique, fut un père pour lui. Le second est un grand-frère qui a contribué à son élection et lui fait partager aujourd’hui son expérience à la tête de la Côte d’Ivoire.
On retiendra également le « grand merci » du peuple ivoirien à la France qui a permis, par son engagement dans la crise ivoirienne, sous mandat des Nations unies, de sauver de nombreuses vies. Et aussi au Président américain Barack Obama.
Autre temps fort du speech du Chef de l’Etat, l’appel à la réconciliation et à l’espérance. Une réconciliation qui doit se faire dans le dialogue, la vérité et la justice.
« L’Union sera le creuset de notre développement », annonce t-il, avant de promettre une « nation plus juste, équitable, dotée d’institutions fortes ».
Pour lui, il ne fait l’ombre d’aucun doute : Alassane Ouattara sera le président de tous les Ivoiriens. Son accession au pouvoir, il ne la voit pas comme la victoire d’un camp sur un autre, mais plutôt celle de la fraternité et singulièrement l’amorce d’un nouveau départ.
C’est donc le temps, professe t-il, pour les Ivoiriens, de taire leurs rancœurs, de sécher leurs larmes et de se mettre au travail. Un renouveau qu’il entend appuyer par des réformes pour redonner de l’espoir à la jeunesse en assurant son éducation et en créant de l’emploi pour les jeunes, redynamiser le secteur agricole, faciliter l’accès des populations aux soins.
D’ici là, il annonce, pour les prochains jours, un gouvernement d’union nationale, qui réunira des hommes et des femmes selon des critères de compétence et de probité. Et avant la fin de l’année, la tenue d’élections législatives.
En attendant, à la Fondation Félix Houphouët-Boigny, l’heure est encore à la fête. Mme Dominique Ouattara apporte son soutien à son époux sur la scène. La tendre complicité entre le couple présidentiel séduit. Puis, trois générations d’Ivoiriens élèves et écoliers, jeunes et adultes, entonnent l’Abidjanaise que la salle reprend en chœur. Arrive enfin le moment des félicitations. Tour à tour, le président Sarkozy, ses pairs du continent, Ban Ki Moon, Raila Odinga, Premier ministre kenyan, félicitent Alassane Ouattara. Les poignées de mains sont chaleureuses, les échanges cordiaux. Nicolas Sarkozy, s’est entre-temps éclipsé, emploi du temps serré oblige. Il doit rencontrer la communauté française à Abidjan, au 43ème BIMA. Ce beau monde prend place sur le podium, pour une mémorable photo de famille. On se croirait à un sommet de l’Union africaine, tant l’entente est fraternelle entre ces grands d’Afrique. Le président Ouattara et ses convives se retrouvent ensuite sur l’esplanade de la Fondation Félix Houphouët-Boigny pour la prise d’armes, ultime étape de cette cérémonie qui aura tenu toutes ses promesses. Il est exactement 13h35.
Trois heures plus tôt, l’émotion était déjà à son comble. Et l’ambiance, très bonne enfant. Quand Henriette Diabaté fait son entrée dans la salle, elle est accueillie par des applaudissements nourris. Lorsqu’Alain Juppé, ministre français des Affaires étrangères, fait son apparition, quelques minutes après, c’est le standing ovation. « Juppé, Juppé, Juppé » scande le public. Comme lui, les représentants du corps diplomatique sont aussi acclamés. Mais le mercure monte d’un cran, dès que le véhicule du Chef de l’Etat s’immobilise sur le parvis de la Fondation Félix Houphouët-Boigny. Après les honneurs au drapeau, il découvre à son tour une salle bondée qui explose aussitôt. « Prési ! Prési ! Prési ! », entend-t-on, partout. Certains ne tiennent plus sur leur siège. C’est l’hystérie totale. Des cris de joie par-ci, des mots de félicitations par-là.
A l’instar du président Ouattara, ses invités sont également accueillis dans une liesse totale, surtout le Français Sarkozy, qui a eu droit à un grand standing ovation avec en chœur « Sarko ! Sarko ! Sarko ! ». Ban Ki Moon, Blaise Compaoré, Goodluck Jonathan, Abdoulaye Wade et bien d’autres chefs d’Etat n’ont pas échappé non plus à cette frénésie populaire.
Avant que le président Ouattara ne prenne la parole, le maire de Yamoussoukro, Kakou Gnrangbé Jean avait dit toute la fierté de sa cité d’abriter cette manifestation et toute la symbolique que cette investiture représente pour elle.
A sa suite, Mme Henriette Dagri-Diabaté avait souligné la foi qu’Alassane Ouattara place en la femme. Lui qui pour la première fois avait nommé une femme (ndlr : Jacques Lohoues Oble) à un ministère de souveraineté (celui de la justice en 1990), une autre, secrétaire générale d’un parti politique(le RDR) et aujourd’hui, grande chancelière de l’ordre nationale ( Henriette Dagri-Diabaté).
« La victoire de ce jour, nous la devons à votre qualité exceptionnelle de pardon et de paix », devait-elle relevé pour finir.
Avec cette cérémonie d’investiture, la Côte d’Ivoire ouvre une nouvelle page de son histoire. Qui, on l’espère, sera glorieuse. Le fait d’y croire est déjà un grand pas…vers le bonheur !
De nos envoyés spéciaux
Y. Sangaré